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Des problèmes éthiques en général au questionnement éthique en fin de vie en particulier. Journée VEA – 27 octobre 2013 Sébastien KLAM. Philosophe. Sociologue. Directeur d’établissement spécialisés. Maire. Curé – Représentant des cultes. Juriste. Assistant social. Médecin - Hôpital.
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Des problèmes éthiques en général au questionnement éthique en fin de vie en particulier Journée VEA – 27 octobre 2013 Sébastien KLAM
Philosophe Sociologue Directeur d’établissement spécialisés Maire Curé – Représentant des cultes Juriste Assistant social Médecin - Hôpital VILLAGE BIOETHIQUE
« Soyons tout simplement des humains ayant le sentiment que la bioéthique est la conscience de la vulnérabilité de l’autre, et que cette vulnérabilité nous oblige, simplement parce qu’elle est à la source d’un sentiment de responsabilité pour celui qui la constate. Plus qu’une bonne conscience, la bioéthique est avant tout une responsabilité ressentie et raisonnée vis-à-vis du plus désespéré, du plus nu, du plus enfermé, du plus petit, du plus pauvre, du plus inconscient, du plus différent, du plus silencieux, du plus invisible ; c’est le message que l’humanité a envoyé et reçu depuis toujours pour elle-même. Le malade, l’embryon, le fœtus, l’enfant, le dément, le prisonnier, l’anormal, lié à un déterminisme chromosomique, génétique, métabolique ou infectieux, la personne la plus âgée, nous mettent en situation éthique d’avoir à répondre de leur destin, de notre engagement à leur égard, de notre vraie responsabilité (…) » Didier Sicard, L’alibi éthique, Paris, 2006, p. 35-36.
Diverses questions éthiques : • Embryon • Fœtus / avortement • Sexualité et responsabilité • Handicap et société • Accompagnement vers la mort • Fin de vie, euthanasie, soins palliatifs, obstination déraisonnable • Prendre soin dans le système hospitalier actuel
Handicap ? • Maladie grave ? • Fin de vie ?
Jean-Dominique Bauby : Le scaphandre et le papillon • David Servan-Schreiber : On peut se dire au revoir plusieurs fois • Christiane Singer : Derniers fragments d’un long voyage • Maryse Vaillant : Voir les lilas refleurir • Alexandre Jollien : Eloge de la faiblesse • Philippe Pozzo di Borgo, Jean Vanier, Laurent de Cherisey: Tous intouchables ? • Gustave Nicolas Fischer : L’expérience du malade. L’épreuve intime • EttyHillesum : Journal
Sens de la dignité ? • Sondage : 86% des Français sont favorables à une loi légalisant l’euthanasie (sondage Ifop, septembre 2012) • Sens de l’euthanasie ? • Intérêt de prendre du recul : Patrick Langue, sj : « Parce que le handicap et la fin de vie sont sources d’angoisses et de phantasmes pour tout être humain qui se projette dans ces situations redoutées, la dictature de l’émotion s’exerce à plein sur ces sujets, modelant peu à peu l’opinion publique. Bernanos le constatait pour le regretter : ʺL’homme de ce temps a le cœur dur et la tripe sensibleʺ. La sensibilité a certes sa place dans l’approche des situations extrêmes (…) Mais la raison doit aussi être convoquée. Elle conduit, après les tempêtes médiatiques, à mesurer les manipulations et à reconstituer plus justement la réalité. Elle incite à réintégrer des éléments dissimulés, des témoignages ignorés, et à analyser ce qui a fait l’objet de généralisations hâtives »
Se poser des questions… s’essayer à quelques pistes humanisantes • Marie-Jo Thiel, Xavier Thévenot : « Choisis de t’humaniser toujours plus » • Marie-Jo Thiel : « l’expérience n’est pas d’abord accumulation mais dépouillement, comme le rappelle l’étymologie ex-pire : l’expérience de la vie est une traversée périlleuse où on laisse des plumes, où, peu à peu, on laisse tomber l’accessoire. » • Jn 19, 5 : « Voici l’homme » • Mt 28, 54 : « Vraiment, cet homme était le Fils de Dieu » • Sophocle dans Antigone : « C’est quand je ne suis plus rien que je deviens vraiment un homme »
Simone Pacot : « On peut guérir d’une maladie ; on ne guérit jamais de sa vulnérabilité » • Vulnérabilité : de vulnus, blessure, et ible, celui qui possède une capacité, une aptitude • Dominique Lambert : « On dit de quelque chose ou quelqu’un qu’il est vulnérable si ses caractéristiques l’exposent potentiellement à un danger. Par ailleurs, on parle de fragilité lorsqu’une chose ou une personne sont de faible résistance, manquent de solidité ou de stabilité et donc présentent un risque d’être rapidement détruits. On peut être vulnérable sans être fragile : un être humain de résistance physique moins forte est vulnérable s’il est placé dans des environnements très hostiles. En revanche, si on est fragile, on est plus facilement exposé à des dangers et l’on est donc ipso facto vulnérable » Distinction vulnérabilité (possibilité d’être blessé) – fragilité (si fragilité, il y aura blessure)
Handicap : • Multiplicité de situations possibles du handicap : handicap physique, mental, sensoriel, moteur, etc. • Causes diverses : accident, maladie, vieillesse, etc. • Classification Internationale du Handicap (CIF) : • Déficience : perte de substance ou altération d’une structure ou fonction • Incapacité : réduction partielle ou totale de la capacité d’accomplir une activité de façon normale • Désavantage : conséquence des déficiences et des incapacités
Fin de vie : • Dépendance ultime • Période longue et éprouvante • Mort et vie intimement liés • Peur de l’inconnu • Différentes phases dans le mourir (E. Kubler-Ross : dénégation, colère, marchandage, dépression, acception) • Difficulté d’assumer une mort dans un contexte très (trop?) porteur de réussites et de quête d’immortalité
Le handicap de la mort comme un pied de nez à notre désir d’immortalité • Multiples morts au long de la vie • Certaines morts = signe de fragilité de l’existence • Annonce d’une maladie grave • AVC et coma EVP (état végétatif persistant) ou EPR (état pauci-relationnel) • Cancer métastatique fulgurant • Maladie d’Alzheimer • Les morts confrontées au désir de toute-puissance et d’immortalité (IBM vs ADN) : narcissisme flagrant ? • La biomédecine, nouvelle religion : euthanasier la mort ? • Paradoxe : l’homme reste fragile, malgré tout • Gn : le terreux est animé par le souffle de Dieu • Le Gorgias de Platon : un homme livré nu • Risque : trier, sélectionner, évincer eugénisme
2. La nécessaire relation à l’autre • Bachelard : « Le Moi s’éveille par la grâce du Toi » • L’homme précaire : se faire demandeur • Jacques de Bourbon Busset : « Vienne dans ma vie un sauveur, quelqu’un qui ait besoin de moi » • Recherche d’une fraternité par-delà les situations (refus de l’autruicide) • Nécessité de relier les hommes entre eux • Ethique de la transfiguration : tout homme, toute femme est plus ce qu’il (elle) donne à voir ! • Affirmer une dignité ontologique à l’être humain • Force de Dieu dans la faiblesse (cf. sacrement des malades) • Josef Pieper : « L’amour est une façon de dire à un autre humain, il est bon que tu sois au monde » • Louis Lavelle : « Le plus grand bien que nous puissions faire aux autres n’est pas de communiquer nos richesses, mais de révéler les leur. »
3. La vie humaine comme une tâche à accomplir et à soigner plus qu’un état à contempler passivement • Être humain = tâche à accomplir (« déjà-là » et « pas encore-là ») • Soigner = avoir le souci de • Henri Nouwen, sj : « Ce que nous donnons de plus beau, c’est peut-être notre capacité à devenir solidaires avec ceux qui souffrent(…) aveu courageux que nous avons besoin l’un de l’autre et c’est la grâce d’une compassion qui nous attache à des frères et sœurs comme nous, qui partagent avec nous le voyage tout à la fois merveilleux et douloureux de la vie. » • Compassion Empathie : entrée émotionnelle dans la souffrance de l’autre au point de la ressentir comme s’il s’agissait de la nôtre • Dans la souffrance, être garant d’espérance ! • Choix de vie • Mise en œuvre de nos capacités de résilience • Se laisser surprendre par le visage de l’autre qui me convoque à mes responsabilités • Prendre soin = participer à la préservation de la vie
Reconnaître la nécessité du prendre soin (caring about), se soucier du soin à donner (caring for), donner le soin (care giving) et faire de l’autre le réceptacle du soin (care receiving) • Jean-Guilhem Xerri : « Ce faire veilleur des murmures et du silence de ce sens balbutiant qui tente d’advenir » • Saint Thomas d’Aquin : « Celui qui aime doit donc traverser cette frontière qui le confinait dans ses propres limitations. C’est pourquoi on dit de l’amour qu’il fait fondre le cœur : ce qui est fondu n’est plus restreint dans ses propres limites, tout au contraire de ce qu’est la dureté du cœur » • La fragilité : une place pour aimer !
Sans conclure… « C'était une matinée chargée, environ 8h30, quand un homme d'un certain âge, dans les 80 ans, est arrivé pour faire enlever les points de suture de son pouce. Il dit qu'il était pressé car il avait rendez-vous à 9 heures. J'ai pris ses coordonnées et lui ai dit de s'asseoir sachant que ça prendrait plus d'une heure avant que quelqu'un ne puisse s'occuper de lui. Je le voyais regarder sa montre, et j'ai décidé, puisque je n'étais pas occupée avec un autre patient, de regarder sa blessure (...) Pendant que je m'occupais de sa blessure, je lui ai demandé s'il avait rendez-vous avec un autre médecin ce matin, puisqu'il était pressé. L'homme me dit que non, qu'il devait aller dans une maison de retraite pour déjeuner avec sa femme. Je me suis informée de sa santé. Il m'a dit qu'elle était là depuis un certain temps et qu'elle était atteinte de la maladie d'Alzheimer. Comme nous parlions, je lui ai demandé si elle serait contrariée s'il était en retard. Il a répondu qu'elle ne savait plus qui il était, qu'elle ne le reconnaissait plus depuis cinq ans. J'étais surprise et lui ai demandé : "Et vous y allez encore tous les matins, même si elle ne sait plus qui vous êtes ?" Il me souriait en me tapotant la main et dit : "Elle ne me reconnaît pas, mais moi, je sais encore qui elle est." J'ai dû retenir mes larmes quand il est parti, j'avais la chair de poule et je pensais que c'était le genre d'amour que je voulais dans ma vie. Le vrai amour, ni physique ni romantique ; le vrai amour est l'acceptation de tout ce qui est, a été, sera et ne sera plus (...) Les gens les plus heureux n'ont pas nécessairement le meilleur de tout, ils s'organisent du mieux qu'ils peuvent avec ce qu'ils ont. La vie n'est pas d'échapper à la tempête, mais de danser sous la pluie »
Innombrables questions posées • Désir de vie à partager, à comprendre, à aimer • Conversion de soi Après le coucher du soleil, il reste encore une lumière, faible et fragile, à l’image de nos vies. Cette lumière, c’est le crépuscule. J’aimerais inviter chacun à percevoir dans sa propre vie comme dans la vie de l’autre cet infime rayon de lumière capable de donner, toujours et encore, un espace possible à l’existence. Loin de tout arrêter prématurément, la sagesse viendra de ce qu’on saura accepter, parfois au risque de sa propre vie, comme choix humanisant et valorisant une dignité de l’homme toujours en quête de vérité et de sens.