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Aspects sociologiques du tabagisme René PATESSON Professeur à l’ULB Directeur du Centre de Psychosociologie de l’Opinion Tél: + 32 475 80 39 56 Courriel : rpatess@ulb.ac.be Rapport disponible sur : http://www.ulb.ac.be/soco/creatic. CPSO - Centre de Psychosociologie de l’Opinion.
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Aspects sociologiques du tabagisme René PATESSON Professeur à l’ULB Directeur du Centre de Psychosociologie de l’Opinion Tél: + 32 475 80 39 56 Courriel : rpatess@ulb.ac.be Rapport disponible sur : http://www.ulb.ac.be/soco/creatic CPSO - Centre de Psychosociologie de l’Opinion
Aspects sociologiques • Partie 1 • Aspects sociologiques du tabagisme examinés au travers d’enquêtes • Partie 2 • Examen de quelques processus psychosociaux mis en jeu dans le tabagisme
Aspects sociologiques du tabagisme : domaines, utilité des enquêtes • Champs couverts • Différences comportements, attitudes selon des groupes sociaux (niveau descriptif) • Âge • Sexe • Groupes de vie • Styles de vie • Niveau socio-économique • Niveau socio-démographique (zone d’habitat,…) • …. • Utilité • Bilan, état des lieux • Compréhension de phénomènes et interprétation des différences observées entre groupes menant à des actions éventuelles ciblées sur chacun d’eux • Faut-il agir sur les jeunes, à partir de quel âge ? • Les femmes enceintes sont-elles un groupe qui demande des actions ciblées,… ? • Mesure d’évolutions du tabagisme dans des groupes déterminés • Évaluation et validation de mesures adoptées, de politiques menées (d’interdiction, de prévention,…) • Explicatif : explication des mécanismes du tabagisme par des concepts, processus, théories sociales ou psychosociales (ce dont se servent aussi les cigarettiers pour engendrer, favoriser ou entretenir le tabagisme).
Aspects sociologiques du tabagisme : méthodes des enquêtes • Méthode principale : enquêtes, le plus souvent quantitatives mais aussi qualitatives • Principe : Interview d’un échantillon « représentatif » dans une population cible • Produit des chiffres, des statistiques (nombreuses, parfois rébarbatives, pas toujours faciles à interpréter et / ou à comparer) • Moyen principal : enquêtes par questionnaires • Principaux types et limites • Face-à-face • moyens mobilisés importants, coût élevé, bonne fiabilité par échantillonnage représentatif, possibilité d’observation du contexte • Téléphonique • moyens mobilisés moins importants, coût moyen, fiabilité moyenne - pas possibilité de s’assurer par observation du contexte de la validité des réponses, détenteurs répertoriés de téléphones (GSM !) • Auto-administré • enquêtes le plus souvent collectives dans des écoles, institutions, entreprises, …. Moyens mobilisés peu importants, fiabilité moyenne à faible (effets collectifs), problèmes de représentativité (ex : non scolarisés, absents, sans emploi, non socialisés (prisons, …) • Problème : comparabilité des résultats d’études différentes (pays, moments, …) compte tenu de la diversité des techniques utilisées • Ex : normalisation type OMS mais discutables (auto-administré avec ou sans présence d’un enquêteur).
Aspects sociologiques du tabagisme : enquêtes - sources • Enquête santé • Nationales (Belgique <Enquête santé>, France <Baromètre santé>, Canada et d’autres…) • Périodiques pour cerner les évolutions : Belgique tous les 4 ans, méthode : questionnaire auto-administré envoyé à domicile mais enquêteur en cas de besoin ou délai à répondre. • Investigue problèmes de santé (plaintes somatiques et psychosomatiques, comportements, moyens, consommation de substances licites (tabac, alcool) et illicites, styles de vie, critères socio-démographiques socio-économiques,…) • Sont un outil nécessaire pour guider les politiques de santé publique • Autres enquêtes • OMS (supra nationales) • Autres secteurs publics • Milieux médicaux • Scientifiques (recherche spécifique) • Privées (industrie du tabac) • …. • Problèmes : • Comparabilité • Fiabilité des résultats • Corrélations mais aussi difficultés d’aborder des relations tentantes de cause à effet (sondage photographique vs cohorte) : ex. relation avec le stress, détente,… ETUDE TPRF les fumeurs sont significativement + stressés que les non-fumeurs.
Aspects sociologiques du tabagisme • Examen de différences selon divers critères principalement • Variables indépendantes • Âge, en particulier chez les jeunes • Sexe • Niveau socio-économique (ressources disponibles) • Niveau socio-culturel (éducation, formation, information, …) • Antécédents de santé • Structure familiale et comportements familiaux • … • Variables dépendantes • Prévalence • Consommation, quantité, modes de consommation, … • Evolution de la consommation • Opinions • Attitudes • …
Examens d’aspects sociologiques à partir de résultats d’enquêtes sur le tabagisme • Diversité - voire disparité - des résultats • Problèmes d’interprétation • Comparabilité
Résultats : prévalence dans la population générale • En 2000 (Baromètre santé), en France un tiers des individus de 12 à 75 ans déclarent fumer. • 36,7 % pour les jeunes de 12 à 25 ans • 32,2 % chez les 26-75 ans • Enquête Drogue 2000 (ULB), en Belgique : 39,3% de fumeurs entre 15 et 55 ans. • En 2004 (Enquête santé), en Belgique on compte 27,6 % de fumeurs chez les plus de 15 ans (dont 24 % de fumeurs quotidiens et 4% de fumeurs occasionnels).
Résultats : évolution de la prévalence dans la population générale par les indicateurs des enquêtes • Enseignement des enquêtes : on y chercherait les effets des mesures « sanitaires » adoptées : vente aux jeunes, interdictions de fumer, etc. • Constat : • Malgré un ensemble de mesures prises pour lutter contre le tabagisme, il ne diminuerait pas significativement (entre 1997 et 2004). • Le tabagisme resterait-il donc problématique ? • « Enquête santé » : On commence à fumer en moyenne à partir de 17 ans, les garçons fument plus tôt (vers 16 ans) que les filles (vers 18 ans). • Sociologiquement rassurant mais … semble néanmoins en contradiction avec certaines observations quotidiennes
Le tabagisme chez les jeunes • Questions auxquelles on cherche généralement à répondre • Plus ou moins de jeunes fument-ils que précédemment ? • A quel âge commence-t-on à fumer (en sachant que les risques sont d’autant plus importants que l’on commence plus tôt). • Réponses à partir des données des enquêtes
À quel âge commence-t-on à fumer ? • Réponses : problèmes d’interprétation lié aux caractéristiques de l’échantillon • Enquête Santé 2004 : partie tabagisme • Population + de 15 ans • N = 9105 • Fumeurs : 27,6% dont femmes 23,0% / hommes 32,5% • Âge du début du tabagisme 17,7 ans en 2001 à 17,3 ans en 2004 • Conclusion : la moyenne d’âge au début du tabagisme a quelque peu diminué depuis la dernière enquête (effet significatif). Par ailleurs les hommes commencent à fumer à un âge plus jeune que les femmes (16 ans et 18 ans respectivement). • Laisse entendre que l’âge moyen du début du tabagisme serait donc de 17,3 ans ce qui serait apparemment rassurant, même si on fume plus jeune, et à partir de ces chiffres il semblerait que ce ne seraient pas les tout jeunes qui seraient particulièrement concernés. • Question : quel usage de ces résultats : • Connaître l’âge moyen du début du tabagisme dans une population donnée pour prendre des mesures appropriées au groupe cible (les jeunes qui commencent) et appropriées à un moment «t » dans le temps.
À quel âge commence-t-on à fumer ? • Enquête Bien-être 2003 • Population jeunes de 10 à 18 ans • Échantillonnage : 100 communes parmi 547 / 100.000 familles contactées / 2000 sélectionnées - enquêtes en face à face au domicile • N = 2009 jeunes • dont 48,5% garçons et 51,5% filles • 528 fumeurs soit une prévalence totale de 26,3% • Dont une prévalence de 26,4% garçons et 26,4% filles • Ouvre la voie à des hypothèses reliant le tabagisme à d’autres facteurs que ceux relevant de la différentiation sociologique fille/garçon • Âge moyen du début du tabagisme dans l’échantillon : • Question : à quel âge avez-vous commencé à fumer régulièrement ? • Filles : 13,5 ans • Garçons : 13,3 ans • Total : 13,4 ans ( >< Enquête Santé : 17,3 ans) • L’enquête Bien-être 2003 se trompe-t-elle? • Faire de la prévention ciblée sur un public de 13 ou 17 ans, ce n’est pas la même chose. • L’enquête Bien-être montre-t-elle que le problème est plus critique que le laisse supposer l’enquête Santé. Et demanderait donc des mesures d’une autre nature que celles que l’on prendrait en considérant l’âge moyen de 17,3 ans. • Il est important de comprendre et d’expliquer l’origine de ces différences (biais ?), surtout dans une perspective d’homogénéisation des mesures et de comparabilité, notamment internationales.
À quel âge commence-t-on à fumer ? • Biais : • Enquête santé 2004 (et les autres) : on calcule des âges moyens de début du tabagisme sur l’ensemble d’une population dont on mélange les âges. • On pose la question de l’âge de début du tabagisme à des personnes âgées, qui ont commencé à fumer il y a longtemps - à des moments où l’âge moyen des débutants était lui-même plus élevé et dont certains ne fument plus actuellement. • Ce comportement « passé » et « dépassé » est amalgamé à l’évaluation de la situation actuelle. • La bonne question sociologique et opérationnelle en matière de santé à laquelle il faut répondre est : • À un moment « t » dans le temps y a t-il plus ou moins de jeunes qui commencent à fumer qu’au moment t-1 ? • Ce n’est donc pas l’âge moyen « HISTORIQUE » de début du tabagisme dans une population globale donnée qui donne la bonne réponse mais l’âge moyen de la proportion de jeunes qui ont commencé à un moment DÉTERMINÉ dans le temps (par exemple dans l’année) comparativement à la moyenne de ceux qui ont commencé dans la période IMMÉDIATEMENT précède. • Réexaminons les résultats des deux enquêtes selon cette perspective.
À quel âge commence-t-on à fumer ? …..et pourtant il y a des indices • Prévalence actuelle par groupe d’âge et âge moyen du début du tabagisme (Enquête Santé 2004) • Résultat : la prévalence est moins élevée chez les jeunes (15-24 ans), l’âge moyen de début du tabagisme DIMINUE fortement depuis 1948, également, ce qui pourrait laisser entendre un accroissement potentiel des risques au cours des années. Cela semble rejoindre les intuitions / observations médicales
À quel âge commence-t-on à fumer ? Indices inquiétants • Prévalence actuelle par âge et âge moyen du début du tabagisme (Enquête Bien-être jeunes 2003) • En 2003, chez les jeunes de 18 ans, la prévalence était de 35% avec un âge moyen de début du tabagisme régulier (chez ces fumeurs) à 13,7 ans (// >< 17,3 ans de l’Enquête Santé 2004)
À quel âge commence-t-on à fumer ? Autres indicateurs significatifs • Âge de la première cigarette (chez les fumeurs réguliers)
À quel âge commence-t-on à fumer ? Première cigarette • Fréquences cumulées • 1/3 des jeunes fumeurs ont fumé leur première cigarette à 12 ans (et avant), plus de la moitié à 13 ans, les 3/4 à 14 ans. • La période 12-14 ans semble dont être critique pour le début du tabagisme chez les jeunes. • Il n’y a pas de différences entre garçons et filles.
Question en forme de conclusion : combien de jeunes se sont-ils mis à fumer en 2003 ? • Résultat enquête Bien-être chez les jeunes 2003. Analyse à un instant « t » • 6,9% des jeunes de 10 à 18 ans se sont mis à fumer régulièrement en 2003 à un âge moyen de 14,8 ans (n=138) (en plus de ceux qui fumaient déjà depuis un certain temps) • Dont 7,1% des garçons de 10 à 18 ans à un âge moyen de 15,1 ans (n=70) • Et 6,6% des filles de 10 à 18 ans à un âge moyen de 14,6 ans (N=68) • (différence des moyennes : t sign. =.05) • Donc si on veut connaître l’état du tabagisme des jeunes et prendre des mesures adaptées à la situation actuelle chez les jeunes il ne faut pas considérer, mêler ou se baser sur les pratiques antérieures des personnes adultes ou âgées - par exemple qui ont commencé à 20 ans il y a 40 ans - mais bien sur ce qui se passe aujourd’hui chez les jeunes. • On a également répondu par là à l’autre question sociologique : les filles fument plus tôt que les garçons en 2003 ( à mettre en correspondance avec les valeurs de l’enquête Santé 2004 : 16 ans chez les garçons, 18 ans chez les filles - chiffres entachés par une prévalence moindre chez les femmes avant 1970 et ayant aussi répondu à la question)
Aspects sociologiques • Partie 1 • Aspects sociologiques du tabagisme examinés au travers d’enquêtes • Partie 2 • Examen de quelques processus psychosociaux mis en jeu dans les débuts du tabagisme
Approche sociologique : les débuts du tabagisme • Constats : • L’initiation au tabagisme et la consommation régulière s’installent au cours de l’adolescence, entre 11 et 17 ans. • La plupart des campagnes de prévention s’adressent aux jeunes. • les efforts publicitaires et marketing des cigarettiers portent aussi sur les jeunes. • Il importe de comprendre et d’étudier particulièrement les facteurs psychosociaux en jeu dans cette phase d’initiation et d’installation de la dépendance puisque beaucoup semble se jouer dans cette période de la vie. • Caractère systémique du démarrage du tabagisme (ne dépend pas d’un facteur unique et simple - mais prend place dans une dynamique psychosociale « complexe » vécue par l’adolescent)
Approche sociologique : les débuts du tabagisme • On distingue trois phases chez le jeune fumeur se situant dans une dynamique psycho-sociale : • 1. Initiation et expérimentation : phase critique / basculement • 2. Acquisition de l’habitude : phase d’installation • 3. Conservation de l’habitude : phase de dépendance
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • Les principaux facteurs psychosociaux qui favorisent l’initiation et l’expérimentation tabagique : • 1a. La curiosité de l’adolescent • 1b. L’influence du groupe • 1c. La pression sociale • La publicité • L’identification aux autres, les vedettes • La famille • L’école • 1d. Les rites initiatiques • 1e. Opposition au monde adulte
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • 1a : la curiosité - examen des résultats de l’enquête Bien-être 2003. Dominé par curiosité et découverte. Pas de différences filles/garçon
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • 1a. La curiosité de l’adolescent • Besoin de découverte : trait caractéristique et souhaitable dans la construction de l’identité • Le savoir des adultes n’est pas suffisant, parfois ou de + en + souvent mis en question • L’adolescent a besoin de résoudre par lui-même les défis de son environnement • La curiosité est indissociable de la notion de risque et l’adolescent le sait • Découvrir, c’est prendre des risques qu’on ne maîtrise pas complètement (vs satisfaction de la découverte) (comme conduire, alcool, sexualité à risque, sports dangereux, …)
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation Prise de risque : ENQUÊTE BIEN-ÊTRE Adolescence marquée par « prise de risques » (93,4%) Plus de jeunes fumeurs déclarent prendre des risques même aux conséquences néfastes
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • 1b . L’influence du groupe • Etude de Killen & al. (1997) : 2 cohortes d’adolescents (m=15 ans) suivis pendant 3 et 4 ans. • Facteurs étudiés : influence de l’environnement social, alcool, caractère (personnalité), symptomatologie de la dépression, désordres alimentaires, poids et taille. • Facteur principal environnement social : les pairs qui fument constituent le facteur primordial déclenchant la première cigarette tant chez les garçons que chez les filles. Les filles : un peu plus sensibles au facteur social Les garçons : un peu plus sensibles aux symptômes de la dépression. • Enquête Bien-être 2003 : si tu as déjà fumé (ou complètement une cigarette), qui te l’a proposée la première fois • Dans 2/3 des cas, le jeune est entraîné par un ami. • Mais dans plus d’1/5 des cas il agirait d’initiative • Pas de différences significatives entre garçons et filles
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • 1b. L’influence du groupe • Le point de vue des amis influence le comportement des jeunes : • DIRE OUI OU NON - dire »oui » pour se sentir mieux et affirmer son appartenance au groupe en acceptant ses conditions (on me propose une cigarette, je dis « oui ») • Processus soumis à des principes psychosociologiques complexes et en interaction dans une phase d’incertitude et de remise en question de l’adolescent : • Identité et reconnaissance de l’individu dans le grouoe • Conformité = processus d’adaptation par lequel les individus modifient leurs opinions croyance et comportements - en s’adaptant ils s’intègrent (assimilation d’une caractéristique du groupe / accomodation : sa propre transformation pour s’intégrer - expériences de Asch ) = adaptation des jugements (dont sur la cigarette, …) • Besoin d’étalage des signes d’appartenance et/ou de différentiation • Crainte de sentir exclu - et donc obéissance au groupe et à ses normes c’est-à-dire commettre des actes qu’il ne ferait pas en dehors du groupe • Pression collective : norme collective • Facilitation sociale : performance - on se met à fumer plus et plus vite - améliorée par la présence d’autrui (Triplett, 1897) • Locus of control : externalité et internalité
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • 1c. Contrôle social, pression sociale : les comportements individuels sont dépendants de la pression de ceux des autres • Rôle de la publicité dans la pression sociale = réponse aux incertitudes de l’adolescent • Contribue à créer un climat de normalité « sociale » autour du tabagisme (exemple de contre publicité contre le tabagisme) • Associe cigarette à des images séduisantes (masculinité, féminité, …)entraînant le désir d’un objet magique qui résoudra les problèmes que se pose l’adolescent. • Attitude sceptique vs messages préventifs - atmosphère mettant le jeune en contradiction avec effets réels du tabac tels qu’on les lui décrit • Tabac =multinationales : informations disponibles dans pays différents, maîtrise des effets de stratégies différentes - tandis que lutte contre la tabagisme est nationale • Arguments marketing : partage de marché > faux augmenter le marché, par exemple • Norvège diminution après interdiction publicité réduction très significative tabagisme adolescent • Autre pays tolérant pour la publicité, effet non seulement sur part de marché mais surtout sur prévalence • Fausse vérités évidentes ou recours au bon sens non vérifiable : • « L’industrie du tabac exagère constamment le nombre des personnes travaillant dans la culture et la fabrication du tabac, ainsi que l’éventuel impact d’une baisse de la consommation sur l’emploi. L’industrie du tabac prétend employer 33 millions de personnes, mais ce chiffre comprend les agriculteurs qui ne cultivent pas exclusivement du tabac, la main-d’œuvre saisonnière, les membres de la famille et d’autres travailleurs à temps partiel. La Banque mondiale suggère d’utiliser un outil de mesure plus efficace, à savoir l’Equivalent temps plein (ETP), qui aboutirait à un chiffre beaucoup moins important que celui qui est avancé par l’industrie du tabac » • « Des estimations montrent également que le nombre des suppressions d’emploi dues aux changements technologiques opérés dans l’industrie du tabac dépasse largement le nombre de suppressions que les politiques de lutte antitabac pourraient engendrer »
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • L’identification aux autres, les vedettes • Modèles, prestige, musique, cinéma, sport,…(internationalisation des médias) • Contrats mirobolants avec cigarettiers • Le contrôle social, la dépendance au groupe et la perte partielle du libre-arbitre • le sujet ne sent ne plus vraiment maître de lui même qu’en présence des autres. Il met en balance ses motivations et ses envies avec les comportements qu’il perçoit autour de lui et la balance penche dans un sens. • ses comportements sont de plus en plus déterminés par les comportements des autres qu’il observe autour de lui. • Ce contrôle social agirait pour d’autres formes d’addictions (hypothèse de Birch). • Dans une étude récente sur l’addiction alimentaire (et l’obésité) nous avons montré que les plus de personnes en surpoids et obèses étaient dépendantes du contrôle social. Les personnes en surpoids et obèses contrôleraient moins bien leurs prises alimentaires lorsqu’elles sont en compagnie : au restaurant, lors de fêtes et réunions de famille, … . • Contrôle social et tabagisme féminin : égalité des chances, liberté de choisir, liberté sexuelle • Le tabagisme est associé (par la publicité) à des modèles de réussite sociale. • Passe le plus souvent par des modèles masculin > d’où absence de modèle féminin forts de réussite sociale féminine • Appropriation par les femmes des modèles masculins et de leurs attributs dont la cigarette • Contrôle social et norme d’apparence physique (maigreur) : tabac à un effet sur la prise de poids > s’oppose à la motivation à l’arrêt, cause de récidive
Aspects sociologiques : attitudes des parents (fumeurs) • Le contrôle social : rôle de la famille • Éducation à la vie quotidienne > familles qui fument > influencent perception du tabac et du tabagisme • Cellule de base du développement social qui contribue à normaliser ou non le tabagisme • Résultat : enquête « Bien-être » • La tendance majoritaire des parents est d’interdire à leurs enfants de fumer (attitude majoritaire des parents : 55,5% - parents des jeunes fumeurs ou non). • Lorsque les parents fument, et notamment les deux, ils sont moins stricts (44,8%). • Les parents dont les jeunes fument, seraient beaucoup moins stricts (22,1% vs 59,4 lorsque le jeune ne fume pas). • Certaines familles adoptent une politique du fait accompli. • Près de 3/10 laissent le choix à leur enfant. Plus de parents qui fument laissent le choix à leur enfant. Lorsqu’ils laissent le choix, plus de jeunes fumeraient. • Le laxisme, le libre choix (avec responsabilisation de l’enfant), la permissivité auraient des effets défavorables (46,6% de jeunes fumeurs ont des parents permissifs vs 26,7% ayant des parents non permissifs). Le tabagisme chez le jeune (dans notre société) ne serait donc pas (ou plus) une réaction comportementale d’opposition à des parents autoritaires.
Aspects sociologiques : effets des parents fumeurs • Analyse selon tabagisme familial : • On observe un effet parent »fumeur » sur la prévalence chez le jeune : • En général : plus de jeunes fumeurs ont des parents (l’un ou l’autre ) fumeur (un des deux 11,4% vs 8,4%) • Si les deux parents fument, l’effet est encore plus important (doublement (8,4 % > 18,7%) • Résultat important : La mère, si elle fume, semble jouer un rôle plus important que le père (la prévalence double : 8,6% si la mère ne fume pas, 16,8% si la mère fume / 9,2% si le père ne fume pas, 13,3% si le père fume seul dans le ménage). • Rôle culturel et privilégié de la mère sur les soins et développement la santé de l’enfant. • Le fait que la mère fume modifierait la perception chez l’enfant des facteurs ayant un impact sur la santé (par imitation, par appropriation, …) • On constate également un effet significatif entre le niveau ou l’intensité du tabagisme du jeune (évalué sur la base du nombre de cigarettes fumées) et celui de ses parents, en particulier celui du père.
Aspects sociologiques : résultats - structure de la famille • Analyse selon caractéristiques de la famille : • Structure de la famille, effet du père et garde alternée • La prévalence est deux fois plus importante chez les jeunes de 10 à 18 ans (19,4% vs 8,6%) qui vivent en famille monoparentale que chez ceux qui vivent avec leurs deux parents. Lorsque le jeune vit chez son père (lui même seul), la prévalence est quatre fois plus importante (8,6% vs 36,0%). • Rôle protecteur ou préventeur du noyau familial complet ou de l’unité familiale (père + mère) • Importance d’action ciblées sur les jeunes en famille monoparentale surtout de type « paternelle » • La prévalence est également significativement plus importante chez les jeunes qui ne vivent pas dans une structure familiale unique et stable de type monoparentale / biparentale (garde alternée). • Problématique de la confrontation périodique à des systèmes éducatifs différents (même légèrement).
Aspects sociologiques : rôle de l’école • Le contrôle social : rôle de l’école • L’étude Bien-être montre que dans les écoles plus permissives le pourcentage de fumeurs est significativement plus important que dans les écoles qui se montrent plus strictes à cet égard. • L’école que tu fréquentes autorise-t-elle les élèves à fumer • L’étude montre la valeur d’exemple des professeurs (associé aussi au fait que l’école autorise ou non à fumer). Les professeurs fument-ils en présence des élèves (classe, cours de récréation)?
Approche sociologique - phase 1 : initiation et expérimentation • 1d. Rite initiatique (absence de …) • Culture occidentale : absence de rites organisés de transition entre l’enfance, l’adolescence et l’âge adulte favorise l’adoption d’actes rituels de substitution symbolisant introduction dans le monde adulte • Qui sont des défis symboliques d’abandon de l’enfance : la première cigarette devient un substitut des rites disparus, comme la première cuite, etc… . • 1d. Opposition au monde adulte • Conflit attirance / refus du monde adulte • Plaisir / émancipation refusée ou interdite par l’adulte
Approche sociologique - phase 2 : acquisition de l’habitude • 2a. Acquisition de l’habitude : rôle de la première bouffée • Premières cigarettes : maux de tête, vertige, toux, expérience désagréable - question pourquoi continuer une expérience désagréable ? • Tolérance aux effets désagréables (les autres l’ont fait, ont dépassé le stade ou ne manifestent pas les effets désagréables. Au contraire ils semblent manifester du plaisir . Donc il ne se passe par quelque chose de normal en moi - je dois donc continuer) Et au fur et à mesure l’expérience cesse d’être négative • Intérêt des additifs : essayer de limiter ces effets désagréables des premières bouffées (arômes agréables du tabac avant qu’elle ne soit allumée) • Toutes les qualités « positives » attribuées à la cigarette dans l’imaginaire poussent à aller + loin • 2b. Étape du renforcement du comportement (renforcement behavioriste) • Jeune fume+fréquemment et découvre progressivement l’impact agréable se déclinant en : • Un bien-être psychique de la de la nicotine sur le cerveau, • Un bien-être social qui en découle : se rapproche enfin des autres • Un bien-être psychologique : il a enfin dépassé les effets désagréables, il est devenu comme les autres et se met à maîtriser une habilité caractérisant son groupe. • Consommation de + en + régulière puis habituelle et associée à des situation de + en + différentes et distinctes (généralisation du conditionnement) • en marchant, avant examen, après amour, pendant une pause après un épisode stressant , pour faire passer le temps d’attente ,… • La cigarette devient progressivement un médiateur entre l’individu et la réalité (l’individu ne se sent + capable de rien sans ce instrument médiateur)
Approche sociologique - phase 2 : acquisition de l’habitude • 2c. La rationalisation de l’habitude ou l’attribution des qualités au tabac : l’exemple du paradoxe de la détente • Détente, bien-être, réduction du stress : Publicité mais aussi résultats d’enquêtes • Dans des études menées en France par Dautzenberg et all. (1997) sur 190.000 élèves de l’Académie de Paris où l’on observe de 21 à 26% de fumeurs selon les années. Le caractère « calmant » du tabac vient en première position des avantages favorables liés à sa consommation. • Etude Bien-être : On constate que parmi les 5 raisons et attraits pour fumer citées par plus de 50% des jeunes fumeurs, 3 raisons se rapportent directement à des sentiments d’effets directs sur l’état psychologique vécu par le sujet • Or ces effets peuvent directement ou indirectement être rapportés à des phénomènes de malaise reliés à un état de manque. « Je fume même si je suis détendu » montrerait que non seulement ce n’est pas pour se détendre que l’on fume mais c’est aussi pour éviter d’être tendu de ne pas fumer, donc pour maintenir l’état par lequel le manque ne se manifeste pas.. • Etude TPRF menée dans entreprises : les fumeurs sont aussi les plus stressés. • Quels sont facteurs psychosociologiques qui pilotent ces opinions et donc ces résultats.
Approche sociologique - phase 2 : acquisition de l’habitude • Fume t’on pour rechercher une détente ou pour éviter d’être tendu de ne pas fumer ? • Qui n’a pas vécu la situation d’être en compagnie d’un fumeur invétéré ne pouvant allumer une cigarette en raison d’interdictions locales. Progressivement sa tension monte, il se met à parler de plus en plus vite comme pour abréger la rencontre, s’empresse et s’agite, regarde sa montre, tâte ses cigarettes ou son briquet dans sa poche, examine périodiquement les alentours pour voir s’il n’y a pas une issue lui permettant de s’absenter un moment pour en griller une, puis s’il y parvient, revient « apaisé ». Donc c’est bien la preuve noir sur blanc que la cigarette apaise et détent. • Paradoxalement, ce rôle lénifiant de l’effet du tabac n’est cité que par les fumeurs, le plus souvent fortement dépendants.
Approche sociologique - phase 2 : acquisition de l’habitude • Locus of control : Expliquer aux autres qu’on fume parce qu’on est stressé à cause du manque de nicotine et donc de sa dépendance au tabac risque d’être réprouvé. Et surtout cela montrerait une carence de ses possibilités de contrôle interne – valorisée socialement aujourd’hui comme nous l’avons expliqué. • Dès lors les explications externes l’emportent, l’environnement nous agresse et nous stresse, les conditions de travail sont mauvaises, les autres ne nous comprennent pas, alors face à ces agressions externes, « une bonne petite cigarette » nous apporte un moment de répit et de détente dans ce monde brutal. • Dans l’étude Bien-être : question de l’internalité/externalité aux sujets interrogés • Voici 6 idées concernant la réussite dans la vie. Choisi les trois avec lesquelles tu es le plus d’accord
Approche sociologique - phase 2 : acquisition de l’habitude • Parmi les sujets qui attribuent à la cigarette un effet sur leur stress et donc une détente, on trouve significativement plus de personnalités externalistes qu’internalistes. • On constate (parmi les comportements associés au tabagisme) qu’un certain nombre de facteurs externes conditionnant l’usage du tabac chez les jeunes sont significativement corrélés avec le locus of control externe. • Les externalistes sont donc plus souvent d’accord avec les items suivants qui renvoient à une cause externe de leur comportement tabagique. • Je fume pour en imposer aux autres • Je ne suis pas dans coup quand je ne fume pas • Je fume parce que tout le monde fume autour de moi • Fumer avec les autres, c’est convivial • Ce sont les autres qui me poussent à fumer
Phase 3 : dépendance du jeune • Découverte des effets négatifs et tentatives d’arrêter de fumer Dépendance et assuétudes • Environ 35% des jeunes fumeurs entre 12 et 18 ans montrent des signes explicites et sévères de dépendance (Fagerström > 5). • 2/3 des jeunes fumeurs de 18 ans et moins ont déjà voulu arrêter de fumer. • ce qui dénote une certaine prise de conscience mais renforce aussi le degré de dépendance certain. Les mêmes disent avoir échoué ce qui conforte l’idée que ce sous-groupe (2/3 des fumeurs) présente déjà des signes de dépendance notables. • Cette tendance à vouloir arrêter est directement liée à la durée du tabagisme. • Le pli du mécanisme « arrêt »/« redémarrage » semble néanmoins s’installer très tôt chez les jeunes fumeurs. • Les raisons qui feraient arrêter de fumer sont dans l’ordre : • o Le prix des cigarettes qui augmente (45,7%) • o La personne qu’on aime le demande (43,3%) • o La maladie ou le décès d’un proche (38,0%) • o Protéger sa santé (37,0%) • Ceux qui n’ont jamais essayé d’arrêter de fumer sont plus sensibles au prix des cigarettes et au décès d’un proche.
Phase 3 : dépendance du jeune • Suite et fin : aspects médicaux du tabagisme tels qu’ils sont abordés dans ce séminaire