170 likes | 410 Views
Pouvoir. Réunion préparée avec Isabelle Chatenay, John Rodriguez et Michel Rumeau . 1. Étymologie / Définitions 2. Notions / Concepts : Le point de vue d’un sociologue et de deux philosophes. 3. Questions / Discussion 4. En guise de conclusion. Étymologie et définitions. Étymologie :
E N D
Pouvoir Réunion préparée avec Isabelle Chatenay, John Rodriguez et Michel Rumeau 1. Étymologie / Définitions2. Notions / Concepts :Le point de vue d’un sociologue et de deux philosophes.3. Questions / Discussion4. En guise de conclusion
Étymologie et définitions • Étymologie : Substantif de l’infinitif, pouvoir vient du latin populaire ‘’potere’’ issu de ‘’posse’’ , être capable de. • Définitions : • Petit Robert : • Le fait de pouvoir (faculté, possibilité) ; ex : le pouvoir de parler • La capacité légale de faire une chose, avoir pouvoir de ; ex : pouvoir d’un tuteur • Propriété physique d’une substance ; ex : le pouvoir calorifique • Possibilité d’agir sur quelqu’un ou quelque chose : ascendant autorité • Situation de celui qui dirige ; ex : pouvoir du gouvernement • Droit et possibilité d’action dans un domaine spécifique ; ex : pouvoir législatif • Dictionnaire philosophique de Comte-Sponville(extrait) : Définition parfaite chez Hobbes (1588-1679) : « Le pouvoir d’un homme consiste dans ses moyens présents d’obtenir quelque bien apparent futur ». Deux sens donc : pouvoir de ; et pouvoir sur. L’action possible ou la domination réelle.
Le point de vue d’un sociologue et de deux philosophes. • Le sociologue allemand Max Weber (1864-1920) distingue 3 grandes formes de légitimation du pouvoir : • Le pouvoir traditionnel qui prend racine dans la croyance au caractère sacré d’institutions fondées sur la coutume. • Le pouvoir charismatique qui résulte de la confiance accordé à un individu, en vertu de circonstances exceptionnelles ou de qualités propres. • Le pouvoir légal qui s’appuie sur la croyance en la valeur rationnelle de règles qui s’imposent à tous. C’est celui de l’Etat moderne qui s’exerce dans un cadre juridique -l’Etat de droit- qui en définit les limites. • Pour le philosophe Alain (1868-1951), aucun pouvoir n’est légitime s’il ne permet la libre expression des désaccords et une opposition, d’où l’importance de la critique, du conflit ou du différend, plus fondamentalement démocratique à ses yeux que le consensus. C’est pourquoi, la résistance au pouvoir lui paraît être une vertu civique autant, sinon plus, que l’obéissance au pouvoir. • Pour le philosophe Michel Foucault (1926-1984), le pouvoir ne se laisse pas ramener à une source unique, comme l’affirment les théoriciens de l’Etat. Le pouvoir ou plutôt les pouvoirs sont diffus, et les institutions qui visent à les intégrer son multiples : la famille, l’école, l’art, le marché, la prison, la médecine, l’Etat..... Autrement dit, le pouvoir n’est jamais tout puissant mais infini. C’est pourquoi la lutte contre le pouvoir est aussi sans fin et ne peut être que locale. Qu’il s’agisse d’un pouvoir à conquérir ou à renverser, MF suggère de substituer à l’idée de révolution, celle de révolte ou de résistance.
QUESTIONS • Le pouvoir : puissance ou domination ? • Le pouvoir ne s’exprime-t-il pas de différentes façons ? • Le pouvoir est-il nécessaire à l’ordre et à la justice ? • Le pouvoir : gage ou obstacle à la liberté ?
Le pouvoir : puissance ou domination ? Animation Michel Rumeau La puissance est une force qui s’exerce (puissance en acte) ou qui peut s’exercer (puissance en puissance) « Pouvoir de » et « pouvoir sur », est-ce la même chose ? Exercer un pouvoir (familial, politique, social, psychologique, symbolique . . .) est-ce dominer ?
1. Le pouvoir : puissance ou domination ? • De la puissance en tant que « pouvoir de » • « Toute puissance est acte, active, et en acte » disait Deleuze à propos de Spinoza. C’est l’être même, en tant qu’il est puissance d’être (conatus, force, énergie) ajoute CS. • Nietzsche voit dans la volonté de puissance, l’essence la plus intime de l’être. C’est une espèce de conatus, mais qui tendrait moins à la conservation de soi-même qu’à son dépassement. Non à persévérer dans son être, comme le voulait Spinoza, mais à le surmonter. Si l’on suit Spinoza et Nietzsche, tout acte est puissance : la puissance, c’est le pouvoir de faire. • A la domination par la force en tant que forme ultime du « pouvoir sur » • Il n’y a pas de « pouvoir sur » sans « pouvoir de ». Le « pouvoir de »est premier. Le « pouvoir sur » n’est qu’une catégorie particulière de « pouvoir de ». • Le « pouvoir sur », c’est le pouvoir de commander et de se faire obéir. C’est usuellement ce qu’on appelle le pouvoir. C’est la puissance humaine que l’on subit ou que l’on exerce • Le secret du pouvoir, note CS, est qu’il s’exerce même quand il n’agit pas.Il gouverne même quand il n’ordonne pas. Pouvoir commander, c’est déjà commander. C’est par où le pouvoir rejoint l’autorité. • La domination en tant que pouvoir exercer par la violence (usage immodéré de la force) est la forme ultime du « pouvoir sur ». « La violence n’est acceptable que lorsque son absence serait pire » dit CS. Le pouvoir, c’est la puissance humaine que l’on subit (librement ou pas), ou que l’on exerce sur autrui (consciemment ou pas). La puissance, nous la partageons avec la nature : c‘est le « pouvoir de » Il n’est de pouvoir qu’humain : c’est le « pouvoir sur ». C’est pourquoi, dit A.C-S « Le pouvoir est tellement agaçant, quand c’est celui des autres, et tellement délicieux, quand c’est le sien... »
Le pouvoir ne s’exprime-t-il pas de différentes façons ? Animation John Rodriguez Le pouvoir s’exerce-t-il toujours par la force ? Le pouvoir n’est-il pas multiforme et de natures diverses ?
2. Le pouvoir ne s’exprime-t-il pas de différentes façons ? • Du « pouvoir de » au « pouvoir sur » n’y a-t-il pas x formes de pouvoir ? • Le pouvoir de séduction n’est-il pas un pouvoir ? • L’art de convaincre ou l’art tout court, ne sont-ils pas des pouvoirs ? • Informer, n’ est ce pas exercer un pouvoir ? Ne parle-t-on pas de 4iem pouvoir dans les démocraties concernant les médias ? • Savoir, d’une façon générale, n’est-il pas déjà une forme de pouvoir ? Dès lors qu’il n’est pas isolé, tout « pouvoir de », tout acte, ne tend-t-il pas à devenir un « pouvoir sur » ? • Le pouvoir ou plutôt les pouvoirs ne sont-ils pas de différentes natures ? • Le pouvoir exécutif, celui qui peut user de la force, n’est pas le seul pouvoir. • Hobbes (1588-1679) voyait dans le désir du pouvoir une propension générale de l’humanité : « Je mets au premier rang, à titre d’inclination générale de toute l’humanité, un désir perpétuel et sans trêve d’acquérir pouvoir après pouvoir, désir qui ne cesse qu’à la mort » • Si laforce, le ciel, le feu et la puissance, en tant que symboles du « masculin », peuvent expliquer les formes de pouvoir qui proviennent de la force; l’inertie, la terre, l’eau et l’importance qui symbolisent le « féminin », peuvent en expliquer d’autres (pas forcément des moindres). Le pouvoir n’est pas l’apanage exclusif de la force, nous le savons bien ! Qui pourrait s’en plaindre ? Avec Michel Foucault,on peut penser que le pouvoir ne se laisse pas ramener à une source unique, celle de la force contraignante. Entre le « pouvoir de » et le « pouvoir sur » , la frontière est souvent ténue. Autrement dit, le pouvoir ne serait jamais tout puissant mais multiforme et diffus.
Le pouvoir est-il nécessaire à l’ordre et à la justice ? Animation Isabelle Chatenay L’ordre (commandement) et l’ordre (rangement) sont-ils sans rapport ? L’ordre et la justice (collective) ne sont-ils pas liés ? L’anarchie peut-elle conduire à la justice ?
3. Le pouvoir est-il nécessaire à l’ordre et à la justice ? • De l’ordre (commandement) et de l’ordre (rangement) : • Il n’y a pas d’ordre (rangement) universel en soi. L’ordre (rangement) est subjectif : c’est une espèce de désordre qui nous arrange parce qu’on s’y retrouve. • L’ordre (commandement universalise l’ordre (rangement). L’ordre commandement devient la norme de rangement applicable par tous. La loi (ordre commandement) a pouvoir sur l’ordre de rangement collectif. Il n’y a pas d‘ordre universel en soi. La loi et le pouvoir (démocratique ou non) universalisent l’ordre • De la justice et de la loi: • Il n’y a pas de justice universelle en soi. Chacun, selon les valeurs qui sont les siennes, se fait une idée de ce qui est juste. • C’est parce que nous manquons de moralité (donc d’amour) que nous avons besoin des lois pour savoir ce qui est juste, dirait CS. C’est parce que l’amour et la morale ne sont pas universels (s’ils l’étaient nous ne serions pas libres) que nous avons besoin des lois et de la justice judiciaire. • A propos de l’anarchie • L’anarchie, c’est l’absence de pouvoir ou le désordre. Cette ambiguïté en dit long sur l’ordre (qu’il ne va pas sans l’obéissance) et sur la liberté (qu’elle ne va pas sans contraintes) dit CS. • « Tout pouvoir est militaire », disait Alain. C’est pourquoi les anarchistes ont horreur de l’armée ; et les militaires, de l’anarchie. Les démocrates se méfient et de l’une et de l’autre: ils savent bien que le désordre, presque toujours fait le jeu de la force ; et qu’aucune force ne vaut, qu’au service de la justice ou de la liberté. L’anarchie ferait un régime parfait pour les anges dit CS ; c’est ce qui les rend suspecte de bêtise (Pascal : « Qui veut faire l’ange fait la bête » ) ou d’angélisme. Sans volonté d’ordre dans la cité, pas de lois; sans pouvoir pas de lois et, quoi qu’en pensent les anarchistes, probablement pas de justice possible.Il n’en demeure pas moins que : « Aucun pouvoir n’est la justice; mais il n’y a pas de justice sans pouvoir » dit A.C-S « Ne pouvant faire qu’il soit force d’obéir à la justice, on fait qu’il soit juste d’obéir à la force » ditPascal
Le pouvoir : gage ou obstacle à la liberté ? Penser qu’être libre est un droit, n’est-ce pas du même coup fixer des limites à la liberté ? Du désir libre (comme puissance) à la liberté désirable (comme valeur).
4. Le pouvoir : gage ou obstacle à la liberté ? • A propos de la liberté et de ses limites : • Etre libre, c’est faire ce que l’on veut; soit ! • S’il n’y a aucune raison de vouloir limiter la liberté de l’esprit, puisque la vérité n’obéit à personne, pas même au sujet qui la pense ; « c’est en quoi elle est libre et libère » dirait CS. • Concernant la liberté d’action, il en va différemment, puisque ma liberté s’arrête où commence celle des autres : • Rousseau dit : « Quand chacun fait ce qui lui plaît, on fait souvent ce qui déplaît à d’autres et cela ne s’appelle pas un Etat libre » • Kant considère que la liberté repose sur la capacité de se déterminer en fonction d’une volonté morale sans laquelle il ne saurait être question de liberté. Je suis libre d’agir quand rien ne s’y oppose : ni ma volonté morale dirait Kant, ni la loi dirait Rousseau. La liberté d’action est toujours relative, toujours limitée. • Du désir libre (comme puissance) à la liberté désirable (comme valeur): • On ne passe du primat du désir libre (puissance égocentrée par excellence) à la primauté de la liberté désirable (valeur éclairée par l’amour) qu’à condition de le vouloir. C’est le mouvement ascendant du désir dirait CS; celui qui tient compte du désir d’autrui. • C’est par quoi la hiérarchie des ordres de CS peut nous aider à éclairer la question du pouvoir : • C’est parce que nous ne sommes pas « tout amour » que nous avons besoin d’une morale • C’est parce que nous manquons de morale que nous avons besoin de lois et du pouvoir impératif et contraignant qui va avec. • C’est la disjonction des ordres vérité et valeur qui légitime le pouvoir (démocratique s’entend) en tant que gage de liberté. C’est la confusion de ces deux ordres qui fait obstacle à la liberté : • Soit par défaut de pouvoir, par angélisme (anarchisme) • Soit par excès de pouvoir, par barbarie (totalitarisme ou intégrisme)
L’amour C’est l’ordre de l’éthique. C’est ce qui éclaire la morale. C’est la valeur suprême de « l’esprit ». Enchaînement descendant des primats Ce qui est objectivement le plus important dans un enchaînement descendant de détermination. Le primat est explicatif : c’est l’ordre des causes et de la connaissance. C’est ce qui sert à comprendre. Hiérarchie ascendante des primautés Ce qui vaut le plus, subjectivement, dans une hiérarchie ascendante d’évaluations. C’est l’ordre des valeurs et des fins, qui tend au meilleur ou au plus élevé. C’est ce qui sert à juger et à agir. La hiérarchie des ordres d’André Comte-SponvillePrimautés et primats /Angélisme et barbarie L’ordre de la morale C’est l’ordre où l’on se pose la question du bien et du mal. C’est l’ensemble de nos devoirs : des règles que l’on se fixe soi-même. C’est parce que nous ne sommes pas ‘‘tout amour’’ que nous avons besoin d’une morale. L’ordre juridico-politique C’est l’ordre où l’on se pose la question du légal et de l’illégal. C’est l’ordre des lois de la vie en société. C’est parce que nous manquons de moralité que nous avons besoin de lois. L’ordre de l’Economie, des sciences et des technologies C’est l’ordre où l’on se pose la question du vrai et du faux, du possible et de l’impossible. C’est l’ordre de la « matière »; de la vérité par excellence. La dialectique (primat de la matière ou de la vérité/primauté de l’esprit ou des valeurs) vaut aussi bien à titre individuel que collectif. On ne passe du primat à la primauté qu’à la condition de le vouloir : c’est le mouvement ascendant du désir. Chaque ordre a sa logique propre : confondre les ordres entre eux est donc ridicule. Pour expliquer un ordre donné, on doit faire appel aux ordres inférieurs. Pour juger un ordre donné, on doit faire appel aux ordres supérieurs. La dialectique valeur / vérité s’exerce ainsi de proche en proche. Soumettre un ordre donné, avec ses valeurs propres, à un ordre inférieur : renoncer à la primauté, c’est de la barbarie. Prétendre annuler ou déstructurer un ordre donné au nom d’un ordre supérieur : oublier le primat, c’est de l’angélisme. Principales références : Le capitalisme est-il moral ? / Dictionnaire philosophique (primats et primautés)
En guise de conclusion • « Comme le despotisme est l'abus de la royauté, l'anarchie est l'abus de la démocratie. » • Voltaire • Contre ces 2 abus (excès ou défaut de pouvoir) quoi; • si ce n’est un choix toujours difficile entre : • Angélisme et barbarie • Valeur et vérité ? • Si elle n’en décide pas pour nous, la hiérarchie des ordres de Comte-Sponville ne peut-elle pas, pour le moins, en clarifier l’analyse ?
Prochaines réunions • mardi 12 février : « Civilisations » + choix des sujets du 2e trimestre • mardi 11 mars : « Valeurs » • vendredi 4 avril : Conférence A Comte-Sponville Toutes les informations et documents sont disponibles sur : http://www.cafe-philo.eu/
Bonne et heureuse année 2008 !