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LES ORIGAMIS. LES ORIGAMIS. LES ORIGAMIS. Yong soupira, une fois de plus. Lui, l’ancien samouraï, acceptait mal son handicap. Son immobilité forcée lui pesait, il ne pouvait toujours oublier les douleurs qui le poignaient… Et, une fois de plus, il se demanda pourquoi
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LES ORIGAMIS LES ORIGAMIS LES ORIGAMIS
Yong soupira, une fois de plus. Lui, l’ancien samouraï, acceptait mal son handicap. Son immobilité forcée lui pesait, il ne pouvait toujours oublier les douleurs qui le poignaient… Et, une fois de plus, il se demanda pourquoi les enfants le prenaient ainsi pour tête de turc… Il essayait de fermer sa fenêtre avant le passage de leur groupe, aux entrées et sorties de classe. Mais il lui était parfois difficile de se lever et d’aller fermer la croisée. Cependant jamais il n’avait répondu à leurs lazzi..
Et puis… le temps passait bien lentement ! Que faire des longues heures de l’après-midi qui s’ouvrait devant lui ? Il fit pivoter son fauteuil et parcourut du regard l’étagère derrière lui. Non, il n’avait pas envie de lire… Il aperçut tout à coup, sous une pile de livres, un paquet de cartons de couleurs. Depuis quand, mais depuis quand n’avait-il pas fait d’origami ? Il attira à lui les papiers multicolores, en choisit un, et réfléchit : qu’allait-il faire ? Et… comment s’y prendre ? ses doigts hésitants caressaient le papier, et il avait l’impression que ce simple contact réveillait en lui un monde de formes, de couleurs, d’habitudes, d’automatismes…
Ses doigts hésitaient encore…palpaient le papier, commencèrent à plier. Marquer un pli… un autre pli… De ses mains naissait l’ange de la Compassion, qu’il évoquait si souvent. L’après-midi passa comme un éclair. Il posait juste sa création sur la table devant lui lorsqu’il entendit les cris et les rires des enfants… Il avait oublié la fenêtre… Les enfants japonais ressemblent à tous les enfants du monde. Ils peuvent être cruels, ils peuvent être formidables… Yong résolut de les ignorer, comme à son accoutumée, et se saisit d’une nouvelle feuille de carton léger.
La joyeuse troupe s’arrêta près de la fenêtre et les quolibets habituels commençaient à fuser, quand une des gamines s’écria : « Regardez ! » Et son doigt se pointait vers le bel ange blanc qui semblait contempler les enfants de son visage sans regard. Un respectueux silence s’établit soudain… Les doigts de Yong continuaient machinalement le pliage, mais devant cette accalmie, il leva les yeux et hasarda un timide sourire vers les enfants. La fillette qui avait toujours le doigt tendu esquissa un sourire en retour, et la bande s’éloigna en silence. Un peu plus loin, il les entendit commencer à chuchoter. L
Allons ! les choses allaient s’arranger, peut-être ! Il fignolait avec application la queue • d’une petite souris lorsque une ombre devant la fenêtre lui fit lever la tête : la fillette au • sourire était revenue et le regardait faire. Elle semblait fascinée. • Bonjour ! lui dit Yong. • Bonjour… Répondit timidement la gamine. Et elle ajouta spontanément : • Je m’appelle Yasouki. • -Et bien, Yasouki, je suis ravi de recevoir ta visite. Il te plaît donc • tant, mon bel ange ?
Oh ! oui, dit Yasouki avec ferveur. Il est… » Elle s’arrêta, à • court de mots, mais son silence même était éloquent. • Yong lui sourit gentiment : • « Eh bien, je te le donne ! viens le chercher. » • Il lui expliqua comment trouver la porte du bureau, et bientôt Yasouki entrait • à pas menus, et se tenait près de lui. Il lui tendit l’ange, quelle reçut dans ses • mains tendues en forme de coupe. Elle était sans paroles !!! • Soudain, impulsivement, elle se pencha, déposa un baiser sur la joue du vieil • homme et se sauva sans un mot.
Yong se coucha le cœur léger. Il y avait bien longtemps, songeait-il, qu’il ne s’était senti aussi léger !!! Le lendemain matin, c’est dans un silence presque religieux que la bande passa devant la fenêtre. Mais elle était fermée ! Le soir, cependant, volontairement, pour voir où en étaient les choses, Yong laissa la fenêtre ouverte. Et aligna sur la table les origamis qu’il avait achevés.
Tout de même, son cœur battait ridiculement fort, en entendant le chuchotis des enfants qui se rapprochaient. Il se morigéna : qu’attendait-il donc ? Un miracle ? Il sourit pour lui-même, en pensant que, après tout, l’on pouvait bien demander un miracle à l’Ange de la Compassion ! Et de fait, la bande s’arrêta en silence. « -Bonjour ! « dit Yasouki d’une voix claire. Et les autres firent vaguement écho. Mais un murmure d’admiration et d’incrédulité passa dans le groupe, détaillant les merveilles exposées sur le bureau.
Bientôt, oubliée la timidité ! Tout à leur émerveillement, ils se montraient les uns aux autres les petits animaux si admirablement représentés. Yong leur sourit, sans contrainte cette fois. « Cela vous plaît donc ? -C’est très bien fait, Monsieur. -Eh bien ! vous aussi, comme Yasouki, venez en choisir un ! » Yasouki, connaissant déjà les lieux, les guida jusqu’au bureau, et ce furent des commentaires, des babils, des rires de joie, des regards émerveillés…
Yong cependant réfléchissait vite ! Il savait que ces enfants étaient issus du quartier ouvrier de la banlieue proche, qu’ils étaient livrés à eux-mêmes… Se pourrait-il que lui soit offerte la possibilité d’être encore utile, de semer encore du bonheur ? Quoi de plus beau que d’allumer des étoiles dans les yeux des enfants ? Alors il proposa : « Aimeriez-vous apprendre à faire ces origamis ? »
« Oh oui ! « s’écria Yasouki. • Les autres n’osaient pas répondre. Ils regardaient celui qui était visiblement • leur chef, comme s’ils attendaient de lui des directives. Et en effet, c’est celui-ci • qui prit la parole. • « Mais, Monsieur, nous avons été si… (il laissa la phrase en suspens) • Pourquoi êtes-vous si gentil avec nous ? » • Parce que le passé est derrière nous. Il est passé !!! Et devant nous, • devant vous, c’est l’avenir qui s’ouvre… »
« Nous n’y arriverons jamais : dit celui qui tenait un éléphant dans ses mains. -non, répondit Yong presque sévèrement, vous n’y arriverez jamais si vous dites au départ que vous n’y arriverez pas. Celui qui part battu dans son cœur ne peut arriver à la victoire, car il ne trouve pas en lui l’énergie nécessaire pour atteindre son but. C’est dur, en effet, c’est long, avant d’arriver à faire ce que vous avez dans vos mains. Mais on commencera par des choses simples. Si vos parents sont d’accord, moi je veux bien vous initier… »
Ce disant, Yong savait bien que ce ne serait pas toujours de tout repos ! Que, certains jours, il préfèrerait sans doute pouvoir être tranquille, et que l’énergie de cette bande joyeuse mais indisciplinée ne serait pas toujours facile à canaliser. Mais… il en avait vu d’autres ! Et c’est le cœur joyeux, en pleine connaissance de cause, qu’il se lançait dans l’aventure !
Les enfants repartirent, heureux, excités, babillant comme une bande de moineaux. Yong était cependant un peu déçu : il aurait aimé que Yasouki l’embrasse cette fois encore, mais il ne se sentait pas le droit de le demander. Le bureau semblait vide et calme, après le départ des enfants. Yong se disait qu’il avait bien fait, et mettait de l’ordre sur son bureau tout en dressant ses plans. Il fallait se procurer des papiers, beaucoup de papiers pour les petits doigts encore malhabiles. Et trouver des sujets simples mais attrayants : Et…
Il fut interrompu par deux petits coups frappés contre sa porte. Il cria d’entrer, et la porte s’ouvrit. Il vit d’abord un bouquet de fleurs des champs, un gros bouquet ! Puis la frimousse de Yasouki. Son sourire. Ses yeux pétillants. « -on l’a tous ramassé pour vous, pour vous remercier. Et ils m’ont envoyée vous le porter pour que je fasse le bouquet. »
Yong n’aurait jamais imaginé qu’une simple visite, qu’un simple sourire puisse donner autant de joie ! Il regarda l’enfant arranger avec goût le bouquet, et la remercia chaleureusement. Alors, Yasouki s’approcha et noua ses bras autour du cou de Yong, pour l’embrasser affectueusement.
Je puis vous l’assurer : toute la soirée, Yong se sentit le plus heureux des hommes ! Et son sommeil fut peuplé de sourires et de câlins d’enfants…
Les enfants vinrent régulièrement. Une belle émulation régnait dans le groupe, et, si tous ne montraient pas les mêmes dispositions manuelles, tous cependant arrivaient à réaliser quelque chose, guidés par un Yong attentif qui se révéla être un très bon professeur.
Petit à petit, des parents vinrent remercier et féliciter Yong, dire leur étonnement devant ce que leur enfant arrivait à réaliser. Un réseau se sympathie se créait. Yong ne trouvait plus le temps long et les journées tristes. Elles étaient ensoleillées par le sourire de Yasouki !
Ces merveilleuses photos d’origamis m’ont été offertes par ma Petite sœur virtuelle, Diane, que je remercie ici. Musique : Chine Jacky Questel, Bidos – Juin 2005
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