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SYPRED - Paris Sud 11- SFDE IDF Paris le 19 octobre 2011 Quel est le responsable de la gestion des déchets? De la Directive 75/442 à la Directive 2008/98. Matthieu Wemaëre Avocat à la Cour Barreaux de Paris et de Bruxelles. En résumé, la nouvelle Directive….
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SYPRED - Paris Sud 11- SFDE IDF Paris le 19 octobre 2011Quel est le responsable de la gestion des déchets? De la Directive 75/442 à la Directive 2008/98 Matthieu Wemaëre Avocat à la Cour Barreaux de Paris et de Bruxelles
En résumé, la nouvelle Directive… • Clarifie un certain nombre de définitions importantes, comme celles du recyclage, de la valorisation et de la notion de déchet • Établit notamment une distinction entre les déchets et les sous-produits et détermine à quel stade le déchet a été suffisamment valorisé – par recyclage ou autre traitement – pour ne plus être considéré comme un déchet • Établit un « ordre de priorité » sur cinq niveaux entre les différentes options de gestion des déchets: prévention, suivie du réemploi, du recyclage, des autres formes de valorisation et enfin, en dernier recours, de l’élimination sans danger; • Renforce la prévention par l’obligation d’élaborer des programmes nationaux de prévention des déchets; • Fixe de nouveaux objectifs de recyclage: 50% des déchets ménagers et 70% des déchets de construction et de démolition d’ici à 2020
La transposition… • Garder à l’esprit les caractères du droit communautaire: • Primauté et effet direct • Article 288 TFUE: • Directive: s’adresse aux États membres qui doivent la transposer quand elle crée des droits et obligations à l’égard des particuliers • Les Etats membres ont le choix de la forme et des moyens mais … • Ils doivent garantir une transposition complète et correcte … • et assurer l’effet utile (création de droits et obligations issu du droit communautaire) au regard de l’objectif poursuivi (protection de l’environnement et de la santé) • Devoir de loyauté des États membres! • Coopération avec les institutions de l’UE, notamment la Commission en tant que Gardienne des Traités
La transposition en droit français • Travaux préparatoires menés par le MEDDTL en 2009 • Loi Grenelle 1 (aout 2009) fixe un certain nombre d’objectifs chiffrés nationaux de recyclage • Loi Grenelle 2 habilite le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance • Ordonnance n° 2010-1579 du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’UE dans le domaine des déchets • Partie Législative => modifie notamment les articles L.541.1 et suivants Code Env. Titre IV, Livre V Déchets • Avis motivé de la Commission notifié le 19 mai 2011: retard dans l’adoption de la partie réglementaire • Partie réglementaire => Décret n°2011-828 du 13 juillet 2011 • Mesures qui couvrent d’autres aspects: transfert transfrontaliers, emballages, piles et accus, pneus…
Introduction sur la responsabilité • La « responsabilité »: quelle portée/signification? • Obligation faite à une personne de répondre de ses actes du fait du rôle ou des obligations qu'elle doit assumer en vertu de sa conscience ou de la loi, et d'en supporter toutes les conséquences • La question est de savoir qui est responsable et de quoi, en vertu de quelle règle, en tenant compte de sa portée • Distinction entre responsabilité opérationnelle, financière et judiciaire, chacune découlant de règles juridiques prévues par la loi (en l’espèce, le droit communautaire) • Approche du droit positif basée sur l’analyse du cycle de vie des produits jusqu’à l’élimination finale des déchets • Multitude d’acteurs potentiellement concernés • Lien fort avec l’utilisation rationnelle des ressources naturelles et la mise en place de l’Europe du Recyclage: une responsabilité positive
Les différents aspects de la responsabilité • La responsabilité d’assurer la gestion écologiquement rationnelle des déchets: qui organise et assume le traitement des déchets? • La responsabilité du producteur de produits générateurs de déchets: de l’éco-conception en amont, à l’obligation d’organiser et/ou de financer la gestion des déchets en aval • La responsabilité financière: l’application du principe pollueur payeur en matière de gestion des déchets: qui finance? • Le rôle et la responsabilité de l’Etat pour garantir une gestion écologiquement rationnelle des déchets • La mise en cause de la responsabilité en cas de dommage causé par des déchets = qui répare le préjudice subi?
La responsabilité de la gestion des déchets • Responsabilité « opérationnelle »: • Permet d’identifier la personne chargée d’organiser et d’assumer la gestion des déchets dans le cadre d’un régime de police administrative institué pour la protection de l’environnement • Quelles obligations? • Régime « général » (art. 8 Directive Cadre 2006/12/CE): Obligation de gérer les déchets soi-même ou de les remettre à une tierce personne qui est habilitée ou autorisée à gérer les déchets) • Régime « d’exception »: REPpour des flux spécifiques (prévus par les Directives filles avant 2008): mise en place de systèmes individuels ou collectifs de collecte te de traitement • Objectifs poursuivis: • Eviter l’abandon incontrôlé des déchets, garantir la gestion des déchets, jusqu’à l’élimination finale en dernier ressort, de manière écologiquement rationnelle
La Directive Cadre n° 2008/98 • L’art. 15 de la Directive 2008/98/CE reprend l’art. 8 de la Directive 2006/12, avec même lien avec l’ex art. 4 (nouvel art. 13), et vise dorénavant le « traitement »: • Champ large: couvre toutes opérations de valorisation ou d’élimination, y compris la préparation qui les précède • Obligation de respecter la hiérarchie des modes de gestion (art. 4) • En cas de remise à un tiers, la responsabilité de valoriser/éliminer complètement les déchets « n’est pas levée, en règle générale » • EMs peuvent préciser les conditions de la responsabilité et décider dans quels cas le producteur initial conserve la responsabilité de l’ensemble de la chaîne de traitement ou si elle est partagée/déléguée • EM peuvent recourir à la REP pour canaliser la responsabilité sur le producteur du produit générateur des déchets • EM s’assurent que ceux qui prennent les déchets auprès du producteur initial/détenteur (collecteurs/transporteurs) acheminent bien les déchets vers des installations de traitement appropriées • Non respect entraîne l’application des sanctions (administratives ou pénales) prévues les EM (art. 36 de la Directive 2008/98/CE)
Sur qui pèse cette responsabilité? • Qui pèse d’abord sur le « détenteur »: le producteur initial de déchets, premier détenteur, ou la personne (…) qui a les déchets en sa possession (art. 3 (6) Directive 2008/98/CE, idem 2006/12/CE) • La possession des déchets n’est pas définie en rapport avec un droit de propriété quelconque ni à un pouvoir juridique de disposer de la chose, le droit communautaire ne légiférant pas sur le droit de propriété qui reste de la compétence des Etats membres. • En droit national, renvoi à la notion de « garde » au sens du droit civil, il n’est pas nécessaire de démontrer la « propriété » des déchets • Par exemple: l’exploitant d’une décharge illégale est détenteur • Notion large, retenue par la CJUE dans plusieurs affaires (voir Van de Walle 2004): • permet de renforcer le contrôle sur la gestion des déchets dans un but de protection de l’environnement, ce qui est le but de la Directive Cadre
En droit français • L’art. L541-2 Code Env. transpose l’art. 15 précité: • Tout producteur ou détenteur de déchets est tenu d'en assurer ou d'en faire assurer la gestion, conformément aux dispositions du présent chapitre (du Code de l’environnement). • Tout producteur ou détenteur de déchets est responsable de la gestion de ces déchets jusqu'à leur élimination ou valorisation finale, même lorsque le déchet est transféré à des fins de traitement à un tiers. • Tout producteur ou détenteur de déchets s'assure que la personne à qui il les remet est autorisée à les prendre en charge. • Liens opérés par l’article L.541-2 nouveau avec: • La nouvelle définition de la « gestion » (art. L.541-1-1) à la place de la définition large de l’élimination du droit français antérieur • Le respect de la hiérarchie des modes de gestion des déchets (art. L.541-2-1) • L’impératif d’une gestion contrôlée (art. L.541-1, 3°) soumise à un régime de police (article L.541-3)
En droit français (2) • Le producteur/détenteur des déchets ne s’exonère pas de sa responsabilité en concluant un contrat en vue d’en faire assurer l’élimination par un tiers (Cass. 13/7/2006, CE 11/1/07) • C’est une disposition d’ordre public: impossible de déléguer sa responsabilité ni sur le plan pénal, ni à l’égard de l’administration • Inopposabilité des conventions de droit privé (contrats avec les ramasseurs/transporteurs et exploitants d’installations de traitement) à l’autorité en charge d’un pouvoir de police • Exonération partielle de la responsabilité sur le plan civil si le nouveau détenteur a reçu du producteur/détenteur initial toute possibilité de prévenir le préjudice = transfert « informé » de la garde • Les acteurs de la filière de gestion restent responsables de l’exécution des obligations qui leur incombent personnellement
Sur le lien avec la REP en droit français (1) • Le principe de la REP est inscrit à l’art. L.541-10, II • Les producteurs de produits ont deux solutions pour s'acquitter de leurs obligations en vertu d’une REP: • en mettant en place des systèmes individuels de collecte et de traitement des déchets issus de leurs produits ou • en mettant en place collectivement des éco-organismes, organismes auxquels ils versent une contribution financière et transfèrent leur obligation et dont ils assurent la gouvernance. • Point important de la transposition française: • « Un producteur, un importateur ou un distributeur qui a mis en place un système individuel de collecte et de traitement des déchets approuvé ou un éco-organisme agréé, lorsqu'il pourvoit à la gestion des déchets en application du II du présent article,
Sur le lien avec la REP en droit français (2) • Quelque soit la manière dont est mis en œuvre le système individuel, y compris via un éco-organisme agréé, le producteur assujetti à une REP reste considéré comme le détenteur des déchets, et ce même s’il fait appel à des tiers dûment habiliter à les collecter, les transporter, les recevoir sur un site de traitement ou de les traiter en vue de leur valorisation ou élimination. • Canaliser la responsabilité opérationnelle (et financière) dans le cadre d’un régime de REP vers l’entité constituée par le producteur des produits concernés, éventuellement ne partenariat avec des importateurs et distributeurs, pour gérer le système individuel approuvé ou l’éco-organisme agréé. • Risque de déresponsabiliser le vrai détenteur des déchets, c’est-à-dire celui qui a le déchet en sa possession, de ne pas assurer la gestion contrôlée
Sur la responsabilité financière • Imputation des coûts de gestion: qui finance les coûts associés à la gestion? • En général, la responsabilité opérationnelle et financière vont de pair • La responsabilité financière s’impose sans préjudice de l’application de la REP (règles spécifiques), ni de la responsabilité en cas de dommage • Application du principe du Pollueur Payeur (art. 191 TFUE) • Dimension préventive (internalisation des coûts) et • Dimension curative (prise en charge des coûts de dépollution au sens large = lien avec la responsabilité en cas de dommages • Article 15 Directive Cadre 2006/12/CE: • Accent mis sur le détenteur, accessoirement sur les détenteurs antérieurs et le producteur du produit (lien REP) • Ne couvre que les coûts d’élimination au sens de l’annexe IIA, et non l’ensemble des opérations de gestion
La responsabilité financière (2) • Que dit la nouvelle Directive 2008/98/CE? • Mention du principe du pollueur payeur pour justifier que les coûts de gestion doivent être supportés par le producteur des déchets, l’actuel détenteur ou les détenteurs précédents • Les États membres peuvent décider que tout ou partie des coûts peuvent également être supportés par le producteur du produit générateur de déchets et les distributeurs • Marge de manœuvre importante laissée aux Etats membres =>Risques de distorsions entre Etats membres • Lien REP renforcé! Participation financière élargie à tous les acteurs économiques, moins de coûts pour la collectivité • Contribution environnementale en droit français • Rôle des instruments économiques et fiscaux
La responsabilité de l’Etat en matière de contrôle • La Directive 2008/98/CE est adressée aux EMs (art. 249 CE) qui doivent prendre toutes les mesures nécessaires (transposition, mise en œuvre et contrôle) • Art. 36 §1 (+ 36§2 et 34 §1) Directive 2008/98/CE • les EMs prennent les mesures pour interdire le rejet, l’abandon ou la gestion incontrôlé. Ils effectuent des inspections des installations de traitement et des entreprises de collecte et de transport, et leur appliquent des sanctions en cas de non respect des obligations. • Les Etats membres ont une obligation de résultat: • L’absence de contrôle et de mesures pour faire cesser un dommage causé par des déchets constitue un manquement au sens de l’art. 226 CE (CJCE Com. c/ Rep. Italienne, aff. C-365/97 “San Rocco”) • L’absence de contrôle, d’inspections, et de prescriptions concernant plusieurs installations de traitement de déchets est constitutif d’un manquement général et persistant aux obligations découlant de la Directive Cadre déchets (CJCE, Com. c/Irlande, aff. C-494/01)
En droit français • Article L.541-7: obligation de fournir à l'administration toutes informations concernant l'origine, la nature, les caractéristiques, les quantités, la destination et les modalités d'élimination des déchets qu'elles produisent, remettent à un tiers ou prennent en charge. • Article L.541-9: les producteurs/importateurs/exportateurs ont l’obligation de justifier doivent justifier que les déchets engendrés, à quelque stade que ce soit, par les produits qu'ils fabriquent, importent ou exportent sont de nature à être gérés dans les conditions prescrites à l’article L.541-2. • L’administration est fondée à leur réclamer toutes informations utiles sur les modes de gestion et sur les conséquences de leur mise en œuvre.
En droit français (2) • Article L541-3 : Procédure de mise en demeure lorsque des déchets sont abandonnés, déposés ou gérés de manière non contrôlée, pour imposer que soient effectuées les opérations nécessaires dans un délai déterminé • Si la personne concernée n'a pas obtempéré à cette injonction dans le délai imparti par la mise en demeure, les sanctions administratives prévues par l’article L.541-3 du Code Env. peuvent être appliquées. • L’autorité compétente peut inviter le Ministère Public à engager des poursuites si des sanctions pénales sont également prévues pour l’infraction commise (voir article L.541-46-8 Code de l’env.) • Mais la carence de l’Etat en matière de contrôle peut entraîner la mise en cause de sa responsabilité devant le juge administratif
La responsabilité en cas de dommage • La Directive Cadre 2008/98/CE ne comporte pas de régime de responsabilité en cas de préjudice causé par des déchets (malgré les tentatives de la Commission, depuis 1989) • Les régimes traditionnels de responsabilité s’appliquent (au plan civil, pénal, ou administratif) selon des traditions juridiques nationales • Le non respect des obligations prévues pour la gestion contrôlée des déchets facilitent la mise en cause de la responsabilité civile ou pénale • Règles particulières en droit international pour les dommages causés par des déchets dangereux lors de leur transferts transfrontaliers (protocole de Bâle du 10 juillet 1999, additionnel à la Convention de Bâle de 1989, non entré en vigueur) • Mais la Directive 2004/35/CE sur la responsabilité environnementale s’applique aux déchets
En droit français • En cas de remise des déchets à une installation de traitement, toute personne qui remet ou fait remettre des déchets à tout autre qu’une personne autorisée à les prendre en charge est solidairement responsable avec lui des dommages causés par ces déchets (article L. 541-23 du Code de l’environnement) • Cette responsabilité s’applique en cas de dommage causés par les déchets, elle complète la responsabilité opérationnelle qui incombe au producteur des déchets ou à leur détenteur dans les conditions discutées plus haut.
L’affaire Erika (C-188/07) devant la CJCE (1) • Faits: Total (pétrolier) passe un contrat avec ENEL (transporteur) pour livrer du fioul lourd destiné à produire de l’électricité. Le navire Erika qui transporte la cargaison sombre à 35 miles marins des côtes françaises (Finistère) entraînant une pollution littoral atlantique français. • Procédure: • La Commune de Mesquer (Loire Atlantique) introduit une action en réparation contre Total et ENEL devant le Tribunal de Commerce de Saint Nazaire sur le fondement de la loi 75-633 relative aux déchets (qui transpose en droit français la Directive Cadre) • Déboutée en 2000, la Commune de Mesquer fait appel devant la Cour d’Appel de Rennes qui, en 2002, confirme le jugement au motif que, si le fioul a bien généré des déchets, Total ne pouvait pas être regardé comme productrice ou détentrice des déchets • Pourvoi en Cassation, sursis à statuer en 2007 pour poser 3 questions préjudicielles à la CJCE sur l’interprétation de la Directive Cadre, qui rend son arrêt le 24 juin 2008
L’affaire Erika (C-188/07) devant la CJCE (2) • La CJCE consacre une approche téléologique de la notion de déchet afin de permettre une application utile de la Directive • Le fioul n’est pas un déchet s’il est exploité et commercialisé et s’il peut être exploité en tant que tel, mais il est un déchet lorsque, déversé accidentellement en mer et mélangé avec d’autres matériaux, il n’est plus possible de l’exploiter sans transformation préalable • Ce n’est pas le naufrage, la perte matérielle, qui caractérise le déchet, mais l’impossibilité de le récupérer et de vendre la substance sans une transformation qui constituerait une charge telle que le détenteur ne peut que s’en défaire • Si le fioul est un déchet: la Directive Cadre s’applique (même si le lieu du naufrage se situe en zone économique exclusive)
L’affaire Erika (C-188/07) devant la CJCE (3) • Le vendeur du fioul et affréteur du navire peut être regardé comme le producteur des déchets…mais aussi le détenteur antérieur • La Cour distingue le détenteur au sens de l’art. 8 Directive 2006/12/CE, qui est tenu par une responsabilité matérielle (d’organiser la gestion), et le détenteur au sens de l’art. 15 (responsabilité financière) qui doit financer les coûts de gestion et, le cas échéant, de réparation • Dans le fil de l’arrêt Van de Walle, le propriétaire du navire est considéré comme détenteur au sens de l’article 8 • L’affréteur peut être considéré comme le « détenteur antérieur » au sens de l’art. 15, si le juge national considère qu’il a contribué au risque de survenance du dommage, s’agissant notamment du choix du navire • Théorie d’équivalence des conditions: toutes les conditions nécessaires à la réalisation du dommage sont considérées comme en étant la cause
MERCI POUR VOTRE ATTENTION !! Matthieu WEMAËRE, Avocat aux barreaux de Paris et de Bruxelles Rue Beckers, B 1040 Bruxelles, Belgique matthieu.wemaëre@gmail.com