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INTERCO – CFDT, 6 Février 2008. Colloque sur le Thème de l’Eau Droit à l’Eau / Droit de l’Eau: Séparation/Intégration entre Ressources et Services Publics Bernard Barraqué, DR CNRS. L’eau est-elle un « or bleu »?. « On s’est battu au 19ème siècle pour l’ or …
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INTERCO – CFDT, 6 Février 2008 Colloque sur le Thème de l’Eau Droit à l’Eau / Droit de l’Eau: Séparation/Intégration entre Ressources et Services Publics Bernard Barraqué, DR CNRS
L’eau est-elle un « or bleu »? • « On s’est battu au 19ème siècle pour l’or … • « On s’est battu au 20ème siècle pour le pétrole … • « On se battra au 21ème siècle pour l’eau. » Hassan, frère du Roi Hussein de Jordanie In BBC, Water Wars • Inconsciemment, on assimile l’eau à un minerai
L’eau : une ressource naturelle renouvelable • L’or et le pétrole sont des minerais, susceptibles de possession et de destruction: propriété publique ou propriété privée? • En France le code minier soustrait les minerais à la propriété privée du sous-sol; mais pas les aquifères sauf exception (Infra) • L’eau est inappropriable parce qu’elle coule: elle est depuis toujours, le plus souvent, la chose commune de ses riverains, sujette à des droits d’usage partagés (droit commun) • Mais, depuis l’antiquité, les empires se sont construits sur la mobilisation de l’eau dans l’irrigation en climat méditerranéen ou semi-aride: despotisme oriental, aussi en Amérique Latine
Le service public de l’eau • En général, l’usage domestique de l’eau a une priorité d’accès à la ressource (boisson et hygiène, jardin potager, petit élevage). Mais qui peut porter chez elle 25 litres par personne et par jour ? • Avec l’urbanisation et l’industrialisation, la densité et la pollution conduisent à inventer les services publics en réseau, qui créent une eau ‘urbaine’ distincte de l’eau-ressource, et séparée par les deux usines (eau potable – épuration) • L’eau ressource est un bien commun, l’eau service est un bien collectif, devenant un bien de club lorsque tous sont raccordés • Mais au milieu du 20ème siècle, les Etats-nations, soutenus aussi bien par les USA que l’URSS, ont tenté de résoudre tous les problèmes par la grande hydraulique.
La confusion du débat mondial • Les hydrologues, géographes et ingénieurs ont inventé des indicateurs de demande forfaitaire (1000-1500 m3/hab/an) sans se rendre compte qu’ils restaient dans une logique d’offre • Les économistes plaquent leurs outils sur un secteur qui ne rentre pas bien dans l’économie de marché; on parle plus de marchés de l’eau qu’on n’en voit! La privatisation totale des services publics est déjà un échec. • Mais les media et certains anti-mondialisation confondent privatisation de la ressource et privatisation des services publics: la raréfaction de l’eau conduirait les pauvres à mourir de soif ! • La revendication de l’eau comme bien public mondial donc d’accès gratuit, comme l’air, ne correspond ni à l’histoire de l’humanité, ni aux réalités actuelles. • Voyons le cas de l’Europe
En France , l’eau n’est pas Domaine Public, mais Patrimoine commun de la Nation • Définition de l’eau dans l’art. 1 de la loi de 1992 • Traduit l’anglais Common Property • On peut le comprendre en reprenant l’histoire comparée des systèmes juridiques • Et en cherchant le droit « coutumier-communautaire » dans les plis du droit positif contemporain • Dans de nombreux pays européens il reste des biens ‘ni publics ni privés’: les communaux, les rivières…
Les trois catégories du droit de l ’eau(selon le droit romain) Eaux Publiques (res publica) XIXème siècle: PROPRIÉTÉ XXIème siècle: USAGE dominio eminente dominio util Eaux Privées (res nullius) Patrimoine commun (res comunis omnium & coutumes germaniques) Coalition libérale-étatique Paul Sabatier Coalition de gouvernance subsidiaire
Evolution du droit de l’eau en Europe (1) • Comme partout l’eau relève d’abord du droit coutumier communautaire: elle est le bien commun des tribus (notamment germaniques: Volksrecht • Seul l’Empire Romain ajoute eaux publiques & privées • Moyen Âge : le droit des seigneurs (abusus) se superpose au droit commun (usage): domaine éminent et domaine utile, les bons et les mauvais seigneurs • A la Renaissance, les cités italiennes redécouvrent le droit romain, et le transmettent aux grandes monarchies (France et Espagne) • Révolution française: Code civil, abolition des coutumes, le domaine éminent devient domaine public
Evolution du droit de l’eau en Europe (2) • Tentation libérale au 19ème Siècle : eaux soit publiques, soit privées : négation des ‘communaux’. • Etats-Unis d’Amérique: riparian rights ou riparian ownership? Combinaison complexe avec le droit colonial espagnol, et la loi des chercheurs d’or: prior appropriation • Mais échec même en France: reconnaissance du caractère commun des rivières non navigables dans la loi de 1898 • Environnement, retour du coutumier-communautaire, la règle d’usage avant l’appropriation. USA, Europe du Nord, puis UE • La tension Etat-propriété remplacée par la tension Etat-communauté (de bassin)
Conséquences de cette histoire pour les pays Andins • Le droit colonial hispanique est d’abord un droit féodal: les colons peuvent abuser des ressources, mais s’ils ne respectent pas les droits d’usage coutumiers des tribus indiennes, elles se révoltent • Compromis de Mexico (étudié par A. Musset): cas typique où les aqueducs à distance doivent avoir des fuites organisées, et alimenter des fontaines publiques gratuites • L’Etat post-colonial est tenté par une domanialisation permettant de mobiliser l’eau, et tend à nier les droits d’usage au nom du développement. La crise financière et la privatisation font pire encore, car l’eau devient obligatoire et payante! (de Misicuni à Cochabamba) • La revendication actuelle des mouvements indiens pour une eau gratuite est donc fondée historiquement, comme pour les paysans européens. Mais c’est une eau-ressource, pas un service public ! • Exemple des ‘puits’ d’el Alto?
L’eau est-elle un bien collectif ?(d’après Ostrom V. & Ostrom E., 1977)
Intégration de la Gestion des Ressources en Eau:la Confrontation État - CommunautéPays centralisésPays subsidiaires • Ont adopté la gestion par bassin • Espagne: Confederaciones Hidrograficas & Comunidades de Usuarios de Aquiferos; France: Agences de l ’eau • Angleterre & Galles: RWA puis NRA puis Environment Agency; WSCplc; Catchment plans, LEAPs • Ont plutôt choisi la Région administrative • Italie: Regioni, Province & Cittá mais Autoritá di bacino & ATO en Consorzi Idrici; Portugal: 5 régions administratives et 300 communes, 15 plans de bassins • Allemagne: Länder & LAWA, sauf Ruhr Genossenschaften; Pays-Bas & Belgique: provinces et Waterschappen
La question de la décentralisation est essentielle • Pour répartir les ressources, en Europe, on s’oriente vers une décentralisation au niveau régional / de bassin, et on insiste davantage sur l’efficacité de gestion et la coopération entre les niveaux de gouvernement, que sur l’autorité publique. De l’Etat maître à l’Etat gardien. • La ressource ne peut être privatisée: même les pays latins dissocient le droit d’usage du droit de propriété des eaux souterraines • On cherche aussi la participation des usagers dans des comités de type communautaire plus que collectif (par catégories d’usage plus que par des élus du suffrage universel) • Des évolutions semblables pour les services publics, mais à une autre échelle, et avec une place pour le secteur privé
Pourquoi un secteur séparé des services publics? • Avant les services publics : - Eau bien commun pour les paysans - Aqueducs des seigneurs, puis des Etats - Problématique de la ‘quantité lointaine’ • Avènement du “comfort”: - Concessions à sociétés privées - Mais desserte partielle (élites, centre) - Difficultés financières & techniques • Le municipalisme : - reprise en mains municipale (santé publ.) - Financements publics aidés - généralisation, régies, syndicats - Mais pas de tradition d’amortissement • L’eau ‘urbaine’ : - Usines de traitement, age de la qualité - Légitimité de la facturation au volume - Développement de l’autofinancement
Crise du municipalisme et adaptations • Quand les services publics deviennent une industrie mature, plus de subventions, donc le renouvellement à long terme implique une forte croissance des tarifs • En plus, on tend de plus en plus à facturer le service d’assainissement dans la facture d’eau, en profitant du fort taux de recouvrement des factures • Enfin, les critères de potabilité deviennent plus sévères avec le progrès des connaissances, mais il devient difficile de les satisfaire, sauf à un prix très élevé. On risque de perdre la confiance du public • Le retour à des formes de gestion commerciales permet de mieux gérer l’amortissement des installations. Mais on va aussi assister à des concentrations supra-locales, et à des entreprises multiservices. Tout ceci nécessite une coopération entre acteurs publics et privés
L’art de la péréquation • Depuis toujours, solidarités sociales (impératif sanitaire): forfaits, rates, blocs croissants (attention aux effets régressifs) • Péréquation par la concentration / centralisation régionale. • Péréquation dans le temps: subventions, prêts aidés, banques de l’eau, redevances (système français). • Entreprises multi-services locales: le Stadtwerk allemand • Les pays ne choisissent pas vraiment, mais innovent dans le cadre de leur culture politique et géographique.
Leçons de l’Histoire • La gestion publique a remplacé les concessions parce qu’elle seule pouvait généraliser les raccordements en obtenant de l’argent pas cher (paiements par l’impôt, caisses d’épargne). • L’Europe n’aurait jamais eu de bons services publics sans une forte intervention de collectivités locales compétentes, et sans financement d’abord par les impôts locaux. Créer la confiance du public • En revanche les restrictions sur les amortissements et les provisions dans la comptabilité publique ont poussé les collectivités locales à chercher des délégataires, ou à créer des entreprises municipales, ou à se regrouper en syndicats, pour trouver des solutions durables au remplacement des infrastructures. Passage des taxes aux factures, consumérisation • Si l’eau reste locale (poids de l’eau), il y a peu de chances pour que le modèle anglais de privatisation complète soit jamais attractif. A fortiori dans le Tiers Monde
Différences avec les PED ? • Le municipalisme européen a correspondu à la domination des couches moyennes salariées et épargnantes des villes • Il n’y avait pas de différence technique flagrante avec les grandes villes du Tiers Monde jusqu’en 1945, sauf en ce qui concerne la solidarité sociale à l’échelle locale, notamment pour la santé publique • Mais le post colonialisme implique une différenciation sociale très forte et donc une cohésion nécessitant autoritarisme et clientélisme, d’où des approches centralisatrices pour les services (ex. Brésil) • Mais, les entreprises publiques d’Etat sont rentrées en crise: tentation de privatisation/ décentralisation • Les conditions démographiques et sanitaires sont très différentes en termes de solidarité sociale avec l’Europe
Quelles solutions pour le droit à l’eau? • Mais les populations pauvres veulent-elles notre confort d’eau potable et d’assainissement chez elles? Non seulement elles ne peuvent payer • Mais si elles vivent encore dans la culture du système juridique post-colonial, elles veulent l’eau gratuite: comment passer de l’eau ressource et bien commun à l’eau collective et citadine? • Si une fraction importante de la population d’une ville est ‘rationnée’, on ne peut pas rationaliser le service: cette question se pose aussi en Europe du sud … • Il faut donc en passer par un financement public et des taxes locales, et donc une responsabilisation des collectivités locales, contrairement à ce qu’a prôné la Banque Mondiale pendant tant d’années • Puis, organiser l’aides des autres niveaux de gouvernement par subsidiarité ascendante: la confiance réduit les taux d’intérêt !!! • Mais il faut aussi regarder en face la fragmentation sociale des grandes villes du Tiers Monde : articuler un service public de base avec des systèmes communautaires dans les Barrios.
Conclusion: la clé de la recherche!Au moins 3 enjeux dans plusieurs champs Attention aux Amalgames et aux Confusions ! Merci de votre attention
Historique de la politique européenne de l’eau • 1975-1988 (les 3 premiers programmes-cadres): Harmonisation des politiques d’environnement et surtout de santé publique pour « aplanir le terrain de jeu » de la concurrence 7 Directives adoptées entre 1975 et 1980: qualité eaux superficielles, baignade, conchyliculture, eaux souterraines, eau potable, toxiques de l’industrie …) • 1988-1994 (4ème progr. Cadre et traité de Maastricht Début de la politique environnementale commune, et développement des commissions internationales de rivières (CIPR, CIPEL) Deux nouvelles directives sur les émissions (DERU et DNA) adoptées La 3ème Directive sur les immissions (écologie des cours d’eau) abandonnée Débat autour de l’approche combinée et soucis des coûts élevés • 1995- 2004 (5ème-6ème progr. traité d’Amsterdam, Aarhus) Approche intégrée et question de la tenabilité à long terme La DCE initiée sous présidence française, une task force a écrit un projet, suivi de houleux débats Conseil-Commission-Parlement, premier cas de conciliation selon traité d’Amsterdam Adoption en Octobre 2000 (CE 2000/60); Groupes de travail de Guidelines
1 Environnement 2 Economie Ethique 3 La Directive Cadre & les « 3 E » 1 – Environnement : bon état ecologique & chimique d ’ici à 15 ans 2 – Economie : les usagers de l’eau payent le « coût complet » des services d ’eau 3 – Accepabilité: une politique de l ’eau transparente & participative Le rêve de l ’économiste est de faire rentrer ces trois objectifs dans le coût à tarifer
Les principaux enjeux de la DCE • La notion de district hydrographique: Quelle taille, quelle relation entre las acteurs, quelle subsidiarité? • Le « bon état écologique » des milieux aquatiques en 15 ans Qu’est-ce que c’est l’état de référence? Quels indicateurs? • Le recouvrement des coûts et l’analyse économique; le « full cost pricing »; sectoriel ou global bassin? • La participation du public Tout public ou acteurs qualifiés? Comités permanents ou sondages? • Les substances dangereuses: réduction & élimination Question on résolue, coûts énormes de l’élimination • Les eaux souterraines, et la gestion quantitative de l’eau redéfinir sécheresse et inondations par rapport à vulnérabilité …
Droit romain Coutumes germaniques Centralisé Espagne Angleterre Subsidiaire Portugal Italie Pays Bas Allemagne Typologie rapide des systèmes administratifs (Subsidiarité = décentralisation + coopération entre entités différentes) équité = égalité
Droit romain Coutumes germaniques Centralisé Espagne Angleterre Subsidiaire Portugal Italie Pays Bas Allemagne La France devrait être avec l ’Espagne, mais elle a créé les Agences de l ’eau France
les Agences de l ’eau sont des institutions partiellement subsidiaires • Sont les exécutifs des comités de bassin, composés de façon qualitative: 1/3 élus, 1/3 usagers industriels, 1/6 Etat, 1/6 usagers associatifs, scientifiques • Les CB votent des programmes quinquennaux et les taxes sur les prélèvements et les rejets polluants, pour aider à 30-40% la réalisation des programmes • Elles n’ont ni pouvoir de police, ni « maîtrise d’ouvrage », mais prélèvent des « impôts affectés » • Elles sont « quasi-inconstitutionnelles », ce qui renvoie à l’affrontement avec la coalition « libérale-étatique ».
Mais, le système n ’est pas assez tourné vers la gestion intégrée • Les agences ont été placées dans le rôle de financeurs passifs de projets ponctuels • L ’industrie de l’eau est historiquement héritière du génie civil et sanitaire plus que du génie de l’environnement • Il faudrait financer mieux et davantage le fonctionnement (aujourd’hui c’est surtout l’investissement), et des médiateurs • Certaines agences encouragent financièrement la gestion intégrée: les contrats (1981) et les SAGE (1992) • Mais on ne fait pas encore assez de gestion intégrée, ni de gestion par la demande des ressources en eau (Qual. /Quant.)