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L’art. Art 1) Sens ancien et large : syn. Technique Tout procédé de production en tant qu’il naît de l’homme, qu’il est appris ; opposé à nature ; cf. artificiel ; « La délicatesse est un don de la nature, et non pas une acquisition de l’art » (Pascal).
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Art • 1) Sens ancien et large : syn. Technique • Tout procédé de production en tant qu’il naît de l’homme, qu’il est appris ; opposé à nature ; cf. artificiel ; « La délicatesse est un don de la nature, et non pas une acquisition de l’art » (Pascal). • Activité qui requiert un savoir-faire : L’art de faire qqch. Avoir l’art et la manière ; C’est du grand art ; opposé à science ; l’art culinaire, militaire, médical, vétérinaire ; les règles de l’art. • 2) Sens moderne et restreint : • Activités comme la poésie, le théâtre, la peinture, la sculpture, la danse et la musique, etc.
« Disons nettement, tout d’abord, qu’à la vérité, « l’Art » n’a pas d’existence propre. Il n’y a que des artistes. En des temps très lointains, ce furent des hommes qui, à l’aide d’un morceau de terre colorée, ébauchaient les formes d’un bison sur les parois d’une caverne ; de nos jours ils achètent des couleurs et font des affiches ; dans l’intervalle, ils ont fait pas mal de choses. Il n’y a aucun inconvénient à nommer art l’ensemble de ces activités, à condition toutefois de ne jamais oublier que le même mot re couvre cent choses diverses, se situant différemment dans le temps et dans l’espace, à condition aussi de bien comprendre que l’Art avec un grand A n’existe pas. Il est de fait que, de nos jours, cette notion d’Art avec un grand A est devenue une espèce d’idole doublée d’un épouvantail. On peut écraser un artiste en lui disant que ce qu’il vient de faire n’est peut-être pas mal dans son genre, mais que ce n’est pas de l’ « Art ». Et on peut confondre un brave homme qui admire un tableau en lui affirmant que ce qu’il aime dans cette œuvre ce n’est pas l’Art lui-même, mais quelque chose d’autre ». Enst Gombrich, Histoire de l’Art, éditions Phaidon, p. 15
I. Art, réalité et illusion Quel rôle doit-on accorder à l’art ? L’art a-t-il pour but de représenter de manière fidèle et authentique la réalité ou bien ne sert-il qu’à nous divertir, nous détourner de la réalité en nous plongeant dans l’imaginaire ?
Peut-on concevoir l’histoire de l’art en termes de progrès dans la manière de représenter les choses? Faut-il voir dans l’histoire de l’art, la recherche d’une représentation des choses qui fasse toujours plus « vraie », qui donne l’illusion de la réalité? Y a-t-il une manière juste (et par conséquent une méthode) de rendre la réalité? Que veut dire « représenter »? Représenter en art, c’est rendre présent quelque chose qui ne l’est pas réellement. Comment les œuvres d’art peuvent-elles représenter quelque chose?
Albrecht Dürer Lièvre, 1503, aquarelle et gouache, 25 x 22,5 cm. Vienne
« La tradition philosophique de la mimèsis » IL y a une vieille conception philosophique qui considère que l’art a pour but essentiel d’imiter la nature. On trouve en effet cette théorie aussi bien chez Platon et Aristote, quoique dans des perspectives un peu différentes. Imiter la nature, la reproduire, n’est-ce pas le but de l’art ? Dans la République, telle semble être l’opinion de Platon. « Quel but se propose la peinture relativement à chaque objet ? Est-ce de représenter ce qui est tel, ou ce qu’il paraît tel qu’il paraît ; est-ce l’imitation de l’apparence ou de la réalité ? De l’apparence […]. L’art d’imiter est donc bien éloigné du vrai ». Platon, La République, livre X.
Bien, dis-je ; tu en viens au point voulu par le discours; car parmi les artisans de ce genre, j’imagine qu’il faut compter le peintre, n’est-ce pas ? • Comment non? • Mais tu me diras, je pense , que ce qu’il fait n’a point de réalité; et pourtant, d’une certaine manière, le peintre lui aussi fait un lit. Ou bien non? • Si, répondit-il, du moins un lit apparent. • Et le menuisier? N’as-tu pas dit tout à l’heure qu’il ne faisait point la Forme, ou, d’après nous, ce qui est le lit, mais un lit particulier ? • Je l’ai dit en effet. • Or donc, s’il ne fait point ce qui est, il ne fait point l’objet réel, mais un objet qui ressemble à ce dernier, sans en avoir la réalité; et si quelqu’un disait que l’ouvrage du menuisier ou de quelque autre artisan est parfaitement réel, il y aurait chance qu’il dise faux, n’est-ce pas? […] Par conséquent, ne nous étonnons pas que cet ouvrage soit quelque chose d’obscur, comparé à la vérité. • Non. • Veux-tu maintenant que, nous appuyant sur ces exemples, nous recherchions ce que peut être l’imitateur? • Si tu veux, dit-il. • Ainsi il y a trois sortes de lits; l’un existe dans la nature des choses, et dont nous pouvons dire, je pense, que Dieu est l’auteur – autrement qui serait-ce ? Une seconde est celle du menuisier. Et une troisième, celle du peintre, n’est-ce pas? • Soit. • Ainsi, peintre, menuisier, Dieu, ils sont trois qui président à la façon de ces trois espèces de lits. • Platon, La République, Livre X.
Le premier modèle de toutes choses, c’est l’Idée ou la Forme, par exemple l’idée de lit, que l’artisan prend comme loi de fabrication quand il travaille : il crée alors le lit sensible et matériel. Que va faire l’artiste ? Il se borne à reproduire et à copier le lit sensible, réalisé par le menuisier, lit qui, lui-même est une copie. Ainsi la matière artistique vient au troisième rang dans l’ordre des réalités : d’abord l’idée, ensuite les choses empiriques ou sensibles, enfin les créations de l’art. Dès lors, l’art n’est qu’un mensonge et une illusion, mensonge au troisième degré, puisque déjà le sensible nous égare. La représentation artistique est un fantôme et une tromperie. Réalité intelligible: idée de lit (1) Apparence sensible: lit particulier (2) Créations de l’art: lit représenté (3)
La condamnation des poètes par Platon : L’essence du théâtre est l’imitation, la simulation des apparences. Les apparences provoquent nos émotions et nous incitent à nous laisser porter par elles, plutôt qu’à nous guider toujours par la raison. Le théâtre est donc dangereux pour la société dans la mesure où il nous incite à nous laisser porter par nos émotions, plutôt qu’à nous guider par notre raison.
« Aristote et l’imitation » « L’art poétique dans son ensemble paraît devoir sa naissance à deux causes, toutes deux naturelles. Dès l’enfance les hommes ont, inscrites dans leur nature, à la fois une tendance à imiter – et l’homme se différencie des autres animaux parce qu’il est particulièrement enclin à imiter et qu’il a recours à l’imitation dans ses premiers apprentissages – et une tendance à trouver du plaisir dans l’imitation. Nous en avons une preuve dans l’expérience pratique : nous avons plaisir à regarder les images les plus soignées des choses dont la vue nous est pénible dans la réalité, par exemple les formes d’animaux parfaitement ignobles ou de cadavres ». Aristote, Poétique, chapitre IV, 48b4-19. Léonard de Vinci,étude d’une tête de jeune fille, 1483. Albrecht Dürer, Vieille femme, 1514.
La tragédie permet la catharsis. L’art permet d’accroître les connaissances car on apprend par imitation. L’apprentissage par imitation est plaisant.
Gombrich : « Il fut un temps où le critique d’art s’intéressait exclusivement aux méthodes de la représentation. Accoutumé comme il l’était à apprécier la valeur des œuvres contemporaines en fonction principalement de l’exactitude de la représentation, il ne doutait pas que, depuis les premiers temps barbares, cette habileté représentative ne cessait pas de se développer en vue d’atteindre à la qualité d’une parfaite illusion ». (L’art et l’illusion).
Vasari : « Les peintres sont dans la dépendance de la nature ; elle leur sert constamment de modèle ; ils tirent parti de ses éléments les meilleurs et les plus beaux pour s’ingénier à la copier ou à l’imiter. Cette dépendance éternelle, c’est à Giotto, peintre de Florence, qu’on la doit. Car, après tant d’années de guerres et de malheurs, les règles de la bonne peinture et des techniques qui s’y rapportent avaient été oubliées et Giotto seul, bien que né parmi des artistes médiocres, les ressuscita et, par un don de Dieu, les ramena des erreurs où elles se perdaient vers une voie que l’on peut considérer comme la meilleure ». ( Les peintres toscans). Giotto,Le Jugement Dernier, détail 1306, fresque Chapelle Scrovegni, Padoue
L’Annonciation vers 1150, miniature d’un évangéliaire souabe, Stuttgart. Giotto, La Foi, vers 1305, détail de la fresque de la chapelle Santa Maria dell’Arena à Padoue
Ce qui caractérise la peinture européenne du début du XIVème siècle à la fin du XIXème siècle, c’est qu’elle se fait sous le principe de l’imitation de la nature. « La perspective »: donner l’illusion de la profondeur La mise en forme du monde, la structure d’organisation de la représentation ne change pas fondamentalement depuis Massacio, début du Xvème siècle à Florence, jusqu’à Monet: la perspective est toujours là, et l’appareil photographique prendra ensuite le relais, dans la mesure où il ne fait que singer le principe de la perspective: il y a un œil unique et toutes les lignes convergent vers le point qui est la projection de l’œil sur la surface de représentation.
« … la peinture imite la belle nature par les couleurs, la sculpture par les reliefs, la danse par les mouvements et par les attitudes du corps. La musique l'imite par les sons inarticulés, et la poésie enfin par la parole mesurée. » Charles Batteux, Les beaux-arts réduits à un même principe (1747), partie 1, chapitre 5, p. 37 Millet, L’Angelus, 1858
c. De la renaissance aux impressionnistes La tradition qui conçoit l’histoire de la peinture comme celle d’un progrès continu vers une plus grande exactitude de la vision s’étend jusqu’à Turner ou aux impressionnistes qui prétendaient reproduire l’ « image perçue par la rétine » : « les impressionnistes, au fond, continuaient d’admettre les idées traditionnelles depuis la Renaissance sur le véritable but de l’art. Eux aussi, voulaient peindre la nature telle qu’elle nous apparaît ; leur conflit avec les tenants du conservatisme portait sur les moyens d’y parvenir ; il ne mettait pas en cause le fond du problème. L’étude impressionniste des reflets, la recherche d’une plus grande liberté de la touche tendaient à réaliser une illusion encore plus parfaite de l’impression visuelle ». Histoire de l’art. William Turner, Pluie, vapeur et vitesse, 1844, Huile sur toile, 90.8 x 121.9 cm, National Gallery, Londres William Turner, Coucher de soleil avec monstres marins, 122 x 92 cm, Huile sur toile, 1845, Tate Gallery, Londres
Cette peinture de Velázquez est comme une photographie, un instantané d’un moment de la vie à la cour d’Espagne. Diego Velázquez, LesMénines, 1656
Comparons maintenant avec ce tableau : Pierre Auguste Renoir, Le moulin de la galette, 1876.
Les impressionnistes se caractérisent par la volonté de peindre en plein air, c’est-à-dire d’exécuter les tableaux de la première à la dernière touche à l’extérieur pour restituer les effets de la lumière. Ils utilisent pour cela le procédé de la touche séparée qui leur permet, plutôt que de combiner intimement sur la palette différents pigments, de poser sur la toile les couleurs pures, en laissant à l’œil du spectateur le soin d’opérer le mélange optique et, ainsi, de retrouver l’éclat coloré de la nature. Monet, Impression, soleil levant,
Les théories nouvelles ne concernaient pas seulement la vision des couleurs en plein air, mais celle des formes en mouvement. William Powell Frith, Le jour du derby, 1856 Édouard Manet, Les courses à Longchamp, 1865
Manet a voulu donner l’impression de la lumière, du mouvement et de la vitesse, en évoquant simplement, par de rapides indications, quelques formes émergeant de la confusion. Les chevaux galopent vers nous à toute vitesse et une foule agitée est massée derrière les barrières. C’est un exemple du refus de Manet de se laisser influencer de ce qu’il sait des formes pour ne représenter que ce qu’il voit vraiment. Ce n'est qu'en 1878 qu'il commence à s'intéresser à la décomposition du mouvement. Il y avait alors, à cet époque, polémique sur la course du cheval. Le physiologiste français Marey affirmait qu'un cheval au galop avait, pendant un moment, les quatre pattes décollées du sol. D'autres affirmaient le contraire. Un riche propriétaire de chevaux a alors organisé un concours pour mettre fin au débat. Muybridge relève le défi et à l'aide de 24 appareils photographiques disposés le long de l'hippodrome et déclenchés par le passage du cheval, il confirme la théorie de Marey. A la suite de cette première et spectaculaire décomposition du mouvement, il entreprit une exploitation systématique de ce procédé. En 1881, il mit au point le zoopraxiscope, projecteur lui permettant de recomposer le mouvement à travers la vision rapide et successive de ces phases décomposées
Mais y a-t-il réellement une bonne manière de représenter les choses? Une représentation peut-elle être plus « vraie » qu’une autre ? Y a-t-il un progrès dans l’art ? N’est-ce pas une illusion ? ?
(Critique ) Le mythe de la représentation « vraie ». La théorie selon laquelle le but de l’art serait la représentation fidèle de la réalité, c’est-à-dire l’idée qui consiste à croire que l’art viserait à représenter le monde visible et que les plus beaux tableaux sont ceux qui « ont l’air vrai » repose sur un énorme préjugé. « Représenter » n’est pas forcément synonyme d’ « imiter » ou de « copier la réalité ». Il y a diverses manières de représenter ou de décrire les choses, manières qui dépendront de la fonction et du but que l’artiste attribue à la représentation.
Ceux qui partagent ce préjugé ne demandent pas aux dessinateurs de Mickey Mouse de le représenter de façon réaliste. L’artiste Marcel Duchamp a forgé le concept d’ « art rétinien » pour dénoncer ce préjugé qui réduit la fonction de l’art à la simple reproduction de l’expérience visuelle commune, habituelle.
Le Jardin de Nebamon, vers 1400 av. J.-C., peinture murale, 64 x 74,2 cm. Provient d’un tombeau de Thèbes. Londres, British Museum. Portrait de Hesire, portail de son tombeau, vers 2778-2723 av. J.-C:., bois, h. 115 cm. Le Caire, Musée égyptien.
Pablo Picasso Poule avec ses poussins, 1942, eau-forte, 36 X 28 cm. Illustration pour l'Histoire naturelle de Buffon. Pablo Picasso jeune coq, 1938, fusain sur papier, 76 X 55 cm.Collection particulière
Léonard de Vinci, Mona Lisa (La Joconde), vers 1502, huile sur bois, 77 x 53 cm. Paris, musée du Louvre. Marcel Duchamp, L.H.O.O.Q., 1919.
Marcel Duchamp, NU DESCENDANT UN ESCALIER Nº2, 1912, 146 x 89 cm
Marcel Duchamp 1887-1968 Duchamp, Fountain, 1917
II. La création artistique Lorsqu’on visite un musée ou une galerie d’art contemporain, on peut parfois avoir le sentiment que l’art se caractérise par une absence totale de règles. La création artistique ne semble pas avoir de limites et toutes les audaces semblent permises. Mais doit-on faire de cette absence apparente de règles dans l’art contemporain la caractéristique majeure de l’art en général ? Si la « règle » de l’art contemporain semble être l’affranchissement de toute règle ou code préétablis pour que puisse s’exprimer la libre créativité et l’imagination des artistes, en a-t-il pour autant été toujours ainsi à travers l’histoire de l’art ? Et plus loin, n’y a-t-il pas encore des règles implicites qui régissent l’art contemporain et qu’il faudrait découvrir pour comprendre la démarche des artistes contemporains et la portée de leurs œuvres ? La création artistique suppose-t-elle de se soumettre, d’obéir à certaines règles ? Pour être un artiste faut-il et suffit-il d’appliquer une méthode particulière, de maîtriser certaines techniques ou certains savoir-faire (de la même manière que dans la production artisanale) ou bien être artiste demande-t-il quelque chose de plus ? Ne doit-on pas considérer au contraire que l’artiste est celui qui pourra progressivement s’affranchir de toute forme de règle ? La création artistique ne doit-elle pas être synonyme d’originalité, de liberté et d’inspiration ?
1. La création artistique exige la maîtrise de certaines techniques et savoirs-faires Avant de prendre sont sens moderne, la notion d’ « art » désignait toute activité supposant des savoirs-faires. Une œuvre se distingue d’abord des productions de la nature en ce qu’elle est un objet fabriqué qui résulte de l’activité de transformation d’une matière par l’homme qui lui impose une forme. Renvoie donc d’abord à l’opposition entre l’artificiel et le naturel. Tout art, que ce soit celui du peintre, celui du médecin ou celui du cordonnier suppose par conséquent un apprentissage dans lequel on acquiert un certain savoir-faire. Connaissance d’ordre pratique qu’il faut distingue d’une connaissance seulement théorique. Cet apprentissage passe en effet par la répétition d’exercices qui visent à développer une disposition ou une capacité (« c’est en forgeant qu’on devient forgeron »). Celle-ci est pleinement maîtrisée lorsqu’on son exercice devient aisé, semble naturel et spontané. La notion de virtuosité.
Il faut toutefois opérer une première distinction entre l’art et l’artisanat, entre les arts libéraux et les arts mercantiles. L’art au sens moderne a un sens beaucoup plus restreint et ne désigne plus que ce que pendant un temps on a appelé les « beaux-arts ». L’art ne vise pas d’abord à remplir une fonction utilitaire. L’art serait à lui-même sa propre fin (autotélie), l’art pour l’art. Cf. Théophile Gautier, poète et théoricien de l’art pour l’art : « Dès qu’une chose devient utile, elle cesse d’être belle ». Le but de l’art est donc a première vue de révéler la beauté de certaines choses, de créer des œuvres belles qui puissent être admirées et contemplées. L’objet propre de l’art, le beau. On ne fabrique pas d’ordinaire des outils et des machines pour le simple plaisir de les contempler. Telle serait au contraire la seule finalité de l’œuvre d’art. L’inutilité et la gratuité de l’art en ferait précisément la spécificité et la valeur.
Toute la question est par conséquent de savoir comment créer des objets qui soient dignes d’être considérées comme des œuvres d’art. Y a-t-il des règles qu’il faudrait suivre pour produire de belles œuvres ? De fait, dans tous les arts, il semble y avoir un certain nombre de règles explicites ou implicites qui l’artiste devrait suivre. Il y a d’abord évidemment des règles qui résultent seulement de l’art choisi et de la matière qui entre en jeu. Des méthodes, des procédés différents en fonction des matériaux qui entre dans la composition d’une œuvre. Des règles qui définissent une pratique artistique et la distinguent d’une autre. (Règles constitutives). Le peintre va nécessairement utiliser principes de la couleur, le musicien, les sons, le sculpteur des matériaux, le poète des mots, etc. Ces règles ne sont pas vraiment des contraintes ou des limites posées à la créativité de l’artiste, c’est au contraire elles qui rendent possible une création déterminée. Mais il y a aussi un autre type de règles qu’on retrouve dans l’histoire dans l’art dont le but est de codifier les différentes pratiques artistiques, à définir les normes à respecter pour pouvoir être rangé au rang d’œuvre d’art. (à préciser)
L’art, une pratique codifiée. Des exemples multiples. Ainsi jusqu’au XIXème siècle. Dans la peinture classique, la recherche de la perfection géométrique dans la composition, respect des proportions, de la bonne mesure, de la perspective, jeu du clair-obscur, etc. Dans la tragédie, règle des trois unités définie par Boileau « Mais nous, que la raison à ses règles engage, Nous voulons qu’avec l’art l’action se ménage ; Qu’en un lieu, qu’en un jour, un seul fait accompli Tienne jusqu’à la fin le théâtre rempli ». Codification aussi de la dans classique, (les cinq positions de Beauchamp). L’art poétique : l’alexandrin, le sonnet, etc. Un autre type de règle : contrainte extérieure imposée à l’art : morale ou politique. Etre artiste, ce n’est pas faire n’importe quoi n’importe comment, sinon nous serions tous artistes. Il faudrait respecter certaines règles. (Transition) Risque de perte de plaisir en art. Trop respecter les règles conduirait au maniérisme et à l’académisme. L’art véritable commence là ou s’achève la technique, lorsque l’artiste prend ses aises avec les règles, s’en joue pour finir par s’en affranchir. L’académisme : observance étroite des règles formelles canoniques transmises par un enseignement de type académique. Le terme dénonce ce qu’il y a de figé, de sclérosé, de dévitalisé dans un art trop étroitement soumis à des règles prescriptives
2. Soumettre l’art à des règles risque d’entraver la force créatrice de l’artiste et de nuire à son originalité Originalité : caractère de ce qui n’ayant aucun précédent, se distingue par sa nouveauté et peut servir de modèle (distinction entre l’original et la copie ou la reproduction). Originalité au sens d’une singularité et d’une unicité de l’œuvre. Une différence importante entre le fait de créer, sans modèle, de façon entièrement originale, une œuvre et de fabriquer, en reproduisant des schémas déjà établi, un simple objet. Alors que l’élève du maître dans l’atelier de peinture s’applique à en intégrer les règles de composition, ce dernier a dû les imaginer seul, les inventer de façon autonome. La création artistique serait dans ce sens une création ex nihilo, comparable à celle du Dieu créateur dans les religions monothéistes. De même que Dieu, selon ces religions, a fait le monde matériel à partir du néant, de même, l’artiste invente un monde formel qui n’existait pas auparavant : il ne crée certes pas la matière sur laquelle il travaille, mais il y découvre des formes d’organisation, que ce soit de la pierre, des couleurs, des mots ou des sons, jusque-là insoupçonnées, inédites. Au contraire, l’artisan suit un modèle préétabli et répétable à l’infini.
Dans le cas de l’objet artisanal ou industriel, la fonction que devra remplir l’objet dicte par avance sa forme. On peut certes rendre beaux des objets techniques, mais dans les limites imposées au préalable par les exigences de la fonction. Au contraire, chaque œuvre d’art porte en elle les règles mêmes qui régiront la forme et les critères d’évaluation. Qu’en est-il de l’artiste ? Cf. Ion où Platon affirme que l’artiste ne possède pas son « art » à la manière de l’artisan. Il ne possède aucune règle préalable, aucun principe qui présiderait à la production de toutes ses œuvres. Il ne reste alors qu’à faire l’hypothèse qu’il s’agit là d’une « inspiration divine », disposition que Platon accorde régulièrement de manière ironique à ceux dont on ne peut pas démontrer qu’ils possèdent un véritable savoir. Il faut bien reconnaître qu’aucune œuvre d’art n’a été produite en application mécanique de ces règles et que, s’il y a des maîtres, le grand art ne se transmet pas comme le savoir-faire de l’artisan.
« Il reste à dire en quoi l'artiste diffère de l'artisan. Toutes les fois que l'idée précède et règle l'exécution, c'est industrie. Et encore est-il vrai que l'œuvre souvent, même dans l'industrie, redresse l'idée en ce sens que l'artisan trouve mieux qu'il n'avait pensé dès qu'il essaie ; en cela il est artiste, mais par éclairs. Toujours est-il que la représentation d'une idée dans une chose, je dis même d'une idée bien définie comme le dessin d'une maison, est une œuvre mécanique seulement, en ce sens qu'une machine bien réglée d'abord ferait l'œuvre à mille exemplaires. Pensons maintenant au travail du peintre de portrait ; il est clair qu'il ne peut avoir le projet de toutes les couleurs qu'il emploiera à l'œuvre qu'il commence ; l'idée lui vient à mesure qu'il fait ; il serait même rigoureux de dire que l'idée lui vient ensuite, comme au spectateur, et qu'il est spectateur aussi de son œuvre en train de naître. Et c'est là le propre de l'artiste. Il faut que le génie ait la grâce de la nature et s'étonne lui-même. Un beau vers n'est pas d'abord en projet, et ensuite fait ; mais il se montre beau au poète ; et la belle statue se montre belle au sculpteur à mesure qu'il la fait ; et le portrait naît sous le pinceau. La musique est ici le meilleur témoin, parce qu’il n’y a pas alors de différence entre imaginer et faire (...). Le génie ne se connaît que dans l’œuvre peinte, écrite ou chantée. Ainsi la règle du Beau n'apparaît que dans l'œuvre et y reste prise, en sorte qu'elle ne peut servir jamais, d'aucune manière, à faire une autre œuvre ». Alain, Système des beaux-arts, (1920), Livre I, chap. 7, Ed. Gallimard
La thèse que soutient finalement Alain, c’est qu’il n’existe pas à proprement parler de règle du beau qu’on puisse connaître abstraitement et qu’on pourrait suivre pour créer de belles œuvres, bref il est impossible d’apprendre à produire du beau. A chaque fois le génie artistique réinvente la règle, et celle-ci n’est connaissable pour le spectateur, comme pour l’artiste qu’après coup. Conclusion sur le texte : le génie artistique semble être un don naturel, un talent inné qui trouve à s’exprimer à travers un processus mystérieux de création dû à l’inspiration. L’artiste, contrairement à l’artisan, n’est pas soumis à des règles de productions préalables, mais semble au contraire libre d’inventer au fur et à mesure qu’il crée ses propres règles sans toutefois pouvoir être capable d’expliquer la façon dont il s’y prend. Ce n’est qu’après coup, d’après Alain, qu’on peut dégager de l’œuvre une fois terminée ce qui lui donne sa beauté singulière et son originalité.
La question du génie • Si, à regarder une œuvre d’art, on a la nette impression qu’il s’en dégage une cohérence interne – le retour d’un même motif dans une œuvre musicale, l’harmonie des formes et des couleurs dans un tableau, le jeu des sonorités d’un poème, - ces régularités ne résultent pas pourtant de l’application mécanique d’un savoir préalable. • Chez Platon, le poète crée grâce à un don divin, un délire, un enthousiasme. L’artiste détient un mystérieux privilège : la suggestion divine le pousse à composer ou à peindre, lui qui ne connaît rien à tout ce qu’il fait. Ce n’est point de sang froid que l’artiste travaille, il est, au contraire, relié à la chaîne des Muses. • Kant reprendra à son compte le thème du génie naturel. Le génie est un don naturel qui donne des règles à l’art : une disposition innée de l’esprit, un ensemble de dispositions permettant de créer. En somme, il y a de la nature dans le génie, si complètement opposé à l’esprit d’imitation. • Le paradoxe souligné par Kant : l’art possède bien des règles, mais celles-ci ne préexistent pas à l’œuvre – elles n’apparaissent qu’après coup. C’est pourquoi l’art est le produit du « génie », au sens précis où Kant l’entend : non pas inspiration divine, mais capacité à donner des règles à ce qui n’en a pas encore.
Le génie, une nature hors du commun. Aucune règle générale ne peut régir sa production. Cette notion permet de penser l’œuvre d’art non plus comme imitation d’une nature, mais comme production de la nature : « le génie est la disposition innée de l’esprit par l’intermédiaire de laquelle la nature donne à l’art ses règles ». Idée paradoxale, réunit dans une phrase ce qui à première vue s’oppose, l’art et la nature. • Kant dans son texte distingue 4 traits caractéristiques du génie : • L’originalité. Le génie produit hors la loi, hors les règles, ses productions sont sans modèle, sauvages et déréglées, elles ne ressemblent à rien de déjà vu, de déjà connu. Excentrique, marginal, le génie doit néanmoins se distinguer de la singularité absurde du fou par l’exemplarité de son œuvre. • Exemplarité. L’œuvre géniale n’est pas l’exemplaire d’une règle, elle est exemplaire d’un pouvoir de créer qui, même si on peut l’analyser après coup, est indéfinissable et ne peut qu’éveiller les aptitudes créatrices des autres génies. Le génie produit spontanément, selon des règles et des procédés qu’il se donne lui-même. Sa « manière » peut être, après coup, analysée et imitée et les grands créateurs sont effectivement à l’origine d’une école et d’une tradition. Paradoxalement le génie fait école sans être lui-même d’aucune école. • Abscondité. Le génie n’est que ténèbre à lui-même, il produit sans savoir comment il produit, comme le disait Picasso de lui-même, il ne cherche pas il trouve, il n’a pas de méthode, il a une manière qui est comme sa leçon de ténèbre. C’est l’artisan, non l’artiste qui contrôle l’ensemble de ses opérations productives. • Exclusivité esthétique. Il n’y a de génie à proprement parler que dans les beaux-arts. En science on pourra parler de grands cerveaux mais non de génies, car il n’y a aucune découverte scientifique vraiment originale : en principe, elle aurait pu être faite par un autre savant.
Critique du génie kantien : « CROYANCE À L'INSPIRATION. - Les artistes ont un intérêt à ce qu'on croie aux intuitions soudaines, aux prétendues inspirations; comme si l'idée de l'œuvre d'art, du poème, la pensée fondamentale d'une philosophie, tombait du ciel comme un rayon de la grâce. En réalité, l'imagination du bon artiste ou penseur produit constamment du bon, du médiocre et du mauvais, mais son jugement, extrêmement aiguisé, exercé, rejette, choisit, combine; ainsi, l'on se rend compte aujourd'hui d'après les carnets de Beethoven, qu'il a composé peu à peu ses plus magnifiques mélodies et les a en quelque sorte triées d'ébauches multiples. Celui qui discerne moins sévèrement et s'abandonne volontiers à la mémoire reproductrice pourra, dans certaines conditions, devenir un grand improvisateur; mais l'improvisation artistique est à un niveau fort bas en comparaison des idées d'art choisies sérieusement et avec peine. Tous les grands hommes sont de grands travailleurs, infatigables non seulement à inventer, mais encore à rejeter, passer au crible, modifier, arranger ». Friedrich Nietzsche, Humain trop humain, T. 1, trad. Desrousseaux, coll. « Médiations », Gonthier, pp. 154-155. (T) On devient un génie à force d’un patient travail, on ne l’est pas par nature et par l’exercice d’un jugement sévère sur ses propres productions
3. L’art est une oscillation perpétuelle entre l’invention de nouvelles règles et leur transgression (Puissance subversive de l’art) • Apprentissage et subversion des règles dans la création artistique • Le mouvement propre à l’art. Style, Académisme, Avant-garde (Exemple à travers un mouvement artistique : l’impressionnisme). Le génie artistique est quelqu’un qui travail beaucoup qui a su maîtriser les techniques des maîtres du passé et qui est progressivement capable de s’en libérer. • L’appréciation esthétique des œuvres suppose une connaissance de l’histoire de l’art