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IX ème rencontres de pharmacologie sociale Toulouse le 21 novembre 2007. L’expertise en santé publique : travaux pratiques appliqués au médicament. Peut-on définir une expertise en santé publique ?. La santé publique est-elle autre chose que la somme de santés individuelles ?
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IXème rencontres de pharmacologie sociale Toulouse le 21 novembre 2007 L’expertise en santé publique : travaux pratiques appliqués au médicament
Peut-on définir une expertise en santé publique ? • La santé publique est-elle autre chose que la somme de santés individuelles ? • Une décision de santé publique peut-elle se substituer à une volonté individuelle ? • Ces notions sont-elles spécifiques à la santé, ou s’intègrent-elles dans le cadre général de la relation entre l’action publique et l’action privée (donc entre les droits et les devoirs de la collectivité et de l’individu) ?
Les références constitutionnelles de 1789 • Article 4 : La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi • Article 5 : La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas
Intérêt du groupe Le ressenti Risque ressenti Bénéfices ressentis L’humain La vie plus longue La contrainte La solidarité Intérêt individuel Le réel Risque réel Bénéfices réels L’argent La vie plus heureuse La liberté La sélection Les oppositions réductrices
L’obésité est-elle un problème de santé publique ? Quelle place pour le médicament ?
L’intervention des médias • Promotion dangereuse de la minceur qui est en réalité une maigreur • Promotion de la grosse heureuse et bien dans sa peau (rarement d’un gros ! rarement en train de monter un escalier après 40 ans) • Promotion de régimes absurdes et dangereux • Promotion du médicament comme solution • Promotion d’une notion de liberté individuelle s’opposant à des concepts liberticides et « hygiénistes » visant à vouloir assurer le bonheur des humains par des comportements imposés.
Un exemple : la promotion du Sibutral • Dépêche AFP (Philippe Coste) 10 mai 2001 • « à quelques semaines des départs vers les plages, un nouveau médicament agissant sur la sensation de satiété pour faire maigrir les obèses va faire son apparition sur le marché européen, promettant de connaître un formidable succès public et de faire un « carton commercial » • « même si le laboratoire allemand Knoll Pharmacutical qui l’a développée insiste sur le fait qu’elle est strictement destinée aux obèses et ne doit pas être utilisée pour perdre quelques rondeurs, la sibutramine – qui sera commercialisée en France le 21 mai sous le nom de Sibutral - fera probablement l’objet d’une demande bien plus large »
La réaction de la revue « Prescrire » • « exercer avec rigueur le métier de journaliste grand public est difficile. Les pressions sont multiples. Le temps manque pour vérifier les sources, pour comparer les avis, pour approfondir les dossiers. La facilité immédiate conduit alors à s’en remettre aux autres, à renoncer aux vérifications nécessaires » • « les journalistes les moins rigoureux ou les plus complaisants vont transcrire les dires des leaders d’opinion dûment appointés, voire recopier ou paraphraser les dossiers de presse bien ficelés, diffusés directement par les firmes»
Suite de l’article de « Prescrire » • « d’autres vont utiliser les dépêches d’agences, de l’AFP notamment. Pour beaucoup de journalistes et de lecteurs à travers eux, ces agences constituent une source d’information sûre, sérieuse, digne de confiance car bien informée » • « l’actualité du médicament fait partie des sujets difficiles à traiter … or dans ce domaine l’AFP n’est pas fiable. Certaines de ses dépêches ressemblent à s’y méprendre à de la publicité rédactionnelle »
Plainte du journaliste de l’AFP devant le TGI de Paris. • Assignation le 21 septembre 2001 • Audience du 3 mars 2003 • Jugement le 25 septembre 2003 • L’association « mieux prescrire » et Patrick Di Maria sont condamnés. • 4 500 € de dommages et intérêts • Publication judiciaire • Prescrire fait appel • Le journaliste ne maintient pas sa plainte
Extraits du jugement(qui finalement n’existe plus, faute de possibilité d’appel par Prescrire) • « Attendu que le fait pour le demandeur de présenter l’arrivée de la Sibutramine sur le marché européen comme la promesse d’un formidable succès public et l’augure d’un carton commercial, tout aussi contestable qu’il soit dans l’effet d’annonce et de recherche du sensationnalisme qu’il révèle, n’entache pas d’erreur ses propos et n’est pas de nature à remettre en cause la loyauté et l’objectivité de l’information contenue dans sa dépêche »
Jugement (suite) • « Attendu que cette circonstance – incontestablement sujette à critique, si on la rapporte à l’exploitation du marché de l’obésité sévissant de toutes parts – ne permettait pas davantage au journaliste de la revue Prescrire d’employer les termes dont il a usés à l’endroit de Philippe Coste, qu’il traite de bonimenteur tout azimut et de colporteur de fausses nouvelles, censé agir dans un contexte de marché de dupes où scintillent des miroirs aux alouettes, ces expressions étant toutes manifestement excessives et destinées à lui nuire »
Recherche Google (17 nov 2007) • sibutramine Médicaments et remèdes - Produits de santé et de beauté - Faites votre shopping discount en ligne sur BizRate.fr - bons prix et bons plans sur ...fr.bizrate.com/medicaments_remedes/search__keyword--sibutramine.html - 143k - • Reductil (Sibutramine) • Reductil augmente sans risque le niveau de sérotonine et catécholamine dans le cerveau. Sérotonine et catécholamine sont deux produits chimiques qui affectent l'humeur, le sommeil et l'appétit. Quand le niveau de sérotonine et catécholamine augmente, votre appétit diminue ce qui vous aide à suivre un régime diététique
Un nouvel épisode : l’acomplia • Médicament destiné à traiter l’obésité développé par Sanofi • Action « originale » sur le système endocannabinoïde • Juillet 2007 : refus de mise sur le marché américain (débat sur le risque de dépression et de suicide) • Novembre 2007 : mise en œuvre d’une « class action » d’investisseurs prétendant que le laboratoire à dissimulé ce risque. • Commercialisé actuellement dans 21 pays dont la France.
Les composantes du problème • La notion « d’obésité problème individuel » devient indéfendable face à une situation évolutive • Nous sommes confrontés à une épidémie d’obésité qui indique l’intervention de facteurs externes à l’individu • Cette épidémie est observée dans tous les pays industrialisés associant : • Une réduction de l’activité physique • L’adoption d’une forme d’alimentation inadaptée
L’abord « santé publique » impose : • La documentation des faits • Des actions en population générale • Action sur la publicité • Information nutritionnelle • Promotion de l’activité physique • L’identification des personnes en danger • Mise en œuvre du dépistage • Prise en charge avec des moyens adaptés
Documenter les variations (âge, sexe, contexte familial, social…)
Définir et conduire les actions adaptées • Interdiction de la publicité pour tous les produits industriels (produits associant plusieurs composants élémentaires) • Information complète • Identification des enfants en surpoids et de leurs établissements scolaires • Aide aux familles (réunions, cours de cuisine) • Aide aux établissements scolaires (gymnases, moyens supplémentaires en EPS)
Le « combat » devient proche de la lutte contre le tabagisme • BMJ 26/06/2004 : Tobacco and obesity epidemics : not so different after all ?
Mêmes références sociétales opposées • Guy Barret : le Figaro 5 août 2004 « De telles lois, célébrées comme un triomphe de la vertu sanitaire sur les appétits déréglés, consacrent en réalité la ruine de la morale individuelle, comme de ceux qui sont chargés de l’enseigner, par la parole et par l’exemple »
Mêmes ambiguïtés politiques • Commentaires du Canard Enchaîné sur le renoncement du gouvernement à interdire certaines publicités alimentaires : « Douste et les lobbies ont fait maigrir la loi sur l’obésité », • Commentaires de l’association des agences conseils en communication : « c’est toute l’intelligence du Ministre de la santé que d’avoir compris le rôle que les publicitaires pouvaient jouer dans cette politique de prévention »
Quelle hiérarchie pour les choix thérapeutiques ? • Modifications des habitudes alimentaires • Modifications de l’activité physique • Aides psychologiques • Médicaments ? • Anneaux gastriques ?? • Chirurgie ???
Santé publique et promotion du médicament • Rapport critique de l’inspection générale des affaires sociales sur l’action des visiteurs médicaux auprès des médecins généralistes : coût par médecin 25 000 € soit 39% du revenu moyen net d’un généraliste (64 000 €) • Réponse de Christian Lajoux (les entreprises du médicament) : « Quand au coût de la visite médicale, au cœur de la critique du rapport de l’IGAS, il est l’affaire des industriels »
Les données du problème • 15000 visiteurs médicaux en 1988 • 17500 en 1998 • 23 250 actuellement • La majorité des médecins disent accorder une valeur supérieure aux données du Vidal et de la HAS • Le conflit est évident entre l’intérêt de santé publique et l’intérêt du visiteur médical qui présente un produit • Le coût d’une telle démarche est inévitablement intégrée dans les coûts industriels globaux donc dans le prix du médicament
Rappel d’un rapport passé • Rapport de santé publique de 1988 (à l’origine notamment de la loi Evin sur la protection des non fumeurs qui va être appliquée en janvier prochain !) • Il mettait en question l’intérêt de la visite médicale et de la publicité dans les revues médicales
Un constat et une proposition extraits du rapport de 1988 disponible sur :www.securite-sanitaire.org
Recommandations de l’IGAS • « faire de la HAS l'émetteur unique d'information sur le bon usage du médicament » car « aujourd'hui, la faiblesse de l'information publique laisse libre cours à la promotion commerciale ». • « confier à l'HAS la définition et la mise en oeuvre d'une stratégie de promotion publique des bonnes pratiques de prescription », car « la recommandation de bonne pratique intègre les critères de la supériorité clinique d'une nouvelle molécule et son insertion dans les stratégies thérapeutiques ».
Quelles bases pour permettre d’atteindre de tels objectifs ? • Peut-on envisager la reconversion des visiteurs médicaux ? • Quelles tâches ? • Quelle prise en charge ? • Peut-on supprimer la publicité dans les revues médicales ? • Quel manque à gagner pour les revues ? • Quelles compensations ?
Réforme de la visite médicale • Interrompre le recrutement de visiteurs médicaux et évaluer le taux de renouvellement actuel de ces visiteurs • Fixer un nombre maximal de visites annuelles en tenant compte du nombre de produits commercialisés et de la décroissance constatée des effectifs • Faire l’inventaire des niveaux d’études et des compétences des personnels concernés • Développer des activités de reconversion financées par la sécurité sociale et se situant des cadres sanitaires où le déficit de personnel est évident : • assistants de recherche clinique participant aux évaluations de médicaments commercialisés ou en cours d’essais • dépistage et suivi du surpoids dans tous les établissements scolaires
Réforme de la publicité pour des médicaments dans les publications destinées aux médecins • Etablir un bilan précis des montants pour la période récente, par revue et par laboratoire • Programmer une régression progressive des recettes publicitaires (% annuel) • Assurer aux publications des ressources supplémentaires : • abonnements se rapprochant progressivement des coûts de production • obligation d’un nombre minimal d’abonnements payants pour un médecin • Éventuel soutien financier public, comme cela a été le cas lors du lancement de Prescrire
Une problématique éternelle • Sommes nous capables d’atteindre un équilibre entre la conservation de l’état de santé (prévention) et son rétablissement (soins) ? • Sommes nous capables d’atteindre un équilibre entre l’article 4 et l’article 5 de la déclaration des droits de l’homme ? • Sommes nous capables d’équilibrer le désir et le besoin ? • Sommes nous capables d’équilibrer l’espoir et la réalité ?
Quelle « dose » de rationalité peut-on faire absorber à un monde profondément ambigu ? • Exemple de décisions « rationnelles » : juillet 1973 – port obligatoire de la ceinture de sécurité et limitation de la vitesse
23 nov 2007 : comité restreint de sécurité routière • Nous savons que les progrès de 2003/2006 ont été obtenus par la réduction de la vitesse moyenne de circulation • Le choix sera-t-il de poursuivre cette réduction qui a de multiples avantages ? • Diminution du risque • Diminution de la production de co2 • Diminution du déséquilibre de notre balance des paiements
Le retour à la crédibilité du dispositif de contrôle et de sanctions
conclusions • Les problèmes du médicament sont ceux de la société • Absence de maitrise des produits et des objets nouveaux • Soumission aux méthodes de la publicité • Envahissement quantitatif • Vision partielle et partiale des problèmes • La séduction remplace la raison • Soumission aux pouvoir économique