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Qui a réveillé le tigre? L’économie indienne au lendemain des réformes économiques. Eckhard Siggel, Professeur au département de Sciences Économiques, Université Concordia
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Qui a réveillé le tigre?L’économie indienne au lendemain des réformes économiques Eckhard Siggel, Professeur au département de Sciences Économiques, Université Concordia Ce texte est basé sur deux projets de recherche en partenariat avec l’Institute of Economic Growth à Delhi et financés par le Canada par l’intermédiaire de l’Institut Indo-Canadien Shastri.
Objectifs de ces projets de recherche • Analyser l’impact des réformes des années 80 et 90 sur le secteur manufacturier (industriel) indien • Examiner en particulier la compétitivité internationale des industries, ainsi que le changement dans les exportations et l’emploi de la main d’œuvre • Observer aussi l’impact des réformes sur le secteur informel et la pauvreté • Mieux comprendre les causes de l’accélération récente de la croissance économique en Inde
Plan • Un bref regard sur l’histoire • Les réformes des années 1980 et 1990 • Structure de l’économie indienne • L’impact des réformes sur le secteur industriel • Le secteur informel • La pauvreté • Conclusion
La période pré-indépendance • Première floraison de la civilisation dans la vallée de l’Indus autour de 2000 a.c. • l’Inde est restée une puissance importante jusqu’au 18e siècle. • L’économie de l’empire Monghol en 1600 était de taille similaire à celle de l’Angleterre en 1800. • Bien qu’essentiellement agricole, sa part dans l’économie mondiale a été estimée à 23% environ, à peu près égale à la part de l’Europe. • Sous le régime colonial britannique, cette part a décliné à moins de 4% à la fin de cette période.
L’économie coloniale • Ce déclin s’explique par l’industrialisation rapide en Europe et en Amérique alors que l’Inde est restée agricole et, largement, une économie de subsistance. • Développements sous le régime colonial: réseaux de transport et de communication, appareils administratif et judiciaire. • Libre échange encouragé: exportation de produits textiles (mousseline, calicot), de produits agricoles (poivre, cannelle, opium, indigo).
L’héritage colonial • Au moment de l’Indépendance (1947) l’Inde héritait d’une économie parmi les plus pauvres au monde. • L’agriculture, son plus grand secteur, était insuffisante pour nourrir sa population croissante. • L’espérance de vie moyenne: 28 ans; niveau d’instruction: 14%.
Le régime post-indépendance • Le gouvernement sous le premier ministre Nehru établissait une économie mixte avec tendance centraliste et socialisante: • Secteur public important, réglementation très répandue (surtout dans le domaine du travail et des finances), emphase sur l’industrialisation et la substitution aux importations (à l’aide d’un régime de forte protection). • Planification centrale, mais co-existence des secteurs public et privé.
Croissance économique • Entre les années 1950 et 1980, la croissance économique a été lente. • Certains auteurs font référence à un taux de croissance ‘’hindou’’, qui se situait en moyenne autour de 3%. • Depuis les années 1980 on voit clairement une accélération de la croissance. • En 2006 (dernier trimestre) la croissance a atteint 9%.
Prévisions pour l’avenir • Selon Goldman-Sachs l’économie indienne dépassera celles de l’Italie et de la France en 2020, et du Japon en 2035, quand elle sera la troisième plus grande au monde
Causes du changement • Quelles sont les causes de cette accélération de la croissance économique? • L’environnement politique n’a pas changé de façon drastique. • Les partis de gauche existent toujours et le présent gouvernement a besoin de l’appui même du parti communiste. • Il faut chercher les causes dans les réformes des années 1980 et 1990.
Deux vagues de réformes économiques • Ce qui a changé de façon significative c’est l’environnement économique et commercial à la suite des réformes économiques. • Il y a eu deux vagues de réformes, celles des années 1980 initiées par le P.M. Rajiv Gandhi, et celles initiées en 1991 sous le P.M. Rao et son ministre des Finances, Manmohan Singh.
Réformes des années 1980 • Les réformes des années 1980 étaient timides, mais importantes. • Elles amélioraient le climat commercial (pro-business) en abolissant le contrôle des prix et les limitations d’expansion des entreprises. • Elles incluaient aussi une réduction des taxes des corporations.
Réformes des années 1990 • La deuxième vague de réformes a été déclenchée par une crise de la balance extérieure en 1991. • Elle comprenait une libéralisation du commerce extérieur, une réduction de la réglementation du secteur privé (système des licences) et la réduction du pouvoir monopolistique dans plusieurs secteurs. • Ces mesures étaient accompagnées par un réalignement du taux de change de la roupie.
Libéralisation du commerce extérieur • Comme membre de l’OMS depuis le début (Gatt), l’Inde a dû remplacer ces restrictions quantitatives aux importations. • Avant 1990 le pays avait une structure de protection industrielle parmi les plus élevées alors que les droits douaniers augmentaient encore à la fin des années 1980 (taux moyen autour de 110%). • Entre 1991 et 2004 le taux maximal a diminué de plus de 300%: il fut fixé à 85% en1994, 50% en 1995 et 25% en 2004. • Les taux de protection par industrie ont été estimés comme suit.
Estimation du niveau de la protection • Le taux de protection tarifaire semble sur-évaluer la différence entre les prix indiens et les prix mondiaux. • Plusieurs études ont estimé les taux de protection tarifaires, ainsi que le taux ‘de collection’ (qui tient compte des exemptions). • Nous avons choisi le taux ‘de collection’ des années 87/88 comme base et nous avons projeté les prix moyens des industries à l’aide des indices de prix (de gros) indiens et internationaux.
Taux de protection nominal tarifaire(basé sur les droits d’entrée)
L’impact de la libéralisation sur le secteur industriel (hypothétique) • Dans plusieurs pays, la libéralisation commerciale a eu un effet désastreux sur le secteur industriel. • La concurrence étrangère accrue force les entreprises à réduire leurs coûts de production ou à fermer l’entreprise. • Basé sur la forte réduction de la protection en Inde, on aurait pu s’attendre à une augmentation significative du chômage et de la pauvreté.
Indicateurs de compétitivité • UCd = TCd/VOd TCd = VITd + VINd + LCd + KCd VOd = Q Pd (indicateur de la rentabilité) • UCx = TCd/VOw VOw = VOd/(1+NRP) (indicateur de la compétitivité internationale ou à l’exportation) • UCs = TCs/VOs TCs = VITs + VINs + LCs + KCs VOs = VOw REO (indicateur de l’avantage comparatif)
L’impact des réformes sur la rentabilité des entreprises • L’impact immédiat (court terme) d’une libéralisation des importations est généralement un déclin de la rentabilité. • A long terme, on s’attend à un gain de rentabilité et de la compétitivité externe, dans la mesure où les coûts de production déclinent. • Sur le prochain graphique, on peut voir comment la rentabilité des industries a changé entre 1987/88 et 1997/98.
Un indicateur de la rentabilité • L’indicateur utilisé est celui du coût unitaire au prix du marché. • Un chiffre moins grand que un signifie une rentabilité positive. • On observe qu’entre 1987/88 et 1997/98 le coût unitaire a augmenté dans 11/17 industries. • Dans l’ensemble du secteur manufacturier, on observe une légère baisse (rentabilité accrue).
Compétitivité extérieure • La compétitivité extérieure (à l’exportation) a été mesurée par un indicateur de coût unitaire également: UCx. • Il se distingue de l’indicateur de rentabilité (UCd) par le fait que les coûts de production sont comparés aux prix mondiaux et non pas aux prix domestiques. • L’augmentation de la compétitivité est beaucoup plus prononcée que celle de la rentabilité.
Croissance et déclin des industries • La croissance des industries, mesurée au niveau de la valeur ajoutée, a été très inégale. • On voit au prochain graphique que certaines industries ont eu une grande expansion et d’autres ont connu un fort déclin. • Le graphique montre la taille relative des industries soit leur proportion de la valeur ajoutée totale.
Analyse des composantes de coût • Il est intéressant d’observer comment les quatre catégories de coût de production ont contribué au changement du coût unitaire. • Catégories: - intrants intermédiaires échangeables - intrants intermédiaires non échangeables - contribution de la main d’oeuvre - contribution du capital
Performance des exportations • Est-ce que la compétitivité accrue s’est traduite par une croissance des exportations? • Le taux de croissance moyen annuel des exportations entre 1987/88 et 1997/98 était de 11% (en termes réels), ce qui est supérieur à la progression des années précédentes.
La création d’emplois • Est-ce que la réduction des coûts de production a entraîné une perte substantielle d’emplois? • On a observé ce genre de résultat dans d’autres pays qui ont aussi libéralisé les importations. • Mais on se rappelle aussi que la législation indienne garantit les emplois dans les grandes entreprises; ces lois interdisent le congédiement des travailleurs.
Stabilité relative des emplois • Cette stabilité relative des emplois peut s’expliquer par quatre facteurs: • La législation du marché de travail; • Le mode de sous-traitance en expansion (une façon de contourner la législation); • Les réformes intérieures qui ont facilité le lancement des entreprises; • L’expansion de certaines industries due à un gain de compétitivité.
Le secteur informel • C’est ce secteur immense constitué de petites entreprises personnelles et familiales qui fournissent des produits et services locaux. • C’est un secteur qui échappe largement à la réglementation tel que le salaire minimum et certaines taxes. • Le secteur informel fournit environ 75% des emplois dans le secteur urbain et emploie 30% de la population active.
Impact des réformes sur le secteur informel (potentiel) • Un travailleur qui perd son emploi dans le secteur moderne se retrouve automatiquement dans le secteur informel. • L’emploi dans le secteur informel a augmenté plus rapidement que l’emploi dans le secteur formel. • Ceci ouvre la possibilité d’une baisse réelle des salaires du secteur informel.
Impact des réformes sur le secteur informel (actuel) • Selon les données disponibles et d’après plusieurs études, ceci ne s’est pas produit. • Le secteur informel a absorbé plus de travailleurs (3.2% par an) que le secteur moderne (2.2%). • Les rémunérations du secteur informel ont augmenté (2.9% annuellement), mais moins que celles du secteur moderne (5.3%).
Tentative d’explication de ce développement • La demande de main d’oeuvre a aussi augmenté suite à un transfert d’entrepreneurs vers ce secteur (par exemple par des sous-contrats, ‘’outsourcing’’) • Les réformes intérieures ont aussi amélioré le climat commercial pour les petites entreprises. Ces observations nous permettent de conclure que les réformes ne semblent pas avoir contribué à une augmentation de la pauvreté.
Réformes et pauvreté • La pauvreté est constamment surveillée et mesurée en Inde. • Le contrôle de la pauvreté est basé sur un système permanent d’enquêtes des ménages dont les résultats sont publiés périodiquement (tous les 2, 3 ou 5 ans, selon la taille des enquêtes, qui couvrent des millions de ménages).
Verdict sur les réformes • 4 études sur 8 ont conclu que la réduction de la pauvreté a été accélérée depuis les réformes. • Notre propre étude suggère: • un niveau présent plus élevé (32%) que la plupart des études (à l’exception de Datt, Kozel, Ravaillon, 34%); • un léger ralentissement de la réduction de pauvreté par rapport à la période pré-réforme.
Conclusion • Le rythme de croissance économique a augmenté de façon significative depuis les années 1980. • L’origine de ce changement peut être trouvé dans les réformes internes des années 1980 ainsi que dans les réformes des années 1990. • L’ouverture de l’économie indienne et son intégration dans l’économie mondiale ont augmenté la compétitivité du secteur industriel.
Conclusion (suite) • 4. Les exportations sont en croissance dans plusieurs industries, surtout dans le secteur de services, mais aussi dans le textile et les produits pharmaceutiques et métalliques. • 5. Les réformes n’ont pas eu les effets néfastes observés ailleurs de réduction d’emplois et d’augmentation de la pauvreté. • 6. Les réformes doivent continuer, surtout dans le marché du travail, pour assurer la continuité d’un développement positif.