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L’empowerment des personnes vivant avec une maladie chronique Détermination d’éléments invariants pour mieux comprendre ce que signifie l’empowerment dans les soins aux personnes âgées. Isabelle Aujoulat, PhD Unité d’éducation pour la santé et d’éducation du patient RESO,
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L’empowerment des personnes vivant avec une maladie chroniqueDétermination d’éléments invariants pour mieux comprendre ce que signifie l’empowerment dans les soins aux personnes âgées Isabelle Aujoulat, PhD Unité d’éducation pour la santé et d’éducation du patient RESO, Université Catholique de Louvain (Belgique) E-mail : isabelle.aujoulat@uclouvain.be
Empowerment • Processus de renforcement de la capacité qu’a une personne d’agir sur les déterminants de sa santé, en particulier lorsqu’elle est confrontée à des situations qui lui confèrent un sentiment d’impuissance (powerlessness). • processus salutogène, en réaction à une situation ou un sentiment d’impuissance (powerlessness). • Powerlessness: « croyance qu’un individu a qu’il ne peut pas atteindre par son propre comportement les objectifs qu’il poursuit » (Seeman, 1972) I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
L’empowerment : Un concept difficile à opérationnaliser • Empowerment comme finalité (outcome) : • Maîtrise d’un comportement ou sentiment de maîtrise ? • Transformation d’une situation initialement perçue comme aliénante ? • quels indicateurs précis ? • Empowerment comme processus: • renforcer sa capacité de décision et d’action… • par le renforcement de quelles aptitudes ? • Empowerment comme stratégie éducative : • conférer du pouvoir à autrui ou aider autrui à prendre du pouvoir par ses propres moyens… • quels objectifs éducatifs ? I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
L’empowerment dans la relation de soins(Revue de littérature) • Principes directeursde l’empowement =auto-détermination et responsabilité(philosophie humaniste) • Aboutissement souvent prédéfini en fonction d’une finalité de contrôle = auto-efficacité et auto-gestion (maladie, traitement, vie) • Empowerment défini comme un processus de changement de comportement • Contenus éducatifs: développement de compétences psychosociales générales (compétences « de vie » ; # compétences spécifiques en lien avec maladie et traitement) MAIS • Situation de « powerlessness » comme point de départ d’un processus d’empowerment n’est pas décrite (implicitement associée à incapacité de gérer son traitement) • Le point de vue du patient sur sa propre expérience de perte et reprise de pouvoir n’est pas exploré. Aujoulat, I., D’Hoore, W., & Deccache, A. (2007) A. Patient empowerment in theory and practice: polysemy or cacophony? A review. Patient Education and Counseling, 66(1), 13-20 I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Exploration de la signification de l’empowerment en tant qu’expérience vécue par des personnes vivant avec une maladie chronique Exploration de la signification du concept de « powerlessness » pour les personnes qui vivent avec une maladie chronique Exploration de la signification du concept de « empowerment » pour les personnes qui vivent avec une maladie chronique Articles: Aujoulat I, Luminet O, Deccache A.(2007) The perspective of patients on their experience of powerlessness. Qualitative Health Research, 17(6), 772-785 Aujoulat I, Marcolongo R, Bonadiman L, Deccache A. (2007)Reconsidering Patient empowerment in chronic illness: A critique of models of self-efficacy and bodily control.Social Science & Medicine, 66(5): 1228-1239
ECHANTILLON • Echantillon : • 40 patients • 16 maladies • Age moyen : 52 ans [23-75] • >65 ans, n=11 • >60 ans, n=18 • Principal critère d’échantillonnage : • Diversité maximale pour asseoir la validité des éléments invariants liés à l’expérience de maladie et à l’identité de malade. I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Eléments de méthode • Guide d’entretien : • Questions ouvertes • À partir des dimensions identifiées par les patients eux-mêmes comme importantes pour leur qualité de vie (cf évaluation subjective de la qualité de vie, Sei-QoL, O’Boyle et al. 1992) : • quelles difficultés rencontrées (changements encourus) du fait de la maladie ? • Quelles attitudes, stratégies, démarches de résolution des problèmes ? • Quelles ressources (personnelles et externes) ? • Méthodes d’analyseadaptées de la phénoménologie et de la Grounded Theory I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
P O W E R L E S S N E S S ? Quels sont les éléments invariants dans l’expérience de situations conduisant à un sentiment d’impuissance (powerlessness) ? E M P O W E R M E N T (processus) ? A partir de l’identification des éléments invariants définissant la situation de powerlessness, comment le processus d’empowerment se construit-il ? E M P O W E R M E N T (aboutissements) ? A partir de l’identification des éléments invariants définissant la situation de powerlessness, quelle est la signification du processus d’empowerment ? I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
RESULTATS (1) : Les éléments invariants intervenant dans les situations de powerlessness • Des incapacités et pertes de contrôle multiples, à l’origine d’unerupture du sentiment de sécurité. • Des changements de rôles sociaux et d’images de soi, à l’origine d’unerupture du sentiment d’identité, dans les 3 dimensions décrites par Tap, Tarquinio & Sordes-Ader (2002) : • Positivité de soi : image dévalorisée de soi et/ou de son corps ; expression de sentiments de honte et de culpabilité • Continuité : changements de rôles sociaux + modification de la perception du temps, induisant des sentiments de rupture par rapport au passé et une incertitude quant à l’avenir • Cohérence : interrogation générale sur le sens de la vie et sur le sens de SA vie marquée par la maladie I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
P O W E R L E S S N E S S IS intériorisée vs extériorisée ou reflétée par autrui IS avant la maladie vs depuis la maladie IS projetée : sois possibles… entre limites, peurs et désirs IS idéalisée vs soi réel Des objets de perte de contrôle multiples : • Corps • Maladie • Émotions (anxiété, détresse) • Vie et transmission de la vie • Environnement physique et relationnel • Temps • Finances • Etc. Perceptions corporelles et temporelles modifiées Questionnement existentiel Tensions ou écarts entre différentes images de soi (IS) Changements de rôles sociaux Image incertaine ou négative de soi Rupture du sentiment de continuité Rupture du sentiment de cohérence Rupture du sentiment d’identité Rupture du sentiment de sécurité I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Que nous enseigne l’expérience des patients à propos de l’empowerment ? (1) • Eléments invariants, à l’origine du sentiment d’impuissance (powerlessness) : • un sentiment d’insécurité • la rupture du sentiment d’identité (tension entre des images de soi conflictuelles et changements de rôles sociaux). • Composantes d’un processus d’empowerment ?… I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
RESULTATS (2) : les composantes d’un processus d’empowerment • Les éléments d’un processus d’empowerment, en réaction à la rupture des sentiments de sécurité et d’identité : • Attitudes et comportements de retrait social ou rapprochement / « étrangers », proches, soignants.. • Processus d’attachement/détachement répond aubesoin de sécurité • Attitudes et comportements de se forcer à maintenir anciens rôles sociaux et images de soi, chercher activement de l’information sur la maladie (devenir « expert » de sa maladie) • Processus de séparation soi/maladierépond aubesoin de maîtrise (contrôle) • Attitudes et comportements de lâcher prise(accepter ce qui n’est pas contrôlable), attribuer un sens à la maladie • Processus d’intégration soi/maladie répond aubesoin de cohérence I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
P O W E R L E S S N E S S Rupture du sentiment de sécurité Rupture du sentiment d’identité E M P O W E R M E N T (processus) Processus de séparation soi/maladie, Traduisant un besoin de maîtrise (« Agir, apprendre, se forcer ») Processus d’attachement/détachement Traduisant un besoin de sécurité (s’éloigner, se rapprocher) Processus d’intégration soi/maladie Traduisant un besoin de cohérence (« Lâcher prise ») I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Que nous enseigne l’expérience des patients à propos de l’empowerment ? (2) • À l’origine du sentiment d’impuissance (powerlessness) : • La rupture du sentiment de sécurité • la rupture du sentiment d’identité (tension entre des images de soi conflictuelles et changements de rôles sociaux). • Le processus d’empowerment a lieu si on observe : • des efforts de reprise de contrôle sur soi et sur la maladie/le traitement (connaissance, efficacité, maîtrise…) • Des attitudes de “lâcher prise”, c’est-à-dire l’acceptation que certains aspects de la situation demeurent hors du contrôle de l’individu. • Aboutissements possibles d’un processus d’empowerment ? I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
RESULTATS (3) : Les aboutissements d’un processus d’empowerment • Transformation personnelle : • La personne malade a le sentiment de savoir prendre soin d’elle et de sa santé, pas seulement de sa maladie et de son traitement • La personne malade a fait l’expérience de « devenir autrement le même» (Bensaïd, 1978) • Quelques indicateurs d’aboutissement d’un tel processus : • Maîtrise RELATIVE • Sentiment de cohérence • Expression d’unemodification de certaines valeurs et priorités • Capacité décisionnelle • Conscience de soi (limites, ressources, émotions)… • Etc. I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
P O W E R L E S S N E S S Rupture du sentiment d’identité Rupture du sentiment de sécurité E M P O W E R M E N T (processus) Processus de séparation soi/maladie, Traduisant un besoin de maîtrise (« Agir, apprendre, se forcer ») Processus d’attachement/détachement Traduisant un besoin de sécurité Processus d’intégration soi/maladie Traduisant un besoin de cohérence (« Lâcher prise ») E M P O W E R M E N T (aboutissements) Transformation personnelle : « Devenir autrement le même ! »: Maîtrise RELATIVE,Sentiment de cohérence, Expression changement de valeurs, Capacité décisionnelle, Conscience de soi (limites, ressources, émotions)… I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Que nous enseigne l’expérience des patients à propos de l’empowerment ? (3) • À l’origine du sentiment d’impuissance (powerlessness) : • un sentiment d’insécurité • la rupture du sentiment d’identité (tension entre des images de soi conflictuelles et changements de rôles sociaux). • Le processus d’empowerment a lieu si on observe : • des efforts de reprise de contrôle sur soi et sur la maladie/le traitement (connaissance, efficacité, maîtrise…) processus de séparation soi/maladie • Des attitudes de “lâcher prise”, c’est-à-dire l’acceptation que certains aspects de la situation demeurent hors du contrôle de l’individu processus d’intégration soi/maladie • Les aboutissements possibles d’un processus d’empowerment sont : • un sentiment d’identité réconciliée, au terme d’un processus de transformation personnelle • Sécurité, auto-détermination, auto-efficacité et cohérence I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
P O W E R L E S S N E S S Le pire, c’est qu’on a un sentiment d’impuissance, de ne plus être maître de sa propre vie, de sa propre existence… E M P O W E R M E N T (processus) Le contrôle, c'est surtout de ne pas me faire battre par la maladie. Je m’efforce de penser que je suis toujours cette personne-là, bien que j'aie cette maladie… que ce que j'ai à l'intérieur de moi est plus fort que la peur que j'ai de cette maladie ! E M P O W E R M E N T (aboutissements) Je ne suis pas une malade, je suis une personne qui a une maladie et c'est très différent ! Le monde est devenu plus petit pour moi. Mais de ce petit monde qui est le mien, je veux tirer le meilleur ! I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Autrement le même ! • Les personnes interrogées se sont exprimées à propos de l’empowerment dans le cadre de la relation à soi, à la maladie et aux autres ; • Il s’agit d’une expérience de transformation personnelle à partir de sentiments d’insécurité et de rupture identitaire ; • L’empowerment concerne l’être avant l’agir… “Etre malade, c’est changer. Mais changer, c’est tantôt être un autre, tantôt être autrement le même. Or, cesser d’être le même, c’est se perdre.” (N. Bensaïd, 1978) I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
L’empowerment des patients peut s’observer dans trois dimensions en interaction : • L’empowerment comportemental • L’empowerment relationnel • L’empowerment identitaire • Les outils de mesure actuels de l’empowerment réduisent le concept d’empowerment à sa dimension la plus visible –celle des comportements- et ne permettent pas suffisamment de prendre en compte la réalité que vivent les patients. • Ex. Anderson et al. 2000 – Diabetes empowerment scale : mesure du sentiment d’auto-efficacité (cf. Bandura, 1977) en rapport avec des comportements d’auto-gestion du diabète. I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Evolution de ma représentation du concept d’empowerment dans le cadre de la relation de soins I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Proposition de critères d’«observation» de l’empowerment chez les malades (et les soignants!?) • conscience de soiet des déterminants d’une situation « aliénante » (Freire, 1972), mais aussi conscience de ses ressources ! • sentiment de sécurité(Aujoulat, 2007) cf dimension de « relatedness » dans la théorie de l’auto-détermination (Deci & Ryan, 2000) et perception du soutien social (Bruchon-Schweitzer) • auto-détermination, dans le cadre de la relation de soins, par rapport à la définition des objectifs de santé et des moyens de les atteindre (cf. Deci & Ryan, 2000) • auto-efficacité (cf. Bandura, 1977 ; Anderson et al. 2000)par rapport à des objectifs auto-déterminés • attitude de lâcher prise(Aujoulat, 2007) Expression de changements de valeurs et de priorités, qui sont un indicateur de la mobilisation effective des ressources intrapsychiques selon Fischer et Tarquinio (2002) + concept de “déprise” (Clément & Mantovani, 1999) • sentiment de cohérence(Aujoulat, 2007) cf. Antonovsky (1993) : théorie de la salutogenèse, dimension de « meaningfulness ». I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09
Les déprises au cours du vieillissement... Les individus peuvent “ne pas avoir prise” sur certaines choses ou relations mais ils conservent soigneusement des registres d’intérêt qui leur tiennent à coeur. Dans ce sens, c’est pour mieux “tenir” d’un côté, qu’on “lâche” de l’autre. Les déprises successives permettent à la personne vieillissante de conserver l’identité qui lui tient à coeur. (...) Il est des manières de se définir en tant que vieille personne dépendante, qui rentrent dans une stratégie d’obtention d’aide, dans laquelle la personne ne cède pas véritablement une part de son autonomie d’acteur: on peut “ne rien faire” au nom d’un handicap, tout en agissant, dirigeant, contrôlant l’aide dont on bénéficie. (...) (On peut au contraire) décider de se placer sous la compétence et l’autorité d’un ou plusieurs tiers. Clément & Mantovani (1999). Gérontologie et Société, 90: 95-108 I. Aujoulat, UCL/RESO - Bruxelles Sept.09