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Emotions. Les émotions sont un monde complexe. La raison provient de la grande variété d’états sous lesquels elles peuvent être décrites, comme les comportements, les sentiments, les changements physiologiques. Difficulté pour les définir, les cerner comme objet d’étude.
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Les émotions sont un monde complexe. La raison provient de la grande variété d’états sous lesquels elles peuvent être décrites, comme les comportements, les sentiments, les changements physiologiques. Difficulté pour les définir, les cerner comme objet d’étude. Les émotions sont très souvent des états personnels, difficiles à décrire, hormis dans les cas les plus évidents. Cette subjectivité est un problème pour l’étude scientifique des émotions. Peut-on mesurer du subjectif grâce à des protocoles objectifs ? Existe-t-il des outils adaptés fiables et reproductibles ?
Pourtant, même si l’on arrive à pallier ces problèmes, peut-on éthiquement au cours d’une situation expérimentale susciter des réactions émotionnelles, telles que de la peur, de la colère ou encore de la tristesse ? De ce fait, les émotions ont longtemps été mises à l’écart au niveau de la recherche expérimentale. Au niveau théorique, en revanche, une multitude de modèles explicatifs des émotions ont été proposés. Dans ce cours, nous nous intéresserons plus particulièrement à l’apport des études psychophysiologiques dans l’étayement ou l’invalidation des différents modèles proposés concernant la nature des processus émotionnels.
Les théories des émotions Leur but est d’expliquer les liens existant entre le phénomène psychologique subjectif et l’activité physiologique viscérale autonome. Elles ont tenté de déterminer si l’individu pouvait éprouver des émotions en l’absence d’activité physiologique viscérale. 3 théories principales = 3 approches différentes pour expliquer les émotions. - La théorie de James-Lange - La théorie de Cannon-Bard - La théorie de Schachter
1ère approche = la théorie de William James et Carl Lange 1884, James suggère que la perception des émotions relève de l’analyse des mécanismes périphériques mis en jeu par ces émotions. Les stimuli émotionnels engendrent des changements corporels, telle que l’activation des systèmes musculaire et glandulaire. De la perception de ces changements naît l’émotion. Ces conclusions s’appuient sur les corrélations reflétées par des expressions courantes telles que « trembler de peur », « rougir de honte »,… À la même époque, un médecin danois, Carl Lange propose une explication similaire qu’il résume ainsi :
« nous devons tout le côté émotionnel de notre vie, nos joies et nos peines, nos moments heureux et malheureux, à notre système vasomoteur. Si les impressions qui affectent nos sens n’avaient pas le pouvoir de les stimuler, nous errerions dans la vie sans éprouver de sympathie ni de passion, et toutes les impressions du monde extérieur ne feraient qu’enrichir notre expérience, accroître nos connaissances sans entraîner ni crainte ni souci. (Lange, 1887) » C’est sur ces affirmations que repose la théorie de James-Lange mettant l’accent sur le rôle primordial des événements physiologiques périphériques dans l’établissement des émotions. = théorie périphériste des émotions Illustration de cette théorie = « on est triste parce que l’on pleure » Cette théorie a engendré de nombreuses études pour relier les émotions aux réponses corporelles, mais elle n’a pas survécu aux critiques, notamment des « centralistes ».
2ème approche = la théorie de Walter Cannon et Philip Bard Dans les années 20, Cannon remet en question la théorie en observant que les réactions corporelles sont très similaires entre les émotions qui sont proches. * Argument 1 = si les états corporels sont des émotions, les modifications physiologiques provoquées par des traitements expérimentaux (chirurgie, drogues) devraient modifier les émotions exprimées. Cannon montre que les animaux dont on sectionne les nerfs, les privant de sensations corporelles ont tout de même des réactions émotionnelles mesurées par l’accélération du rythme cardiaque. Il rapporte également que des hommes atteints de paralysie sont capables de ressentir des émotions. Toutefois, même si ces individus présentent encore des émotions, l’intensité de leurs sentiments est très réduite.
* Argument 2 = si les états physiologiques précèdent les émotions, la diversité des émotions doit être expliquée par la même diversité de ces états. Or, un même pattern de changements périphériques peut accompagner des émotions différentes. La théorie de Cannon-Bard revendique l’existence d’une intégration cérébrale des stimuli émotionnels engendrant la réaction corporelle et l’expérience émotive. Les émotions seraient donc produites entièrement par le cerveau. = théorie centraliste des émotions Jusqu’au milieu du siècle, il y eu peu d’effort produit pour expliquer les origines des émotions, celles-ci étant considérées comme non nécessaires dans l’étude des comportements.
3ème approche = la théorie de Stanley Schachter et Jérôme Singer Dans les années 60-70, devant l’opposition des 2 précédentes théories et l’émergence des sciences cognitives, Schachter et Singer proposent que les individus interprètent les réactions corporelles engendrées par le stimulus émotionnel en fonction de leur expérience et du contexte situationnel. Exp. : Administration d’adrénaline à des individus réalisant des activités les rendant joyeux ou colériques. Seule la moitié des individus connaissent l’effet de l’adrénaline sur leurs réactions corporelles. Les individus avertis des conséquences se maîtrisent beaucoup mieux face à « l’emportement » que provoque l’adrénaline. Une émotion ne serait donc plus uniquement commandée par une activation physiologique, mais également contrôlée par des systèmes cognitifs internes.
L’émotion résulterait de la perception d’une relation causale entre la réaction physiologique et le vécu émotif. = théorie cognitiviste des émotions La réaction physiologique serait non spécifique n’affectant que l’intensité de l’émotion et non sa nature. Si l’émotion apparaît suite à une analyse cognitive de la réaction physiologique, la suppression de cette réaction devrait perturber l’émotion. Or, une expérience montre que le blocage de récepteurs adrénergiques réduisant les activités cardiaques notamment, n’entraîne pas de diminution de l’émotion (Reisenzein, 1983). Toutes ces théories mettent en relation phénomènes corporels et émotion. Est-il possible de mettre en évidence des patterns physiologiques spécifiques de certaines émotions ou groupes d’émotions ?
Dans le cadre de la psychophysiologie, il existe au moins 3 aspects des émotions : Le sentiment intime et subjectif L’être humain est capable d’exprimer une grande variété d’états qu’il dit ressentir ou éprouver. Ces expériences subjectives peuvent s’accompagner de manifestation de joie ou encore de détresse, mais très souvent elles ne comportent pas d’indicateurs évidents. Les émotions constatées sont pour la plupart un mélange de différents états. L’éveil physiologique Il s’exprime ou se manifeste par des réactions somatiques et autonomes, suggérant que les états émotionnels peuvent être définis par un panel de réactions d’organes viscéraux, tels que le cœur, l’estomac ou les intestins.
Sentiment d’émotion Impulsions à agir Comportement manifeste Effet Événement stimulus Connaissance déduite Éveil physiologique Boucles de rétroaction L’expression comportementale ou acte Exemples : la défense ou l’attaque en réponse à une menace. Théorie de Darwin La théorie de Darwin suggère que les émotions ont un rôle important dans la survie de l’individu en permettant d’adopter des réactions appropriées dans des cas d’urgence. Selon certaines conceptions, les émotions seraient assimilées à une chaîne d’événements déplaçant un individu vers un état d’homéostasie comportementale.
La catégorisation des états émotionnels Au XIXe siècle, Wundt donne 3 dimensions fondamentales aux émotions, regroupées en couples d’états opposés : - plaisir / déplaisir - tension / détente - excitation / relaxation La liste se complexifie ensuite avec Plutchik proposant de décrire les émotions au moyen de 8 émotions fondamentales réparties en 4 paires : • Joie / tristesse • acceptation / dégoût • colère / peur • surprise / anticipation
Ainsi, toutes les émotions dériveraient de combinaisons issues de cette organisation universelle de base. La diversité émotionnelle proviendrait des variations d’intensité des émotions sur 3 niveaux. Intensité
La réponse nerveuse autonome Le débat = la forme de réaction corporelle donne t-elle une information sur le type d’émotion éprouvée ? En 1953, Ax montre une spécificité des réactions corporelles en réponse à des stimuli émotionnels. L’expérience consistait à provoquer de la colère ou de la peur chez des sujets reliés à un polygraphe afin d’enregistrer leurs différentes réponses physiologiques. Malgré les hésitations face à ce genre de protocole expérimental, des réponses émotionnelles fortes sont néanmoins obtenues. Une augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression sanguine plus importante est obtenue pour la peur par rapport à la colère. Néanmoins, 30 ans plus tard, Cacioppo (1995) conclut que la preuve d’une différenciation des émotions par les réactions du système autonome n’est pas acquise.
Des stimuli émotionnels différents ne déclenchent pas invariablement une forme distincte de réaction du système périphérique. D’autres résultats expérimentaux complexifient le débat en montrant qu’il existe une variabilité importante des réactions physiologiques accompagnant les émotions d’un individu à l’autre (Lacey et Lacey, 1970). Cependant, les patterns observés sont stables pour un même individu tout au long de sa vie. Ces individus sont placés en condition de stress et on observe les profils de réponse du système périphérique. On plonge par exemple leur main dans de l’eau glacée, on leur fait faire des calculs mentaux à rythme soutenu ou encore on stimule intensément leur peau. On teste des individus allant de la petite enfance jusqu’à l’âge adulte. Certains individus réagissent vigoureusement par des changements du rythme cardiaque, d’autres par contraction de l’estomac ou encore par modification de la pression sanguine.
L’extrême stabilité de ces patterns individuels tout au long de la vie permet de comprendre comment les mêmes conditions de vie stressantes peuvent donner lieu à des effets distincts, tels que des ulcères ou de l’hypertension artérielle. Emotions et modifications endocrines (hormonales) Plusieurs structures endocrines corporelles semblent être engagées dans la sphère émotionnelle. Ainsi, des recherches explorant les relations entre hormones et émotions ont été menées suivant l’une ou l’autre de ces 2 démarches : 1) Observation des variations, mêmes minimes, des [hormones] dans le sang pendant des états émotifs spontanés ou déclenchés. 2) Observation des changements d’état émotionnel suite à l’administration d’hormones ou après l’enregistrement de carences hormonales résultant de maladie endocriniennes.
Hormones étudiées ? adrénaline Sécrétée par les médullosurrénales. corticostéroïdes Sécrétées par l’hypophyse et les corticosurrénales. Rem: Bon nombre d’expériences dans ce domaine ont été réalisées sur des animaux et les états émotionnels étudiés ont été surtout la peur et le stress. [adrénaline] ou [noradrénaline] élevées dans le sang et les urines avant et après l’activité. Situations stressantes, anxiogènes En fait, ces augmentations dépendraient de la force émotive avec laquelle les individus réagissent. Dans une situation d’interview, d’interrogatoire, l’augmentation est en effet obtenue pour des individus exprimant des émotions intenses allant jusqu’à l’agressivité par rapport à des réponses plus calmes.
Levi (1965) note une hausse des [adrénaline] équivalente chez des individus à qui l’on projette des films à caractère émotionnel agréable ou désagréable. Les activités endocriniennes semblent donc apporter des arguments contre l’idée qu’il existe des patterns physiologiques distinctifs pour chaque émotion. Les réponses des corticosurrénales ne paraissent pas non plus apporter d’arguments pour permettre de différencier les types d’émotion (Brown et Heninger, 1975). La réduction de sécrétion d’hormones résultant de divers états maladifs exerce également une influence sur les réactions émotives. On associe souvent à la dépression les faibles sécrétions d’hormones thyroïdiennes. On note également l’existence d’un état dépressif dans la maladie d’Addison, trouble du fonctionnement des surrénales, qui s’accompagne d’une diminution des sécrétions de glucocorticoïdes.
D’autres études, essentiellement consacrées au stress, ont eu lieu en environnement naturel. La raison invoquée par les chercheurs est qu’il est possible que les expérimentations en laboratoire ne permettent pas de refléter pleinement l’effet d’un stress comme dans la vie réelle. La difficulté principale d’une expérience en environnement naturel est de maîtriser le caractère le plus souvent imprévisible des situations stressantes. La situation de la vie réelle la plus souvent utilisée pour étudier le stress est celle du programme de formation des aviateurs et des parachutistes. Ursin, Baade et Levine (1978) ont effectué des mesures physiologiques et psychologiques chez des recrues de l’armée norvégienne, avant et pendant leur première phase d’entraînement au saut en parachute. Cet entraînement consistait à se laisser glisser le long d’un filin reliant le haut d’une tour de 12 mètres et le sol. Cette situation, même si sans danger, était suffisante pour provoquer une forte appréhension.
Les mesures physiologiques ont révélé un ensemble important de manifestations nerveuses autonomes et hormonales. Des prélèvements sanguins et urinaires ont été également réalisés avant l’entraînement (définissant une période de base) puis avant et après le saut. Evolution temporelle des concentrations hormonales dans le sang ou les urines.
après avant Augmentation de la [cortisol] dès le premier saut puis retour à la normale, à l’inverse le taux de testostérone diminue fortement lors du premier saut pour remonter ensuite au cours des jours suivants. Ce pattern physiologique a été corrélé avec la peur et disparaît donc avec l’expérience de la situation. Il est dû à l’activité de l’hypophyse.
Augmentation de la [adrénaline] et de [noradrénaline] dans les urines dès le premier saut mais avec une évolution plus lente. La sécrétion d’adrénaline se produit pendant l’exercice puisque le taux n’augmente qu’après le saut, ce qui n’est pas le cas pour la noradrénaline. Ces résultats couplés à d’autres, soulignent la relation entre la noradrénaline et l’affrontement direct d’une situation stressante, tandis que l’adrénaline serait associée à des réactions plus indirectes.
Les mécanismes centraux Comme nous l’avons évoqué précédemment, depuis la théorie de Cannon-Bard une part importante est donnée à l’existence d’un contrôle central des émotions, reflétées par le système nerveux périphérique. Diverses structures cérébrales ont été mis en évidence. L’hypothalamus Ce sont les expériences réalisées par Philip Bard qui mirent en avant le rôle essentiel de l’hypothalamus dans l’expression des émotions. Une ablation de la totalité des hémisphères cérébraux était réalisée, ne laissant que le tronc cérébral comprenant l’hypothalamus. Déclenchement d’une rage « factice » = sans stimuli déclencheur
= colère violente accompagnée de toutes les activités végétatives habituelles liées à cette émotion. Augmentation de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque, une dilatation des pupilles, un hérissement du poil, des activités motrices typiques comme l’incurvation du dos, la sortie des griffes, des crachements ou grondements… Il renouvela ensuite l’expérience mais en supprimant l’hypothalamus et montra que cette rage factice n’apparaissait plus. • Il suggéra donc que • l’hypothalamus jouait un rôle majeur dans l’expression des émotions et notamment négatives • le cortex cérébral avait sans doute un rôle modérateur dans la réalisation du comportement émotionnel.
Une confirmation arriva de la part de Walter Hess grâce à des expériences de stimulations électriques dans des zones précises de l’hypothalamus. Suivant la région stimulée, il réussit à déclencher deux comportements antagonistes: soit un comportement de rage voire de d’attaque soit un comportement de peur et de défense. Vers quelles structures l’hypothalamus envoie t-il des connexions ? l’hypophyse L’hypothalamus contrôle les sécrétions hormonales produites par celle-ci, participant à l’expression de l’émotion. la formation réticulée La formation réticulée contrôle les fonctions cardiovasculaires, respiratoires, digestives et de déglutition.
Ainsi, par le biais de la formation réticulée, l’hypothalamus va agir sur les comportements végétatifs viscéraux mais aussi sur certains comportements moteurs volontaires sous contrôle cortical. D’autres structures viennent également participer à cette activation de la formation réticulée, une des plus importantes est l’amygdale. Des observations cliniques ont permis d’apporter des éléments montrant que l’expression émotionnelle est liée à une activation involontaire motrice et non commandée par le cortex moteur. Des patients atteints d’une paralyse faciale unilatérale, due à des lésions des voies motrices d’origine corticale, étaient incapable de contracter les muscles de la moitié du visage de façon volontaire. En revanche, ces mêmes patients, exposés à un événement déclenchant une émotion, présentaient à nouveau des mouvements musculaires parfaitement symétriques de la face, mouvements donc involontaires puisque les voies motrices étaient lésées.
L’amygdale La découverte de la participation de l’amygdale dans les émotions a été progressive. L’expérience de départ fût réalisée par Klüver et Bucy dans les années 30 sur des singes chez qui l’on avait retiré la majeure partie du lobe temporal. Comportements bizarres et notamment des modifications du comportement émotionnel. = ces animaux ont un comportement de peur et de d’agressivité vis-à-vis de l’homme lorsqu’ils vivent à l’état sauvage. Une fois opérés, ils devenaient dociles, sans réaction colérique ou agressive. Face à un stimulus dangereux comme un serpent, ils ne manifestaient plus de crainte. Des phénomènes similaires furent ensuite observés chez des patients atteints de lésions des lobes temporaux, à qui l’on donna le nom de syndrome de Klüver-Bucy.
Ce syndrome est observé également chez des personnes possédant des troubles variés altérant les lobes temporaux, comme lors de la maladie d’Alzheimer. On attribua ces changements drastiques en premier lieu à la destruction d’un ensemble de structures temporales formant un circuit. Ce n’est que plus tard grâce à d’autres expérimentations que l’implication privilégiée de l’amygdale fut mise en avant : Downer notamment apporta une démonstration majeure. Il enleva à un singe une de ces 2 amygdales et sectionna toutes les voies de communication existantes entre les 2 hémisphères y compris le chiasma optique. En bandant l’œil droit ou l’œil gauche de l’animal, il constata que son comportement dépendait de l’œil qu’il utilisait. Si on lui cache l’œil du côté de l’amygdale intacte, il analyse donc ce qu’il voit avec le cerveau intact et présente un comportement « normal » c’est-à-dire agressif et craintif. Si on lui cache l’autre œil, il analyse avec son cerveau sans amygdale et devient docile.
Champ visuel gauche Champ visuel droit Nerf optique Corps genouillé latéral HG HD Privé d’amygdale, le singe n’analyse pas comme à l’accoutumée les stimuli visuels qui lui parviennent, en tout cas, ceux qui sont « néfastes ou dangereux » pour lui. Downer en conclut que l’amygdale permettait d’associer aux stimuli environnementaux leur signification émotionnelle.
Le circuit de Papez et le système limbique En 1937, James Papez propose l’existence d’un circuit nerveux de l’émotion, regroupant diverses structures corticales et sous-corticales parmi lesquelles on retrouve l’amygdale et l’hypothalamus. Papez a imaginé ce circuit comme une boucle fermée partant des corps mamillaires (partie de l’hypothalamus), passant par le thalamus puis à travers le cortex cingulaire, le gyrus parahippocampique pour rejoindre l’hippocampe. En retour l’hippocampe se projette sur l’hypothalamus par l’intermédiaire du fornix.
Papez a tiré ses conclusions en autopsiant les cerveaux de malades présentant des troubles affectifs. Il a localisé les structures cérébrales détruites et a conclu que ces lésions étaient à l’origine de l’altération des émotions. Ces lésions impliquaient un ensemble de sites cérébraux interconnectés. Chaque région du circuit a donc subi un grand nombre de lésions, stimulations afin de déterminer ses relations avec le processus émotionnel. Par ces expériences, de nouvelles structures sont venues complexifier la constitution de ce circuit, comme l’amygdale et le septum. Ce circuit fut alors rebaptisé « système limbique ».
Le cortex frontal Au-delà du système limbique, un contrôle serait exercé par certaines zones corticales. Le cortex frontal est l’une d’entre elles. Sa participation dans les sentiments et l’expression des émotions a été révélée lors de l’observation clinique d’un cas devenu célèbre, celui de Phinéas Gage.
Début de l’an 2000, le développement des techniques modernes d’imagerie cérébrale ont permis à Damasio et ses collègues de déterminer les zones du cortex frontal qui avaient été touchées par la lésion, et de faire une corrélation entre les émotions et lobe frontal. Les personnes présentant des lésions du lobe frontal sont apathiques, impulsives, ont parfois des accès d’euphorie. Leurs émotions sont superficielles, même leur sensibilité à la douleur est atténuée. L’apathie peut parfois être remplacée par la vantardise.
L’apport des techniques d’imagerie cérébrale, telles que l’IRMf, a contribué à l’enrichissement des structures activées pendant un comportement précis. Ainsi, une équipe de chercheurs londoniens a montré que, lorsque l’on présentait à des personnes des visages exprimant la peur ou le dégoût, 2 structures distinctes s’activaient. L’amygdale était corrélée à la peur, tandis que le dégoût suscitait l’activation de l’insula antérieure. 2 émotions négatives mettent en jeu 2 régions cérébrales différentes. Pattern central distinct pour différentes émotions, et non plus périphérique. L’activation de l’insula avait également été mis en avant lorsque l’on faisait goûté du sel. Les mêmes circuits cérébraux sont visiblement mis en jeu quelle que soit la manière dont l’émotion est perçue ou ressentie.
Les troubles mentaux Dans les années 80, une étude menée auprès de 18000 personnes adultes américaines fait ressortir que pratiquement 20% de ces personnes sont affectées par au moins un problème de nature psychiatrique : 8% = troubles d’anxiété 6% = troubles liés aux drogues et à l’alcool 5% = dépression 1% = schizophrénie Dans le passé, ces perturbations ont été presque exclusivement abordées du point de vue psychologique, les recherches actuelles ont également pris une orientation biologique. permet d’affiner les catégories des troubles mentaux, et contribue à l’avancement des connaissances et à l’amélioration de la prise en charge.
La schizophrénie On estime à environ 10 millions la population mondiale de schizophrènes. Avant les progrès de la psychophysiologie et des neurosciences, les patients atteints de schizophrénie passaient leur vie dans un état d’incapacité dû à l’hallucination, au délire et à des anomalies généralisées de l’affectivité et de la pensée. La schizophrénie est-elle une maladie génétique ? Etude des histoires familiales Les enfants ainsi que les frères et sœurs des personnes schizophrènes ont de plus grands risques d’être également schizophrènes que les individus d’une population moyenne. Plus la parenté biologique est grande, plus le risque est grand.
Les études des histoires familiales est critiquables car les membres d’une même famille partagent non seulement les facteurs héréditaires mais aussi les facteurs liés à l’expression de ce trouble. Ces facteurs sont alors confondus. De plus, les données recueillies font appel aux souvenirs de parents qui parfois attribuent l’origine du mal à un parent bizarre. Etude des jumeaux Les jumeaux semblent fournir aux chercheurs de bonnes conditions pour faire une étude génétique. Les jumeaux peuvent en effet être monozygotes, issus d’un même ovule, ou hétérozygotes, issus de deux ovules différents. De plus, les jumeaux ont aussi d’autres frères et sœurs avec lesquels on peut effectuer des comparaisons. On recherche la différence d’apparition de la maladie chez les jumeaux monozygotes et hétérozygotes. Il y a une concordance plus importante chez les jumeaux monozygotes que chez les jumeaux différents.
Taux de concordance (%) monozygotes Etudes hétérozygotes A 61 10 B 82 15 C 75 14 D 42 9 E 38 10 Kendler et Robinette (1983) ont confirmé ces résultats en montrant que sur 50000 jumeaux, une concordance de 30,9% existait entre des jumeaux monozygotes tandis qu’elle n’est que de 6,5% chez les hétérozygotes. Cas extrêmement rare (1/500 millions) = cas des quadruplés Genain Histoire des quadruplés monozygotes devenus schizophrènes dès leur plus jeune âge. Ils n’avaient pas la curiosité typique des enfants et ne semblaient pas avoir de personnalité distincte. Leur milieu familial était stricte, sans humour et plaisir.
Vers 20 ans, les symptômes cliniques de la maladie se manifestèrent mais de façon différente chez les quadruplés. Leurs réactions face à la médication variaient. Les données d’imagerie ont montré une activité métabolique faible dans les lobes frontaux par rapport aux sujets témoins. Diverses concentrations hormonales sont anormales. Les quadruplés présentaient aussi un taux élevé de phényléthylamine (PEA), substance considérée comme un hallucinogène endogène. Toutes ces différences observées chez les quadruplés ont permis de mettre en évidence que l’information génétique n’est néanmoins pas la seule base de la schizophrénie. Des données issues d’études relatives à l’adoption d’enfants schizophrènes apportent encore des arguments supplémentaires pour le caractère génétique. Une forte proportion de schizophrènes est enregistrée chez les parents biologiques des enfants adoptés devenus schizophrènes.
Une anomalie anatomique importante est également observée dans le cerveau des personnes schizophrènes. La schizophrénie s’exprime à travers une augmentation de la taille des ventricules due à une atrophie des tissus nerveux adjacents, tels que ceux du lobe temporal et en particulier les régions hippocampique et parahippocampique. Cette augmentation a des répercutions sur l’action des médicaments, ceux-ci agissent moins bien. D’une façon générale, des chercheurs ont noté que la présence d’un élargissement des ventricules était corrélée avec l’importance des difficultés d’ordre cognitif et l’inadaptation sociale dont font preuve les personnes touchées. Structures subissant des changements pathologiques sont celles intervenant dans les mécanismes nerveux des émotions.
La schizophrénie serait déclenchée par un disfonctionnement de la perte programmée synaptique au cours de l’adolescence. Cette réduction synaptique ne s’effectuant pas correctement engendrerait une réorganisation des structures cérébrales, provoquant alors l’apparition de la maladie. Des facteurs génétiques pourraient prédisposer le cerveau d’un schizophrène à subir des modifications plastiques inhabituelles en raison de stress routiniers. Plusieurs théories explicatives de la schizophrénie privilégient les causes biologiques. L’une des ces théories propose que la maladie résulte de processus métaboliques déficients provoquant principalement des excès ou insuffisances de neurotransmetteurs. Le principal neurotransmetteur « touché » serait la dopamine.
La dépression Il ne faut confondre déprime et dépression, où la déprime n’est qu’un malaise passager. L’état de dépression se reproduit avec une régularité cyclique, généralement chez les personnes de plus de 40 ans. Cet état se caractérise par une humeur chagrine, une perte d’intérêt, d’énergie et d’appétit, une difficulté de concentration et une agitation nerveuse. L’individu est pessimiste sans qu’il n’y ait de stress apparent. Des études épidémiologique montrent que qu’il y a une prédominance de femmes parmi les victimes de dépression grave. Quelles sont les origines de cette différence ? Explications psychosociales La première hypothèse serait liée au manque d’équité entre homme et femme, pouvant engendrer une faible estime de soi, et donc une dépression chez les plus vulnérables.
Explications génétiques La dépression serait un trouble de l’hérédité lié au chromosome X. Mais les taux de dépression entre hommes et femmes ne semblent pas différents. Une explication plus plausible a été apportée par l’étude de la communauté Amish. Cette communauté interdisant l’alcool, entre autres choses, a révélé une équité entre les deux sexes concernant la dépression. Une hypothèse est alors avancée, la dépression ne serait-elle pas masquée par une surconsommation d’alcool chez les hommes. Une nouvelle analyse des données épidémiologiques précédentes, mais cette fois-ci sur l’alcoolisme, indique qu’il existe une différence entre les deux sexes avec une dominance pour les hommes.
Les maladies dépressives seraient associées à une diminution de l’activité synaptique impliquant la noradrénaline et la sérotonine au niveau de l’hypothalamus et du système limbique. L’ampleur des changements accompagnant la dépression ne saurait s’expliquer que par les augmentations ou diminutions de neurotransmetteurs. Certains chercheurs proposent que la dépression reflète plutôt un problème de régulation de l’action des neurotransmetteurs. La défection des mécanismes régulateurs donne un système transmetteur incapable de réagir de façon convenable aux besoins externes ou internes. Les études réalisées sur la dépression recherchent l’existence de marqueurs biologiques (biochimiques, physiologiques ou anatomiques) pouvant refléter les perturbations. Les recherches se centrent sur les marqueurs associés aux réactions hormonales.