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Journal intime d’une exilée. Cher journal, je t’écris ces quelques lignes car je me sens seule et que je n’ai personne à qui parler ni à qui me confier. Je suis dans un état d’esprit où j’ai peur et je ne crois plus en rien.
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Cher journal, je t’écris ces quelques lignes car je me sens seule et que je n’ai personne à qui parler ni à qui me confier. Je suis dans un état d’esprit où j’ai peur et je ne crois plus en rien. Je suis Hongroise, catholique et j’ai vécu en Roumanie car mes parents y ont migré en 1956 à cause de la révolution. Mon enfance n’a pas toujours été facile et à l’âge de 10 ans mes parents se sont séparés. Ma sœur et moi en avons souffert aussi. Un jour j’ai décidé d’écrire un livre sur la révolution de 1989, j’ai voulu faire éclater la vérité. Je voulais que les gens sachent la vérité sur le président et tous ces hommes politiques. Ce fut un vrai coup d’état. Quinze jours après la sortie de mon livre, mon éditeur fut mis en prison. Ce fut la cause de mon départ pour partir loin de ce pays, loin de ces histoires et de ces craintes. J’avais peur d’être à mon tour mise en prison ainsi que des répercussions possibles sur ma famille.
1989 Prise de panique, je n’ai pas eu le temps de planifier mon voyage, à 8h du matin je pris ma décision de quitter le pays. Quelques temps plus tard, je vends ma machine à écrire pour avoir de l’argent et à 10h20, je suis dans le car qui a comme destination Prague en Tchéquie. La réaction de ma famille fut très négative, ma sœur resta en Roumanie. Mais le plus pénible pour moi était de laisser mon mari et mes deux enfants. Cette séparation fut sans doute une des choses les plus émouvantes de mon aventure mais j’étais dans le car et je n’avais pas d’autres solutions que de fuir. Avec moi je n’ai pas emporté beaucoup de choses, juste un jeans, trois slips, dix boîtes de conserves et des cigarettes.
Je suis dans le car et je pense à ce que je vais faire.Ma famille me manque et je n’ai pas grand-chose à manger. Je sais que le car va bientôt arriver à Prague, là je descendrai et je ne remonterai plus dedans. Pour trouver mon chemin, je suis allée acheter une carte routière dans une librairie et j’ai vu que je n’étais pas loin de la frontière allemande. Toute seule, continuant mon voyage, j’ai décidé de passer la frontière à pieds. J’ai marché pendant deux nuits sans m’arrêter et la journée je me cachais dans les mauvaises herbes de l’autre côté des quais de gare, le long des rails de chemin de fer. Ce passage de mon aventure fut très dur physiquement et mentalement. J’étais seule, perdue, fatiguée et avec la tête remplie de bons moments passés avec ma famille qui me manquait beaucoup.
Pendant ce trajet, il ne fallait pas que je fasse de bruit, personne ne devait me voir, à tout moment j’avais peur qu’un douanier me trouve et me renvoie en Roumanie.. En suivant les rails des trains je n’ai pas vu de frontières entre la Tchéquie et l’Allemagne. Je suis arrivée à Dreisteigne en Allemagne. Après neuf mois de vie là – bas, j’ai pris le train jusque Rostov et dans le courant de l’après–midi je me suis rendue au centre d’Asile qui venait d’être incendié le matin même par des Néo Nazis. Ce fut peut – être un signe du destin qui voulait que je persévère malgré les difficultés et ce fut une chance d’être arrivée après.Pendant quinze jours j’ai du dormir dehors, à la belle étoile, dans les buissons où les femmes allemandes faisaient faire leur besoins à leur chien et nous n’étions pas nourris. J’ai perdu 17 kilos et n’avais plus la force que j’avais avant de partir. A ce moment, on se dit que l’on est plus rien, moins qu’un animal, on est un objet, un phénomène de cirque. Je n’avais jamais baissé les bras avant alors je ne comptais pas commencer maintenant.
Un jour j’ai voulu aller dans un magasin « Aldi » pour demander à manger mais on m’a mise dehors. Alors après neuf mois dans ce centre je suis allée vers un autre centre de réfugiés à cause des Néo Nazis. Dans ce centre j’apprenais l’allemand pendant mes journées et je recevais 200 euros pour m’acheter de la nourriture que l’on cuisinait au centre.Je n’ai jamais profité de ma première paie car j’ai été volée et ensuite battue par des gens de même origine que moi, ce qui me blessa plus profondément, je pensais qu’on se soutiendrais. Cet événement m’a donné la rage et l’envie d’apprendre l’allemand. Je ne pouvais pas me laisser faire ni me laisser marcher sur les pieds. Je voulais montrer que j’existais et que tout le monde avait le droit de vivre normalement et d’être respectée. Au bout de trois mois d’apprentissage, je savais parler allemand et me faisais comprendre. Grâce à cela, j’ai pu travailler comme traductrice au staff du centre et être payée 0.80 cents par heure. On nous proposait aussi de décharger du charbon et d’être payés 0.10 cents de l’heure.Grâce à cela je pouvais téléphoner à ma famille deux fois par mois.
Cela faisait un bout de temps que je suis dans ce centre, seule et sans amis avec les Néo Nazis qui faisaient leurs descentes quotidiennes dans le seul but de nous faire souffrir. Après quelques mois, un couple de Yougoslaves et leur bébé de six mois sont arrivés au centre. J’ai fait leur connaissance et nous avons décidé de partir vers un pays francophone car je connaissais le français. Après quelques discussions, nous avons choisi d’aller en Belgique. Mon aventure continuait et je changeais à nouveau de pays. Plus je partais loin et plus j’étais rassurée.A la frontière belge, nous n’avons pas vu de douaniers, les routes étaient désertes mais bien éclairées.En roulant sur l’autoroute j’ai pu apercevoir quelques panneaux indiquant : « Wallonie, Terre d’Accueil » ou encore « Autoroute du Soleil ». En lisant ces mots, j’ai retrouvé le sourire et la force d’aller vers l’avant et de continuer cette aventure. Pour une personne comme moi, exilée, ce genre de mots fait chaud au cœur.
Après quelques heures de route, nous sommes arrivés dans les Ardennes et nous nous sommes dirigés vers le centre de réfugiés de Rochefort où la famille de Yougoslave est restée. Pendant tout ce temps je n’ai pu avoir des nouvelles de ma famille et je ressentais un terrible manque de ne pas les voir. Quelques jours après mon arrivée en Belgique, des témoins de Jéhovah sont venus me proposer leur aide et m’ont donné une chambre.Malgré leur gentillesse et leur prosélytisme, je n’ai jamais changé de religion et je ne suis jamais entrée dans leur «secte ». Ils m’ont fait visiter les environs et m’ont présenté dans une boulangerie où j’ai travaillé les jours suivants.
14 Novembre 1994 En Novembre de cette année, mon mari a demandé le divorce , je me demandais pourquoi, c’est pourquoi je décidai de retourner en Roumanie pour avoir des explications. Et donc, dans les semaines qui suivirent, je suis retournée en Roumanie. Je n’ai eu aucun problème aux douanes. J’ai été hébergée par mon ancienne professeur de chimie et j’ai pu avoir mes explications. Il a divorcé parce qu’il avait peur des représailles et parce que sa mère avait insisté. Pour cela je ne pouvais lui en vouloir, je le comprenais mais j’étais horriblement triste. Quand j’étais là-bas, mon ex belle-mère m’a refusé la visite de mes enfants, j’étais tout près d’eux et je ne pouvais pas les voir, cela me faisait souffrir peut-être plus que les mois passés en Allemagne.
Et donc, dans les semaines qui suivirent, je suis retournée en Roumanie. Je n’ai eu aucun problème pour les douanes. J’ai été hébergé par mon ancienne professeur de chimie et j’ai peu avoir mes explications. Il a divorcé parce qu’il avait peur des représailles et parce que sa mère avait insisté. Pour cela je ne pouvais lui en vouloir, je le comprenait mais j’étais horriblement triste. Quand j’étais là-bas, mon ex belle-mère a refusé que je voie mes enfants, j’étais tout près d’eux et je ne pouvais pas les voir, cela me faisait souffrir peut-être plus que les mois passés en Allemagne.En Novembre de cette année là, mon mari a demandé le divorce , je me demandais pourquoi, c’est pourquoi je décida de retourner en Roumanie pour avoir des explications.Et donc, dans les semaines qui suivirent, je suis retournée en Roumanie. Je n’ai eu aucun problème pour les douanes. J’ai été hébergé par mon ancienne professeur de chimie et j’ai peu avoir mes explications. Il a divorcé parce qu’il avait peur des représailles et parce que sa mère avait insisté.
28 Janvier 1994 Pour revenir j’ai été obligée de me cacher dans un sac dans le coffre d’une voiture. J’ai eu l’impression d’être traitée comme une marchandise, un objet, sans respect de l’être humain. Acquérir le respect des gens est quelque chose que je voudrais avoir. Après ce trajet, je suis revenue travailler à la boulangerie et en même temps pendant quinze jours je travaillais comme « Madame pipi » sur les autoroutes. Ma vie commençait à suivre un chemin et à prendre forme. Je ne suis plus à la rue, sans abris et seule contre le monde qui nous entoure. Je redécouvre en quelques sortes la vie avec bien – sûr les bons jours comme les mauvais.Le bonheur frappe à ma porte. C’est à ce moment que j’ai rencontré un homme avec lequel je me suis mariée et j’ai eu un enfant.En complément de mes autres professions je suis devenue vendeuse chez « Kerby ». Ensuite j’ai déposé ma candidature pour être traductrice jurée et celle – ci a été acceptée.
Me voilà maintenant avec plusieurs professions, je me suis prouvée à moi-même et aux autres que je peux faire quelque chose, que je peux y arriver même si je suis exilée. En gardant courage j’y suis arrivée. Ca n’a pas été facile, il y a eu plusieurs moments de doutes, des grandes tristesses mais la persévérance a gagné. Pendant trois ans et demi, j’ai travaillé au commissariat des réfugiés de Huy et au tribunal de Huy. Aujourd’hui en 2003, je travaille dans une boulangerie à Hannut. De plus, mes enfants sont venus me rejoindre en Belgique et nous vivons notre vie unis et heureux. On mérite bien cela après tout.
Si je pouvais résumer mon aventure en quelques mots je le dirais comme ceci : Je viens de Roumanie,Je suis une réfugiée, exiléeet je ne demande qu’à être acceptée dans la société. Pour en arriver où je suis actuellement,J’ai du parcourir des centaines de kilomètres, seule à mes dépens. J’ai dû faire preuve de courage et de persévérance,Je n’ai jamais baissé les bras et j’ai toujours continué à y croire, J’ai cru en l’espoir. Je n’ai pas eu la vie facile,Beaucoup de larmes ont coulé, jamais je ne vais oublier que cette aventure fait partie de mon passé.Comme moi, vous pouvez croire à vos rêves ; toujours aller de l’avant et voir la vie comme un enfant même si elle ne commence qu’à 40 ans.Je dédie ce livre à tous ceux qui ont vécu le même calvaire et aux autres, pour qu’ils sachent ce que c’est de devoir se cacher, de vivre en exclue, d’ être rejeté de tous juste parce qu’on a osé dire la vérité, on a osé parler dans un pays qui ne l’accepte pas.Quand on a vécu ce que j’ai vécu, la vie n’est jamais plus la même, elle nous semble différente, peut-être plus facile à surmonter.