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Intégrer les Droits Economiques, Sociaux et Culturels à la Justice Transitionnelle. Tunis, 21-22 octobre 2012 Session 2: R echerche de la vérité. Les « Commissions de Vérité ». Des enquêtes complètes sur le passé, indépendantes mais autorisées et soutenues par l’Etat.
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Intégrer les Droits Economiques, Sociaux et Culturels à la Justice Transitionnelle Tunis, 21-22 octobre 2012 Session 2: Recherche de la vérité
Les « Commissions de Vérité » Des enquêtes complètes sur le passé, indépendantes mais autorisées et soutenues par l’Etat. Des organes non judiciaires, mais dont les pouvoirs peuvent être importants: par ex. amnistier, établir les responsabilités (individuelles ou institutionnelles), faire des recommandations de réforme à l’Etat. Des organes centrés sur les victimes: idée d’une justice « reconstructive ». Ecouter, raconter, reconnaitre, réparer.
Limites • faiblesse de la société civile, • instabilité politique, • peur de témoigner, • manque de ressources, de temps, de personnel, • manque de coopération des « bourreaux », • insuffisance des moyens d’investigation, • incapacité à protéger les témoins.
Facteurs clés Procédure de choix des commissaires et critères de leur éligibilité; Objectifs de la commissions, période d’investigation, fonctions (audiences publiques, éducation, recherche…) Pouvoirs d’investigation (obligation à comparaitre, saisie des biens, autorisation à citer les responsables…); Budget: montant et source (indépendance); Rôle et place des accusés présumés, lien avec la justice pénale; Procédures et mécanismes de suivi des recommandations.
Leçons apprises Importance des consultations avant, pendant et après; Processus de sélection ouvert, public et non partisan pour garantir la légitimité de l’institution; Impartialité des membres (réelle et perçue); Stratégie médiatique et communicationnelle; Equité de genre, représentativité culturelle et confessionnelle.
Etude de cas: Afrique du Sud • TRC divisée en: • Comité d’amnistie • Comité de réparations et réhabilitations • Comité des violations des droits de l’homme • 1800 victimes témoignent en public; les audiences sont diffusées à la télévision nationale. • 20 000 victimes de “violations massives des droits humains” (meurtre, torture, enlèvement, traitement cruel) sont désignées.
Etude de cas: Afrique du Sud (suite) • Une “amnistie conditionnelle” est accordée pour les crimes politiques, au nom “de la réconciliation et de la reconstruction” (Constitution intérimaire, 1993) • Amnistie conditionnée par: • Preuve de la motivation politique du crime; • Révélation “honnête et complète” des circonstances du crime devant la CVR; • 7000 anciens combattants demandent l’amnistie.
Etude de cas: Afrique du Sud (suite) Problème: exclusion des victimes de DESC du récit émanant de la TRC. Persistance des inégalités économiques et sociales résultant de l’apartheid. Une lecture purement politique, non économique, du passé.
Exercices Travail en groupe: vous devez rédiger un mémo pour le Parlement du pays X, exposant les arguments pour et contre l’établissement d’une enquête officielle sur les crimes passés. Comment procédez-vous? Qu’apporte la participation des « bourreaux » aux audiences des CVR, comme en Afrique du Sud? Comment les inciter à participer (« carotte »)? A quels mécanismes pouvez-vous penser pour garantir le suivi et la mise en œuvre des recommandations d’une CVR?
Exercice (suite) • Considérez le document distribué rassemblant des extraits des mandats des commissions de Vérité d’Allemagne, du Guatemala, d’Afrique du Sud, et du Sierra Leone. • Quelles conclusions pouvez-vous tirer quant à: • La nature des objectifs fixés: sont-ils réalistes? • La nature des violations étudiées: sont-elles exhaustives? • L’attribution des responsabilités: est-elle indispensable?
Commissions de Vérité et DESC Souvent concentrées sur violations des DCP Avantage des CVR: structure plus souple que les procès, qui permet de rendre compte du contexte structurel des violations. Dépasser la dichotomie « victime / bourreaux » vers les bénéficiaires des violations, et élargir la définition des « victimes ». Question: qui sont les « victimes » de Ben Ali en Tunisie?
Commissions de Vérité et DESC Dévoiler la vérité sur les exactions et crimes économiques du passé contribue à délégitimer les régimes et à éviter la nostalgie du passé. Exemple de Pinochet au Chili. Fournir un compte-rendu plus complet du passé, en remontant aux causes profondes, et penser les moyens de garantir la non-récurrence.
Commissions de Vérité et DESC • Exemples: • la Commission Vérité du Tchad enquête sur les pillages commis par le régime d’Hissène Habré, trace leurs avoirs, recommande l’exclusion des personnes corrompues. • La Commission Vérité du Sierra Léone fait de la corruption et de la mauvaise gouvernance la cause première du conflit. • La Commission Vérité, Justice, et Réconciliation du Kenya enquête à la fois sur les violences politiques, assassinats, déplacements forcés, expulsions, mais aussi les crimes économiques (accès aux terres, acquisitions illégales des biens…)
Commissions de Vérité et DESC Les enjeux économiques sont souvent au cœur des préoccupations des victimes. Exemple: au Kenya, 43 % des victimes ayant témoigné ont indiqué que les injustices de distribution des terres étaient leur première préoccupation. 34% citent les assassinats politiques. Pas de guérison sans justice socio-économique. Impossibilité de distinguer les crimes économiques de la violence politique.
Collecte de donnés relatives aux violations des DESC: une expertise particulière • Variété des sources: textes de lois, politiques publiques, budgets, événements particuliers (ex: fermeture d’une école, d’un hôpital…), décisions judiciaires, mais aussi récit des victimes. • Indicateurs, notamment régionaux (à trouver notamment dans les rapports de l’Etat pour les organes de traités, PNUD, etc). • Différencier entre: • Indicateurs structurels: intégration des droits au code législatif de l’Etat et définition de plans d’action pour les réaliser; • Indicateurs de processus: efforts effectués par l’Etat pour leur réalisation; • Indicateurs de résultats.
Collecte de donnés relatives aux violations des DESC Analyser les obligations de l’Etat, le cadre légal, les manquements passés, la situation d’individus et de groupes particuliers (par entretiens avec les communautés rurales, visite des écoles, des hôpitaux, des usines)… Remarque: l’intégration des DESC au mandat d’une CVR exige d’autant plus une ramification locale de l’institution, pour multiplier les sources d’information et rencontrer tous les acteurs impliqués.
Analyse des informations relatives aux violations des DESC Identifier les victimes; Identifier les autorités responsables et les acteurs complices (bénéficiaires des violations); Détailler les faits; Identifier les types de violations (droit à la santé, droit à l’eau, droit au logement, droit au travail…); Déceler des schémas de discrimination systématique dans l’accès aux DESC: désagréger les données pour comparer (par ex: entre zones urbaines et rurales); Identifier les priorités thématiques pour réparer les violations (accès aux terres, santé, éducation, égalité et non discrimination…)
Etude de cas: Timor Leste Colonisationportuguaise, guerre civile et occupation indonésienne: variété des violations. La Commission pour la Réception, la Vérité et la Réintégration (CAVR) estcréée en 2001 pour enquêtersurtoutesles violations commises entre 1974 et 1999. Son rapport soulignel’ampleur des crimes économiquescommis par l’Indonésie et les puissancesinternationales.
Etude de cas: Timor Leste (suite) Le rapport de la CAVR analyse non seulement les mortsdirectes, maisaussi les victimes “indirectes”, notamment les morts dues à la faim, à la pauvreté et à la maladie. « Les violations du droit à l’alimentation ont été liées aux violations de la liberté de mouvement, du droit de vivre où l’on veut, du droit d’avoir accès à l’aide, à la destruction des ressources alimentaires, et, ultimement, aux violations du droit à la vie. » Il liste les violations des DESC (notamment: droit à un niveau de vie adéquat, droit à la santé, droit à l’éducation), ainsi que les violations des DCP ayant eu des conséquences sur les DESC (exemple: les violations du droit à un traitement humain affectent le droit à la santé…).
Etude de cas: Timor Leste (suite) Le rapport de la CAVR enquête sur la corruption, notamment dans le secteur du café, et son rôle dans la perpétration des violations des DDH. Recommandations relatives au DESC: accès à l’eau et au soin, enquêtes sur les questions relatives aux terres et aux programmes de réinstallation, réparations financées par les multinationales ayant soutenu l’occupation. Difficultés rencontrées dans la collecte des données sur les violations des DESC: manque d’informations, de ressources et d’expertise; Ses recommandations ne furent pas suivies: pragmatisme économique du Timor Leste et influence des puissances internationales.
Exercices • Voir la fiche sur l’établissement de la vérité dans les violations du droit au logement (expulsions forcées). • De votre point de vue, dans quelle mesure ce type d’enquête s’intègre-t-elle à la justice transitionnelle? • Quels sont les enjeux posés par ces violations en terme: d’établissement des responsabilités? De reconnaissance des victimes?
Amnisties, recherche de la vérité et DESC • Les amnisties sont interdites pour les crimes internationaux. • Mais elles peuvent être utile pour la recherche de la vérité dans le cas des crimes économiques et de la corruption. • Distinction entre: • établissement de la vérité par la motivation (ITR: incentive-basedtruthrevelation): fournir aux personnes impliquées dans les violations des « carottes » pour les inciter à révéler la vérité. Exemple: la commission « Vérité et Responsabilité » au Bangladesh (2008). • établissement de la vérité par les enquêtes (ETR: evidence-basedtruthrevelation): enquêtes similaires à celles des procès, sans incitations.
Amnisties, recherche de la vérité, et DESC Les amnisties pour corruption et violations des DESC peuvent être une manière d’obtenir des informations utiles sur le recouvrement des avoirs. Convention des Nations Unies contre la Corruption (UNCAC), art. 37(3): « Chaque État Partie envisage de prévoir la possibilité, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, d’accorder l’immunité de poursuite à une personne qui coopère de manière substantielle à l’enquête ou aux poursuites relatives à une infraction établie conformément à la présente Convention. »
Amnisties, recherche de la vérité et DESC • Combiner les forces: • Commission de Vérité « ITR »; • Amnisties; • Collaboration avec des instruments juridiques internationaux comme l’UNCAC. • Exemples de succès: la Commission Présidentielle sur la Bonne Gouvernance aux Philippines (1986), combinée avec la Commission sur les Violations des Droits de l’Homme – contribua au recouvrement des avoirs du Président Marcos en Suisse, notamment par le biais de l’immunité offerte en échange d’informations.