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TON BEAU CAPITAINE. Simone Schwarz-Bart. Genre Drame Nombre de personnages (1 homme, 1 voix f éminine) Longueur 1 acte 4 tableaux 58 pages Temps et lieux Guadeloupe, période contemporaine Thèmes les souffrances de l’exil , le couple face à l’immigration .
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TON BEAU CAPITAINE Simone Schwarz-Bart
Genre • Drame • Nombre de personnages (1 homme, 1 voix féminine) • Longueur • 1 acte • 4 tableaux • 58 pages • Temps et lieux • Guadeloupe, période contemporaine • Thèmes • les souffrances de l’exil , le couple face à l’immigration
Parcours dramatiques : • La pièce de Simone Schwartz-Bart présente un aspect unitaire, cependant nous pouvons y repérer une sorte de "raccommodage" de morceaux de vie. Simone Schwarz-Bart appartient à cette lignée d'écrivains, désignés sous le nom d'"écrivains-raphsodes", selon l'heureuse expression de Jean-Pierre Sarrazac. Enregistrant les changements sociaux, recomposant les lambeaux, les fragments de la vie, les raphsodant, elle enchevêtre les thèmes, les entrelace ou les oppose pour éclairer d'un jour nouveau l'histoire immédiate de la société de son temps.
Évoquer cet itinéraire personnel revient pour Simone Schwarz-Bart à parler politique et à interroger l'histoire. La dimension intime s'inscrit dans le social et rappelle qu'aux Antilles, tout est traversé par l'Histoire et notamment celle de l'esclavage. Sous prétexte de raconter une histoire d'amour ratée, Schwarz-Bart tend à sa société un miroir et l'oblige à y reconnaître sa propre souffrance. L'absence conduit à l'effritement du couple et à la transformation de Marie-Ange et Wilnor "en courant d'air ».
Utilisant la cassette comme outil de communication et mêlant dans le récit des formes différentes comme la lettre, le conte et même le mythe, Simone Schwarz-Bart tricote une réalité multiple. En s'interrogeant sur le sort de ces sous-prolétaires haïtiens qui émigrent en Guadeloupe, Simone Schwarz-Bart remet dans les mémoires la traite des esclaves et remet en question le concept unificateur de Négritude prôné par Aimé Césaire. Le microcosme de l'histoire individuelle recompose la réalité du macrocosme de l'Histoire.
La structure dramaturgique explose (absence de scènes bien découpées au profit du tableau) et comme chez Brecht, le drame de l'individu n'a rien d'intimiste mais s'inscrit exclusivement dans la sphère sociale. L'introduction de l'étranger dans la sphère familière d'une société qui s'en détourne glisse un élément qui intrigue, étonne et suscite une interrogation. Simone Schwarz-Bart recourt au zoom d'un évènement apparemment anodin (l'arrivée d'une cassette sous forme de lettre) pour grossir la réalité socio-historique.
Le drame de Wilnor se déroule dans une pièce unique en Guadeloupe. La belle maison à colonnades que Wilnor décrit à Marie-Ange n'existe que dans son imagination. Pourtant, à partir de cet univers clos et limité du monde, Wilnor décrit la réalité de l'exil. "Ce sont les petites choses qui m'incitent à écrire plutôt que les grandes" dit souvent Simone Schwarz-Bart.Ton Beau capitaine est né du déclic provoqué par un fait quotidien banal : dans le petit village où elle habite en Guadeloupe, un voisin vient un jour frapper à sa porte. Il est haïtien, il tient à la main une cassette que sa femme, restée au pays, lui a adressée et il souhaite lui emprunter un lecteur de cassettes.
L'auteure dénonce les silences de la société à la fois guadeloupéenne et française insistant sur les refoulements accumulés depuis des décennies. L'accent est mis ici sur une situation que les Antillais connaissent bien, celle de l'oppression. Celle-ci naît de l'immigration, situation d'autant plus tragique ici puisqu'elle est infligée par des gens qui ont connu les épreuves de l'esclavage et vivent encore sous la tutelle de la France.
En examinant les ravages de l'exil, Simone Schwarz-Bart souligne les antinomies de la société guadeloupéenne, les anciens esclaves, devenant à leur tour exploiteurs. Les secrets familiaux révèlent en fait les difficultés d'insertion, les oppressions dans une société inégalitaire. En apprenant que Marie-Ange est enceinte, Wilnor mesure alors toute l'étendue de sa misère. Mais par-delà le problème intime de Marie-Ange et de Wilnor, surgit, en filigrane, la vie des paysans ou ouvriers haïtiens. En s'expatriant en Guadeloupe dans l'espoir d'une vie meilleure, ils finissent par constituer une sorte de sous-prolétariat à qui l'espoir d'avancement n'est guère promis.
Loin de Haïti et de Marie-Ange, il regarde tout ce qui l'entoure "comme de la fumée", dit-il. Les vraies valeurs se sont défaites et sa femme et lui sont devenus les victimes de tous les abandons. Abandon surtout à l'illusion de l'argent, le premier fantasme qui a suscité tous les autres et a fait sombrer la vraie relation dans une sorte d'onirisme de la communication. À cause de la misère, Wilnor a été poussé vers des rêves qui n'ont fait que le soumettre à l'impérialisme de ceux qui détiennent le pouvoir de l'argent. Derrière l'histoire de Wilnor et Marie-Ange, se profilent l'esclavage et l'esclavagisme qui hantent l'imaginaire de la plupart des Antillais.
Face à des auteurs comme Césaire qui ont affirmé la vigueur de l'identité nègre aux Antilles, on se trouve aujourd'hui dans une situation identitaire plus mouvante. Simone Schwarz-Bart fait entendre les grincements d'une histoire et d'une époque plus complexes. Loin des mythes du "héros" ou de "l'héroïne" de résistance et d'un théâtre de lutte, est née une forme d'idéologie de l'opposition.
L'affirmation d'une identité unique, est remplacée par l'acceptation du multiforme. Dans la littérature antillaise, le Métis a été la preuve historique d'une mésalliance entre le Noir et le Blanc, l'oppresseur et sa victime. Césaire voyait tout Antillais comme « un bâtard de l'Europe et de l'Afrique. » Mais le concept même de métissage a évolué vers une relation féconde qui dépasse la notion d'Autre et d'Histoire, pour enregistrer l'intention de résistance exprimée - consciemment ou inconsciemment par les textes.