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Prier avec Ste-Thérèse d’Avila. PRIER À LA MANIÈRE DU CARMEL. Pourquoi la Prière ?.
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Prier avec Ste-Thérèse d’Avila PRIER À LA MANIÈRE DU CARMEL
Pourquoi la Prière ? • La prière est notre réponse à l’invitation de Jésus d’entrer en relation personnelle et intime avec Lui Elle est un échange, un dialogue, un « élan du coeur». Tantôt formelle,tantôt spontanée, elle comporte aussi des moments de silence où Jésus parle à notre coeur. Nous prions pour être avec Jésus pour l’aimer, le louer, l’adorer, mais aussi pour l’écouter, pour qu’il libère en nous l’amour et nous conforme à Lui. La prière donne un sens à notre vie. Elle forme notre coeur, nous unifie et nous épanouit.
Qui prier? • Celui qui est l’Amour : DIEU. Il est venu parmi nous. Il t’aime personnellement. Des amis qui t’entourent de sollicitude, les saints et les saintes : Marie, Joseph, St Michel. Ils sont vivants! Tes Proches rendus à la maison du Père.
Quand tu veux prier … « Retire-toi dans ta chambre, ferme sur toi la porte » Mt 6,6 • Choisis un lieu : Un coin de prière, une église, un monastère. Choisis un temps et fixe la durée. Trouve une position appropriée, qui te convient. « Rassemble » ton coeur, recueille tout ton être sous la mouvance de l’Esprit Saint.
Les expressions de la vie de prière • La tradition chrétienne a retenu trois expressions majeures de la vie de prière. 1. La prière vocale par des paroles vocales, elle associe le corps à la prière intérieure du coeur. 2. La méditation recherche priante qui met en oeuvre la pensée, l’imagination, l’émotion, le désir. 3. L’oraison mentale regard de foi fixé sur Jésus, écoute de la Parole de Dieu, silencieux amour.
PRIER À LA MANIÈRE DU CARMEL • La prière de l’Église est bien présente au Carmel : l’Eucharistie, sommet de notre vie de prière, la prière des psaumes, l’adoration, les prières à Marie (chapelet, Angélus, litanies…), les invocations aux saints et saintes, et diverses formes de prières personnelles, toutes font partie de la prière camélitaine à des degrés variés selon notre état de vie et notre vocation. Cependant, la prière qui constitue la spécificité du Carmel et qui se retrouve dans toutes les vocations camélitaines, c’est l’oraison. « Sans l’oraison le Carmel ne serait rien. » Léon XIII
L’ORAISON • L’oraison n’est pas l’exclusivité du Carmel. Tout chrétien, de par son baptême, est appelé à rencontrer Jésus dans un coeur à coeur intime … dans l’oraison. Catéchisme | 2709 – 2719 Des guides sûrs Le Carmel a le privilège d’avoir des guides d’oraison sûrs, reconnus comme Maîtres et docteurs* des voies intérieures par l’Église universelle : Sainte Thérèse de Jésus (d’Avila) 1515-1582 et Saint Jean de la Croix 1542-1591 C’est à leur école que se sont formés tous ceux et celles qui vivent de la spiritualité du Carmel. Ils nous ont légué le fruit de leur vaste expérience de la vie de prière et de l’accompagnement spirituel dans des écrits* qui constituent une référence pour toute l’Église.
L’ORAISON suite Un exemple contemporain Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus de la Sainte Face (Lisieux) 1873-1897, déclarée 33e docteur de l’Église en 1997, nous enseigne comment être une âme d’oraison dans le quotidien d’une vie tout ordinaire, dans notre monde d’aujourd’hui. Sa doctrine de l’enfance spirituelle ou « petite voie » a inspiré plusieurs communautés nouvelles et elle nous est livrée dans ses écrits autobiographiques. • FAIRE ORAISON peut nous transformer et changer toute notre vie
L’ORAISON suite Il est reconnu que les personnes qui s’adonnent à une forme de méditation quelle qu’elle soit en retirent des bénéfices concrets dans leur vie de tous les jours. En un premier temps, elles deviennent plus calmes, plus sereines. Elles augmentent leurs capacités de concentration et leur maîtrise de soi. Mais la motivation profonde pour faire oraison se situe à un tout autre niveau : l’oraison est une rencontre intime avec Dieu. C’est là que se développe notre relation avec « Celui dont on se sait aimé. » C’est là que nous nous laissons transformer par l’Amour pour féconder l’Église, et toutes ses oeuvres.
L’ORAISON suite Comment s’y disposer Pour répondre à ces avances de Jésus, pour se livrer à l’action de son amour transformant, il n’est pas nécessaire d’être parfait. Le Seigneur nous acheminera lui-même à la perfection qu’il désire pour nous. Il suffit d’avoir un désir ordinaire de connaître et d’imiter Jésus dans tous les domaines de notre vie, et de prendre quelques petits moyens suggérés pour se disposer à cette rencontre quotidienne. Le Seigneur nous fera ensuite connaître ce qu’il attend de nous au fur et à mesure que nous progresserons sur ce chemin d’oraison. Pour avancer dans l’oraison il est avantageux de se choisir un guide spirituel.
LES PREMIÈRES ORAISONS « L’oraison mentale n’est à mon avis, qu’un commerce intime d’amitié où l’on s’entretient souvent seul à seul avec ce Dieu dont on se sait aimé. » Ste Thérèse d’Avila (Vie 7) La conception de l’oraison chez Ste Thérèse d’Avila D’emblée il faut constater que l’oraison est une réalité spirituelle complexe, difficile à saisir. Elle est de l’ordre de la foi et de l’expérience et varie selon les personnes. Pour Ste Thérèse, toute prière personnelle faite dans le silence où l’esprit et le coeur s’occupent directement de Dieu s’appelle oraison. Mais Ste Thérèse considérera aussi comme faisant partie de l’oraison toute prière vocale où l’esprit et le coeur s’occupent : *soit du sens des paroles prononcées, *soit directement de Dieu, sans référence aux paroles récitées. Chercher et demeurer dans la compagnie du Christ, telle est l’idée fondamentale que Thérèse se fait de l’oraison.
LE RECUEILLEMENT « Je tâchais autant que possible de vivre en gardant en moi la présence de Jésus-Christ, notre Bien et Seigneur et c’était là mon mode d’oraison. » (V4, 7) Le recueillement est la manière de prier qui a si bien réussi à Ste Thérèse dans les débuts. On peut y distinguer trois étapes : Se recueillir Réaliser en soi-même ou auprès de soi la présence vivante de Jésus S’entretenir intimement avec Lui. Se recueillir, qu’est-ce que c’est? C’est l’effort par lequel nous amenons nos sens et notre esprit à ne plus s’occuper du monde extérieur afin qu’ils se rendent disponibles pour entrer en contact direct avec Dieu.
Comment s’y disposer? Pour se recueillir, surtout dans les débuts, il convient de rechercher le silence et la solitude. Une fois les sens extérieurs apaisés, nous serons vite assaillis par un monde intérieur de pensées et de sentiments les plus divers. Que faire? Ste Thérèse nous conseille alors d’abandonner au Seigneur toutes ces pensées et ces sentiments en reconnaissant notre misère et notre condition de pécheur. Puis, elle nous demande de ne nous occuper que de Lui. Conseils de Thérèse : « Pour prier comme il convient, vous savez ce qu’on fait tout d’abord. On examine sa conscience, on se confesse à Dieu et on fait le signe de la Croix. » (C 26,1) « Aussitôt après, appliquez-vous à trouver une compagnie. Et quelle meilleure compagnie pouvez-vous trouver que celle du Seigneur. » (C 26,1) De la qualité de ce recueillement dépendra la qualité de l’oraison.
Cette forme de recueillement est acquise par nos propres moyens. Il ne s’agit pas ici du recueillement surnaturel dans lequel Dieu nous absorbe en Lui, mais réaliser la présence vivante du Christ en soi. « Il est vivant le Seigneur devant qui je me tiens » 1R 17,1 Pour Ste Thérèse, il est primordial de prendre conscience que Dieu est là, qu’Il est à mes côtés ou en moi. Elle préfère cependant qu’on se représente le Christ au plus intime de soi car Il y demeure, en son centre comme en un château. A nous ensuite d’établir la relation personnelle, le contact direct avec le Seigneur. Comment réaliser ce contact vivant? Ste Thérèse nous propose de le faire par une représentation du Christ en son Humanité. Mais puisque ellemême est incapable d’utiliser son imagination à cet effet, la représentation intérieure qu’elle nous propose est de l’ordre de la foi, d’une foi vive qui perçoit, sans voir, la Présence du Christ. « Figurez-vous quelqu’un qui est aveugle, ou qui est dans l’obscurité. Il parle à une personne. Il sait qu’il est en sa présence, parce qu’il a la certitude qu’elle est là; il comprend, il croit qu’elle est là mais il ne la voit pas. »
Quelle attitude adopter? « Je ne vous demande qu’une chose : le regarder. » (C 26, 1) « Lui ne vous perd jamais de vue. » (C 26, 3) Le regard revêt une signification particulièrement importante pour Ste Thérèse. C’est dans cet échange de regards que s’exprime la relation personnelle. Ce regard est théologal : c’est un acte de foi, animé par l’amour et tendu vers le désir, l’espérance d’être uni à Dieu. « Dieu et l’âme se comprennent, sans autre artifice, ces deux amis se communiquent leur amour mutuel. Comme ici-bas deux personnes qui s’aiment beaucoup et se comprennent bien semblent s’entendre sans échanger un signe, rien qu’en se regardant.
Entretien avec le Christ « Ste Thérèse nous conseille de tout mettre en oeuvre pour garder un contact vivant avec le Christ et maintenir notre relation d’amour avec Lui. « Tout ce qui vous incitera à aimer davantage, faites-le. » (4D, 1, 7) Ces efforts pourront prendre la forme d’entretiens : entretien coeur à coeur, et entretien à thème évangélique. Entretien coeur à coeur Vient un moment où l’âme désireuse de demeurer en présence du Christ et de garder un contact intime avec Lui, rompt le silence et s’exprime en toute confiance, livrant le fond de son être. « Nous pouvons (…) nous exercer à vivement nous éprendre de son Humanité sacrée, vivre en sa présence, lui parler, lui demander ce dont nous avons besoin, nous plaindre à lui de nos peines, nous réjouir avec lui de nos joies, et ne pas l’oublier pour autant, sans chercher des prières apprêtées, mais des mots conformes à nos désirs et à nos besoins. »
Ste Thérèse estime que cet entretien seul à seul avec le Seigneur doit être empreint de vérité, de liberté et d’amour : une vérité qui ne cache rien de sa misère, de ses faiblesses et de ses besoins, *vérité de celui qui se sait aimé en dépit de tout, une liberté qui est spontanéité, franchise, simplicité de ceux qui se connaissent intimement et qui peuvent tout se dire, un amour qui est total, unique et vivant. Entretien à thème évangélique Ici, l’on s’engage dans une forme simplifiée de méditation dans le but d’enflammer la volonté. Ce qui caractérise cette méditation c’est le choix, non pas d’une idée générale mais d’une scène de l’Évangile. « Il est bon de s’arrêter un moment pour méditer sur le mystère du Christ ( …), de penser aux peines qu’Il a subies, pour quoi Il les a subies, qui était Celui qui les a subies et avec quel amour Il les a endurées. » (V 13, 22)
Cependant, dès que l’on est éveillé à l’amour que l’on revienne à l’entretien coeur à coeur ou au simple regard. Ste Thérèse nous met en garde contre tout effort contraignant pour prolonger cet entretien méditatif. « …ne nous fatiguons pas à ne chercher toujours que cela. » (V 13, 22) « Il ne s’agit pas de beaucoup penser, mais de beaucoup aimer » (4D, 1, 7)
CONSEILS Pour arriver à garder le contact vivant avec le Christ ou pour y revenir Ste Thérèse nous suggère quelques petits moyens : S’aider d’un bon livre Avoir une image ou un portrait du Seigneur Réciter une prière vocale comme le « Notre Père » en essayant de suivre les paroles et d’en pénétrer le sens. Bien que Ste Thérèse nous ait laissé des suggestions très concrètes pour nous aider à faire oraison, elle n’a pas développé de « méthode d’oraison ». C’est le Seigneur seul qui en est le maître d’oeuvre. Ainsi donc, ce qui caractérise sa manière de faire oraison, c'est plutôt l’extrême souplesse qui laisse à chacun la plus grande liberté. Pour Ste Thérèse, l’essentiel est que nous restions « éveillé à l’amour ».
Pour calmer l’inquiétude des débutants et encourager à la persévérance tous ceux « qui ont commencé depuis longtemps » mais qui sont « persuadés » de perdre leur temps elle précise que c’est à ce moment-là « que la volonté s’amplifie et se renforce » mais « ils ne s’en rendent pas compte » ( V 11, 15) « Pensez-vous qu’Il se taise lorsque nous ne l’entendons pas? Il parle fort bien au coeur, quand de tout coeur nous le lui demandons. (C 24, 5) Elle reconnaît cependant que « parfois le Seigneur vient tard, mais alors, il paie bien et il donne autant en une seule visite qu’Il a donné peu à peu en plusieurs années. » (C 17, 2) Pour que l’on puisse durer dans cet « entretien », Dieu dépose au plus secret de nous-même, un désir, une impatience d’avoir enfin une réponse de Lui. Et Il ne répondrait jamais?
VERS UNE AUTRE PROFONDEUR Un don de Dieu • Ste Thérèse a une connaissance si vive de l’amour de Dieu, une confiance si assurée en Lui, qu’elle ne doute pas de l’action du Seigneur. Ce germe caché qu’est ce premier appel à faire oraison est destiné à éclore au jour et à l’heure voulue par Dieu et à porter ses fruits dans l’oraison contemplative
Ste Thérèse nous dit : « Je ne trouve rien de mieux pour expliquer certaines choses spirituelles, que la comparaison de l’eau. Figurons-nous que nous sommes en présence de deux fontaines qui remplissent d’eau deux bassins. (…) Or les deux bassins se remplissent d’eau de différentes manières. Le premier la reçoit de très loin; elle est amenée par des aqueducs et à l’aide de notre industrie (Ce sont les premières oraisons); l’autre la reçoit immédiatement de la source …même qui est Dieu et le remplit sans bruit aucun. » (4D, 2) C’est l’oraison contemplative. « Malgré toutes nos diligences nous ne pourrions l’acquérir, et elle manifeste par elle-même qu’elle n’est pas de notre métal mais de l’or très pur de la Sagesse divine. » (4D, 2)
Prier avec Ste-Thérèse d’Avila L’oraison contemplarive
« Oui, Il nous appelle tous. Je regarde comme certain que tous ceux qui ne resteront pas en chemin boiront de cette eau vive. » Chemin XXI Tôt ou tard l’Esprit-Saint vient offrir de prendre Lui-même l’initiative de la prière. Il nous invite à passer à une autre profondeur, au recueillement surnaturel. L’oraison contemplative est un pur don de Dieu.
LE RECUEILLEMENT SURNATUREL • Le recueillement surnaturel est différent du recueillement dont nous avons parlé plus tôt. Écoutons Sainte-Thérèse qui, dans les quatrièmes demeures, décrit ce changement dans notre prière dû à une action nouvelle de l’Esprit-Saint.
« Le coup de sifflet » « Considérons que nos sens et nos puissances (…) sont les habitants de ce château intérieur de l’âme. (…). A la vue de leur bonne volonté, le Grand Roi qui l’habite veut bien dans son immense miséricorde les ramener à lui; ce bon Pasteur donne un coup de sifflet(…)qui a tant d’empire sur eux qu’ils abandonnent les choses extérieures dans lesquelles ils étaient absorbés et rentrent dans le château. » 4D, 2, 881-2 Le Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus, un carme contemporain dont les oeuvres font autorité au sein du Carmel explique : « L’orant n’a pas entendu ce coup de sifflet mystérieux, il n’a rien saisi directement, mais il se sent apaisé, enveloppé d’une chape de recueillement par une puissance qu’il ignore. » JVVD p. 498
Pour sa part Saint Jean de la Croix nous dit : « L’âme boit à son aise; se mettant en oraison, l’âme boit à son aise avec suavité; sans qu’il soit besoin de tirer l’eau des aqueducs des considérations passées, des formes et des figures. De manière qu’aussitôt qu’elle se présente devant Dieu, elle se trouve en acte d’une connaissance confuse, amoureuse, paisible et tranquille, où l’âme boit la sagesse, l’amour et la saveur. » II M, 14,2
SUR LE SEUIL … Si à cette étape, l’action de Dieu commence à se faire sentir de manière plus directe et plus pressante, elle ne manque pas non plus de nous déconcerter. Alors même que l’Esprit-Saint nous invite à une intimité plus profonde et plus féconde avec Lui, paradoxalement nous avons l’impression d’être arrivés à une impasse, de perdre Dieu … de perdre son temps
Tous nos efforts semblent stériles. La prière n’a plus de saveur. Sécheresse et distractions nous envahissent. Pourtant … nous désirons toujours Dieu. Dans sa pédagogie, Dieu enlève son efficacité à nos propres efforts et nous demande de basculer dans la foi. Nous sommes ici sur le seuil, prêt à faire une expérience unique et personnelle du Dieu tout amour. Mais cette expérience de Dieu requiert de notre part un acte de foi et d’abandon. Rupture Ainsi Dieu commence à se communiquer à nous d’une manière toute différente qui requiert de notre part une attitude nouvelle. Cette période plus difficile n’est pas nécessairement dramatique. Mais elle peut le devenir si l’on refuse d’abandonner notre ancienne manière de prier.
Que faire? Persévérer. D’abord : il importe de persévérer dans la prière… malgré les distractions et la sécheresse. de rechercher l’amitié de personnes qui font oraison. Cela peut nous être d’un grand secours surtout s’ils ont l’expérience de ce chemin. de poursuivre notre fréquentation des saints du Carmel en nous familiarisant toujours davantage avec leurs oeuvres. De plus, il nous faut rechercher une aide afin de mieux discerner l’action de l’Esprit- Saint dans notre prière. Un bon accompagnateur spirituel peut nous éviter bien des angoisses et des pertes de temps et nous aider à discerner l’évolution de notre prière.
LES SIGNES Moyens de discerner Thérèse mais surtout Jean de la Croix nous donnent quelques moyens pour nous aider à discerner l’action de l’Esprit-Saint dans notre prière. L’impossibilité de méditer … comme auparavant. Cette impossibilité est l’élément le plus perceptible dans la mutation de notre prière. Prendre un texte de l’Évangile, faire des considérations sur son contenu, prendre des résolutions, tout cela ne va plus. Si on essaie malgré tout, on n’éprouve qu’aridité. Pour que cette impossibilité retienne notre attention, elle doit s’étendre à toute prière, se maintenir, croître, s’imposer. Elle peut être réelle même si l’imagination continue à vagabonder.
Dieu se fait connaître d’une autre façon : tout devient gris. On perd le goût et la consolation (satisfaction) dans les choses de Dieu, dans les obligations familiales ou autres, dans la vie professionnelle. L’Esprit saint veut devenir, en celui qui cherche Dieu, l’unique principe de son agir. Il s’agit d’un nouveau mode d’aimer. Ces deux signes négatifs : l’impossibilité de méditer, tout devient gris, font penser à un déblayage, à une préparation. Ils sont accompagnés par deux autres signes qui dénotent les effets positifs de l’action divine : dans l’intelligence, Dieu donne une connaissance générale, obscure; dans la volonté, Il fait naître une sollicitude d’amour.
Connaissance générale et amoureuse. « L’âme aime à se tenir seule avec une attention amoureuse à Dieu, sans considération (pensée, jugement) particulier, en paix, repos, sans faire agir ses puissances (mémoire, intelligence, volonté). … Elle demeure ainsi sans comprendre quelque chose de distinct, sans comprendre ce qu’elle atteint » II M, 13 La sollicitude d’amour. Le contact avec Dieu ne donne plus satisfaction. Il est normal qu’on s’inquiète. Est-on en train de perdre Dieu? « On est ordinairement occupé de la pensée de Dieu avec un sentiment d’anxiété douloureuse. On se figure qu’on ne sert pas Dieu et qu’on recule à son service. » I NO, 13
L’inquiétude prouve qu’il n’y a rien à craindre. En effet celui qui est tiède ne s’inquiète pas de sa relation à Dieu. Sollicitude d’amour… souci de servir Dieu, de l’aimer au fil du quotidien… dans la prière, dans l’action. Pendant la nuit on va de l’avant sur le chemin on est pris et travaillé par Dieu. … laissons la Nuit nous prendre par la main! O Nuit! O nuit! toi qui m’as guidée. O nuit! plus que l’aurore aimable. O nuit! toi qui as uni L’Aimé avec son Aimée, L’Aimée en son Aimé transformée. Poésie Nuit Obscure
QUELLE ATTITUDE ADOPTER? Dans la prière : persévérer Ayant reconnu ces signes dans notre vie d’oraison, St Jean de la Croix et Ste-Thérèse nous nous encouragent vivement à persévérer jusqu’à ce que Dieu luimême nous fasse franchir le seuil qui nous mène des premières oraisons à l’oraison contemplative. Confiance et abandon La nouvelle attitude sera donc toute d’accueil, de réceptivité et d’abandon, confiant en Jésus opérant dans notre coeur son oeuvre d’amour en secret.
Nous ne nous préoccuperons plus de ce que nous pouvons ressentir ou comprendre mais nous nous abandonnerons dans la confiance et l’amour à l’action vivifiante de l’Esprit Saint. Dans le quotidien de la vie Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus est notre guide par excellence pour développer une vie d’oraison intense à la portée de tous dans le quotidien d’une vie toute ordinaire. Sa petite voie nous trace un chemin sûr pour atteindre l’union à Dieu tant désiré par tous les mystiques d’hier et d’aujourd’hui. Avec l’oraison contemplative, le chemin devient rivière. « Les rivières sont des chemins qui marchent tout seuls et qui portent là où on veut aller » Pascal
QUEL COMPORTEMENT ADOPTER dans la prière et dans la vie quotidienne? DANS LA PRIÈRE Cette harmonisation appelle principalement trois comportements nouveaux s’imbriquant les uns dans les autres: ne plus méditer comme avant, se contenter d’accueillir, de recevoir, prier avec une simple attention amoureuse à Dieu. NE PLUS MÉDITER COMME AVANT Dans l’intelligence, (au niveau cérébral), l’intervention de Dieu fait que nous ne sommes plus capables de méditer au moyen des images et des concepts. « Auparavant on lui fournissait un sujet à méditer et elle méditait; maintenant, qu’elle ne médite plus. Du reste, (…) elle le voudrait qu’elle ne le pourrait pas, et ne ferait que se distraire. » VF B, 3
De son côté, (au niveau du coeur), la volonté ne trouve plus les goûts et les douceurs que lui apportait la prière. « Auparavant, elle cherchait l’amour sensible, la ferveur sensible, et elle les trouvait. Maintenant elle ne doit plus ni les désirer, ni les rechercher, et tous ses efforts ne les lui donneront pas, mais ils ne lui apporteront que sécheresse.» VF B, 3
SE CONTENTER D’ACCUEILLIR, DE RECEVOIR. « Il convient en effet, nous dit Jean de la Croix, que celui qui reçoit conforme sa manière de recevoir au don qui lui est fait, afin de le recevoir et de le retenir tel qu’on le lui communique. (…) Dieu se comporte avec une connaissance simple et amoureuse, en la façon de lui donner, de même l’âme doit aussi se comporter, en la façon de recevoir, avec une connaissance ou un regard simple et amoureux,» VF B III, 3 « Si cette connaissance amoureuse est reçue dans l’âme selon le mode de Dieu qui est un mode surnaturel, et non selon le mode de l’âme qui est un mode naturel, il s’ensuit que pour la recevoir l’âme doit se tenir dégagée, oisive, calme, paisible et dans cette sérénité qui convient à l’action de Dieu. »
« Plus l’air est libre de vapeurs, plus il est pur et tranquille, plus aussi le soleil l’illumine et l’échauffe. Ainsi l’âme ne doit s’attacher à rien, ni à une méthode de méditation ni à un goût quelconque, soit sensitif, soit spirituel. » « C’est en souveraine paix et en profonde tranquillité que l’âme doit prêter l’oreille à ce que Dieu dit en elle. VF B, 3 Pour sa part, Thérèse d’Avila compare le travail de l’intelligence, à cette étape, à de grosses bûches qui pourraient éteindre l’étincelle de l’amour divin que l’Esprit lui-même attise dans le coeur du priant et ce,
souvent à son insu. Se reprendre en main, regagner le contrôle sur ses pensées ou sur son imagination constituent alors un obstacle à l’action de Dieu dans l’âme. Ce qu’il y a de mieux à faire ici c’est de ne pas s’arrêter à ces pensées, ni se préoccuper de ce que nous suggère notre imagination, ni même y être présents. Plutôt, dès que nous en prenons conscience, essayons de revenir tout doucement à Jésus, par un mot, une Parole de Dieu, une image.
« On ne négocie pas bien avec Dieu à force de bras. (…) ce serait comme si l’on jetait sans discrétion de grosses bûches sur l’étincelle; on ne pourrait que l’éteindre » (…) « Ce qu’il y a de plus opportun ici, ce sont de petites pailles (des paroles douces) placées sur ce feu avec humilité. Elles contribuent mieux à allumer ce feu qu’une grande quantité de bois (des considérations savantes). V, XV Cependant, nous devrons probablement, à certains jours, revenir à la méditation. En effet, ni saint Jean de la Croix, ni sainte Thérèse ne nous demandent de nous mettre nous-mêmes dans un « vide ».
La contemplation chrétienne n’est pas un vide … mais une emprise de Dieu. Quand nous sommes sous cette emprise, nous ne pouvons plus méditer. Mais cela ne sera pas toujours le cas. Si nous pouvons méditer sans difficulté, alors méditons. Sainte Thérèse d’Avila insiste : « Quand il nous semble que Dieu par des voies secrètes nous fait comprendre qu’il nous écoute, il est bon alors de nous taire, dès lors qu’il nous a permis de nous approcher de lui;(…) si nous ne comprenons pas encore que ce grand Roi nous écoute et nous regarde, nous ne devons pas rester comme des insensés à ne rien faire. » 4D,III
PRIER AVEC UNE SIMPLE ATTENTION AMOUREUSE VERS DIEU Sous l’emprise de Dieu, l’âme qui insiste pour méditer semblera engagée dans un véritable combat avec son Seigneur. Elle apprendra petit à petit à ne pas résister à Ses avances, à Lui abandonner toutes ses pensées et ses efforts, à simplement Le regarder amoureusement, sans considérations particulières. « Elle doit se borner, nous dit St Jean de la Croix, à une amoureuse attention vers Dieu, sans actes particuliers. En un mot, elle doit se comporter passivement sans efforts personnels, se contentant d’une amoureuse et simple attention, à peu près comme une personne qui tient les yeux ouverts pour regarder avec amour. » VF B, 3
« Qu’elle s’abandonne entre les bras de l’amour, conseille Ste Thérèse, Sa Majesté (Dieu) lui apprendra ce qu’elle a à faire en cet état, où elle ne doit avoir pour ainsi dire d’autre souci que celui de se reconnaître indigne d’une si haute faveur et d’en rendre grâces. » 4D, III. L’attitude générale est alors une acceptation humble de son état, puis, l’action de grâce et la confiance : Croire que Jésus nous porte. Notre fidélité à l’Esprit-Saint, dans l’oraison, appelle notre générosité dans la vie quotidienne. « Prière et vie chrétienne sont inséparables car il s’agit du même amour et du même renoncement qui procède de l’amour. » (CEC 2745)
QUEL COMPORTEMENT ADOPTER dans la vie quotidienne. Tout accueillir comme venant de la main du Bien-Aimé, sans se dérober aux situations ni aux personnes ni à ses responsabilités. S’abandonner à Jésus dans la confiance – FOI Ne pas se décourager – ESPÉRANCE Se tourner vers les autres – CHARITÉ S’abandonner à Jésus dans la confiance – FOI Tout au long de la journée s’abandonner à Jésus dans la paix et la confiance, sans calculs, sans attentes, en Lui laissant toute liberté d’agir à sa guise dans notre vie.
Les mains ouvertes… «Laissons-le prendre et donner tout ce qu'il voudra, la perfection consiste à faire sa volonté (...) Comme c'est facile de plaire à Jésus, de ravir son Coeur! Il n'y a qu'à l'aimer, sans se regarder soi-même, sans trop examiner ses défauts. (…) Jésus, ne m'apprend pas à compter mes actes. Il m'enseigne à faire tout par amour, à ne lui rien refuser, à être contente quand il me donne une occasion de lui prouver que je l'aime. Mais cela se fait dans la paix, dans l'abandon.» «Qui dit paix ne dit pas joie, ou du moins joie sentie; pour souffrir en paix, il suffit de bien vouloir tout ce que Jésus veut.» ( LT
Ne pas se décourager – ESPÉRANCE Tout espérer de l’infinie miséricorde de Dieu … malgré nos infidélités et nos manques de vertus. « Ce qui lui plaît, c'est de me voir aimer ma petitesse et ma pauvreté, c'est l'espérance aveugle que j'ai en sa miséricorde... Voilà mon seul trésor. (…) Ah! restons bien loin de tout ce qui brille, aimons notre petitesse, aimons à ne rien sentir, alors nous serons pauvres d'esprit et Jésus viendra nous chercher, si loin que nous soyons il nous transformera en flammes d'amour...» ( LT 197 ) « Je ne me découragerai jamais. » «Oui je le sens, quand même j'aurais sur la conscience tous les péchés qui se peuvent commettre, j'irais, le coeur brisé de repentir, me jeter dans les bras de Jésus, car je sais combien il chérit l'enfant prodigue qui revient à lui.» ( MSC 36,2 v) « Ce qui offense Jésus… c’est le manque de confiance. » (LT 92,64)
Se tourner vers les autres – CHARITÉ … spécialement les personnes qui souffrent autour de nous. Sortir de soi-même, s’oublier pour faire plaisir à Jésus. « J’en ai fait l’expérience quand je ne sens rien, que je suis incapable de prier, de pratiquer la vertu, c’est alors le moment de chercher de petites occasions, des riens qui font plus de plaisir à Jésus que l’empire du monde ou même que le martyre souffert généreusement : par exemple, un sourire, une parole aimable alors que j’aurais envie de ne rien dire ou d’avoir l’air ennuyé » (Lt 142)
«La charité ne doit point rester enfermée dans le fond du coeur: … la charité … doit éclairer, réjouir, non seulement ceux qui sont les plus chers, mais tous ceux qui sont dans la maison, sans excepter personne» ( MSC 12 r). «Il faut faire tout ce qui est en soi, donner sans compter, se renoncer constamment en un mot, prouver son amour par toutes les bonnes oeuvres en son pouvoir » ( CSG 50 ). «L'amour donne tout et se confie !» ( CSG 62 ).