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Rencontre avec André Comte- Sponville aumônerie EPFL 17 mai 2011. Une spiritualité sans Dieu ?. Préliminaires . Quel exercice périlleux : 15 minutes ! Je ne connaissais pas votre présentation. À partir de votre livre avec Philippe Capelle Dieu existe-t-il encore ? (Cerf, Paris, 2005).
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Rencontre avec André Comte-Sponvilleaumônerie EPFL17 mai 2011 Une spiritualité sans Dieu ?
Préliminaires • Quel exercice périlleux : 15 minutes ! • Je ne connaissais pas votre présentation. • À partir de votre livre avec Philippe Capelle Dieu existe-t-il encore ? (Cerf, Paris, 2005). • Une disputatio (débat) dans la commune quête de la vérité (Vatican II, «Déclaration sur la liberté religieuse»). • Contrairement à Michel Onfray (Traité d’Athéologie), pas d’animosité à l’égard du christianisme.
Respect pour votre «athéisme fidèle» • (de fides, la foi !); • pour votre honnêteté intellectuelle : • «Si je suis athée, c’est aussi parce que je préférerais, pour tout vous dire, que Dieu existe»(Dieu existe-t-il encore ?, p. 56).
Votre hommage émouvant à Jésus-Christ : • «Disons que je me suis forgé une espèce de Christ intérieur "doux et humble de cœur", mais purement humain, qui m’accompagne ou me guide» (L’esprit de l’athéisme, p. 76). • Les valeurs de la morale judéo-chrétienne et de l’Évangile : l’une des bases de votre maison philosophique : • «Tout m’y paraît bon, sauf le Bon Dieu» (L’esprit de l’athéisme, p. 75).
Vous exprimez ce que beaucoup de non-croyants pensent : • l’existence sans Dieu peut être vécue de manière authentique, sensée et joyeuse. • Accords avec vous : • le réel comme mystère; • la priorité de l’amour; • l’impossibilité de prouver l’existence ou l’inexistence de Dieu; • le respect mutuel entre croyants et non-croyants; • la défense d’une saine laïcité politique; • la lutte contre les obscurantismes.
Avec Jean-Claude Guillebaud(Comment je suis redevenu chrétien, Albin Michel, Paris, 2007) et André Fossion(Dieu désirable, Lumen Vitae, Bruxelles, 2010), quelques lignes de divergence. • Buts : • Montrer en quoi la proposition chrétienne rejoint la plupart de vos intuitions en leur donnant une coloration différente; • Établir que la foi biblique reste compréhensible, plausible et désirable, y compris rationnellement. • Trois dimensions : une spiritualité comme • mystique, • éthique • et raison. • Et des questions critiques.
I. Une mystique du Tout anonyme ou de la relation interpersonnelle ? • Le christianisme, une spiritualité mystique et prophétique • Le christianisme : • pas d’abord un corps de doctrine ni un ensemble d’interdits moraux, • mais une voie de sagesse, de bonheur et de liberté, prophétique et novatrice. • Au cœur de la spiritualité chrétienne : la rencontre interpersonnelle avec le frère et avec le Christ. • La foi chrétienne : • Aucun monopole de la spiritualité. Spiritus : se laisser traverser par un souffle venu d’ailleurs qui donne sens à notre existence.
Une rencontre interpersonnelle • À la source de votre mystique, un «sentiment océanique», fusion dans le grand Tout du réel immanent : expérience muette d’éternité et d’absolu. • N’est-ce pas la disparition de la notion de personne humaine, irréductible au monde et à la nature ?
Une altérité constitutive : • La mystique chrétienne (Thérèse d’Avila, Ignace de Loyola) respecte l’altérité constitutive de l’être humain face au cosmos. • Elle est aussi uneexpérience d’absolu, d’éternité, de plénitude, de présence et de joie, • non par fusion dans un grand Tout indistinct, • mais par l’union intime avec Dieu et les frères. • Une communion sans confusion, comme les trois Personnes de la Trinité.
Un face à face amoureux : • Une mystique selon l’amour de communion, unifiant, différenciant et personnalisant. • Une relation interpersonnelle sans dissolution ni domination. • Une expérience de face à face amoureux entre le «Je» de l’homme et le «Tu» de Dieu • Dans le silence de la méditation, de l’oraison et de la contemplation. • Expérience du prophète Élie, entré «dans le silence d’une brise légère» (1 Rois 19, 12) : il y rencontre personnellement le Seigneur.
Une spiritualité simple et incarnée • Pas d’expériences «planantes d’extases» en dehors de notre condition charnelle. • Jésus n’initie pas les disciples à des «extases océaniques», • il les introduit à la prière tournée vers le Père et à l’accueil du cadeau du salut. Destinée à tous : • Une mystique pas réservée à une élite, mais destinée à tous : • Simple et incarnée, par la mise en œuvre des trois vertus théologales (foi, espérance, charité) dans le quotidien.
II. Une éthique de fraternité qui butte sur le désespoir ou qui donne d’espérer ? • Amour et vérité • Vous placez l’amour au cœur de l’éthique, l’amour des autres et de la vérité. • Mais pour vous la vérité n’est pas l’amour, le réel n’est pas une puissance d’amour (L’esprit de l’athéisme, p. 216).
Le «gai désespoir» • D’après vous, assumer le désespoir de la condition humaine, le «gai désespoir». • L’espérance chrétienne détourne-t-elle de l’engagement et du bonheur présents pour nous tourner exclusivement vers un ailleurs ? • L’histoire de Jésus s’arrête-t-elle au Calvaire ? • Pour vous, l’expérience spirituelle du réel : une expérience du tragique et de la solitude.
Une espérance pour le présent • L’espérance des béatitudes : «Heureux les pauvres de cœur, le Royaume des cieux est à eux», déjà maintenant. • Espérer en la résurrection, ce n’est pas vider le présent de la joie. • Ce que nous espérons de surcroît n’enlève rien à la richesse du présent. • L’espérance donne toute sa densité au présent. • Le don de Dieu n’est pas achevé : • ce qui nous est promis sera plus beau encore !
Une perle rare • Une spiritualité avec Dieu, précieuse pour l’existence : • le Christ assume le tragique et le traverse; • il ne nous laisse pas à notre solitude angoissée; • il nous appelle ses amis. • Une fois que nous avons éprouvé quelles raisons de vivre la foi offre, comme par surcroît, nous ne pouvons vivre «sans». • La prunelle de nos yeux !
III. Des raisons de croire ou de ne pas croire ? • Dieu s’éprouve • Dieu existe-t-il ? Le débat reste ouvert. • Dieu n’est pas un objet de connaissance parmi d’autres, mais le sujet d’une rencontre possible. • Dieu ne se prouve pas, il s’éprouve. • Comme l’amour humain…
Dans les frères • «Les expériences de Dieu sont faibles, elles ne conduisent qu’à aimer les humains» (L’esprit de l’athéisme, p. 106). • N’est-ce pas ce que dit Jean ? • «Dieu, personne ne l’a jamais vu. Si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, en nous son amour est accompli»(1 Jean 4, 12.16). • Beaucoup de personnes font une expérience forte de Dieu qui bouleverse leur vie. • Or l’amour de Dieu implique toujours l’amour des frères.
L’excès du mal • Pour vous, le mystère du mal, encore plus scandaleux si un Dieu tout-puissant existe. • Parler de la création en termes non de causalité, mais de don. Tout don est risqué, il ouvre un espace de liberté. • Dieu crée en se retirant, il confie le monde à l’homme. • La création et l’histoire sont risqués, le mal peut s’y insinuer.
Un excès de bien • Dieu nous accompagne de sa présence. • Il conduit discrètement l’humanité et le cosmos vers l’accomplissement. • Il répond par un excès d’amour en Jésus sur la croix. • «là où le péché abonde, la grâce surabonde» (Romains 5, 20).
IV. Des questions • Au plan mystique • Comment concevoir que l’homme, fini et mortel, puisse faire une expérience de l’infini, de l’absolu et de l’éternité, sans faire appel à une Transcendance du réel, à un au-delà de la nature ?
Au plan éthique • En l’absence de certitude sur la vie après la mort, vaut-il mieux se laisser tomber dans l’abîme du désespoir ou dans celui du mystère d’un Amour infini ? • Pourquoi ne pas rattacher votre «gai désespoir» à la «nuit lumineuse» de Jean de la Croix, où la nuit du désespoir est le lieu même d’un bonheur annoncé ?
Au plan rationnel • Quelle est la plus grande illusion ? • Décréter que Dieu ne serait que la projection des désirs que pourtant nous expérimentons ? • Ou vivre autant qu’il est possible dans le sens des désirs les plus profonds que nous portons en nous ? • Jésus crucifié est-il vraiment la projection de nos rêves ? N’est-il pas plutôt «scandale et folie» (1 Corinthiens 1, 22-25) ?