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Agota Kristof Le Grand Cahier. Un livre ne peut être aussi triste qu’une vie. Agota Kristof, Le troisième mensonge , 1991. Agota Kristof L’ENFANCE. 30 octobre 1935: Naissance d’ Agota Kristof, dans un petit village de Hongrie. Son père est l’unique instituteur du village.
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Agota KristofLe Grand Cahier Un livre ne peut être aussi triste qu’une vie. Agota Kristof, Le troisième mensonge, 1991
Agota KristofL’ENFANCE • 30 octobre 1935: Naissance d’Agota Kristof, dans un petit village de Hongrie. • Son père est l’unique instituteur du village. • Agota et son frère Jano, qui n’a qu’un an d’écart avec elle, sont inséparables. • Elle aime élaborer de longs mensonges et raconter des histoires à ses camarades de classe.
Guerre et Occupation • Deuxième Guerre Mondiale : la Hongrie fait partie de l’Axe. • En 1949, après la défaite des nazis, la Hongrie est occupée par les armées soviétiques. • Atmosphère de pauvreté extrême dans le pays. • À 14 ans, Agota Kristof entre à l’internat, où règne une ambiance militaire. • Écriture de poèmes en Hongrois. • Organisation de petits spectacles dont le thème principal est l’imitation des professeurs.
L’exil • 1956: Insurrections prolétariennes motivées par la haine généralisée du stalinisme. • Sévères répressions du gouvernement soviétique: 3000 morts et 13 000 blessés. • Agota Kristof doit s’enfuir du pays avec sa fille de 4 ans et son mari. • Exil en Suisse et rupture amoureuse. • Kristof travaille dans une usine d’horlogerie et élève sa fille seule. Elle écrit durant la nuit.
Une première publication en français… • 1986 : Publication du livre Le Grand Cahier aux éditions du Seuil. • Très grand succès, plusieurs traductions. • C’est la chose la plus importante d’une vie. • Tout être humain doit avoir écrit un livre. • Un livre ne peut être aussi triste qu’une vie.
Le roman d’apprentissage • Genre littéraire romanesque qui s’oppose au rêve et à l’évasion • Caractère autobiographique • Construction de l’individu. • Confrontation avec le monde et développement d’une pensée personnelle.
Les années d’apprentissage : L’homme et son milieu • Apprentissage de la survie dans un monde inhospitalier. • Rencontre avec l’homme au sommet de sa laideur : guerre et cruauté. • L’expérience des états limites : la guerre comme laboratoire des déviances sexuelles et comportementales. • Un style cru et dépouillé: le style indirect libre et la parataxe.
Adaptabilité et renforcement : l’agôgè • Le choix de la survie et du combat : Dominer ou être dominé. • Exercices de renforcement physique et mental. • Le confort devient chose étrangère aux jumeaux, ils n’en ont plus besoin. • Nous voulonsseulementvaincre la douleur, la chaleur , le froid, la faim, tout ce qui fait mal.
Le renforcement (suite) • Quandil y aura quelque chose à tuer, ilfaudra nous appeler. C’est nous qui le ferons. Elle dit : - Vousaimezça, hein ? – Non, Grand-Mère, justement, nous n’aimons pas ça. C’est pour cette raison que nous devons nous y habituer. (P.55) • Aussi nous apprenons à nous défendrecontre les grands. Nous fabriquons des armes : nous aiguisons des pierres, nous remplissons des chaussettes de sable et de gravier. Nous avonsaussi un rasoir, trouvédans le coffre du galetas, à côté de la Bible. (p.57) • «Meschéris ! Mes amours ! Je vousaime» […] À force d’être répétés, les motsperdentpeu à peuleur signification et la douleurqu’ils portent en euxs’atténue. (p.24)
Les épreuves… • Le concept d’épreuves (l’épreuve du jeûne, de la mendicité, etc.) n’est pas sans nous faire songer aux romans de la Table Ronde de Chrétien de Troyes, ainsiqu’àl’idéalchevaleresque. • Ilsfinissent pas se gagner le respect et l’admiration de tous, grâce à leursétonnantesfacultésd’adaptation.
La désensibilisation : un rempart contre le pathos • Aprèsavoirétéabandonnés par leurmère au début du récit, ils se sontdétournésprogressivement de l’enfance, du jeu et de la joie… • Le point culminant de cettemontéeprécoceversl’âgeadulteintervient à la fin, avec la disparition du père (parricide symbolique). • Au point de vuestylistique, les jumeauxadoptent un point de vueextérieurneutre. Celaleurpermet de garderune distance avec la réalité et de ne pas se laisserenvahir par la noirceurenvironnante.
Dimension intellectuelle • Leur discipline (du moins, au niveau physique et psychologique) se rapproche de l’idéalspartiate, maiselleva encore plus loin, puisqu’elleimpliqueégalement un renforcementintellectuel. • Nous nous mettons à écrire. Nous avonsdeuxheures pour traiter le sujet et deuxfeuilles de papierànotre disposition. […] Si c’est «Bien», nous pouvonsrecopier la composition dans le Grand Cahier. (p.32-33)
Écriture, observation et expérimentation : Le « Cahier expérimental » • Leur travail d’écriture se sépare en deux : les anecdotes et les épreuves. • Les anecdotes concernentl’observation et la description objective du monde qui les entoure. On peutyvoirl’influence du courant réaliste. • Les épreuvesdécoulentsouvent des anecdotes. Elles constituent l’expérimentation du mondeàcemonde et la tentative d’adaptation. La réalitédevientalors un macro laboratoireoù le sujet principal estl’êtrehumain en situation de guerre. • Le Grand Cahier, de par son style dépouillé et cru, maiségalement (et surtout) par son caractèreexpérimental, estfacilementassimilable au projetnaturalisted’Émile Zola.
Le Cahier expérimental (suite…) • [Exercice de mendicité] «-Pourquoimendiez-vous ? – Pour voirqueleffetça fait et pour observer la réaction des gens.» (P.39) • Nous avonsremarquéque les gens qui se trouventdans la cave d’unemaisonbombardéesonttoujoursmorts. Par contre, la cheminée de la maisonrestepresquetoujoursdebout. (p.106)
Écriture et vérité • Pour décidersic’est « Bien » ou « Pas bien », nous avonsunerègletrès simple : la composition doitêtrevraie. Nous devonsécrireceque nous voyons, ceque nous entendons, ceque nous faisons. (p.33) • Par exemple, ilestinterditd’écrire : «Grand-Mèreressemble à unesorcière» ; maisilestpermisd’écrire : «Les gens appellent Grand-Mère la sorcière.» (p.33)
Le Grand Cahier: Un récit fondateur… • Aux vertuschrétiennes et chevaleresques (vertu, loyauté, prouesse, sainteté), on substitue des valeurs de survie (endu-rance, absence de sensiblerie, détermina-tion et sang froid, nécessité, exactitude et froideurscientifique). Celles-cisontmieuxadaptées au contexte de guerre danslequelvivent les jumeaux.
Caractère biblique (suite…) • Vousconnaissezdonc les Dix Commandements. Les respectez-vous ? – Non, monsieur, nous ne les respectons pas. Personne ne les respecte. Il estécrit : «Tu ne tueras point» et tout le mondetue. Le curédit : - Hélas…, c’est la guerre. (p.86) • Nous ne prionsjamais, vous le savezbien. Nous voulonscomprendre. (p.110) • Car le mot «aimer» n’est pas un mot sûr, il manqué de précision et d’objectivité. «Aimer les noix» et «aimer notreMère», cela ne peutvouloir dire la même chose. La première désigne un goûtagréabledans la bouchel’autre un sentiment. (p.33) • En rentrant, nous jetonsdansl’herbe haute qui borde la route les pommes, les biscuits, le chocolat et les pièces de monnaie. La caressesurnoscheveuxest impossible à jeter. (p.39)
La mise en abyme et l’expérience de la fiction • La mise en abyme (en littérature) est un procédé qui consiste à placer, à l’intérieur d’un récit donné, un autre récit qui en reprendra les thèmes du premier. C’est le concept des poupées russes, du récit à l’intérieur du récit. Ce procédé produit un effet de super-position et de profondeur. • La mise en abyme, dans Le Grand Cahier, permet à l’auteur d’élaborer une réflexion profon-de sur l’importance de la litté-rature et de la fiction.
Importance de l’ironie dans Le Grand Cahier : Histoire du pauvre et du riche • La présence de l’ironie (on pourraitégalement dire humour noir) est flagrante. L’ironieconstitue non seulementunemiseà distance, maiségalementunefaçon de triompher de la laideur par le rire. • Il secoue les cendres de sa cigarette dans la paume de sa main. Le riche, qui aimeraitbienque le pauvres’enaille, feint de ne pas voirquel’homme a besoin d’un cendrier. […] • Ça sent bon chez vous, monsieur. – Ça sent la propreté. – Ça sent aussi la soupechaude. Je n’ai pas encore mangéaujourd’hui. – Vousauriezdû. [Le riche se retrouvantseul] – Merci, SeigneurJésus, pour toustesbienfaits […]
Gémellité et autosuffisance • Ils ne nous apparaissentjamaispitoyables, ou à plai-ndre, et c’estprincipalementparcequ’ils ne sontjamaisseuls. Ilssontfusionnés. On peutmêmenoter, du point de vuestylistique, qu’ilsparlentconstammentàl’unisson, ce qui n’est pas sans créer un effetd’étrangeté… • Nous décidons de poursuivrenosétudes sans institutions, seuls. (p.28)
La séparation • Cette distance entre nous nous semblemonstrueuse, la douleurque nous en éprouvonsest insupportable. C’estcommesi on nous avaitenlevé la moitié de notre corps. Nous n’avons plus d’équilibre, nous sommespris de vertige, nous tombons, nous perdonsconnaissance. (p.27) • La mère : Ils ne font qu’uneseulepersonne. (p.26) • La séparation se présentecommel’épreuve finale, après le meurtresymbolique du père. On pourraitl’interprétercomme le passage officielàl’âgeadulte, à la désillusion, la mort définitive de l’enfance…
Une fable noire… • Entre le conte et l’autobiographie • La vérité ou le mensonge • La fiction ou la réalité • KLAUS et LUCAS…
J'essaie d'écrire des histoires vraies, mais, à un moment donné, l'histoire devient insupportable par sa vérité même, alors je suis obligé de la changer (...) Alors, j'embellis tout. • Agota Kristof, Le troisième mensonge, 1991 • Conception et réalisation : Blaise Gaulin
Synthèse Un roman d’apprentissage qui illustre le caractère indispensable de la fiction en ce qui a trait à la survie, ainsi qu’à l’adaptation au monde, dans un contexte de guerre et de déshumanisation. http://poesieblgal2.wordpress.com/