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La rencontre avec le patient . L Ollivier, J Leclère, F Apiou, M Ruszniewski et S Neuenschwander Institut Curie Paris. Une rencontre entre deux individus : mais une situation toujours asymétrique. Radiologue:
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La rencontre avec le patient L Ollivier, J Leclère, F Apiou, M Ruszniewski et S Neuenschwander Institut Curie Paris
Une rencontre entre deux individus : mais une situation toujours asymétrique • Radiologue: • Connaissance scientifique • Situation habituelle (routine) • Relation professionnelle • Rationnelle • Indépendante • Patient : • Ignorance • Situation exceptionnelle • Relation émotionnelle • Subjective • Dépendante Radiology: Peint par un radiologue américain
Actuellement • Patients mieux informés sur leur maladie et leurs droits, plus exigeants Informations sur le net, associations de malades • Importance de l’image en médecine • Rencontre du malade plus fréquente, réponse aux questions qu’il se pose sur sa maladie • Même si on a l’impression de « bien faire »… personne n’est à l’abri de ratage à cause du stress • Le comportement médical doit évoluer aussi en imagerie (pour des raisons d’éthique et…les risques de procès)
Particularités de la relation médicale en imagerie • Tous les actes d’imagerie sont potentiellement stressants • L’échographie en obstétrique: mort in utero, malformations, simplement la gémellité… • En cancérologie l’image peut correspondre à un verdict de mort
Verdict… L’effet de l’annonce du cancer : montage photo réalisé par une patiente
Réfléchir sur nos pratiques • Comment peut on améliorer la relation/ la communication avec le patient ? • Le radiologue n’a pas de formation en psychologie ni en technique d’entretien • Pas forcément de « vocation » au dialogue, à la relation médecin /malade • il n’est pas le seul… • Et pourtant dans certaines situations il est • le premier à connaître le résultat de l’examen, la gravité du pronostic • le premier à devoir en parler au patient
Réfléchir sur nos pratiques • Sa relationavec les malades est brève, parfois unique • Ne connaît pas le malade, son état somatique ou psychique • Ne sait pas ce qui a déjà été dit • Doit s’adapter au cas par cas et il n’y a pas de « recette » • N’a pas la « carte thérapeutique » pour rassurer le patient, avoir un « projet commun » à l’inverse du médecin référent
Remettre en cause nos pratiques • Challenge : assurer un examen techniquement bon, répondre au médecin traitant et en plus avoir une bonne relation avec le malade? Est-ce possible? • On ne l’a pas appris, cela s’apprend-il? • D’abord, en radiologie particulièrement, il faut être affranchi de la technique pour avoir toutes ses capacités pour s’intéresser au malade • Il faut être capable de relativiser la « belle image » • Si nécessaire il faut accepter de limiter le temps ou le nombre de séquences d’un examen, se limiter à répondre à la question
Connaître l’effet de l’annonce d’un diagnostic grave • Effet sur celui qui l’entend, sur celui qui l’annonce • Souffrance du malade, du soignant • Identification au malade • Rappel de sa propre mortalité • “Savoir encombrant” peur d’en dire trop, ou de mentir, • Peur de faire mal , de mal faire, d’être trop émotionnel
Mécanismes de défense du médecin • Inconsciemment mis en oeuvre par le médecin • Ne rien dire (mécanisme radical, travestissement de la vérité) différent de mentir par omission (distillation graduelle des faits au rythme du patient) • Tout dire, tout de suite: impression de s’alléger du fardeau de la vérité, dommages parfois irrévocables • Fausse réassurance: optimiser les résultats, espoir artificiel, décalage entre réalité médicale et le patient
Mécanismes de défense du médecin • Rationalisation: discours hermétique incompréhensible pour le patient, faux dialogue • Esquive: déviation de conversation “j’ai vu vos enfants, ils vont pouvoir vous aider” • Dérision “allons allons ce n’est pas la mer à boire” “ il y a eu le foie, le poumon et maintenant la tête, ça ne pourra pas monter plus haut” • Banalisation: distanciation, on reste dans le médical pur “vous avez une petite anomalie au foie, on va vous faire une petite chimio” • Identification projective: illusoire partage d’une souffrance inconnue Nous connaissons le pronostic des métastases hépatiques, les malades, non
Mécanismes de défense du malade • Dénégation personnelle ou sociale et relationnelle Vrai déni ou apparente sérénité, ne désire pas en parler • Isolation, repli sur soi, mutisme, régression, abandon de l’autonomie, patients qu’on risque “d’oublier” • Maîtrise, essai de contrôler, de comprendre la maladie, l’évolution, vigilance extême, observation scrupuleuse des soins, souvent “surinvestis” par les personnels, combativité, création d’associations, écritures de livres…. • Projection agressive, récriminations, médecin cible • Certains de ces mécanismes peuvent être difficiles à supporter pour les soignants et peuvent entraîner exaspération, rejet, abandon
Les examens d’imagerie sont source d’émotion et d’anxiété pour les patients • Comment les percevoir • Elles se traduisent par des attitudes verbales et non verbales, comportementales (peur, tristesse, déception, colère….)Parfois par de l’agressivité qu’il faut apprendre à dédramatiser « vous avez l’air très en colère » • Agitation, manque de compréhension des ordres simples, fausse jovialité, transpiration, aorte qui bat sous la sonde
Détecter les signes et les sources d’émotion et d’anxiété du patient • Certains patients cherchent un coupable à leur maladie : • eux-mêmes « j’ai trop tardé…» • ou d’autres « le diagnostic n’a pasété fait » : réflexions parfois liées à l’absence de dialogue avec les précédents médecins« c’était déjà là il y a deux ans… » • Certains patients : • se sentent jugés, « ils passent des examens » • ou incapables, s’ils ne sont pas « bon répondeur » à la chimiothérapie
Des « outils » pour améliorer la relation avec les patients? • Construire une relation grâce à des moyens simples qui permettent d’évacuer son stress et d’avoir un contact naturel mais professionnel avec les malades et leur famille dans toutes les circonstances • Essayer de réaliser l’examen dans les meilleures conditions • Faire attention aux mots (ceux du patient) mais aussi les nôtres et surtout les phrases qui « tuent »
Avant l’examen, on doit : Préparer à la fois l’examen et le dialogue Lire attentivement le dossier quand il est disponible Les résultats des précédents examens radiologiques La rubrique « informations données » Lire les commentaires des psy quand il y en a Construire une relation avec le patient : les moyens simples
Favoriser un climat de confiance: se présenter, s’excuser du retard, sourire… Faire déshabiller juste ce qu’il faut, s’assurer du confort Présenter les stagiaires et… les briefer avant En échographie, attendre un moment pour laisser une place au sujet Écoute empathique, ouverture relationnelle et non ses propres émotions et respectueuse (éviter les termes familiers et paternalistes ) Construire une relation avec le patient : les moyens simples
Construire une relation avec le patient : les moyens simples • Expliquer simplement la procédure • Montrer que l’on connaît le médecin référent, les résultats des examens précédents, les traitements en cours • Ne pas critiquer un collègue (celui qui a fait l’examen précédent par exemple…) • Légitimer le patient : « la plupart des patients sont inquiets aussi quand ils passent une IRM… » « c’est normal que… » « je comprends que… »
Réaliser l’examen dans les meilleures conditions • Éviter les dérangements, le téléphone • Faire respecter son territoire, celui du patient que vous recevez • Fermer la porte à clef pendant examen endo- cavitaire • Éviter de parler à un tiers, de manifester de l’étonnement devant l’écran • Expliquer clairement si l’on doit aller chercher un collègue pour avis • Il faut du confort pour tout le monde : on est capable ou pas de parler « Nous allons faire cet examen au mieux, le plus rapidement et ensuite je répondrai à vos questions »
Réaliser l’examen dans les meilleures conditions…jusqu’au bout! • Ne pas s’enfuir après l’examen • Rester assis, au même niveau que le patient, garder une connexion, regard, toucher ou se laver les mains tranquillement • Montrer une attitude d’acceptation du dialogue, éviter les : «vous verrez ça avec votre médecin traitant » • Recevoir le patient (lorsqu’il est rhabillé) et sa famille, dans un cadre adéquat
Avant de parler, inviter le patient à s’exprimer • Les questions fermées sont nécessaires, interrogatoire médical « depuis quand? », « combien de fois? » • Poser aussi des questions ouvertes qui permettent aux patients de s’exprimer « comment ça va depuis la dernière consultation?» « qu’est-ce qui vous préoccupe le plus? » « comment vous sentez-vous? » • Vérification et ajustement de sa propre compréhension « si j’ai bien compris…»
Avant de parler, écouter • Laisser parler, écouter, laisser des pauses, des silences pour tenter de comprendre ce que veut le patient • Il ne cherche pas forcément à savoir le résultat précis de l’examen « pensez vous que je vais avoir une nouvelle chimio? » « croyez-vous que je pourrai partir en vacances » • Ecouter la formulation des questions du patient : certains malgré des traitements signifiants, ne connaissent pas leur maladie ou ne veulent pas la connaître, ou bien lancent des mots (cancer, métastases) pour savoir si leur médecin traitant leur dit la vérité, d’autres utilisent ces mots pour faire connaître leur souffrance « Heureusement moi, je n’ai pas de métastases, je n’ai que des lésions secondaires… »
Apprendre à donner les informations • Ne pas se focaliser sur les aspects techniques« le parenchyme hépatique est stéatosique » « il y a un nodule hypoéchogène de 12 mm dans le foie gauche… » • En cancérologie, éviter de donner spontanément des mesures, des pourcentages de régression • Par contre rassurer sur le fait que l’examen s’est bien déroulé et qu’on va pouvoir analyser les résultats
Apprendre à donner les informations • On peut donner des résultats partiels, amorcer une annonce progressive attente des résultats définitifs: temps psychique nécessaire pour accepter la mauvaise nouvelle, les signes cliniques niésvont s’imposer • Apprendre à clore une conversation (questions sur la prochaine consultation, les autres examens…) • On peut aussi appeler le médecin traitant
Apprendre à donner les informations • Méfiez-vous de vos propres mots de défense • « Mais tout le monde va mourir, moi aussi je vais mourir! » • « La progression n’est pas généralisée, le scanner cérébral est normal » • « Allez, allez, ça ira beaucoup mieux après la première cure de chimio » • « Ne vous inquiétez pas » « je ne vais pas vous faire mal » • Les phrases qui tuent • « c’est votre première récidive? » • « comment ça se fait que vous ne vous en soyez pas rendu compte avant? » • « pour le moment, c’est normal » • Les « gaffes »…
Ne jamais dire que c’est normal si ce n’est pas vrai • Ne jamais trop en dire, ne jamais aller au delà de la demande Et même, ne pas insister sur la normalité d’un examen Ne pas accepter de donner de résultats par téléphone
Relations avec le médecin traitant • Depuis janvier 2005: la consultation d’annonce • Première consultation: patient informé du diagnostic et des alternatives thérapeutiques • Puis, dossier soumis à concertation multidisciplinaire et nouvelle consultation (décision thérapeutique, explication des effets secondaires, éventuelle inclusion dans essai, information, signature consentement…)
Améliorer les relations avec le médecin traitant • Le radiologue ne participe pas directement à cette annonce • Plusieurs enquêtes nord américaines : cliniciens et radiologues sont d’accord pour que le radiologue donne les résultats au patient si l’examen est normal ou peu pathologique.Par contre quand il est anormal, radiologues et surtout cliniciens y sont opposés • Mais tendance des oncologues à demander que les radiologues « préparent » l’annonce de la mauvaise nouvelle • Et les MT se servent de l’imagerie, des images (certains malades veulent voir leur tumeur) et des comptes-rendus, pour justifier un traitement lourd ou au contraire arrêter un traitement inefficace • Le CR participe de la relation avec le malade: « bruts » ou « embrouillés »
Ce que veulent les patients • Plusieurs études nord américaines : pub med « breaking bad news/ imaging » • Les femmes qui passent une mammographie préfèrent que le radiologue leur donne immédiatement les résultats, dans 90% des cas s’ils sont normaux, dans 88% des cas s’ils sont anormaux, plutôt que d’attendre de les obtenir par leurs médecins traitants • Communicating results of diagnostic mammography: what do patients think? Levin KS et al Acad radiol 2000;7(12):1069-76
Ce que veulent les patients • 2/3 des patients qui ont répondu à l’enquête de l’Institut Curie • veulent plus d’informations sur les examens, leur intérêt, leur déroulement, leurs risques (pdc, rayons X…) sur l’identité des intervenants • veulent voir le radiologue après l’examen pour avoir “en partie les résultats” une annonce progressive • considèrent le radiologue comme l’interlocuteur privilégié pour la délivrance des résultats • une frange assez constante de 20 % des patients ne veulent rien savoir • Nous devons apporter les modifications attendues par les patients dans nos services (et dans nos mentalités)
Les leçons que l’on doit en tirer • Faciliter la rencontre avec le radiologue lorsque le patient le désire • Penser à la façon d’annoncer les résultats lorsqu’ils sont demandés, et au contenu des explications • Apprendre à mieux communiquer, pas uniquement des mauvaises nouvelles, mais aussi des résultats normaux, la nécessité de faire une autre incidence, une autre séquence, une biopsie, un consentement etc • Situations différentes entre patients externes, hospitalisés, selon l’âge, la pathologie… • « Patient communication programs can improve patient care, enhance career-satisfaction, enrich the future of radiology itself » R Gunderman AJR 2001…
Organiser le service autour du malade • L’équipe radiologique : manipulateurs(trices), aide-soignant(e)s, secrétaires… • Rassure, explique l’examen, les désagréments • Renseigne le radiologue sur l’état physique et psychique du patient • Recueille les demandes de résultats • Valoriser la place de la relation avec le malade en imagerie médicale pour tous les personnels • Rôle déterminant du chef de service…(exemplarité, valeurs communes, règles de conduite) • Vérifié dans d’autres cultures
Conclusions • Risque d’agression psychologique dans le service d’imagerie médicale • Mais c’est aussi un espace de parole • La rencontre avec un autre médecin à qui parler de soi, de sa maladie • Temps psychologique qu’on accorde au patient est important individuellement et tous les malades n’ont pas la même demande • Travail personnel, pas facile mais qui en vaut la peine • L’information, la communication sont réciproques, partagées