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Temps Anciens
Il n’y a guère si longtemps nos grands parents ont dû lutter quotidiennement contre les éléments afin de survivre aux conditions climatiques difficiles de ce pays «sans bon sens». Ils ont élevé leurs enfants dans des maisons sans électricité, sans eau courante, sans système central de chauffage, sans climatisation... Le plus incroyable c’est qu’ils ont non seulement survécu, mais la plupart ont vécu jusqu’à un âge très avancé! Plusieurs furent centenaires!
Nos grands parents élevaient des familles nombreuses. Il n’était pas rare de voir des foyers avec dix enfants, et même davantage! Tous ces enfants naissaient à la maison, comme de petits agneaux, souvent avec le seul concours d’une sage-femme du village qui faisait fonction d’accoucheuse et de guérisseuse. Mais comment ont-ils pu faire tout cela?
Les repas étaient cuits sur un gros poêle à bois à l’extrémité duquel était fixé une sorte de réservoir à eau chaude, la seule eau chaude de toute la maisonnée. Comme il y avait presque toujours un nouveau-né dans la maison, cette eau servait à sa toilette. Tous les autres membres de la famille devaient se laver à l’eau froide qu’on devait prendre au puits, à l’extérieur, ou à la source.
Mais comment nos grands parents ont-ils pu survivre aux terribles hivers, dans le neige et la glace, alors que les maisons ne possédaient aucun système de chauffage central? Il fallait se lever plusieurs fois, la nuit, pour aller mettre de nouvelles bûches dans le poêle qui ne dérougissait pas...
Nos grands mères faisaient le pain, chaque semaine, pour des familles de dix, douze ou quinze personnes... Parfois davantage! Il fallait pétrir à la main des quantités incroyable de pâte. Mon grand père achetait la farine en sacs de cent livres à la fois. La cuisson du pain exigeait des heures...
Tout le linge de ces familles nombreuses, y compris les draps, les serviettes, les couvertures, devait être lavé «à la planche», dans des cuves d’eau chaude, avec du savon rude à haute teneur de caustique. Il fallait ensuite empeser et repasser. Les fers étaient chauffés sur le dessus du poêle de cuisine. Et tout le monde avait toujours du linge bien propre. Mais quelle force incroyable animait nos grand mères!
En ce temps-là, qui n’est pourtant pas si loin, l’homme devait se lever avant «la barre du jour» pour traire les vaches et soigner les animaux. Il ne rentrait déjeuner que des heures plus tard. Et le soir, malgré la fatigue du labeur de la journée, il ne rentrait pas avant que la nuit ne fut complètement tombée. Complètement épuisé, il s’endormait souvent dans sa chaise, incapable de se rendre jusqu’à son lit. C’était bien avant la semaine de 32 heures...
Si d’aventure un voisin était frappé par le malheur ou par la maladie, nos grand parents allaient immédiatement lui porter secours, sans rien demander en retour. Si un voisin n’arrivait plus à nourrir tous ses enfants, nos grand parents en adoptaient un ou deux, spontanément, et les gardaient jusqu’à l’âge adulte...
Il m’arrive parfois de souhaiter que tous les services tombent soudainement en panne pour quelques heures – ou même quelques jours –; électricité, aqueduc, transports, etc., afin que la génération actuelle puisse connaître un peu les conditions dans lesquelles vivaient nos grand parents...
Simplement pour aller aux provisions, nos grand parents devaient parfois parcourir des distances de plusieurs kilomètres. Il fallait atteler les chevaux, hiver comme été, et se rendre au magasin général le plus près. Il fallait surtout ne rien oublier car les «dépanneurs» n’existaient pas...
Alors, comprenez moi bien. Quand je vois certaines femmes d’aujourd’hui se plaindre que leur grille-pain n’est pas du dernier modèle ou que le dessus de leur armoire de cuisine n’est pas en marbre, ou que je vois des jeunes hommes en santé préférer un chèque d’assistance sociale plutôt que de chercher un travail, j’ai des envies de révolte. Non, j’ai plutôt envie de pleurer...