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Fièvre chez le patient cancéreux. Dr Thierry Berghmans Soins Intensifs et Oncologie Thoracique Institut Jules Bordet. Physiopathologie de la fièvre. Balance entre Production de chaleur Conservation de chaleur Perte de chaleur assure maintien de la T° corporelle
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Fièvre chez le patient cancéreux Dr Thierry Berghmans Soins Intensifs et Oncologie Thoracique Institut Jules Bordet
Physiopathologie de la fièvre • Balance entre • Production de chaleur • Conservation de chaleur • Perte de chaleur assure maintien de la T° corporelle • Fièvre en présence d’un pyrogène qui dérègle les mécanismes de thermorégulation: conditions environnementales extrêmes (hyperthermie), « drogues », maladies spécifiques
Définition de la fièvre • T° normale comprise dans un intervalle de 1°C autour de 37°C (Zhukovsky, Hematol Oncol Clin N Am, 2002). • T° > 38°C (3x à 1 heure d’intervalle) ou > 38,5°C (1x) considéré cliniquement significatif en oncologie • FOI: T° > 38,3°C en plusieurs occasions et d’étiologie incertaine après 1 semaine d’hospitalisation
Cas clinique #1 • Un patient de 36 ans, sans antécédent notable, présente une altération de l’état général, un amaigrissement (10% du poids corporel) et de la fièvre (38,5°C à plusieurs reprises). • A l’examen clinique, on observe une hépatomégalie volumineuse et des adénopathies cervicales et sus-claviculaires, dures et indurées. Le reste de l’examen physique est sans particularité.
Cas clinique #1 • La biopsie d’un ganglion montre un lymphome non Hodgkinien de malignité intermédiaire. • Les examens complémentaires (CT thorax, hémocultures, EMU) ne mettent en évidence aucun foyer infectieux. • Une chimiothérapie de type CHOP est instaurée. Après une phase de défervescence, un nouvel épisode fébrile est observé dans un contexte de neutropénie profonde (PMN < 100/mm³).
Cas clinique #1: Question 1 • Chez ce patient cancéreux non neutropénique (phase pré-chimio), la fièvre peut être due à: • Infection • Cancer (fièvre paranéoplasique) • Maladie de système non néoplasique • Maladie thrombo-embolique • Médicament
Cas clinique #1: Question 2 • Chez ce patient cancéreux neutropénique (phase post-chimio), la fièvre peut être due à: • Infection • Cancer (fièvre paranéoplasique) • Maladie de système non néoplasique • Maladie thrombo-embolique • Médicament
Causes rares • Maladie thromboembolique et pathologies vasculaires • Troubles endocrinométaboliques • Pathologies granulomateuses • Maladie sérique, ...
Etiologies (Pizzo et al, Medicine 1982)
Patient non neutropénique Pizzo et al, Medicine, 1982
Patient neutropénique • Cause infectieuse démontrée dans 51,8% des cas • Parmi les fièvres d’origine indéterminée, plus de 50% présentent une défervescence sous antibiotiques, suggérant une origine infectieuse à la fièvre.
Cas clinique #1: Question 3 • Chez ce patient cancéreux, quel(s) critères permettrait de faire la différence entre une fièvre paranéoplasique ou infectieuse: • CRP (C-reactive protein) • Procalcitonine • Importance de la fièvre • Rythme cardiaque • Test au naproxène • Aucun critère validé
Fièvre paranéoplasique • Fréquence variable selon les études, populations et année de publication: varie entre 5% et 56% des cas. Peut être observée dans toutes les tumeurs. • Hypothèses: • réaction d’hypersensibilité • production de pyrogènes • production primaire de cytokines • nécrose tumorale avec production secondaire de cytokines
Fièvre paranéoplasique: aspects cliniques • Fièvre révélatrice du cancer • Principalement • Hémopathies malignes • Tumeurs solides abdomino-pelviennes • Sarcomes
Fièvre paranéoplasique: aspects cliniques • Fièvre au cours de l’évolution du cancer • Fréquence variable en fonction du type tumoral et extension: 7%-30% • Principalement: • Lymphomes • Rein • Tube digestif • Plus fréquent en cas de maladie évoluée
Fièvre paranéoplasique: aspects cliniques • Pas de différence clinique entre fièvre infectieuse et paranéoplasique
Fièvre paranéoplasique: diagnostic • Pas de critère défini • Rôle des examens d’imagerie? • CRP: non • Procalcitonine: peut-être
Test au naproxène • Non validé • 4 études prospectives avec résultats conflictuels • Fièvre paranéoplasique répond aussi à d’autres AINS: diclophénac, indométhacine • Pas de place dans le diagnostic
Fièvre médicamenteuse • Agents chimiothérapiques (Bleomycine, Gemcitabine, Ara-C, ...) • Modificateurs de la réponse biologique (Interferons, ...) • Antibiotiques: vancomycine, amphotéricine B • Arrêt de médicaments: BZD, opiacés • Réaction transfusionnelle • Médicaments non liés au traitement du cancer
Etiologies de la fièvre chez le patient cancéreux • L’infection est la cause la plus fréquente, représentant de 25% à 100% des causes de fièvre selon les études, la localisation tumorale et la neutropénie.
Cas clinique #2 • Un patient de 63 ans, BPCO Gold II, est atteint d’un cancer bronchique à petites cellules en généralisation cérébrale avec oedème péri-lésionnel nécessitant la prescription de dexaméthasone (4 x 4 mg/j). • En bronchoscopie, on objective une obstruction quasi complète du tronc souche gauche par une masse tumorale.
Cas clinique #2 • Une chimiothérapie par cisplatine et VP16 est administrée après placement d’un système veineux totalement implantable. • Au J10, le patient développe de la fièvre et une pneumonie du LIG est documentée.
Cas clinique #2: Question 1 • Chez ce patient cancéreux, quel(s) est (sont) le(s) facteur(s) favorisant une infection: • Corticoïdes • Chimiothérapie (neutropénie) • Immunosuppression induite par la tumeur • Obstruction tumorale • Corps étranger (système veineux totalement implantable)
Infection chez le cancéreux Le risque de développer une infection chez le patient cancéreux est important tout au long de sa maladie, du fait de: • l’immunosuppression et des obstructions secondaires au cancer • l’immunosuppression liée au traitement antitumoral • la présence de corps étrangers
Infection chez le cancéreux Lors de la prise en charge du patient cancéreux, il faut tenir compte de: • du type de tumeur et du risque infectieux qui lui est associé • du traitement antitumoral (greffe de moëlle) • de l’importance de l’immunosuppression (cyclosporine, corticoïdes) • de la présence de facteurs mécaniques prédisposants (mucites, obstruction, cathéters, …)
Particularités du patient cancéreux • Baisse des défenses immunitaires • Neutropénie • Déficit immunité cellulaire (Hodgkin) • Lymphopénie (germes intracellulaires) • Hyposplénisme: radiothérapie, splénectomie (germes encapsulés) • Diminution des immunoglobulines actives (myélome multiple, alloBMT, LLC) et défaut d’opsonisation et bactéricidie moins efficace (germes encapsulés).
Particularités du patient cancéreux • Diminution des barrières • Mucites, pathologie cutanée (GVHD, métastase) • Obstructions • Cathéters: veineux totalement implantables, sonde vésicale, néphrostomie, drains. • Corps étrangers: systèmes veineux implantables, prothèses (endobiliaire, bronchique, urétérale).
Particularités du patient cancéreux • Zones ischémiques: mauvaise vascularisation et mauvaise pénétration antibiotique. • Malnutrition: prédisposition aux escarres, dégradation des muqueuses. • Hospitalisations fréquentes favorisant la colonisation par des germes nosocomiaux. • Risque de développement de pathogènes inhabituels pour patient immunocompétent.
Risque de décès et infection Inagaki et al; Cancer 33(2): 568-73; 1974
Infection chez le cancéreux • Le décès du patient cancéreux, en cas de leucose aiguë, est dû, jusque dans 70-75% des cas, à une infection, associée ou non à une hémorragie. • Les données sont plus rares chez les patients atteints d’une tumeur solide. Néanmoins, on estime que jusqu’à 50% de ces patients ont une infection comme cause immédiate ou associée au décès.
Cas clinique #2: Question 1 • Chez ce patient cancéreux, quel(s) est (sont) le(s) facteur(s) favorisant une infection: • Corticoïdes • Chimiothérapie (neutropénie) • Immunosuppression induite par la tumeur • Obstruction tumorale • Corps étranger (système veineux totalement implantable)
Principes de base • Une obstruction entraîne une stagnation des sécrétions favorisant une colonisation bactérienne. • Une diminution des mécanismes de défense locaux permet une prolifération bactérienne aboutissant à l’infection.
Epidémiologie • Peu de données dans la littérature • Principales obstructions: • arbre trachéobronchique • voies biliaires • tube digestif (colon) • voies urinaires
Poumon: physiopathologie • Stade précoce: stagnation sécrétions en amont de l’obstacle; dilatation bronches et alvéoles remplies de mucus; présence de micro-organismes. • Evolution avec endartérite jusqu’à obstruction complète des vaisseaux. • Hypoventilation et défect perfusionnel favorisent atélectasie.
Poumon: physiopathologie • Pneumonie rétro-obstructive peut survenir même si obstruction incomplète par stagnation des sécrétions favorisée par le rétrécissement bronchique et le remplacement des cellules ciliées par des cellules tumorales. • Pneumonie peut aboutir à une pneumonie nécrosante ou un abcès.
Poumon: épidémiologie • Abcès pulmonaire dans 2 à 25% cancer. • 7/49 (14.3%) pneumonies rétro-obstructives et 10% abcès (Brambilla et coll; 1992) • 9/40 patients avec lésion obstructive et abcès pulmonaire avaient un cancer bronchique (Perlman et coll; 1969) • Nécrose et cavitation dans 100/632, principalement liés à une obstruction progressive (Chaudhuri; 1973)
Poumon: épidémiologie • Abcès pulmonaire dans 17/176 SCLC (Hansen et coll; 1986). • Dans infection à anaérobies un cancer bronchique est retrouvé dans: • 9% des abcès • 11% pneumonies nécrosantes • 14% pneumonies
Voies biliaires: systèmes de défense • Sphincter d ’Oddi = barrière mécanique • Cellules de Kupffer et tight junctions entre hépatocytes = prévention translocation bactérienne et métabolites toxiques de la bile vers le sang ou vice-versa. • Flux continu de bile. • Action bactériostatique des sels biliaires. • Facteurs prévenant l’adhérence bactérienne: IgA et mucus sécrété par épithélium biliaire.
Voies biliaires: mécanismes d ’infection • Micro-organismes duodénaux = principaux responsables de la cholangite. • Porte d ’entrée: probablement ascendante. • Infection cancer ampoule de Vater > voie biliaire principale car obstruction intermittente. • Elévation P intrabiliaire ouverture tight junctions bactériémie et translocation bactérienne du flux veineux vers la bile.
Tumeurs primitives Pancréas 80% Canal biliaire 5% Ampoule de Vater 1% Duodénum 1% Métastases Estomac 10-50% Colon 20-40% Mélanome 15% Sein 10% Poumon 1% Lymphome 1% Voies biliaires: obstructions néoplasiques
Voies biliaires • Infection en cas d’obstruction néoplasique des voies biliaires est relativement peu fréquente et plutôt liée aux manipulations. • Fréquence de cholangite en cas d’obstruction néoplasique des voies biliaires: • 7/63 (Longmire et coll; 1973) • 8/50 dont 2 bactériémies et 1 choc septique (Rolston et coll; 1995) • 21/165 dont 14 sans manipulations préalables (O ’Connor et coll; 1981)
Voies biliaires: traitement • Diminuer la pression dans les voies biliaires Mais risque infectieux lié au placement prothèse endobiliaire: • Si cholangite, infection secondaire ou abcès • Cholangite secondaire dans 26 à 47% • 14/21 pts opérés 8 survivants; 0/7 si traitement médical (O ’Connor et coll; 1981)
Tube digestif: flore intestinale et obstruction • Augmentation nombre de bactéries (aérobies et anaérobies) • Perte du gradient pour bactéries aérobies et anaérobies • Augmentation fonction de la durée de l’obstruction • Obstruction intestinale simple chez l’homme peut provoquer une translocation bactérienne.