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Histoire de la Guerre froide. Quatrième cours : la Détente (1953-1963). Quatrième cours : Détente I (1953-1963). 1 – Situation intérieure 2 – La Détente vue de Moscou 3 – Monsieur K en visite aux États-Unis 4 – La seconde crise de Berlin. 1 – Situation intérieure.
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Histoire de la Guerre froide Quatrième cours : la Détente (1953-1963)
Quatrième cours : Détente I(1953-1963) 1 – Situation intérieure 2 – La Détente vue de Moscou 3 – Monsieur K en visite aux États-Unis 4 – La seconde crise de Berlin
1 – Situation intérieure • La mort de Staline modifie la situation intérieure et extérieure de l’URSS, comme en fait foi la conclusion d’un cessez-le-feu en Corée quelques mois après la disparition de Staline. • De 1953 à 1956, les questions relatives à la politique étrangère sont peu importantes, les candidats à la succession étant occupés à se poignarder dans le dos. L’étranger n’est alors qu’un prétexte pour s’en prendre à ses adversaires. • Dans un premier temps, deux hommes dominèrent le pays : Malenkov et Beria. Dès le début avril, le premier est mis en demeure de choisir et d’abandonner l’un de ses postes. Il commet l’erreur d’abandonner celui de secrétaire général aux mains du numéro 2 du parti, Nikita Khrouchtchev.
Dès juin 1953, Khrouchtchev et Malenkov éliminent Beria. On lui reproche de vouloir mettre de l’avant une politique étrangère qui conduirait à l’affaiblissement de l’URSS, en tendant la main aux adversaires du pays : abandon de la RDA et rapprochement avec Tito. • De 1953 à 1956, le secrétaire général gruge les positions de ses adversaires. Mais devant son incapacité à faire tomber ses collègues, il tente un coup audacieux : lors du XXe congrès du PCUS, il donne lecture lors d’une séance à huis-clos d’un rapport secret sur Staline. Manœuvre de politique intérieure qui a cependant de lourdes conséquences au plan extérieur. • Dans ce rapport, Khrouchtchev attaque l’héritage stalinien : il critique le culte de Staline, sa responsabilité dans les désastres des premiers mois de la guerre, sa guerre mené contre le parti, sa politique de déportation en masse, sa suspicion et sa paranoïa, bref, presque tout y passe. Apparemment.
Mais pas tout : le rapport est très sélectif : s’il condamne les purges contre le parti, il ne souffle mot de celles qui ont décimé la population, ni celles contre les principaux opposants à Staline (Trotski, Zinoviev, etc.) • Il met l’accent sur les purges auxquelles ont participé ses adversaires, mais ne parle pas de la purge du parti ukrainien, qu’il a lui-même orchestrée. • En outre, s’il critique les gestes de Staline depuis 1934, il insiste sur les bienfaits de ses actions avant cette date et ne remet en question ni la collectivisation, ni l’industrialisation à marche forcée du pays. Bref, il ne touche pas à l’assise fondamentale du régime. • Malgré les blancs, les non-dits, les omissions volontaires et involontaires du rapport, c’est néanmoins une véritable révolution, qui va changer radicalement le cours du développement de l’URSS.
Qu’est ce qui pousse Khrouchtchev à présenter ce rapport ? On trouve dans l’historiographie deux interprétations. • La première est d’ordre pragmatique : le pouvoir de Khrouchtchev étant encore mal assis, il veut se servir de ce rapport, qui fait la part belle à ses propres méfaits et insiste sur ceux des autres, pour miner la position de ses adversaires. • Les mémoires de Khrouchtchev présentent un autre angle interprétatif : Khrouchtchev ne connaissait pas l’ampleur des « erreurs » de Staline. La révision des procès consécutives à la mort de Staline met les dirigeants devant l’énormité des crimes de Staline et les poussent à aller plus loin. • Khrouchtchev prend donc le risque d’entamer cette déstalinisation par en haut, plutôt que d’attendre, risque encore plus grand, que celle-ci ne s’impose d’en bas... • Le secret ne sera pas gardé longtemps : dès juin, le Département d’État américain publie une version du rapport.
La publication du rapport va provoquer la plus grave crise du mouvement communiste international depuis le pacte Ribbentrop-Molotov : en URSS et en Europe orientale, bien sûr, mais aussi dans les PC d’occident (le PCI surtout) et dans les rapports avec la Chine (c’est l’une des principales causes de la rupture sino-soviétique au début des années 60). • Dans l’immédiat, c’est aux frontières de l’URSS que les choses bougent. La dénonciation du stalinisme va entraîner l’explosion du mécontentement dans les démocraties populaires, surtout en Pologne et en Hongrie • En Pologne, la présence de Gomulka permit de sauver la situation, mais en Hongrie, les choses dégénèrent, malgré la tentative de répéter à Budapest l’expérience de Pologne : Nagy arrive trop tard et n’a pas une poigne assez solide pour contrôler la population. Il faudra l’intervention de l’Armée soviétique pour ramener le calme, au prix d’une hécatombe (entre 15 000 et 25 000 morts).
Une autre conséquence de la déstalinisation, sera plus tard au début des années 60 le divorce sino-soviétique. La fausseté de l’un des dogmes du léninisme, prétendant qu’il ne peut y avoir de conflit entre États socialistes, est alors démontrée. Les États-Unis en profiteront au début des années 70 (sous Nixon) pour enfoncer un coin entre les deux anciens alliés et il faudra attendre Gorbatchev pour que les ponts avec la RPC soient rétablis. • Ainsi, initiée pour répondre à des besoins de politiques intérieures, la remise en question va déborder rapidement et le secrétaire général ne pourra pas garder le contrôle. Avec la crise de Cuba, c’est dans cette politique aventuriste qu’il faut chercher les raisons de la mise à la retraite de Khrouchtchev en 1964.
2 – La Détente vue de Moscou • La « Détente » a-t-elle vraiment existé? Pour les Soviétiques, elle est réelle. Du moins le croient-ils en posant des gestes visant à désamorcer la crise, malgré tous les autres qui au contraire l’enveniment. • Du point de vue de l’historiographie russe et soviétique, cette détente existe bel et bien dans la mesure où au cours de cette période, il y a dialogue au sommet. • Cela ne veut pas dire que les conflits sont réglés, bien au contraire, mais tout au long de cette période (qui s’étendra au-delà), les ponts ne seront jamais rompus, malgré certaines initiatives agressives de part et d'autre, comme l’illustre bien le triangle Washington-La Havane-Moscou.
Les bouffées de chaleur et les reculades à de la direction soviétique au cours de la période tiennent beaucoup à la personnalité du secrétaire général, lequel est le moins que l’on puisse dire un homme instable. • Cela étant, ses harangues agressives et à l’inverse, sa main tendue après celles-ci, s’expliquent par le balancement de l’avantage stratégique au cours de la période. • À partir de 1957, soit depuis le lancement du spoutnik, Khrouchtchev se montre périodiquement très agressif, car il croit avoir l’avantage. Mais il ne veut pas la guerre. Personne d’ailleurs ne la veut, et c’est pourquoi il recule généralement rapidement lorsqu’il fait face à une opposition frontale. • En Europe, toutes les tentatives de conciliation entre les deux blocs achoppent sur le problème allemand. Mais au-delà de la question allemande, c’est celle du désarmement en Europe, mais aussi ailleurs, qui se pose.
Un exemple de l’ambivalence des deux camps : la question des essais nucléaires. Lors de la Conférence de Genève, en 1955, les Soviétiques vont ainsi proposer un moratoire sur les essais nucléaires. Ils reviendront plus tard sur ce thème, mais chaque fois les Occidentaux rejetteront la proposition. • Eux-mêmes vont proposer ce moratoire à quelques reprises, qui sera rejeté par les Soviétiques. En fait, la partie qui propose le moratoire le fait lorsqu’elle vient de terminer une série de tests et c’est la raison pour laquelle l’autre refuse, afin de pouvoir de son côté faire d’autres tests… • Mais le condominium américano-soviétique se met en place. Cela est manifeste par la crise des alliances (initiatives franco-britanniques à Suez pour les Américains ; crises de 1956 et de 1961 pour les Soviétiques), qui témoigne de la volonté des deux grands de s’entendre sur certaines questions de principe (maintien du statu quo, non-ingérence dans leurs sphères d’influence respectives, etc.) au détriment des « petits ».
La crise cubaine, où Moscou fera complètement abstraction de l’opinion de Castro après le déclenchement de la crise, est assez éloquente. Il n’y a pas de meilleure illustration de cette entente des Grands sur le dos des Petits que l’installation de la ligne de téléscripteur directe entre Moscou et Washington. Adversaires? Assurément. Partenaires? Tout autant.
3 – Monsieur K. en visite aux États-Unis • Du 15 au 27 septembre 1959 eut lieu la première visite officielle de l’histoire de hauts dirigeants soviétiques aux États-Unis. La délégation soviétique était menée par Nikita Khrouchtchev. • La question d’une rencontre au sommet fut soulevée dès le début de l’année 1959, lors d’une visite de Mikoïan, qui rencontra alors Eisenhower et Dulles. Cette visite avait été rendue nécessaire par la détérioration des relations bilatérales consécutivement à la position prise par la direction soviétique quant à la question allemande et berlinoise. • Mikoïan rentre en URSS avec une invitation officielle du gouvernement américain à l’endroit de la haute direction soviétique, afin de pouvoir discuter des questions qui fâchent.
La réaction initiale de la direction soviétique fut prudente, mais dès le début de l’été 1959, les deux parties étaient parvenues à s’entendre sur le principe d’une visite officielle. Les détails de la visite furent par la suite discutés entre Nixon et Kozlov au cours des mois de juin et juillet. • Khrouchtchev manifesta son désir de prendre la parole lors de la séance officielle d’ouverture de la session de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre. Ce désir entraîna un report de la visite dans la deuxième moitié de septembre. De même, la visite officielle en Chine dans le cadre des festivités soulignant le 10e anniversaire de l’arrivée au pouvoir du PCC fut reportée, ce que Mao n’apprécia guère. • L’événement suscita l’intérêt et la curiosité des médias internationaux. Près de 5 000 journalistes de partout à travers le monde couvrirent le voyage de monsieur K. aux États-Unis.
La délégation soviétique se prépara très sérieusement, afin de produire sur l’opinion internationale le meilleur effet possible et présenter l’essence de la politique étrangère soviétique : celle d’une superpuissance nucléaire, capable d’écraser tous ses adversaires, mais éprise de paix et désirant ardemment trouver des terrains d’entente sur les questions épineuses avec son partenaire-adversaire américain. • Au cours des 13 jours que dura la visita, Khrouchtchev s’entretint à plusieurs reprises avec Eisenhower, dont à deux reprises seul à seul. • La question allemande occupa une place importante dans les discussions. L’URSS était pressée de conclure des traités de paix avec les deux Allemagnes, mais menaçait, si les pourparlers s’enlisaient, de conclure avec la seule Allemagne de l’Est, ce qui risquait de poser problème aux forces occidentales stationnées à Berlin.
Eisenhower, tout en assurant son interlocuteur du fait que Washington ne voyait pas de problème à ce que Moscou conclut une entente avec la RDA, insista sur le fait que les troupes occidentales continueraient à stationner à Berlin-Ouest. • Les pourparlers concernant les relations commerciales n’aboutirent à rien et la délégation soviétique fut incapable d’avancer sur la question de l’annulation par le Congrès des sanctions commerciales frappant l’URSS, entre autres parce que la partie américaine insistait pour lier cette question à celle du paiement par Moscou de sa dette dans le cadre du Lend-Lease de la guerre (la somme que Moscou se disait prêt à payer étant jugé nettement insuffisante par Washington). • Les discussions concernant les relations sino-américaines n’aboutirent pas non plus. Les tentatives de la délégation soviétique d’infléchir la position de Washington suscitèrent une réaction aigüe de la part des Américains.
Le 18 septembre, Khrouchtchev prit la parole à l’ONU et présenta la proposition soviétique d’un désarmement général. Mais la délégation américaine accueillit cette proposition très fraîchement. Quant à la proposition visant à mettre fin aux essais nucléaires, les Américains la laissèrent sans réponse. • De nombreuses autres discussions restèrent sans résultat. À la proposition soviétique de conclure un accord, le Secrétaire d'État répondit que les questions consulaires intéressaient les États-Unis et que la possibilité de discussions sur un accord politique dépendrait du développement des relations. • Les nombreuses discussions concernant les échanges culturels, scientifiques et techniques se conclurent elles aussi sur des notes peu optimistes. • Lors de son séjour, Khrouchtchev visita diverses institutions, pris la parole à la télévision et lors de diverses rencontres avec des gens d’affaires à San Francisco, Pittsburgh et De Moine.
Dans tous les discours de Khrouchtchev, deux éléments revenaient constamment : la nécessité d’améliorer les relations soviéto-américaines et la croissance continue de la puissance économique et militaire de l’URSS. • Il fut contraint de répondre à des questions « provocatrices » (sur la crise hongroise, la déstalinisation, etc.) et de s’expliquer sur sa déclaration suivant laquelle, « Que cela vous plaise ou non, l’histoire est de notre côté. Nous vous enterrerons » faite en 1956 à des diplomates américains en visite au Kremlin. • Dans l’ensemble, il se tira assez bien de la situation et suscita même certains éloges de la part des diplomates et politiciens américains, qui le qualifièrent « d’excellent polémiste ». • Mais la visite n’apporta guère de résultat : sur la plupart des questions et des problèmes évoqués, les positions des deux parties ne purent s’approcher.
La rencontre au sommet sur la question allemande et la visite d’Eisenhower en URSS ne purent avoir lieu, suite à la détérioration des relations entre les deux pays, partiellement causée par l’affaire des vols de U2 au-dessus du territoire soviétique. • Malgré tout, cette première visite officielle d’un chef d’État soviétique aux États-Unis permis la remise en question de nombreux stéréotypes, de part et d'autre, et une meilleure compréhension mutuelle des populations américaines et soviétiques. • Surtout, elle fut la démonstration éclatante d’un changement de ton dans les relations entre les deux États et la consécration de la Détente.
4 – La seconde crise de Berlin • Le 13 août 1961, les forces armées de la RDA bloquèrent la frontière avec Berlin ouest. Les troupes soviétiques furent mises en état d'alerte. On commença la construction du mur de Berlin séparant l’ancienne zone soviétique d'occupation et Berlin ouest ; il devint le symbole visible du « rideau de fer » divisant le monde en deux camps hostiles. • La crise de Berlin a une longue histoire. En 1956 et 1957, après la normalisation des relations entre l'URSS et la RFA, le ministère des Affaires étrangères soviétique élabora l'idée d’une confédération germanique, comprenant la RFA et la RDA, qui aurait posé les bases d’une consolidation de la paix en Europe et de la réunification d’une Allemagne pacifiste.
La direction de la RDA ne s’objectait pas et l’idée rencontra un certain soutien aux États-Unis. Mais Bonn s'opposa et Adenauer imposa sa volonté à ses alliés de l'OTAN. • Des tentatives visant à régler le problème avaient été entreprises plus d’une fois. Il semble que la situation se soit mise à évoluer après la rencontre de Camp David en 1959. • Le président américain y reconnut que la situation à Berlin Ouest était « anormale » et exprima son accord de principe pour des négociations à ce sujet, mais après l'incident du U2, la rencontre fut annulée, et avec, la possibilité de conclure un traité de paix avec les deux États allemands. • Autre rencontre en 1961 à Vienne entre Khrouchtchev et Kennedy. Autre échec. • Khrouchtchev menaçait, dans l’impossibilité de parvenir à un accord avec les États-Unis, de conclure au plus tard en décembre 1961 un traité de paix avec la RDA.
Dans ce cas, Berlin-Ouest se retrouverait entouré de tous les côtés par la RDA et les accords concernant les couloirs de transport entre l'Allemagne occidentale et Berlin-Ouest seraient caducs : un nouveau blocus de Berlin pouvait survenir. • L'intérêt de l’URSS pour l'établissement d’une frontière entre les deux parties de Berlin était motivé par les demandes du gouvernement de la RDA, qui se plaignait que certains habitants de Berlin-Est travaillant dans des entreprises de la partie occidentale, recevaient un salaire en bundesmark et les échangeaient en mark de RDA à un cours spéculatif de 1 pour 4. Les produits d'alimentation à Berlin-Est étaient meilleur marché que ceux de Berlin-Ouest, ce qui avait des conséquences évidentes. • Et surtout, il y avait l'évasion des habitants de la RDA en RFA.
Les relations soviéto-américaines devinrent très tendues. Les Américains menacèrent d’utiliser les tanks pour briser le blocus de Berlin-Ouest si cela s’avérait nécessaire. • Mais une sortie fut trouvée. Dans la nuit du 12 au 13 août 1961, on bloqua la frontière entre les deux zones de Berlin et on commença à construire des barrages. Le statut de Berlin-Ouest ne changea pas. Le mur fut construit sur les terres de l'Allemagne de l'Est. • Khrouchtchev, en donnant à Ulbricht l’autorisation de fermer la frontière le mit en garde contre toutes actions touchant au territoire de Berlin-Ouest ou aux voies d'accès de la RFA. • Le mur de Berlin devint le symbole physique de « la guerre froide » et les deux superpuissances reconnurent ainsi la situation réelle qui mit fin au partage de la dernière ville européenne non partagée par les accords d'après-guerre.