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Quelles langues parlons-nous? ______________ L'espagnol: langue unique, langue plurielle. 0.- Introduction .
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Quelles langues parlons-nous? ______________ L'espagnol: langue unique, langue plurielle.
0.- Introduction. L'histoire de la langue espagnole est le reflet fidèle de l'histoire diverse et tourmentée de la Péninsule Ibérique en général, et de l'Espagne en particulier. Les allées et venues des différents peuples et des différentes puissances étrangères qui ont occupé notre sol ont laissé leurs traces dans les domaines les plus divers.
Les marques les plus profondes sont présentes dans la conscience collective manifestée à travers la langue. Langue à base latine, l'espagnol constitue toutefois une particularité dans le monde latin en raison des onmiprésentes marques orientales qui s'y trouvent. Les apports arabes et tsiganes, entre autres, en ont façonné la personalité, et la survie du judéo-espagnol en ont fait une langue duelle.
1.- L'empreinte arabe. 1.1.- Contexte politico-linguistique. Descendant du latin vulgaire, l'espagnol est reconnaissable comme tel dès le VIIIe siecle apr. J.C. dans les montagnes du nord du pays. Dès sa naissance, il a fait face à la poussée formidable de l'arabe, entré en force dans la Péninsule au printemps de l'an 711.
L'usage de l'arabedans les domainespolitique, administratif, commercial et scientifique fut généralisétrèstôt, quoique son usagecommelanguecouranteconjointementavec les parlersmozarabesdutattendrel'époquecalifale (Xe siècle). En fait, plusieurslanguescohabitaientdans les différentsroyaumeschrétiens et musulmans: l'arabe et le latin des classescultivéescôtoyaient le mozarabe et les autreslanguesoudialectesd'usagepopulaire.
Situation linguistique de la Péninsule Ibérique au Xe siècle
Les langues actuellement parlées étaient déjà bien distinctes, quoique la plus grande partie du territoire était couverte par le mozarabe, composé d'une série de dialectes très apparentés mais sans constituer une langue unifiée et normalisée. Dans ce contexte, l'Espagne musulmane avait comme langue commun l'arabe, et comme langue parlée les dialectes mozarabes.
Cette cohabitation dura jusqu'à la fin du XVIe siècle, date de l'élimination des Morisques de l'ancien Royaume de Grenade, soit par extermination, soit par dispersion forcée dans le Plateau Castillan, 80 ans après l'absorption du Royaume Nasride de Grenade par la Castille et la disparition politique et sociale de l'Islam espagnol.
Cependant, revenantauMoyenÂge, les languesnouvellementnées de l'évolution du latinvulgaire – le galicien, le portugais, le léonais, le castillan, l'aragonais et le catalan-valencien – ontprisimmédiatementcontactavec ce nouvelétat des faits. L'expansionterritoriale de ces languessuivral'expansionterritoriale des multiplesroyaumeschrétiensaudétriment des royaumesmusulmans, changeant la situationlinguistique à chaqueavancée.
À partir du XIe siècle, la Castille devient le moteur de la Reconquista, ce qui marque le point de départ de la fantastique expansion du castillan à travers la Péninsule, puis vers le Nouveau Monde. Dans la diapositive suivante, il est possible de suivre l'expansion du castillan dans la Péninsule Ibérique, dans le sens nord-sud puis centre-périphérie.
À chaque avancée territoriale, l'arabe et les dialectes mozarabesperdaient du terrain au profit du castillan, langue des conquérants et des nouveaux colons, ainsi que des habitants locaux qui décidaient de rester sur place et d'accepter, de gré ou de force, les us et coutumes des vainqueurs. Mais tout en fut pas guerre et destruction dans l'Espagne médiévale.
Les aléas de l'histoire, des frontières et des mouvements de populations furent alternées de longues périodes de stabilité et de bon voisinage qui favorisèrent une intense circulation de produits commerciaux, d'idées, de technologie, de science et de culture. D'importantes marques en restèrent dans la langue espagnole.
Environ 10% du vocabulaire espagnol est d'origine arabe. Les Arabes furent de grands militaires, des experts en commerce international, d'excellents agriculteurs et jardiniers. En outre, ils véhiculèrent vers l'Europe Occidentale chrétienne l'ensemble du savoir antique à travers les traductions arabes des écrits de l'Antiquité Hellénique.
Faire un inventairecomplet du lexiqued'originearabeserait une tâchedémentielle. C'estpourquoi un petitéchantillon du vocabulaire des toponymes, de l'agriculture et de la guerreestfourni en annexe à cetteexposition. Voicicependantquelquesexemples de vocabulairecourantespagnold'originearabe, en exposant en premier lieu la prononciation du mot original arabe, ensuite le motespagnolmoderne, puisfinalementl'équivalent en français.
kharshuf Alcachofa artichaud
Barqūq Albaricoque abricot
Ruz Arroz riz
Sukr Azúcar sucre
Kharrub Algarroba caroube
Zeytūna Aceituna olive
Laymūn Limón citron
De même, toujours dans le terrain de l'agriculture, nombre de mots d'instruments agricoles sont toujours en usage, notamment dans le domaine de l'irrigation. Si bien les agriculteurs arabes n'ont rien inventé, ils ont étendu le système d'irrigation par canalisations construit par les Romains. Ainsi, les 'sakkiyas' arabes sont devenues les 'acequias' espagnoles, et les 'nuriyas' sont nos actuelles 'norias'.
Au XVe siècle, arrivèrent en Espagne Chrétienne de nouvaux habitants de tradition nomade, apportant avec eux une langue et des coutumes totalement étrangères aux traditions péninsulaires. Voulant vivre à part et n'acceptant d'être assimilés ni à rien ni à personne, les problèmes commencèrent après un “état de grâce” qui dura 60 ans.
S'ensuivirent trois siècles de persécutions, doublées d'interdictions de plus en plus dures. Au XVIIe siècle, il leur fut imposé l'interdiction de parler le tsigane. Alors, les Gitans, ou Tsiganes espagnols, voulant ruser avec les Autorités de l'époque, persévérèrent dans la conservation de leurs signes d'identité. Entre autres, ils “déguisèrent” leur langue ancestrale en espagnol de la façon suivante:
Tout en conservant le lexique original, ilsdotèrentleurlangued'une base grammaticale et phonétiquepleinementespagnole, de tellefaçon que leurparler ancestral pouvaitêtreprispour un argot local, et non plus comme une languedistincte. Ilsvenaienttoutsimplement de créer le 'caló', ou variante espagnole du tsigane. C'est à ce momentqu'ungrand nombre de motstsiganespassèrent à l'espagnolavec une valeurargotique. Voyons les exemplessuivants:
Chalao fou
Jalar manger
Pinrel pied
Churumbel Enfant, fils/fille
Chorar voler
Menda moi
Camelar Aimer; séduire
Un phénomène unique au monde s'est produit au sein de la langue espagnole: la cohabitation de deux états diachroniques différents de la même langue. L'histoire, à un moment donné très cruelle, en a décidé ainsi.
3.1.- Contextepolitique. Au MoyenÂge, les Juifssontplutôt bien intégrés et bien acceptésdans la sociétéplurielleespagnole, se mélangeant à tous les estaments de la sociétémédiévale. Les problèmesd'antisémitismeétaientpratiquementinexistants. Mais à la fin du XIVesiècle, l'antisémitismeviolentsévissantdanstoutel'Europearrivadans la PéninsuleIbérique, donnantlieuaux terribles massacres de Séville en 1391. À partir de ce moment-là, plus rien en fut commeavant.
La situation des Juifsempirachaquefois un peu plus, et la conversionauChristianisme, forcéeoupas, negarantitnullement le Salutdans une Espagne sur le point de tomberpour plus de 300 ansdans les ténèbres de l'implacableInquisition. Le 30 mars 1492, les RoisCatholiquessignèrent à Grenadel'Editd'Expulsion des Juifsd'Espagne, mettantainsi un point final à 20 siècles de présencejuivedans les territoiresespagnols, Editqui fut tenupournul à partir de 1929, et ne fut dérogéofficiellementqu'en 1992, 500 ansaprèssapromulgation.
3.2.- Les JuifsSépharades et l'espagnol. Les Juifscastillansn'utilisaientl'hébreu que danscertainsofficesreligieux. Leurlanguecouranteétait le castillan, et une grande partie de la littératurereligieusesépharadeétaitrédigée en cettelangue. Lors de leurexpulsion, ils se disséminèrentpartoutdans le monde, spécialement en Europe du nord, en Italie, dans les Balkans, dansl'EmpireOttoman et en Afrique du Nord.
Ces communautésjuives, arrachéesd'unpaysqu'ilsont continué à appelercommeleur “mère”, emportèrentaveceux la languequ'ilsparlaient: l'espagnolmédiéval. Encoreaujourd'hui, ilscontinuent de parlerl'espagnol de l'époque des RoisCatholiques, avecquelquesmodificationsortographiques et lexicales, donttémoignent des motspris des langues de leursnouveauxpaysd'accueil. Cependant, la base lexicalecorrespond à l'espagnolancien. En voiciquelquesexemples:
Iyico Hijito Petit enfant
Kesho Queso fromage
Meoyo Meollo; cerebro cerveau
Mosafir Viajero voyageur