L’émergence du capitalisme Une esquisse théorico-historique

1. L’émergence du capitalisme Une esquisse théorico-historique

2. Introduction

3. La critique radicale du capitalisme en vue de son dépassement exige une insistance sur son historicité, donc sur son histoire : sa vie, sa mort prochaine, mais aussi sa naissance, son émergence.

4. Le capitalisme n’a rien d’anhistorique, d’éternel, de naturel.Sinon, il n’y aurait plus d’histoire. « Si « travail » est un concept d’anthropologie générale, utilisable également en tous temps et en tous lieux, alors il y n’a pas d’histoire, et l’on peut même se demander si l’histoire a encore un sens. » Alain Guerreau

5. La majorité des historiens souffre d’une définition anhistoricisante du capitalisme, par négligence de son historicité. « Faisons table rase de toute l’historiographie parce que nous traitons des étrangers comme des semblables, sous prétexte qu’ils sont nos ancêtres. » Bartolomé Clavero

6. Complète remise en cause de l’historiographie de l’émergence du capitalisme, qui alignait anachronismes historico-centristes et rétroprojections conceptuellesan-historicisantes.

7. Une réévaluationhistoriographique réellement historisante de l’émergence du capitalisme est donc nécessaire, sous forme d’une esquisse théorico-historique.

8. Mais cette réévaluation rigoureuse de l’histoire de l’émergence du capitalisme ne serait possible sans l’appareilconceptuel développé par MoishePostone, Robert Kurz, Anselm Jappe …

9. I) L’hypothèse de l’émergence du capitalisme en Europe Continentale à l’époque moderne II) L’hypothèse de l’émergence du capitalisme en Angleterre à l’époque moderne

10. I) L’hypothèse de l’émergence du capitalisme en Europe Continentale à l’époque moderne La thèse du « big-bang capitaliste » en Europe continentale à l’époque moderne (Robert Kurz) La thèse du « Long Moyen Âge » en Europe continentale : l’exemple de l’Ancien Régime (Jean-Yves Grenier & Alain Guerreau)

11. Bibliographie Le big-bang capitaliste Robert Kurz, Le boom de la modernité Geoffrey Parker, La révolution militaire L’Ancien Régime A. Guerreau à propos de L’économie d’Ancien Régime de J.-Y. Grenier L’économie d’Ancien Régime de J.-Y. Grenier

12. 1) La thèse du « big-bang capitaliste » en Europe continentale à l’époque moderne (Robert Kurz)

13. L’invention des armes à feu provoque une course aux armements et une rupture dans l’ordresocial : naissance d’une gigantesque « machine militaire hors-sol », centralisée, dominatrice, destructrice et insatiable.

14. Cette machine antisociale fonctionnant grâce au « nihilisme de l’argent » (extorqué par l’impôt) et aux mercenaires (« tueurs professionnels »), cela entraîne l’essor du travail abstrait et de l’argent.

15. « Nous, on se fiche bien De l’Empire romain. Qu’il meure aujourd’hui ou demain, ça ne nous fait ni chaud ni froid. (…) Pourvu qu’on nous donne du blé.»(Chanson de mercenaires)

16. « L’ « économie politique » des institutions militaires » hors-sol, conclue Kurz, « devint indépendante de ses objectifs initiaux », donnant naissance à l’« économie hors-sol », c’est-à-dire au capitalisme.

17. 2) La thèse du « Long Moyen Âge » en Europe continentale : l’exemple de l’Ancien Régime (Jean-Yves Grenier & Alain Guerreau)

18. L’Ancien Régime, première puissance militaire européenne au 18ème siècle : un exemple de choix pour vérifier l’hypothèse de Kurz.

19. Jean-Yves Grenier s’interroge sur l’existence éventuelle d’un « équivalent général » au 18ème siècle en France. « Il est impossible de parler avec réalisme de valeur (…) au milieu du XVIIIe siècle » A. Guerreau

20. Le travail abstrait n’existe pas sous l’Ancien Régime : il n’existe pas de marché du travailou de salariat de masse (rapports féodaux), pas de production capitaliste des paysans ou des artisans (majorité des Français).

21. Jacques Le Goff, Le Moyen Âge et l’argent : « Le système féodal a été profondément pénétré par l’usage de monnaie (…) [mais] cela n’a pas fondé un monde autonome qui serait celui de l’argent »

22. L’échange est asymétrique, simple traduction des rapports de domination féodaux. Il n’existe pas de marché de masseou d’offre et de demande globale. Pas de marchandisation des produits échangés.

23. Les paysans visent l’autosuffisance. Les « bourgeois » veulent devenir des aristocrates rentiers. Minimisation du temps d’activité des journaliers et des artisans.

24. Minimisation du temps d’activité des journaliers et des artisans. Enfin, pas de véritable recherche de maximisation des revenus. L’Ancien Régime reste précapitaliste, pas proto-capitaliste.

25. La thèse de Kurz est magistrale, rigoureuse conceptuellement, avec des apports historiographiques importants. Changements profonds à l’époquemoderne, négligés par A. Guerreau et Jean-Yves Grenier

26. La sphère militaire proto-capitaliste aurait effectivement pu entraîner l’émergence du capitalisme si elle avait mis à bas l’agriculture paysanne et l’essentiel des structures féodales.

27. Mais cette machine militaire hors-sol est restée cantonnée à son domaine. Kurz a sous-estimé l’inertie des structures sociales médiévales. L’Ancien Régime n’était pas capitaliste.

28. Les mutations de l’époque moderne n’impliquent pas l’émergence du capitalisme, puisqu’il n’y a pas constitution d’une médiation-automate autonomisée totalisatrice, d’un système métaphysique réel.

29. L’Europecontinentale est encore non-capitaliste au 18ème siècle ; en Angleterre, l’émergencedu capitalisme aurait-elle déjà commencé ?

30. II) L’hypothèse de l’émergence du capitalisme en Angleterre à l’époque moderne L’émergence du capitalisme en Angleterre à l’époque moderne L’émergence du capitalisme : une esquisse théorico-historique

31. Bibliographie L’émergence du capitalisme E. M. Wood, L’origine du capitalisme Karl Marx, Le Capital, Livre 1, Huitième section E. P. Thompson, La formation de la classe ouvrière anglaise

32. 1) L’émergence du capitalisme en Angleterre à l’époque moderne

33. La thèse d’E. M. Wood est celle de l’émergence du capitalisme dans un seul pays, en Angleterre. Une thèse classique, peu rigoureuse conceptuellement, sans réel apport historiographique, mais efficace.

34. Puissants seigneurs-propriétaires déféodalisés, ayant une volonté d’hégémonie sur commerce précapitaliste, dans une Angleterre centralisée, initient un processus d’émergence du capitalisme.

35. Expropriations, enclosures, abolition des droits coutumiers : disparition paysannerie anglaise. Augmentation productivité agricole (essor démographique), marché national intégré.

36. Les sans-terre doivent consommer : débouché de l’agriculture commerciale ; en retour, sans-terre sont contraints de travailler, d’abord comme travailleurs indépendants, puis comme ouvriers.

37. L’industrialisation (surtout à partir de 1830) marque un point de quasi non-retour, avec une prolétarisationmassive des sans-terre et une destruction quasi-complète des modes de vie non-capitalistes.

38. Le cas anglais, un récapitulatif chronologique

39. « Le processus d’industrialisation se déroula avec une violence exceptionnelle en Grande-Bretagne» : expropriations, misère, destruction des modes de vivre, workhouses et exploitation sans bornes.

40. Le processus d’émergence du capitalisme ailleurs : entre héritage (cas étasunien), importation (cas allemand, français ou japonais) et « développement » (cas des ex-colonies. Une esquisse chronologique.

41. 2) L’émergence du capitalisme : une esquisse théorico-historique

42. L’émergence du capitalisme n’est possible que par une transformation radicale des structures sociales au fondement même des sociétés précapitalistes (agriculture paysanne).

43. Une « volonté de capitalisme », l’importance du facteur subjectif : différence entre intellectuels britanniques et français au 18ème siècle.

44. Le modèle théorique de l’émergence du capitalisme : à partir d’une configuration précapitaliste, par codétermination, dynamique progressive d’émergence du capitalisme.

45. Triomphe des obstacles objectifs Triomphe des obstacles subjectifs Triomphe des obstacles objectifs Triomphe des obstacles subjectifs Triomphe des obstacles objectifs Triomphe des obstacles subjectifs

46. Conclusion : Le capitalisme a émergé avec violence en Angleterre à l’époquemoderne, puis ailleursaux 19ème-20ème siècles.