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Conférence LEEM Paris, Janvier 2007. Les laboratoires face aux génériques : quelques aspects antitrust Emmanuel Combe Université de Paris 1, ESCP* * Les opinions émises dans le présent document n’engagent en aucune manière les institutions auxquelles l’auteur appartient.
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Conférence LEEM Paris, Janvier 2007 Les laboratoires face aux génériques : quelques aspects antitrust Emmanuel Combe Université de Paris 1, ESCP* *Les opinions émises dans le présent document n’engagent en aucune manière les institutions auxquelles l’auteur appartient
Enjeu pour les laboratoires Nouveau contexte concurrentiel et réglementaire favorable aux génériques Les laboratoires font face à une pression concurrentielle accrue pour rentabiliser leur R&D durant la période d’exclusivité (brevet + CCP) et pour optimiser l’exploitation commerciale d’un médicament sur le marché post-brevet - Quelles stratégies des laboratoires face à la « menace » générique ? - Quelle licéité de ces stratégies au regard de l’antitrust ?
Une typologie des stratégies (1) • Renforcer l’inertie de la demande médicament = « bien de confiance » attachement des patients (et des médecins) à la marque accroître les coûts de changement (« switching cost ») de médicament par le marketing • Réduire la taille du marché génériquable - Switch de la demande vers un produit de deuxième génération (Prozac Weekly) … lancé sur le marché avant l’expiration du premier brevet (cf. Inexium lancé avant expiration du brevet sur le Mopral) - Stratégie de « prolifération de produits » par le recours aux extensions de gamme (Augmentin de GSK : commercialisé en France …sous 7 formes différentes)
Une typologie des stratégies (2) • Conquérir de nouveaux débouchés Transfert du médicament vers le marché OTC (Tagamet de Smith Kline) … pour bénéficier d’un an d’exclusivité • Contrôler le marché générique Lancement d’un « générique propre » dans un timing très précis (cas du Macrobid de P&G) • Retarder la date d’entrée des génériqueurs sur le marché Système du « reverse payment » • Allonger la durée légale de protection Etendre la période d’exclusivité commerciale (brevets additionnels, CCP, exclusivité des données)
Les stratégies face à l’antitrust • Ces stratégies ont un objet et/ou un effet anti-concurrentiel mais …elles restent souvent difficiles à évaluer/corriger : - tenir compte du bénéfice pour les consommateurs (cf. médicament de seconde génération ou stratégie de «prolifération des produits ») - tenir compte de l’incitation à innover (rôle des brevets) • Pourtant, dans plusieurs affaires récentes, l’antitrust a estimé que ces stratégies enfreignaient les règles de concurrence relatives : - à l’abus de position dominante - aux ententes entre firmes
Abus du cadre réglementaire (1) • Abus du système brevetaire (Etats-Unis) : - Recours (via une licence exclusive) à des brevets peu fondés (Biovail/Andrx) - Enchaînement de plusieurs périodes de suspension face à un entrant générique (USA), en mobilisant des brevets auxiliaires (BMS/Mylan) rôle essentiel du «30 Month stay » • Cet abus peut être toutefois minoré par une réforme adéquate de la réglementation une seule période de suspension désormais aux Etats-Unis (depuis 2003)
Abus du cadre réglementaire (2) • Retrait du marché du produit de référence (UE) AstraZeneca : demande d’annulation d’AMM sur le Losec dans 3 pays européens (NB : réforme récente de la législation communautaire pour éviter cette stratégie) • Manipulation de dossiers pour l’obtention d’un CPP : AstraZeneca aurait communiqué des informations erronées sur la date d’obtention de l’AMM sur le Losec … afin d’obtenir un CPP
Abus par des remises liées • Les remises liées (médicament protégé par un brevet + médicaments concurrencés par des génériques) peuvent être abusives si : pas de justification objective + le laboratoire est en position dominante sur le marché du médicament sous brevet • En France, affaire Sandoz (03-D-35) sur la ciclosporine (Sandimmum et Néoral) : remise de gamme si l’hôpital achète avec la ciclosporine sept autres spécialités, pour lesquels il existe des GENERIQUES Sandoz aurait voulu étendre son pouvoir de marché au-delà de ce que lui confère son brevet
Abus via un générique autorisé (1) • Une pratique fréquente aux USA : mise sur le marché par le laboratoire d’une version générique de son princeps, peu avant l’expiration de son brevet • Selon une étude IMS [2006], 27 cas de génériques propres (fin 2005), parfois sur des «blockbusters » (Zocor, Zoloft) • Un vif débat en 2006 entre PhrMA et les génériqueurs, sur la base de deux études empiriques contradictoires • Plusieurs décisions de justice récentes …et une proposition de loi
Abus via un générique autorisé (2) • Thèse de PhRMA : impact favorable des génériques propres sur la concurrence, sur la base d’une étude confiée à IMS [2006] • Premier argument (empirique) : concurrence accrue pendant la période d’exclusivité des 180 jours (différentiel entre le rabais de prix avec GA et le rabais sans GA estimé à 16% … sur la base de prix de gros) • Second argument (empirique) : le différentiel de prix perdure au-delà de la période d’exclusivité, lorsque le marché comprend moins de 6 génériques
Abus via un générique autorisé (3) Riposte des génériqueurs, sur la base d’une étude conduite par Hollis & Liang [2006] • lorsque l’on raisonne sur des prix de détail (et non de gros), le différentiel de rabais n’est plus que de 5% • le lancement d’un générique propre conduit le laboratoire à augmenter plus fortement le prix de son princeps (que sur les marchés sans GA) le différentiel de rabais résulte moins d’une baisse du prix des génériques que d’une hausse du prix du princeps ! • Quel effet à long terme sur l’incitation d’un génériqueur à entrer sur le marché avant l’expiration du brevet ?
Abus via un générique autorisé (4) Plusieurs décisions de justice récentes • Affaire Teva : rejet de la requête de Teva demandant l’interdiction du lancement d’un générique propre (au motif que la FDA n’a pas les compétences pour refuser l’agrément d’un générique propre) • Affaire du Macrobid : l’exclusivité de Mylan (génériqueur) est valable uniquement vis-à-vis des autres génériqueurs et non vis-à-vis du laboratoire (Procter & Gamble) Vers une reconnaissance de la licéité des génériques autorisés durant la période d’exclusivité ?
Abus via un générique autorisé (5) En dépit de ces jugements favorables aux génériques autorisés, le débat économique et politique n’est pas clos : • La FTC a engagé une vaste étude empirique sur les effets concurrentiels à court/long terme des génériques propres qui sera publiée .. en 2007 • Un projet d’amendement, soutenu par la FTC a été déposé en Juillet 2006 par le sénateur Rockfeller : il propose d’interdire le lancement de génériques propres pendant la période d’exclusivité des 180 jours
Accord de report d’entrée (1) • Une pratique fréquente … aux Etats-Unis 14 accords recensés par la FTC [2002] ; affaire récente du Plavix • Un cas de figure standard : - litige sur un brevet : le génériqueur tente d’invalider le brevet sur un princeps - les deux parties règlent à l’amiable leur différend : accord sur une date de mise sur le marché du générique et versement d’une somme au génériqueur - aucun autre génériqueur ne peut rentrer sur le marché à cause du report de la période d’exclusivité • Condamnation per se ou règle de raison ?
Accord de report d’entrée (2) • Accord de report d’entrée = entente horizontale ayant pour objet et/ou effet de bloquer l’entrée d’autres génériqueurs (via l’exclusivité de marché de 180 jours) section 1 du Sherman Act • Plusieurs décisions d’interdiction per se : - Abbott/Geneva Pharmaceutical sur l’Hytrin (USDC SD Florida, 2000) - HMR/Andrx sur le Cardizem CD (Sixth Circuit en 2003, confirmée par Cour Suprême en 2005) - Schering Plough/Upsher Smith sur le K-Dur (FTC, 2003)
Accord de report d’entrée (3) • Thèse de la FTC (affaire K-Dur) : paiement = illicite per se • Supposons que les probabilités de gagner le procès sont symétriques (50/50) l’espérance du délai d’attente est donc égale à la moitié du laps de temps compris entre le verdict et l’expiration du brevet = « date consensuelle » • Si les deux parties sont neutres au risque, elles vont s’accorder sur cette date consensuelle (sans paiement) si le laboratoire verse un paiement au génériqueur, c’est pour fixer une date d’entrée postérieure à cette « date consensuelle » illicite !
Accord de report d’entrée (4) Accord Date « con- sensuelle » Expiration du brevet 2005 LITIGE €€€ 2000 2010 Plainte pour violation du brevet Versement d’un paiement Date d’entrée convenue Date du verdict Hypothèse : NEUTRALITE AU RISQUE DES DEUX PARTIES
Accord de report d’entrée (5) • La décision de la FTC (2003) dans l’affaire du K-Dur a été annulée par la Cour d’Appel du 11ème Circuit (2005) • Argumentation : si le laboratoire est averse au risque, il peut s’entendre avec le génériqueur pour fixer avec certitude la date d’entrée, même si cette dernière est antérieure à la « date consensuelle » un paiement ne signifie pas nécessairement une volonté de reporter l’entrée au delà de la « date consensuelle » le paiement ne serait pas condamnable per se
Accord de report d’entrée (6) Accord Date « con- sensuelle » Expiration du brevet LITIGE €€€ 2000 2005 2010 Plainte pour violation du brevet Date du verdict Date d’entrée convenue Versement d’un paiement Hypothèse : AVERSION AU RISQUE DU LABORATOIRE
Accord de report d’entrée (7) • Dans l’affaire Bayer/Barr (sur le Cipro), la Cour (2003) a appliqué la règle de raison • Argumentation : - en cas de verdict favorable au génériqueur, ce dernier rentre sur le marché / dans le cas contraire, il ne perd rien (excepté les coûts juridiques) - en cas de verdict favorable au génériqueur, le princeps perd son exclusivité / dans le cas contraire, il ne peut espérer des dommages puisque le générique n’a pas été encore commercialisé Le paiement exprime cette asymétrie du risque
Accord de report d’entrée (8) • Argumentation : Tant que la présomption de validité du brevet est maintenue, le laboratoire a le droit de protéger son invention l’exclusion d’éventuels concurrents est « légitime », y compris au moyen d’un paiement • Plusieurs décisions fondées sur cet argumentation : - Annulation en appel (2004) de la décision Abbott/Geneva sur l’Hytrin - Rejet de plainte de consommateurs dans l’affaire Zeneca/Barr sur le Tamoxifen (2003) - Décision dans l’affaire Bayer/Barr sur le Cipro