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Pensée figurative et langage figuratif. Le langage figuratif présuppose-t-il une pensée figurative? Figures: Métaphore, métonymie, Ironie, Euphémisme, Hyperbole, etc. Exemples. Métaphore: Ton mari est un bébé (processus analogique?)
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Pensée figurative et langage figuratif Le langage figuratif présuppose-t-il une pensée figurative? Figures: Métaphore, métonymie, Ironie, Euphémisme, Hyperbole, etc.
Exemples • Métaphore: Ton mari est un bébé (processus analogique?) • Métonymie: Paris s’éveille (ou« Bruxelles a décidé... »; tout à fait courante, elle ne pose aucun problème de compréhension) • Ironie: Quelle intelligence! • Euphémisme: Cette maison a besoin d’un coup de pinceau • Hyperbole: Hier je t’ai appelé des centaines de fois
La plupart des recherches sur le langage figuratif ont concerné la métaphoreD'autres figures: • — les expressions idiomatiques ou métaphores "mortes" ("le dos de la cuiller ») • — l'oxymore ("obscure clarté" : alliance de mots sémantiquement opposés et apparemment incongrus, que pourtant nous pouvons comprendre et qui est utilisée fréquemment dans le langage poétique, cf. Quevedo, Shakespeare et leurs définitions de l’amour)
Métaphore: du grec “metapherein” = “transfert” • “Ton ami est une perle” - pas de difficulté de compréhension, indépendamment du jugement personnel • On ne pense pas à la pureté de sa couleur ni à son utilisation éventuelle dans un collier • Comment allons-nous au-delà du sens littéral? • Différent de la synesthésie: • “ A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu: voyelles, Je dirai quelque jour vos naissances latentes”
Métaphores attributives (X est Y)Métaphores relationnelles (X est comme Y)Métaphores filées (implicite dans les propositions ou phrases suivantes)Métaphores par apposition (Y avant X)Métaphores indirectes (via un autre terme associé)
Métaphores visuelles = dans des moyens picturaux d’expression (par exemple, le cinéma): un champ en hiver, sous le gel et parcouru par le personnage, seul, peut transmettre la désolation, l’abandon; l’image d’une femme qui regarde tristement les morceaux brisés d’un miroir peut refléter son conflit intérieur Citizen Kane (rose button), Journal d’une femme de chambre, Good morning BabiloniaOxymore au cinéma, exemple: Vertigo (deux mouvements contradictoires: zoom avant travelling arrière)
Répandu dans la littérature mais aussi dans la prose scientifique et dans la communication courante Puissant instrument conceptuel (notamment en sciences) et de communication (y compris pour une transmission indirecte, « déguisée »: on évite d’expliciter et on est facilement compris) Source de polysémie:par ex. « mine », cette encyclopédie est une mine, ce sens de mine est déjà lexicalisé, ou « boucher », ce chirurgien est un boucher (maladroit)
Aristote: un signe de la maîtrise du langage et du génie, mais un ornement appropriéà la poésie mais énigmatique pour la philosophie et la scienceconception fondée sur la similitude ou “comparative”: conversion de X est un Y en X est comme un Y - le point de vue analogique s’est maintenu jusqu’à récemmentBlack (1962): phénomène de communication qui opérerait au niveau de la structure conceptuelle: les processus sous-jacents seraient d’interaction et non de comparaison
Des thèmes tels que la rationalité, les émotions et la signification de la vie et de la mort sont souvent discutés dans des termes figuratifs (surtout métaphoriques), en particulier dans la littérature et la poésie Le langage figuratif serait le produit d'une pensée flexible, hautement divergente
Métaphores conceptuelles dans les références journalistiques et scientifiques à propos des clones (Dolly - The Times et Nature, Hellsten, 2000) « Clones are mass products »: cette métaphore conceptuelle peut être utilisée avec des objectifs opposés, parce que la cible et la source ont beaucoup de propriétés en commun : mauvaises copies ou copies utiles; la science est un chemin avec objectif incertain vs. doit vaincre des obstacles. Expression méprisante: ex: Frankenfood, Frankenfish
Le langage figuratif est examiné aujourd'hui par les linguistes et les psycholinguistes mais aussi dans un contexte plus large de psychologie cognitive Il est aussi étudié dans le cadre de l'organisation et de la structure des concepts
Pour un certain courant théorique (cf., entre autres, Georges Lakoff et Raymond Gibbs Jr.), les figures sont constitutives de notre expérience car elles la conceptualisent, déterminant ainsi des connexions très fortes entre le langage figuratif et ce que ce courant considère être une "pensée figurative"
« Ses affirmations sont indéfendables », « j'ai démoli son argument », « il a attaqué chacune de mes positions », « ses critiques sont allées droites à la cible », « si vous utilisez cette stratégie d'argumentation il vous battra » Sous-jacente à toutes ces expressions, il y aurait une "conceptualisation métaphorique" de la discussion argumentative comme une guerre. Les "métaphores conceptuelles", disent ces auteurs, structurent notre expérience, lui donnent un sens. Notre compréhension de beaucoup d'expressions métaphoriques nouvelles est fondée sur une connaissance métaphorique commune
D'autres métaphores conceptuelles sont, par exemple, "les causes sont des forces" (notamment en science) "la communication est un conduit, un espace »(cf. "le chapitre était vide d'idées", "j'ai du mal à faire passer cette idée"), ou "la colère est un fluide chaud dans un conteneur" (cf. "la colère monte en moi", "il brûle de colère, il explose") Cela montrerait bien la présence dominante des modes figuratifs de pensée
Rôles des métaphores conceptuelles1. Rôle représentationnel:les concepts complexes (abstraits) sont organisés à partir de concepts plus simples (concrets) selon un principe d’économie cognitive2. Rôle de traitement: elles permettent une médiation pour l’utilisation et compréhension de certaines expressions métaphoriques(économie: récupération dans la mémoire, dispensant le calcul; plusieurs expressions métaphoriques peuvent être dérivées d’une structure sémantique unique)
Métaphore conceptuelle; les théories sont des édifices, bâtiments (« buildings »)Domaine « cible » Domaine « source »Théorie ----------------- EdificeThéoricien ------------------------ ConstructeurFormulation -------------------- ConstructionIdées ------------------------ MatérielsHypothèses ------------------- FondementsValidité ----------------------- SoliditéRévision --------------------- Rénovation
Murphy (1996) a analysé 3 conceptions de la métaphore:Deux versions de l'idée que la cognition humaine est modelée par des processus figuratifs de penséeVersion forte: certains concepts (par ex., les concepts d'émotions) ne sont pas compris via leur propre représentation mais par référence (métaphorique) à un concept + facile à comprendre, + structuré ou + concretVersion faible, nous avons une structure conceptuelle bien développée pour les concepts abstraits, la représentation de ces concepts n’est pas métaphorique per se, mais l'existence de métaphores systématiques dans notre culture a influencé leur structure (ex. théories comme édifices)
La troisième conception est celle d'une similitude structurale:Tous les concepts sont représentés directement, les métaphores résultant de la similitude entre structures conceptuelles pré-existantes
Murphy considère que la version forte de la représentation métaphorique ne tient pas pour les raisons suivantes: 1. D'après les données développementales, les émotions sont conceptualisées par les enfants bien avant les domaines sources2. On ne comprend pas comment des métaphores multiples, parfois conflictuelles, pourraient résulter dans une structure cohérente3. Si le concept dit métaphorique n'incluait pas une structure propre on ne pourrait pas distinguer entre les propriétés du domaine source qui sont pertinentes et celles qui ne le sont pas
Supposons par exemple que la discussion argumentative est bien une guerre; nous savons que beaucoup de choses qui caractérisent les guerres (employer des armes telles que des missiles ou du napalm, mettre des uniformes, ou payer des réparations au vainqueur) n'ont pas de place dans les discussions argumentativesPour Murphy (1996), il n'est pas possible pour l'instant de décider entre la version faible et la théorie de la similitude; il préfère la dernière pour sa simplicité
Gibbs, en réponse à Murphy, défend la version forte de la représentation métaphoriquePour lui, la théorie de Murphy ne peut pas rendre compte de l'asymétrie ou directionnalité entre le domaine cible et le domaine source (l'amour peut recevoir une interprétation métaphorique en termes de voyage, mais les voyages ne sont pas interprétables en termes d'amour), étant donné le caractère plus vague ou incomplet du domaine cible Cependant, Gibbs reconnaît que d'autres conceptions non représentationnelles, comme la conception de l'appariement de structures, peuvent rendre compte de cet aspect des métaphores
Pour Gibbs,les deux termes de l'expression métaphorique ne doivent pas partager des relations abstraites avant d'être interprétés en tant que composantes d'une métaphore (cf. Tourangeau & Rips, 1991, déjà cité) Cependant, cette affirmation devrait mettre en question la notion même suivant laquelle le concept cible reçoit sa structure du concept source (voir ci-après)
Des trois arguments de Murphy, Gibbs ignore dans sa réponse celui qui concerne les propriétés pertinentes et non pertinentes du domaine source Il répond à l’argument des métaphores multiples en soulignant que les concepts ne sont pas des structures fixes, statiques et que l’on peut avoir différentes manières de conceptualiser la même expérience Pour lui, les concepts sont des constructions temporaires dans la mémoire de travail créées sur le pouce à partir de l’information (connaissance) contenue en mémoire à long terme
Ainsi, les différentes conceptions de l’amour seraient appropriées à différentes situationsCependant, répond Murphy, cette distinction ne fait que reculer le problème S’il existe une connaissance au sujet de l’amour en mémoire à long terme, elle devrait avoir une structure propre qui intégrerait (ou non) l’information correspondante à chacune des différentes métaphores
L’argument développemental reçoit de la part de Gibbs une réponse qui semble plus convaincante: Les enfants n’ont pas besoin d’une connaissance sophistiquée de la physique pour conceptualiser certaines émotions en termes de forces physiques Les expériences du corps, en particulier kinesthésiques (le corps entre dans des conteneurs tels que le lit, la baignoire, etc., et contient, incorpore ou expulse lui-même d’autres objets), et de manipulation des objets peuvent être à l’origine de toute une série de constructions métaphoriques
McGlone (2001, 2006):Il faut cesser d’utiliser uniquement l’évidence linguistique pour traiter des connexions profondes entre la pensée et le langage; le raisonnement se trouve déjà biaisé (cf. histoire de l’hypothèse de Whorf)Comment est-ce que nous savons que les gens pensent aux théories en termes d’édifices? Parce qu’ils utilisent une terminologie fondée sur les édifices pour parler des théories? Un postulat dans la preuve (le langage reflète exactement la pensée)Il faut donner une substance à ces affirmations qui soit indépendante de l’évidence linguistique, d’autant plus que l’idée est que la métaphore conceptuelle n’est pas essentiellement linguistique
Les processus de traitement des métaphoresLa fausseté littérale n'est pas, contrairement à ce qu'ont dit à la fois Grice et Searle, une condition nécessaire de la métaphore Par exemple, "aucun homme n'est une île" est vrai littéralement et métaphoriquement; "mon mari est un animal" est vrai littéralement quoi qu'il arrive du point de vue métaphorique
On avait cru que les expressions métaphoriques (par exemple, "l'homme est un loup") étaient traitées via des opérations séquentielles, d'abord pour extraire la signification littérale, ensuite moyennant une correction de type métaphoriqueCe n’est pas le cas
Glucksberg, Gildea et Bookin (1982):Les sujets répondaient plus lentement "non" à une phrase littéralement fausse lorsqu'elle avait une interprétation figurative que lorsqu'elle n'en avait pas Donc, la signification métaphorique est calculée involontairement, interférant avec la décision Dans la mesure, cependant, où la prise de décision n'est pas instantanée, on ne peut pas être sûr que l'interprétation métaphorique a été atteinte aussi rapidement que l'interprétation littérale
D'autres expériences ont montré qu'il ne faut pas plus de temps pour comprendre les expressions métaphoriques que les expressions littérales
Connine et Blasko (1993), avec la technique d'amorçage inter-modal, ont estimé la vitesse relative d'activation des significations littérales et métaphoriques des mots dans des métaphores comme "l'indécision est un tourbillon (d'eau) (whirlpool)" Les sujets devaient écouter ce type d'expressions et émettre le plus vite possible des jugements de décision lexicale en réponse à des mots écrits, soit des associés littéraux tels que "eau", soit des associés métaphoriques tels que "confusion", soit encore des non associés tels que "permission"
Les réponses aux associés littéraux et métaphoriques ont été également rapides entre elles et plus rapides que les réponses aux non-associés, ceci même lorsque les cibles étaient présentées simultanément avec le mot critique de l'expression Il semble donc y avoir accès simultané aux significations littérales et métaphoriques Cependant, lorsque, dans l'expérience, des métaphores non appropriées étaient utilisées, seules les significations littérales ont été activées Donc, à condition que la métaphore soit interprétable, les significations littérales et métaphoriques sont engendrées en parallèle
Le fait que l'accès aux deux interprétations soit indépendant et simultané n'implique pas que les processus de traitement respectifs sont identiques Keysar (1989) : Prenons la phrase "my son is a baby » Elle peut être littéralement vraie ou fausse selon l'âge du fils. Métaphoriquement, aussi: vraie si le fils a un comportement infantile, et fausse s'il est indépendant. Les interprétations littérale et métaphorique sont logiquement orthogonales (L+/M+; L-/M-; L+/M-; L-/M+). Les phrases ont été présentées en contexte. Le contexte pouvait les rendre soit littéralement vraies ou fausses, soit métaphoriquement vraies ou fausses.
Keysar (1989) Latence Erreurs Contexte Vrai Faux Vrai Faux Congruence Oui 874 897 11 6Non 954 981 16 16Appuyant l'idée que l'interprétation métaphorique est construite de manière obligatoire, on a observé une interférence pour les phrases où les deux interprétations sont incongrues
Considérons maintenant la manière dont l'interprétation métaphorique est construite. Modèle standard: on convertit l'assertion attributive "X est un Y" ("my son is a baby") en relationnelle "X est comme un Y" ("my son is like a baby") Or, l'assertion de similitude et l'assertion de catégorie sont pragmatiquement incompatibles: si "le cuivre est un métal" est acceptable, alors "le cuivre est comme un métal" n'est pas acceptable; si une personne est un vrai bébé, alors on ne peut pas dire qu'elle est comme un bébé —> la prédiction suivante: les phrases qui sont vraies littéralement et métaphoriquement devraient être difficiles à vérifier parce qu'elles posent un problème d'incongruité fonctionnelle
Cependant, les données de Keysar n'ont pas montré ce type de résultat En réalité, les phrases L+/M+ ont donné lieu aux vérifications les plus rapides Ainsi, on peut conclure que les interprétations métaphorique et littérale sont fonctionnellement équivalentes La signification métaphorique est calculée obligatoirement et ne prend pas une forme comparative. Elle ne demande pas plus de transformations que l'interprétation littérale
Quel type d'information utilisons-nous pour engendrer des significations métaphoriques ? Cinq modèles ont été proposés 1. D'après le modèle de déséquilibre de saillance(Ortony, 1979), la métaphore résulte d'une asymétrie dans les attributs partagés, leur saillance étant plus importante pour le terme B que pour le terme A Exemple: les sermons sont des conférences/somnifères (attribut: exposés oraux/monotonie) Inverse: les somnifères sont des sermons (monotonie n’a pas de saillance pour B)
2. D'après le modèle d'interaction entre domaines (Tourangeau & Sternberg, 1981),la qualité métaphorique résulte d'une similitude de position à l'intérieur des domaines respectifs et augmente avec la distance entre ceux-ciExemple: Bush est un faucon (« Bush est comme un faucon » est exclu)
3. D'après le modèle d'appariement de structure(Gentner, 1983), les relations structurelles, à un niveau abstrait, entre les domaines seraient importantes (ex.: la vie est un chemin) et la préférence des sujets irait aux métaphores relationnelles (mais peut-être pas vrai) Aucune de ces théories ne rend compte des processus on-line
4. D'après le modèle d'inclusion de classes(Glucsberg & Keysar, 1990), toutes les métaphores sont des affirmations d'inclusion de classe En créant une métaphore on crée une nouvelle catégorie ou catégorie de diagnostic Par exemple, en disant "my job is a jail" on crée une catégorie dans laquelle on inclut toutes les entités qui vont contre notre volonté, qui sont désagréables et dont il est difficile d'échapper "Jail" devient un exemplaire typique de cette nouvelle catégorie
Ces nouvelles catégories seraient structurellement similaires aux catégories taxonomiques habituelles pour lesquelles il y a des noms conventionnels (aliments, moyens de transport, etc.) ou aux catégories ad hoc (aliments à prendre en cas de régime, etc.) Les métaphores seraient donc des affirmations implicites de catégorie (modèle de « catégorisation attributive »)
La catégorie qui est utilisée pour caractériser la catégorie topique fonctionne comme une catégorie attributive, c’est-à-dire elle fournit des propriétés à la catégorie topique Ces propriétés peuvent souvent s’appliquer à beaucoup d’autres catégories, et quand cet usage est très extensif le référent de la catégorie attributive peut devenir une signification conventionnelle (par exemple, « boucher » pour désigner intervention brutale et incompétente)
Est-ce que l’applicabilité de la théorie en termes de métaphore conceptuelle versus en termes de catégorie attributive dépend du caractère conventionnel versus innovateur de la métaphore? Jones et Estes (2005), expérience d’évaluation d’attributs: dans quelle mesure la catégorie topique était un membre de la catégorie véhicule? Exemple: « l’examen est un filtre »
Les résultats ont été comparables pour les métaphores conventionnelles et les nouvelles, mais la catégorisation a été jugée plus élevée pour les métaphores à haut degré d’aptitude que pour celles à faible degré (« aptness »: mesure dans laquelle l’affirmation reflète des caractéristiques importantes de la catégorie topique)Jones & Estes (2006):même type de résultats dans une tâche de compréhension (rapidité et précision)
Tâches utilisées par McGlone pour contraster la théorie de la métaphore conceptuelle et la théorie de la catégorisation attributive : —émettre des paraphrases d’une affirmation —créer des métaphores similaires en signification (tendance à créer des véhicules de la même catégorie attributive) — faire un rappel indicé (en manipulant l’indice)
— comprendre une métaphore :par exemple, pour « la leçon du Dr. X était un repas complet pour l’esprit », précédée d’autres métaphores,il n’y avait pas de facilitation suite à des métaphores du même domaine (aliments, manger) (« ce livre était un restaurant »), ce qui relèverait de la métaphore conceptuelle,mais bien suite à d’autres métaphores de la même catégorie attributive (grande quantité) (« ce livre était une mine d’or »)
Pour Gibbs, "mon mariage est une longue route poussiéreuse" ne constituerait pas tant une création implicite de catégorie, dans le but de rendre une certaine idée plus expressive, que la manifestation d'une conceptualisation d'expérience déjà structurée dans notre esprit (la métaphore conceptuelle "LOVE IS A JOURNEY") —> compréhension immédiate sans reconnaissance consciente du caractère métaphorique
Gibbs et Nascimento (1993) se sont fondés sur cette dernière théorie dans leur étude des conceptions des étudiants au sujet de l'amour Dans l’expérience 1, les sujets devaient décrire ce qu'ils avaient expérimenté lorsqu'ils étaient "tombés amoureux" pour la 1ère fois Plus de la moitié des sujets ont utilisé des expressions qui relèveraient des métaphores conceptuelles "LOVE IS A UNITY", "LOVE IS A NATURAL FORCE", et "LOVE IS PHYSICAL CLOSENESS"
Dans l’expérience 2, les sujets devaient lire 10 fragments de poésie amoureuse, suivis d'une liste de 5 métaphores conceptuelles et ils devaient sélectionner la métaphore qui convenait le mieux à ces fragments Les réponses se sont révélés très précises (autrement dit, conformes au jugement préalable de juges) Dans l’expérience 3, les sujets devaient lire les mêmes fragments et choisir parmi une liste de 5 expressions conventionnelles la plus appropriée (par exemple, "we were sick with love") La même conformité a été observée
Enfin, dans l’expérience 4, on a examiné les déclarations et commentaires faits pendant la lecture de poèmes. et on a constaté que 78% de ces affirmations correspondaient aux conceptions métaphoriques sous-jacentes Ceci suggérerait que, en réalité, les poètes ne créent pas de nouvelles métaphores mais de nouveaux exemplaires de catégories pré-existantes