370 likes | 704 Views
Psycholinguistique : Question de développement Leçon 2 : Le développement des habiletés de production du langage. Plan. Introduction L’émergence du babillage canonique à 6mois Théorie motrice Mc Neilage & Davis : oscillation mandibulaire
E N D
Psycholinguistique : Question de développementLeçon 2 : Le développement des habiletés de production du langage
Plan • Introduction • L’émergence du babillage canonique à 6mois • Théorie motrice Mc Neilage & Davis : oscillation mandibulaire • Comment le babillage est influencé par la langue en acquisition : De Boysson-Bardies • Théorie linguistique : Pettito : le babillage en langue des signes
Le langage articulé • Le langage articulé s’est inscrit dans le patrimoine génétique entre Homo habilis et Homo sapiens. L’appareil physique permettant la parole articulée a évalué avec la station debout, qui a permis l’émergence du tube « coudé » : augmentation de la possibilité de produire des sons nouveaux et d’en accroître le rythme et le contrôle (+ accroissement du volume cérébral).
Le conduit vocal du nouveau-né (voir Transparent) • Lorsqu’on parle, il faut coordonner un ensemble de muscles (mouvements du larynx, de la glotte, du voile du palais, de la mâchoire, des lèvres, de la langue, plus de 100 muscles) pour avoir un débit de 15 phonèmes par seconde • Le bébé humain, riche en potentialités d’écoute, doit traverser une longue période de maturation, ex-utero, avant de pouvoir produire qqs vocalisations • Le conduit vocal du nouveau-né ne permet pas de produire des sons articulés car il ressemble à celui des primates non-humains • Pinker : « Le larynx monte comme un périscope et s’engage dans le passage nasal, forçant l’enfant à respirer par le nez et rendant possible pour lui de respirer et boire en même temps ». Le pharynx du nourrisson est proportionnellement plus court que celui de l’adulte, sa cavité orale est plus grande; la masse de la langue est située plus en avant, remplit la bouche, ce qui limite sa possibilité de mouvement.
Darwin, La Descendance de l’homme (1871) • « Comme l’observe l’un des fondateurs de la noble science de la philologie, le langage est un art, au même titre que l’art de fabriquer de la bière ou du pain; il me semble toutefois que l’écriture eût été un terme de comparaison bien plus convenable. Le langage n’est certainement pas un instinct dans le sens propre du mot, car tout langage doit être appris. Il diffère beaucoup, cependant, de tous les arts ordinaires en ce que l’homme a une tendance instinctive à parler comme nous le prouve le babillage des jeunes enfants, tandis qu’aucun enfant n’a de tendance instinctive à brasser, à faire du pain, ou à écrire. «
Introduction :le babillage est-il pré-linguistique ou fait-il partie du développement du langage ? • Selon la vision structuraliste de Jakobson (1941), le babillage constitue une période pré-linguistique, séparée (par un temps de silence) de la période à laquelle le bb acquiert réellement les structures sonores de sa langue. • Pendant le stade prélinguistique du babillage, l’enfant va produire une variété de sons qui ne coexistent dans aucun langage • « A child during his babbling period can accumulate articulations which are never found within a single language or even a group of languages – consonants of any place of articulation, palatized and rounded consonants, sibilants, affricates, clicks, diphtongs, etc. According to the findings of Gregoire (1937), the child at the height of his babbling period « is capable of producing all conceivable sounds» (Jakobson, 1941, 21) • Le bbé acquiert les patrons sonores de ses premiers mots sur base d’unités de phonologie formelle, les traits distinctifs, indépendantes du contexte (Jakobson, 1968)
Lenneberg (1967: The biological foundation of language) soutient que les enfants sourds commencent à babiller au même âge que les entendants, alors qu’ils ne produisent pas des mots au même âge. Mais les études ultérieures ont montré que le babillage oral est fortement retardé chez les enfants sourds (Stoel Gammon & Otomo, 1986; Oller & Eilers, 1988) • Bb trachéotomisés durant la période de babillage et des premiers mots mettent plusieurs mois à acquérir la parole normale après arrêt de la trachéotomie, en dépit de leur expérience auditive normale (Locke & Pearson, 1990) • Les bbs continuent à babiller même après avoir produit leurs premiers mots • Les caractéristiques phonétiques des premiers mots sont en continuité avec les patrons prévalents dans le babillage des enfants • Diversité des sons dans le babillage : les 12 consonnes les plus fréquentes rendent compte de 95% des consonnes produites par les bbs (et les 12 consonnes moins fréquentes apparaissent dans 5% des productions) • L’existence d’un babillage en langue des signes par les enfants sourds et les enfants entendants de parents sourds (Petitto et al., 1991, 1993) suggère que le babillage est un passage nécessaire de l’acquisition du langage • Il semble qu’une audition normale et un accès normal aux tentatives de vocalisation soit nécessaire dans les stades précoces de l’acquisition de la parole
Les changements développementaux dans le babillage (1) • Les vocalisations avant 6 mois : voyelles isolées + nasalisation, coups de glotte … voir DDB, pp. 51-54 • À partir de 6 mois, babillage canonique ou (reduplicated babbling); pas de caractère référentiel • L’enfant produit des séquences de syllabes composée d’une consonne plosive combinée à une voyelle centrale « bababa » « papapa » (interprété par les parents !) • composée d’un noyau : voyelle pleine, tractus vocal ouvert et beaucoup d’énergie, et de marges : consonnes, tractus vocal contracté, et d’une transition de formant entre le noyau et les marges • à chaque voyelle correspond une syllabe • durée : entre 100 et 500 msec • Progression linéaire jusqu’à l’âge de 10 mois, indépendamment du milieu socio-économique, mono- ou bi-linguisme • le plus souvent : labiales et dentales /p, b, t, d, m, n/ ; parfois : vélaires /g, k/ : plus de 80% des consonnes en début de babillage • combinées avec /a/, /o/, /ae/ ; les autres voyelles sont relativement rares dans les productions ; peu de syllabes fermées • Suites répétititves de syllabes : /ba, ba, ba/, /dae dae dae/, /be be be/ • Ex : production du bébé de 8 mois (Grégoire) : /pa pa/, /ta ta ta/, /de de de / /emawma/, /aba abwou/, /go agou ga/, /go agé eka/ • Suites VCV fréquentes : /aba/, /aedae/, /éka/ • Syllabes fermées : rares : /dat/, /bam/
Développement (2) • 9-10 mois : Babillage « panaché » (variegated) devient ensuite plus complexe, et se rapproche des syllabes de la langue native : alternance de segments consonantiques plutôt que réduplication • la proportion augmente considérablement entre 12 et 14 mois lorsque l’enfant produit une variété de consonnes sur un patron intonatoire de la phrase; la production des mots commence et l’enfant essaye d’imiter un grand nombre de patrons intonatoires différents : sorte de laboratoire où s’effectue une préparation à la production des sons de la langue avec leur spécificité articulatoire (DBB, 67) • Changements dans les voyelles : /i/ et /u/ (voyelles fermées) sont les plus difficiles à prononcer à cause de la configuration du tractus vocal
Rôle de la motricité dans le babillage (MacNeilage & Davis, 1995, 2000) • Théorie « Frame/Content » d’évolution de la parole : rôle central de l’alternance consonne-voyelle, s’explique par le mouvement simple d’ouverture et de fermeture de la mâchoire • les consonnes et les voyelles requièrent des mouvements mandibulaires incompatibles: conduit ouvert pendant la phonation : voyelles; conduit vocal relativement fermé : consonnes • Oscillation mandibulaire fournirait le « cadre » (« frame ») articulatoire, dont le contenu (« content ») serit donné par les mouvements de la langue • Well made -> Mel Wade • Add hoc -> odd hack • Et jamais de permutation entre consonnes et voyelles (no-> own) • Perspective darwinienne, neurobiologique • L’oscillation mandibulaire pour la parole a un précurseur (il y a 200 millions d’années) sous la forme d’oscillations mandibulaire pour des buts d’ingestion (mastiquer, sucer, lécher); ce comportement a été utilisé pour la communication visuo-spatiale chez les primates pré-humains et finalement associé à la phonation pour former les protosyllabes chez les hominidés
Les préférences de co-occurrences Consonne-Voyelle reflètent une contrainte sur la capacité des bbs à changer le point d’articulation pendant la syllabe • Fig. 1 MacNeilage & Davies (2000) • C alvéolaires avec V antérieures (CORONAL-FRONT): /dé, dé, dé/ • C vélaires avec V postérieures (DORSAL-BACK): /go, go, go/ • C labiales avec V centrales (LABIAL-CENTRAL) : /ba, ba, ba/ • « Fronted Frames » & « Backed Frames » : la position antérieure ou postérieure de la langue est adoptée avant l’oscillation de la mandibule, et maintenue pendant toute la durée de la production (essayez les différentes combinaisons /go/, /ga/ , /gé/, /do/, /da/, /dé/, et vous verrez !); contrainte contre des mouvements extrêmes de la langue. ILLUSTR • « Pure Frame » : la fermeture de la bouche aux lèvres est produite par un mouvement passif, et la voyelle centrale résulte de la position de repos de la langue pendant la phase d’ouverture : le babillage rédupliqué est obtenu par simple oscillation de la mandibule surimposée à la vibration des cordes vocales • Les consonnes présentes dans le babillage sont celles qu’on retrouve dans le plus de langues (FIG « Infant babble, child speech, and languages »)
Le frame (cadre de la parole) serait sous contrôle de l’aire motrice supplémentaire, partie d’un système « intrinsèque » spécialisé pour l’activité auto-générée (input : gyrus cingulaire antérieur, qui fonctionne comme un système d’attention exécutive) Cf Leborgne, 1er patient de Broca: ‘tantan’ : automatismes de parole qui subsiste chez certains patients aphasiques
Cortex ventral prémoteur, partie d’un système « extrinsèque » spécialisé pour les réponses motrices à une stimulation externe Site de contrôle des processus d’ingestion Fournit le frame avec un contenu, en termes de consonnes et voyelles
Le quatrième patron : LVC, ou LC • Tendance à commencer un mot avec une consonne plosive labiale, et, après la voyelle, à produire une consonne plosive dentale : LvC > CvL • Les enfants produisent même ce patron lorsqu’ils essayent de produire l’inverse : « pot » pour « top », « miw » pour « wim » • Le patron LC est la première tentative systématique vers une différentiation intersyllabique des « frames », vers une non-répétition des consonnes et des voyelles dans les syllabes successives • Les bbs commencent par une action « facile » (bilabiale) • L’effet LC est présent dans 9 langues sur les 10 étudiées, et significatif dans 8 langues (moyenne du rapport séquences LC sur CL : 2.23)
Frame/Content : Conclusions • Selon MacNeilage & Davis, le franchissement du Rubicon pour adopter la vraie parole n’est PAS le résultat d’un changement génétique soudain, mais le produit d’un développement à deux stades. • Le premier stade = emprunt par nos ancêtres hominidés de simples propriétés biomécaniques du système, le « frame », avec des configurations statiques de la langue • Ensuite, augmentation de la complexité sérielle intersyllabique grâce au patron LC, résultant de l’interaction auto-organisée de contraintes biomécaniques d’initiation du mouvement (placement de la langue et des lèvres) et de la cognition culturelle (influence de l’environnement)
Hypothèse d’une interaction précoce entre l’équipement biologique des enfants et l’expérience avec la langue parlée des parents • le « chasseur de babillage » adulte peut détecter un accent dès l’âge de 8 mois, càd identifier parmi différents échantillons ceux appartenant à des enfants de leur propre communauté linguistique • Paires d’échantillons de babillage d’enfants de 8 mois, français, arabes cantonais : choix (quel est, parmi deux, le babillage du bébé français?) correct à plus de 70% • Caractéristiques rythmiques, contours d’intonation, type de phonation, reflètent des caractéristiques de la langue dès l’âge de 8 mois
Comparaison inter-langues de la production des voyelles (de Boysson-Bardies et al, 1989) • Chaque langue a son propre espace vocalique : le nombre de voyelles varie d’une langue à l’autre (de 3 à 16) • Comparaison de bébés français, anglais, cantonais, algérien • Anglais : plus de voyelles antérieures /i/(see), /I/(sit) /ae/(apple) • Français : plus de voyelles arrondies : /oe/ (fleur), / /(deux) • Cantonais : voyelles postérieures / /(mort), /a/ (patte) • Algériens : trois voyelles centrales seulement • La distribution des voyelles apparaît bien différente pour les bbs des 4 groupes à 10 mois (voir Fig. 3) • Les anglais ont tendance à produire plus de voyelles antérieures /i/ /I/, tandis que les cantonais produisent davantage de voyelles postérieures /o/ • Comparaison du rapport F2/F1, qui diffère selon les langues (anglais : voyelles antérieures, plus diffuses; cantonais : voyelles postérieures, plus compactes) : courbes parallèles chez les bébés et les adultes • Conclusion : il existe chez les bbs une représentation de l’espace vocalique qui leur permet de produire les voyelles en fonction des caractéristiques des voyelles perçues • (cf leçon 1 : sensibilité des bbs aux voyelles prototypiques de leur langue)
Comparaison inter-langues de la production des consonnes (DBB) • Enregistrement des bbs français, américains, japonais, suédois de dix mois (0 mots) à 16-19 mois (25 mots); analyse de la distribution des consonnes en fonction du lieu d’articulation (labiales, dentales, vélaires) et selon le mode (plosives, fricatives, nasales, liquides) • Tendances générales universelles liées à la physiologie de l’appareil articulatoire • Pourcentage important des consonnes labiales et dentales • Prépondérance des occlusives • Rareté des fricatives et des liquides /l/ et /r/ • Dès l’âge de 10 mois,les bbs français produisent plus de labiales que les bbs japonais ou suédois : les bbs de 10mois ont déjà sélectionné un répertoire de consonnes qui reflète la composition du répertoire de la langue de l’environnement • La distribution des consonnes ne change pas fondamentalement entre le babillage et les premiers mots, mais l’enfant revient à des productions plus simples (davantage de bilabiales et d’occlusives, moins de fricatives) pour les premiers mots, car élaboration d’un programme moteur spécifique est contraignante • Cf harmonie consonantique dans les premières productions de certains mots : « guck » pour « duck » (cf Méthodes examen du langage oral)
Universalité du patron CVCV ? Les bébés nigérians parlant le yoruba (encore à propos de MacNeilage …)DBB, 1992 • La proportion de mots bisyllabiques CVCV où C1 et C2 sont de réelles consonnes (ou semi-voyelles) est significativement moindre en yoruba • Français 79.3% • Anglais 66.7% • Suédois 78.0% • Yoruba 38.0% • en yoruba le patron VCV est largement prédominant pour les noms. Le patron nominal semble perceptivement et cognitivement plus important que tout autre pour l’adaptation sélective des enfants au langage. Les enfants yoruba produisent 62% de leurs disyllabes VCV
Etude comparative des associations CV dans les productions bisyllabiques (Table 5) • C labiale + V centrale : observé en français, mais pas en anglais (C labiale + voyelle front) ni en suédois (voyelles back); les patrons correspondent aux caractéristiques du langage cible (calculées sur les mots que les enfants tentent de prononcer) • C dentale + V antérieure : observé en français, anglais, suédois pour C1, et seulement en anglais pour C2; les associations « non prédites » (français : C2 dentale – V arrière) sont observées dans les mots de référence • C vélaire : les associations observées ne correspondent pas au modèle de MacNeilage
Modèle de sélection (De Boysson-Bardies) • Entre 9 et 12 mois, l’interaction entre perception et performances motrices permet aux enfants d’organiser leur babillage • On voit que les bbs « se désintéressent » au niveau perceptif des sons qui n’appartiennent pas au système phonologique de leur langue • Au même moment, ils s’orientent vers la production de voyelles, consonnes et syllabes fréquentes de leur langue • Le stockage pré-phonologique des voyelles (à 10 mois) serait un peu plus précoce que celui des consonnes (entre 11 et 17 mois)
Développement du babillage et spécialisation hémisphérique (J. Locke) • Aire supra=motrice (cf patient de Broca tan tan tan) • Existence d’un mécanisme commun dans le cortex périsylvien gauche qui contrôle les mouvements rythmés de la main et le tractus vocal • Connexions dendritiques plus importantes entre les aires manuelles et vocales-motrices de l’hémisphère gauche que dans les aires homologues de l’hémisphère droit • Les enfants attrapent plus facilement les objets posés à leur droite (à distance équivalente) • Au début du babillage, augmentation des contacts/approches mains droite – objets • Au même âge, augmentation de l’activité rythmique manuelle et préférence pour les jouets qui font du bruit
J. Locke, Bekken, McMinn-Larson & Wein (1995) : Emergent control of manual and vocal-motor activity in relation to the development of speech • Groupes 1 & 2 : Pre-babbilleurs (4-5 mois) • Groupes 3 – 6 : babilleurs (6 à 9 mois) • Hochet audible et silencieux placés à la gauche et droite de chaque enfant • On évalue le temps pour prendre le jouet, le nombre de mouvements, et le nombre de mouvements par secondes • Augmentation radicale du nombre de mouvement manuels de la main droite avec l’émergence du babillage (Groupe 3); un peu plus quand le jouet est audible
Interprétations • au cours de la seconde moitié de la première année, l’hémisphère gauche prend le contrôle de l’activité « speechlike » • Le babillage = convergence fonctionnelle entre le contrôle moteur et les systèmes de feedback sensoriels • Petit effet de l’audibilité : explique que les enfants sourds ne commencent à babiller que beaucoup plus tard
Oller et al. • Jusqu’à l’âge de 5-6 mois, les bébés sourds congénitaux vocalisent comme les bébés entendants • À 7 mois, les vocalisations des bébés sourds diminuent, et les bébés ne produisent pas de babillage canonique • Après un an, les bébés sourds commencent à produire un babillage canonique, surtout constitué de bilabiales (visibles)
Les bébés sourds babillent-ils en langue des signes ? • Les bébés de milieux pratiquant la langue des signes sont plongés dans un bain de langage où les informations sont transmises par des gestes manuels et reçues visuellement • Malgré les différences entre les circuits de contrôle moteur des articulateurs manuels et oraux, les étapes de développement de la langue de signes sont similaires à celles des bébés entendants qui apprennent à parler • Les bbs sourds babillent manuellement vers l’âge de 8 mois; gestes assimilables aux syllabes du babillage de l’enfant entendant ? (Petitto, ) • Gestes articulatoires « gratuits », sans signification, évoquant des éléments sublexicaux de la structure des signes • Comment les distinguer des gestes non linguistiques que font tous les bébés ? • Rythme d’ouverture/fermeture de la main • Configurations particulières de la main • Gestes effectués dans un espacedélimité
Petitto & Marentette (1991) • Comparent le comportement gestuel de deux enfants sourds de parents sourds avec celui de trois enfants entendants de parents entendants filmés en vidéo à 10, 12 et 14 mois • Les enfants sourds et entendants ne diffèrent pas dans leur utilisation de gestes communicatifs ou référentiels • Les deux enfants sourds produisent plus de gestes « sign-like ». Un tel babillage manuel est aussi produit par les trois enfants entendants, mais à une fréquence moindre (20% de leur total d’output gestuel); le babillage manuel des enfants sourds est aussi plus varié que celui des enfants entendants , avec des configurations de la main plus diverses • Pour Petitto, le babillage manuel est l’expression de la « structure linguistique abstraite du langage » (et non le produit de comportements biologiques, cf MacNeilage)
Meier & Willerman (1995) • Comment définir qu’un geste est « sign-like » ? • Difficile de proposer des critères phonétiques • Le geste « sign-like » est produit dans l’espace du signeur • Le geste doit être reconnu comme une approximation de la forme adulte (rythmicité, configuration appartenant à l’ensemble de la LS) • Trois catégories • Gestes communicatifs et significatifs tels que pointer, atteindre, bouger, et gestes symboliques • Gestes qui sur la base de la forme ou de l’usage sont identifiés comme signes ASL • Gestes sans signification, non référentiels
Pas de différence majeure entre les trois sourds et les deux entendants dans la proportion de gestes non référentiels et communicatifs (voir Table 18.1) • Les gestes non référentiels des sourds contiennent davantage de répétitions que ceux des entendants (voir Fig. 18.1) : effet de l’environnement linguistique (LS vs LO)? • similitudes apparentes dans la forme et le développement du babillage manuel (activité manuelle cyclique) et vocal
Petitto et al (2004) • Critique de Meier et al : par manque de critère strict, le « babillage » observé n’est peut-être qu’une activité manuelle fondamentalement similaire à celle observée chez tous les bébés • La question-clé : l’activité manuelle rythmique des bbs exposés à la langue des signes et celle des bbs exposés au langage oral est-elle fondamentalement similaire ? • Deux groupes de bbs entendants filmés à 6, 10 et 12 mois • 3 bbs entendants exposés à la langue orale seulement • 3 bbs entendants de parents sourds, exposés systématiquement à la LS (et pas d’exposition systématique à la langue orale) • Enregistrement et calcul des mouvements par la technologie OPTOTRAK (indépendamment de l’analyse vidéo)
Enregistrement total de 2000 mouvements pour les 6 bbs aux trois prises • Un mouvement = toute activité manuelle impliquant un seul type de mouvement : ouverture/fermeture de la main; nouveau mouvement si un mouvement différent commence, par ex bouger la main pour dire « au revoir »; tous les mouvements impliquant des objets sont éliminés • Restent 1449 mouvements, dont 595 produits par le groupe exposé à la LS et 854 par le groupe exposé à la parole • On échantillonne 200 segments pour chaque « groupe », dont 151 à 6 mois, 37 à 10 mois et 12 à 12 mois • Analyse de la fréquence en Hz puis confrontation avec la bande vidéo • Transcription de la forme physique des mains des bébés en utilisant une sorte d’alphabet phonétique de la LS (configuration, forme, mouvement, orientation) • On ne retient que les mouvements produits en l’absence de référence et d’intention communicative apparente, et qui ne sont pas des tentatives de former un signe de la LS • Si le mouvement montre une organisation systématique, on examine s’ils ont des propriétés organisationnelles uniques ou s’ils partagent des propriétés formationnelles avec l’organisation phonétique et syllabique « commune à la langue signée et parlée » • Si une unité phonétique est identifiée, l’attribution du statut de « babillage manuel » à cette activité de la main respecte les critères utilisés pour attribuer le statut de babillage vocal aux vocalisations des EE
Méthodologie Petitto 2004 • Critères pour décider qu’un mouvement constitue du « babillage » • (i) être produit avec un sous-ensemble réduit d’unités combinatoires membres de l’inventaire phonétique de tous les langages naturels • (ii) démontrer une organisation syllabique qui n’existe que dans les langues naturelles • (iii) être produit sans signification ou référence • Une analyse de la localisation des mouvements est réalisée • « Espace signé » : entre les épaules du bb et la limite inférieure du sternum • « espace non-signé » : la tête jusqu’aux épaules, en-dessous du sternum jusqu’à la taille, …
Résultats de l’analyse Optotrak • Les deux groupes produisent des mouvements de haute fréquence (2.5-3.0 Hz: trois cycles complets par seconde): non-linguistique, activité d’excitation commune à tous les bébés de cet âge • Seul les 3 bbs sourds produisent une autre classe de mouvements, de faible fréquence, autour de 1 Hz : « babillage manuel », produit pour la plus grande partie dans l’espace du signeur (voir Table 3) • Les bbs entendants produisent 39% (78/200) mouvements de basse fréquence (1.58 Hz) et 61% (122/200) mouvements de haute fréquence, mais aucun des mouvements de basse fréquence ne peut être considéré comme du babillage et seulement 8% sont exécutés dans l’espace du signeur
Discussion • Selon Petitto, le cerveau humain posséderait une région spécialisée dans la détection de patrons spécifiques de l’input qui correspondent aux régularités grammaticales, rythmiques, des langues naturelles (voir Déf. Sens) • Les bbs sont sensibles à, découvrent, ces régularités dans leur environnement, et tentent de les reproduire
L’émergence du babillage est-il indépendant de la modalité langagière (vocale vs manuelle) ? • Selon MacNeilage (Approaches to the Evolution of Language, 1998) : NON • « While the vocal propensity for repetitive frame production results in a behaviour that forms a specific motor basis for the entire subsequent course of speech acquisition, the manual sequences do not provide such a basis for sign acquisition. Unlike speech, sign language does not have a single specific motor oscillation analogous to mandibular oscillation continually running through it. Thus whatever type of manual movement is repeatedly made during the sign babbling stage, it cannot form an actual motor basis for a sequence of signs » • « … my contention that the vocal-auditory modality of spoken language was the first and only output mechanism for language »
Mardi prochain … • Communication mère/enfant, précurseurs du langage, attention conjointe, turn-taking, pointage, le mamanais (motherese) … • Lecture : « L’univers communicatif du bébé » in DBB, Comment la parole vient aux enfants, pp. 87-114