Pr Yves Sarfati Centre Hospitalier de Versailles Paris, 16 décembre 2005

1. Cognition sociale et schizophrénie Pr Yves Sarfati Centre Hospitalier de Versailles Paris, 16 décembre 2005

2. C- Vous avez toujours des voix ? P- Voix du ciel, paradisiaques, voix du ciel : on s’occupe de moi. Jésus Christ en personne. C- Et qu’est qu’elles vous disent ? P- Elles me disent qu’elles sont versaillaises. La secte, elle est fondée à Versailles ; ça pue sur Versailles ; ça fume. Une sauce béchamel qui se tient. C- C'est-à-dire ? P- Je ne sais pas ! Ne m’emmerdez pas ! Je ne sais pas quel est le but ! Ca fume. Je pollue. C- Si je vous comprends bien, vous vous sentez toujours persécutée ? P- Mais non ! Il ne faut pas dire ça Monsieur le Docteur ! Il ne faut pas déformer mes paroles et mes propos ! Elles me disent des phrases qui me mettent à plat. Au ras des pâquerettes. Alors je rampe. Vous voyez ? Je surnage. C- C’est pas pareil surnager et ramper ! Vous avez des difficultés à assumer votre journée ? P- Oui. Alors elles me coupent l’herbe sous le pied. J’aime regarder les toitures. C- … P- Eh bien, quand je me poste sur mon lit, une voix vient m’emmerder. Le charabia commence jusqu’au sommeil.

3. Cognition & schizophrénie : Quatre logiques de recherche • Modèle génétique • les marqueurs de vulnérabilité à la maladie • Modèle probabiliste • les facteurs prédictifs du développement d’un trouble schizophrénique  • Modèle médical • les tests spécifiques de schizophrénie • Modèle psychopathologique • les anomalies pathogéniques : la cognition sociale

4. 1. Les marqueurs de vulnérabilité à la maladie Prédisposition innée à développer la maladie

5. Conditions à remplir par un marqueurde vulnérabilité à la schizophrénie • Spécificité • Héritabilité • Stabilité • Reproductibilité

6. Marqueurs de vulnérabilité à la schizophrénie • Neuropsychologie cognitive • Continuous Performance Test (CPT) • Digit Span Task • Span Of Apprehension test (SOA) • Backward Masking • Wisconsin Card Sorting Test (WCST) • Trail Making Test • Neurophysiologie cognitive • Réaction électrodermale (SCOR) • Potentiels évoqués • Mouvements occulaires SPEM Antisaccades

9. 2. Les facteurs prédictifs du développement d’un trouble schizophrénique • Recherches en population à haut risque • Recherches en population générale

10. Recherches en population à haut risque • Swedish High-Risk Study • Jerusalem Infant Development Study • Isreali Kibbutz-Town High-Risk Study • New-York Infant Study • New-York High Risk Project • Copenhagen High Risk Project.

11. Recherches en population à haut-risque : exemple du New-York High Risk Project • 8 items du Continuous Performance Test • 5 items du Attention Span Task • 2 items (forward et backward) du Digit-Span, extrait du Wechsler Intelligence Test for Children.

12. Recherches en population à haut-risque : exemple du New-York High Risk Project • Déficit attentionnel chez les enfants futurs schizophrènes MAIS • Déficit également prédictif d’un « trouble du spectre de la schizophrénie » • Déficit également prédictif d’un déficit social • Quelle en est la véritable valeur prédictive ?

13. Déficits neuro-comportementaux de l’enfance comme facteurs prédictifs du développement d’une future schizophrénie mesurés dans un groupe de 79 enfants issus de parent(s) schizophrène(s)

14. Recherche en population générale : exemple de la cohorte d’appelés israéliens INSTRUMENT CLINIQUE • Social functionning subscale BATTERIE « COGNITIVE » • le test Otis-R(evised), inspiré du test Alpha Instruction des armées américaines (test verbal)  • le test des Similarities-R(evised), inspiré du sous-test du même nom de la Wechsler Adult Intelligence scale (test verbal) • la Raven’s Progressive Matrice Revised (RPM-R) de Lezak (test non verbal) • le test Arithmetic-R(evised), inspiré du sous-test du même nom de la Wechsler Adult Intelligence scale (test non verbal)

15. Recherches en population générale • Un QI pré-morbide plus bas est régulièrement retrouvé chez les enfants futurs schizophrènes, et ce dès 3 ans MAIS • Un QI bas pris isolément n’est ni spécifique, ni sensible • Les germains des patients présentent un profil comparable jusqu’à l’apparition des symptômes

16. 3. Les anomalies cognitives spécifiques de schizophrénie Les méta-analyses

17. Fonctions cognitives, tests les explorant, et tailles d’effet d corrigés (corrected size effects) pour les patients schizophrènes, versus groupes contrôles normaux et psychiatriques (1) CVLT : California Verbal Learning Test / RAVLT : Rey Auditory Verbal Learning Test / LNNB : Luria-Nebraska Neuropsychological Battery / WMS-(R) : Wechsler Memory Test-(Revised) / RMT : Recognition Memory Test

18. Fonctions cognitives, tests les explorant, et tailles d’effet d corrigés (corrected size effects) pour les patients schizophrènes, versus groupes contrôles normaux et psychiatriques (2) ROCFT : Rey-Osterrieh Complex Figure Test / WAIS-(R) : Wechsler Adult Intelligence Scale –(Revised) / NART : National Adult Readind Test / WCST : Wisconsin Card Sorting Test / HCT : Halstead Category Test

19. Résultats des méta-analyses • le déficit existe quel que soit le test considéré, avec un % de patients en dessous de la médiane allant de 61 à 78% • à l’inverse, un nombre substantiel de patients schizophrènes présente un tableau neuropsychologique normal • aucun test pris isolément ne discrimine complètement la distribution des sujets normaux et des sujets schizophrènes

20. Frith (1999) «Le succès de cette entreprise dépendra de notre capacité à développer des modèles plus spécifiques de ces fonctions [cognitives]. Ce qui doit, par conséquent, conduire au développement de nouvelles procédures expérimentales. Les tests standards d’activités frontales actuellement utilisés par les neuropsychologues sont trop grossiers et sous-spécifiques en terme des processus cognitifs qu’ils impliquent. (…) Notre capacité à comprendre les signes et symptômes de la schizophrénie en passe par la conduite d’études d’un haut niveau de précision [des processus cognitifs].»

21. Les normes communicationnelles « On reconnaît un comportement comme communicatif parce que le locuteur s ’efforce de respecter certaines normes. Nos échanges verbaux sont, dans une certaine mesure au moins, des efforts de coopération ; et chaque participant reconnaît en eux, dans une certaine mesure au moins, un but…ou du moins une direction mutuellement acceptée. » Grice, 1975

22. Attribuer des intentions Théorie de l ’esprit (Premack et Woodruff) « Aptitude à prédire ou à expliquer le comportement de nos semblables en leur attribuant des croyances, des souhaits ou des intentions, c’est-à-dire en concevant qu ’ils aient des états mentaux différents des nôtres. » J. Nadel, Vocabulaire des Sciences Cognitives, 1997

24. Tâche évaluant l’attribution d’intentions à autrui Cartons « histoire » Cartons « réponses »

25. Lien cognitivo-clinique * Sarfati et al., Psychological Medicine 1999 Sarfati et al., Cognitive Neuropsychiatry 1997

26. Bandes dessinées :« logique avec personnages » Cartons « histoire » Cartons « réponse »

27. Lien cognitivo-clinique Sarfati et al., Psychological Medicine 1999 Sarfati et al., Cognitive Neuropsychiatry 1997

28. Soustraction en PET-scan Brunet et coll., 2002

29. Neuro-psychologie cognitive Cliniciens, y compris cognitivo- comportementalistes Niveau Clinique Langage, mémoire, attention, etc… Tests cognitifs Niveau Cognitif Traitement de l ’information Anatomo-pathologie Neurosciences Niveau Biologique Cerveau

30. Les troubles de la communication C - c ’est votre première hospitalisation, alors ? P - Oui, c ’est la première. Vous ressemblez à mon petit frère. C - … P - Vous n ’êtes pas mon petit frère ? C - Ah non, non P - Non ? C - Non, non P - Vous n ’êtes pas mon petit frère ? C - Ah non, non P - Non ? Le petit Albert C - Vous avez un petit frère, alors. P - Eh ben, c ’est mon frère aîné C - Ah. P - Oui. C - Mm, Mm P - Mon frère aîné C - Vous le voyez souvent votre frère aîné ? Musiol, Trognon, 2000

31. Neuro-psychologie cognitive Niveau Clinique Communication Niveau Cognitif Intégration du contexte sémantique Niveau Biologique Cerveau

32. Traiter le contexte sémantique SELLE PAILLE CHEVAL ECURIE COURSE MANEGE CRINIERE JUMENT JOCKEY

33. Traiter le contexte sémantique PAL………………….

34. sucre Il boit son café avec du lait et un……. N 400 Niveau Cognitif Intégration du contexte sémantique 400ms Il boit son café avec du lait et un……. chien N 400

35. Traitement du contexte & Potentiels évoqués cognitifs Effet N400 Phrase contexte… Mot lié Phrase contexte… Mot non lié X 100

36. Préciser les mécanismes d’action Niveau Clinique Niveau Cognitif Niveau Cérébral

37. Schizophrènes t12 mois t0 Témoins Modalités évolutives des anomalies de la N400 sous AP

38. Variation de la N400 en fonction des signes cliniques Schizophrènes avec SCD < 5 Schizophrènes avec SCD > 5 (Kostova et coll., Clinical Neurophysiology, 2003)

40. Frith C.D (1992). The Cognitive Neuropsychology of Schizophrenia. Traduction française : B. Pachoud, C. Bourdet (1996). Neuropsychologie cognitive de la schizophrénie. Paris: Presses Universitaires de France. Georgieff N., Dalery J., Marie-Cardine M. (1997). Approches cognitive et neuro-psychologique de la schizophrenie. In Les Schizophrénies. Aspects actuels. J.-C. Scotto & T. Bougerol (Ed.) Paris : Flammarion. Hardy-Baylé M.C., Sarfati Y., Passerieux C. (2003). The cognitive basis of disorganization symptomatology in schizophrenia and its clinical correlates : Toward a pathogenetic approach to disorganization Schizophrenia Bulletin, 23 (3), 459-471 Hardy-Baylé M.C. (2003) Jusqu’où la psychiatrie peut-elle soigner ? Odile Jacob Sarfati Y., Passerieux C. (2000) Une approche cognitive de la désorganisation schizophrénique : Vers une échelle pathogénique de la désorganisation. In Eléments de Psychopathologie Cognitive. M. Musiol & A. Trognon, Editeurs. Paris : Armand Colin. Trognon A., Musiol M (1996). L'accomplissement interactionnel du trouble schizophrénique. In I. Joseph, J. Proust (Eds), La Folie dans la place - Pathologies de l'Interaction. Paris: Edition de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales.