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Internet et contrat de travail : Enjeux et solutions. Karl Delwaide, avocat/associé (Avec la collaboration de M. Vincent Cérat Lagana, étudiant en droit). Internet : un incontournable en milieu de travail.
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Internet et contrat de travail : Enjeux et solutions Karl Delwaide, avocat/associé (Avec la collaboration de M. Vincent Cérat Lagana, étudiant en droit)
Internet : un incontournable en milieu de travail • Internet en milieu de travail : où s’arrête la tolérance et où commencent les sanctions? • L’employeur peut-il être responsable du comportement virtuel de ses employés? Doit-il établir et appliquer une politique pour éviter sa responsabilité et faire respecter ses exigences? • Facebook, Twitter et les nouveaux sites de réseautage: Qu’en est-il?
Usage personnel : un vrai problème? • L’accès entraîne les excès. Les employés ont la possibilité d’utiliser leur poste à des fins personnelles, jusqu’à impact sur leur prestation de travail (Art. 2085 C.c.Q.). • Un tel agissement de l’employé peut entraîner une rupture du lien de confiance. • Qu’est-ce que l’employeur doit tolérer et où doit-il sévir?
Usage personnel : Les facteurs à considérer • La durée de l’utilisation à des fins personnelles. • La nature de l’utilisation à des fins personnelles. • Les facteurs aggravants et atténuants.
La durée de l’usage personnel • Il s’agit d’établir si l’employé a « volé » du temps et dans quelle mesure. • Bourassa et Ville de La Tuque (2009 / C.R.T.) • 96% de l’utilisation du poste = fins personnelles. Moyenne de 90 minutes par jour; • Congédiement sans progression des sanctions; • Existence d’une politique de contrôle dont le plaignant était au courant. • Syndicat des employés municipaux de Beloeil et Ville de Beloeil (2007 / T.A.) • 3 heures d’utilisation personnelle par jour : 40% du temps de travail; • Congédiement sans progression des sanctions; • Existence d’une politique. Certaines permissions, mais le plaignant a dépassé les limites.
La durée de l’usage personnel (suite) • Bell Canada et Association canadienne des employés de téléphone (2000 / T.A.) : • Étalement sur plusieurs mois de l’envoi de courriels personnels, certains avec du matériel pornographique; • L’arbitre tient compte du peu de temps consacré à l’envoi d’un courriel; • Aucune mention d’une politique dans la décision; • Congédiement annulé, suspension de trois mois.
La nature de l’utilisation à des fins personnelles • Au-delà du simple « vol de temps » et de son étendue, la nature des sites consultés a aussi un impact. • Deux situations entraîneront des sanctions même si l’utilisation est de plus courte durée : • Consultation de sites à matériel pornographique ou offensant; • Exploitation d’une entreprise personnelle à l’aide du matériel informatique.
Consultation de sites pornographiques ou offensants • Souvent, l’abus d’usage personnel d’Internet au travail est lié à la consultation de sites pornographiques. • Mais, même de courte durée, la consultation d’un site pornographique pourra entraîner des sanctions. • Centre de réadaptation Lethbridge et Syndicat des physiothérapeutesetdes thérapeutes en réadaptation physique du Québec (2004 / T.A.): • Une journée pendant laquelle il y a eu visite de certains sites pornographiques; • Connaissait très bien la politique, avait siégé au comité qui l’a adoptée; • Entraîne une suspension de cinq jours.
Consultation de sites pornographiques ou offensants (suite) • En matière de consultation de sites pornographiques, la nature de l’emploi et de l’entreprise a aussi un impact. • Syndicat des Cols bleus regroupés de Montréal, section locale 301 et La Ronde (Six Flags) (2004 / T.A.) • L’arbitre considère comme facteur aggravant le caractère familial de l’entreprise. • Entre la consultation ponctuelle de courriels ou de résultats sportifs et celle de pornographie, il y a un monde de différence.
Exploitation d’une entreprise, manque de loyauté • L’exploitation d’une entreprise personnelle à partir du réseau informatique de l’employeur entraînera aussi des sanctions. • Collège Ahuntsic et Syndicat du personnel de soutien du Collège Ahuntsic (2007 / T.A.) • Il ne s’agit pas d’un vol de temps considérable; • Sauf que l’employé exploite une entreprise et participe à une OSBL à partir de son poste de travail; • Ses cartes d’affaires pour l’entreprise personnelle comprennent même l’adresse courriel de l’employeur; • Il réclame pourtant du temps supplémentaire; • Aucune mention d’une politique claire; • Suspension de trois semaines.
Facteurs aggravants et atténuants • Haut degré d’autonomie = Grande confiance. L’usage personnel sera plus sévèrement puni dans une telle situation. • Tenir compte du dossier disciplinaire et de l’ancienneté. • L’usage d’Internet à des fins personnelles a-t-il vraiment eu un impact négatif sur la qualité du travail de l’employé? • Finalement, l’employé était-il au courant de l’interdiction? Existait-il une politique claire au sein de l’entreprise? Existait-il plutôt une culture permissive?
Facteurs aggravants et atténuants (suite) • L’honnêteté et la bonne foi de l’employé sont déterminantes. • L’employé qui ment, se montre évasif ou cache son usage personnel pourra subir une sanction plus sévère. • Notamment, le fait de cacher ses traces, d’effacer son historique de navigation. • Syndicat du personnel de soutien de la Seigneurie des Mille-Îles et Commission scolaire de la Seigneurie des Mille-Îles (2008 / T.A.); • Syndicat des spécialistes et professionnels d’Hydro-Québec et Hydro-Québec (2007 / T.A.).
Une politique claire est souhaitable • La question de la politique de l’employeur est particulièrement intéressante. • Il s’agit : • D’assurer un certain encadrement et d’éviter les abus pour assurer une productivité à laquelle l’employeur est en droit de s’attendre. • Mais aussi : • D’éviter que l’usage de l’informatique ne devienne une source de responsabilité pour l’employeur ou n’ait des effets néfastes sur la réputation de son entreprise.
Le contrôle de la prestation de travail • L’existence ou l’absence d’une politique d’utilisation d’Internet a un impact sur les sanctions possibles en matière d’usage à des fins personnelles. • L’absence de politique peut entraîner des comportements non sanctionnés. L’employé utilisant Internet à des fins personnelles croira son comportement toléré. • Gilles et Ciba Spécialités chimiques Canada inc. (2008 / C.R.T.) : • Le code de conduite de l’entreprise suggérait le congédiement; • Certaines directives et politiques sur l’utilisation des outils informatiques, mais preuve de tolérance; • Sanction moins sévère parce que l’employé ne savait pas.
Responsabilité et réputation de l’entreprise • Quelles sont les questions auxquelles l’employeur fait face en matière de responsabilité? • Ère du Web 2.0 = Tous ont la possibilité d’écrire, de créer, de se prononcer sur Internet. • Les conséquences peuvent être importantes. • Responsabilité de l’employeur pour la faute de son employé; • Diffamation dans les cas où l’employeur exploite un blogue, un babillard, un site d’information, etc.; • Atteinte à la réputation de l’entreprise par l’employé ou l’ex-employé.
La responsabilité du commettant • Si l’employé commet une faute par son comportement sur le Web, l’employeur peut-il tout de même être tenu responsable? • Principe de l’article 1463 C.c.Q. :le commettant est tenu de réparer le préjudice causé par la faute de ses préposés dans l’exécution de leurs fonctions; il conserve, néanmoins, ses recours contre eux. • La critère de l’exécution des fonctions est primordial. L’employé agit-il au bénéfice de l’employeur?
La responsabilité du commettant (suite) • Lemay c. Dubois (2005 / C.Q.): • Dubois devait informer Lemay de la diffusion d’un reportage à son sujet; • Elle a plutôt affiché le tout sur le babillard public d’un site Internet en précisant des détails « qui ne respectent pas le droit de la demanderesse au respect de sa vie privée. »; • Dubois utilise le matériel informatique de son employeur pour commettre la faute; • L’employeur n’est pas responsable. Dubois n’a pas respecté les directives et n’a pas agi dans l’intérêt de l’employeur.
La responsabilité du commettant (suite) • Inform Cycle Ltd. c. Rebound Inc., (2007/Alta. QB) • Draper travaillait pour le demandeur et travaille maintenant pour Rebound; • En utilisant la connexion Internet de Rebound, Draper enregistre le nom de domaine informcycle.com et le redirige vers un site de pornographie homosexuelle; • Inform poursuit Rebound en faisant valoir la responsabilité du commettant; • Inform allègue que Rebound n’avait pas de politique relative à l’utilisation d’Internet, donnait une grande autonomie à Draper et a bénéficié de son comportement puisqu’elle est concurrente d’Inform; • Cet argument est rejeté au stade de l’irrecevabilité. Draper a agi pour son propre compte et dans son seul intérêt.
La responsabilité de l’employeur en matière de harcèlement • Syndicat des travailleuses et travailleurs en garderie de Montréal et Laval (CSN) et Centre de la petite enfance La garderie du Manoir inc. (2007/T.A.) : • Congédiement d’une éducatrice pour avoir « frappé un enfant »; • L’employeur est tenu de réintégrer l’éducatrice à la suite d’une sentence arbitrale; • L’employeur crée un site Internet avec une pétition contre la violence en garderie; • Une affiche indique l’existence de ce site avec le nom et la photo de la plaignante; • L’arbitre conclut à l’existence de harcèlement psychologique.
La responsabilité de l’employeur en matière de harcèlement (suite) • Davison c. Nova Scotia Safety Association (2005/N.S.H.R.B.I.D.) : • Plainte de harcèlement sexuel fondée sur plusieurs évènements; • L’employée entre dans le bureau de son supérieur et aperçoit une photo de femme nue sur son écran; • Le supérieur imprime la photo trouvée sur Internet et l’exhibe aux employés masculins du bureau; • Responsabilité de l’employeur pour le comportement du supérieur en matière de harcèlement sexuel; • Le tribunal se fonde sur les principes de l’arrêt de la Cour suprême dans Robichaud c. R. (1987/CSC).
Atteinte à la réputation et diffamation • Arpin c. Grenier (2004 / C.Q.) : • Le défendeur publie un texte sur un forum de discussion; • Fait un parallèle entre la Crise d’octobre et les idées de certains membres du gouvernement dont le premier ministre; • Met le nom et le logo de son employeur avec sa propre signature électronique; • Poursuite en dommages-intérêts par l’employeur (devenu ex-employeur); • L’employeur a gain de cause. Allègue notamment dommages à son entreprise quant à ses efforts de financement.
Atteinte à la réputation et diffamation (suite) • Cogeco Câble Canada inc. et Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 3624 (2001 / T.A.) : • L’employé utilise une adresse IP flottante appartenant à son employeur pour pénétrer le système d’un compétiteur; • L’employé communique ses découvertes aux médias; • Suspension confirmée de l’employé, notamment parce que son comportement aurait pu avoir des conséquences néfastes pour son employeur.
Mieux vaut encadrer : La nécessité d’une politique claire • Pour contrer : • La baisse de productivité; • Les chances que l’entreprise soit responsable du comportement de ses employés; • Une atteinte à l’image de l’employeur par un employé. • Doit inclure : • Interdictions; • Sanctions; • Explications; • Modalités d’application.
La politique d’usage : ses interdictions • L’employeur rappelle que l’utilisation d’Internet et du courriel est limitée à l’exécution des fonctions de l’employé. Il peut tolérer à titre de privilège une utilisation limitée, raisonnable et qui ne pose aucun préjudice à l’employeur. • La liste de chaque interdiction précise sera dressée à même la politique d’usage. • La politique rappellera le devoir de tout employé de ne pas communiquer d’information confidentielle. Lorsque le secret professionnel est en jeu, la politique insistera sur la responsabilité de le respecter. • La politique prévoira les sanctions applicables.
Politique d’usage : autres éléments à prévoir • L’employeur doit indiquer que les usagers renoncent à invoquer leur droit à la vie privée à l’égard de toute information visionnée, créée, emmagasinée, envoyée ou reçue à l’aide des outils informatiques de l’entreprise. • L’employeur devra mettre en place un système où l’accès à des outils informatiques est protégé par un mot de passe. • La politique indiquera les dispositions prises pour assurer la confidentialité des renseignements par le contrôle de l’utilisation des outils informatiques.
L’application de la politique • L’employeur doit faire appliquer la politique qu’il a adoptée. • Il doit donc informer les employés de l’existence de ces politiques et donc : • Faire des rappels occasionnels; • Prévoir un avis lorsque l’employé se connecte; • Requérir un geste positif démontrant que l’employé a eu l’occasion de prendre connaissance des politiques pertinentes. • Les moyens utilisés doivent cependant être raisonnables et appliqués de façon uniforme. On ne peut cibler un employé, sauf s’il y a des motifs raisonnables de croire à une violation des règles applicables (Bridgestone / Firestone, 1999 / C.A.).
La surveillance électronique des employés • Qu’en est-il de la possibilité d’exercer une surveillance électronique sur les employés? • Tout est question d’expectative raisonnable de la vie privée et du caractère objectivement raisonnable de la surveillance. • Plusieurs facteurs entrent alors en jeu : • Quel type d’activité surveille-t-on? Privée ou professionnelle? • Quel est l’environnement de travail? • Facteur le plus important : une politique claire élimine ou réduit considérablement l’expectative de vie privée.
La surveillance électronique des employés • Alliance de la fonction publique du Canada et Musée des beaux-arts du Canada (2002/T.A.) : • Employé suspendu en raison de l’utilisation de son ordinateur à des fins personnelles; • L’employeur a découvert la situation en faisant examiner l’usage par le service de technologie de son entreprise et par une firme externe; • L’employé fait valoir une intrusion à sa vie privée; • On décide qu’il n’est pas abusif de vérifier si la politique de l’entreprise quant à l’usage de l’informatique est respectée. L’employé connaissait la politique. • Dans l’ensemble, la jurisprudence récente appuie une faible expectative de vie privée quant à l’utilisation du matériel informatique de l’employeur : • Ghattas c. École nationale de théâtre du Canada (2006/CS); • Syndicat des travailleuses et travailleurs de Resto-Casino de Hull (F.E.E.S.P.-C.S.N.) (section Hilton Lac Leamy) et Hilton Lac Leamy (2004/T.A.).
Les nouveaux sites de réseautage • Nouveaux sites de réseautage : • Facebook; • Twitter; • LinkedIn; • Second Life. • Ces sites viennent s’ajouter au phénomène déjà bien en place des blogues d’opinions personnelles. • Posent leur propres enjeux : • Une ligne mince entre la vie au travail et la vie privée; • Une mine d’informations sur les employés?
Vie au travail c. vie privée • Exemple Facebook : • Chaque personne a son profil personnel; • Peut ajouter des « amis »; • Communiquer, envoyer des messages, organiser des évènements. • De véritables opportunités s’offrent à l’employeur qui peut encourager l’usage des sites de réseautage par ses employés : • Développement des affaires; • Publicité.
Vie au travail c. vie privée (suite) • D’une part, le site de réseautage sera utilisé pour les fins de l’employeur. • D’autre part, l’employé en fera sûrement un usage personnel : goûts personnels, état d’esprit, commentaires sur une situation, etc. • « One consequence of this new business model is that the division between work and personal life will become even more blurred, to the point where it may be non-existent…» (Melanie R. BUECKERT, The law of employee monitoring in Canada).
Une mine d’information sur les employés • Découvrir des informations sur ses employés en consultant des blogues ou des sites de réseautage? • Montour Ltée et Syndicat des employées et employés de la Cie Montour(CSN), (2006/T.A.) : • L’employé écrit dans un groupe de discussion sur Internet qu’il est très bien payé et passe la moitié de ses quarts de travail à jouer aux cartes; • Un fournisseur de l’entreprise découvre le message et communique la situation à l’employeur; • Le congédiement est confirmé.
Une mine d’information sur les employés (suite) • Alberta c. Alberta Union of Provincial Employees (2008/Alta grievance arbitration) : • L’employée exploite un blogue sur lequel elle insulte des collègues et son employeur; • L’employeur découvre le blogue par hasard et congédie l’employée; • Le congédiement est confirmé. • EV Logistics c. Retail Wholesale Union, Local 580 (2008/British Columbia Collective Agreement Arbitration) : • L’employé exploite un blogue sur lequel on retrouve des propos racistes, le blogue réfère à l’employeur et l’identifie; • Découvert par l’employeur grâce au courriel anonyme d’un autre employé offensé; • Suspension de l’employé.
Une mine d’information sur les employés (suite) • Cette réalité trouve aussi application en matière d’accidents de travail. • Renaud et Ali Excavation, (2009/C.L.P.) : • Le travailleur, un manœuvre, demande à la C.L.P. de déclarer qu’il a subi une maladie professionnelle; • Épicondylite bilatérale et syndrome du tunnel carpien bilatéral; • On retrouve sur sa page Facebook des message qu’il a lui-même émis et par lesquels il indique avoir fait une visite chez « Docteur cool » et avoir « peinturé sa maison »; • Cet élément est admis en preuve et il est déclaré que Renaud n’a pas subi de lésions professionnelles.
Merci de votre attention Me Karl Delwaide (514) 397-7563 kdelwaide@fasken.com Karl Delwaide tient à remercier Vincent Cérat Lagana, étudiant en droit, pour sa collaboration à la préparation de cette conférence.