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Economie des ressources épuisables. Sébastien Rouillon 2014 (Première version, 2008). 1. Formalisation générale. On étudie l’exploitation d’une ressource épuisable. On note : T : La durée d’exploitation (finie ou non) ; S 0 : Le stock initial ;
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Economie des ressources épuisables Sébastien Rouillon 2014 (Première version, 2008)
1. Formalisation générale On étudie l’exploitation d’une ressource épuisable. On note : • T : La durée d’exploitation (finie ou non) ; • S0 : Le stock initial ; • (q0, q1, …, qT) : Un plan d’extraction ; • W(q0, q1, …, qT) : une fonction d’objectif.
1. Formalisation générale Tout problème de res. épuisable implique de : Choisir un plan d’extraction Q = (q0, q1, …, qT) pour maximiser un objectif W(q0, q1, …, qT) sous une contrainte d’épuisement q0 + q1 + … + qT S0.
2. La fonction objectif La fonction W(Q) est appelée fonction objectif. Sa forme dépendra du type de problème que l’on veut traiter : • Equité intergénérationnelle ; • Exploitation commerciale.
2. La fonction objectif Dans tous les cas, la f° objectif : • définit un critère d’évaluation des plans Q d’extractions possibles ; • détermine les propriétés de la solution Q° du problème.
3. Equité intergénérationnelle Réfléchir à l’équité intergénérationnelle de la répartition de la ressource revient in fine à définir une fonction objectif W(Q). Voici des exemples exotiques possibles : ObjectifFonction objectif Egalité Indice de Gini Lissage Somme de carrés des écarts
3.1 Critères welfaristes Si la ressource n’est jamais stockée, la quantité qt, extraite à la période t, est consommée par la génération courante. Notons alors : • Ut(qt) : L’utilité tirée par la génération t de la quantité extraite qt. Elle sera supposée croissante et concave.
3.1 Critères Welfaristes Il paraît légitime, pour évaluer Q = (q0, q1, …, qT), de prendre en compte : • plutôt que les qt directement, • les utilités Ut(qt) qu’elles procurent. Alors, l’objectif peut s’écrire : W(U0(q0), U1(q1), …, UT(qT)) Quand la fonction objectif s’écrit de cette façon, elle est dite Welfariste.
3.1 Critères Welfaristes Voici deux ex. de telles fonctions : • Maximin : W = min {U0(q0), U1(q1), …, UT(qT)} • Additive actualisée (0 < < 1) : W = U0(q0) + U1(q1) + … + T UT(qT)
3.2 Fonction Maximin Rawls (1971) justifie son utilisation en affirmant qu’elle serait adoptée, si les générations décidaient la fonction W derrière un voile d’ignorance, les rendant incapables de savoir : • à quelle date elles vivront ; • quelle sera leur fonction d’utilité ; et si elles avaient une aversion infinie pour le risque.
3.2 Fonction Maximin Etudions le cas simple où : S0 = 1 et T = 1. On cherche q0 et q1 pour maximiser W = min {U0(q0), U1(q1)} telles que q0 + q1 1.
3.2 Fonction Maximin Théorème : La solution (q0°, q1°) vérifie les conditions : U0(q0°) = U1(q1°), q0° + q1° = 1.
3.2 Fonction Maximin Preuve : Soit (q0°, q1°) la solution. Comme l’utilité est croissante, si q0° + q1° < 1, on peut augmenter W = min {U1(q0°), U2(q1°)} . Donc : q0° + q1° = 1. Supposons que : (H1) U0(q0°) < U1(q1°). Alors : W = min {U0(q0°), U1(q1°)} = U0(q0°). En augmentant q0° (et en diminuant q1° d’autant), W augmente. (H1) est donc contradictoire. Idem avec : (H2) U0(q0°) > U1(q1°).
3.2 Fonction Maximin Preuve : Si les deux générations ont la même f° d’util., on aura de plus : q0° = q1° = 1/2 U0 U1 U0 U1 W q1 q0° q1° q0 1
3.2 Fonction Maximin Exercice 1 : Supposons que les deux générations aient pour fonctions d’utilité : U0(q0) = 5 (1 – q0/2) q0, U1(q1) = 8 (1 – q1/2) q1. Si S0 = 1, montrer que : (q0°, q1°) = (2/3, 1/3).
3.3 Fonction additive actualisée Barro (1974) justifie son utilisation en affirmant qu’elle serait adoptée par une dynastie parfaitement altruiste, où chaque génération traite sa descendance comme elle-même, notamment en actualisant de la même façon son utilité au cours de sa vie et celles de ses descendants.
3.3 Fonction additive actualisée Supposons encore que S0 = 1 et T = 1. On cherche q0 et q1 pour maximiser W = U0(q0) + U1(q1) et telle que q0 + q1 1.
3.3 Fonction additive actualisée On appelle utilité marginale de la génération t, la fonction Umt, associant à toute quantité qt, son gain d’utilité de t pour l’augmentation d’une unité (infiniment petite) de sa consommation de la ressource. Par définition de la dérivée : Umt = Ut’(qt)
3.3 Fonction additive actualisée Théorème : La solution (q0°, q1°) vérifie les conditions : Um0(q0°) = Um1(q1°), q0° + q1° = 1.
3.3 Fonction additive actualisée Preuve : Um0 Um1 Une unité en + à la gén° 1 augmente W de Um0. Une unité en + à la gén° 2 augmente W de Um1. W est max. quand Um0 = Um1. Um0 Um1 Um1 q1 q0° q1° q0 1
3.3 Fonction additive actualisée Exercice 2 : Supposons que les deux générations aient pour fonctions d’utilité : U0(q0) = 5 (1 – q0/2) q0, U1(q1) = 8 (1 – q1/2) q1. Si d = 1/2 et S0 = 1, montrer que : (q0°, q1°) = (5/9, 4/9).
3.3 Fonction additive actualisée Exercice 3 : Supposons que les deux générations ont la même fonction d’utilité : U0(-) = U1(-) = U(-) avec : U(q) = (1 – q/2)q, q étant la consommation de la ressource. Montrer que : (q0°, q1°) = (1/(1 + ), /(1 + ))
3.3 Fonction additive actualisée Exercice 3 : On a : Um0(q0) = 1 – q0 et Um1(q1) = 1 – q1. La solution du problème vérifie donc : (1) : 1 – q0 = (1 – q1) (2) : q0 + q1 = S0 = 1 En utilisant (2) : q1 = 1 – q0. En substituant dans (1) : 1 – q0 = q0 On trouve donc : q0° = 1/(1 + ). En substituant dans (2) : q1° = 1 - 1/(1 + ) = /(1 + ).
3.4 Exercices < Attention, casse-tête ! > Adapter l’exercice 3 dans le cas où on ne connaît pas le stock initial S0, mais on sait seulement qu’il est distribué uniformément sur [0, S].
4. Mathématiques des ressources épuisables Cette section présente les outils mathématiques, permettant de résoudre un problème de ressource non renouvelable. On distingue deux types de modèles : • Modèle en temps discret ; • Modèle en temps continu.
4.1 Temps discret On veut résoudre le problème suivant : Choisir un plan d’extraction (qt ; t = 0, 1, …, T) pour maximiser la fonction objectif W(Q) = ΣtT=0t Ut(qt) sous la contrainte d’épuisement ΣtT=0qt S0.
4.1 Temps discret On forme le lagrangien associé : L = ΣtT=0tUt(qt) – l (ΣtT=0qt– S0), où : l est un multiplicateur de Lagrange.
4.1 Temps discret La solution du problème vérifie : qt 0, L/qt 0 et qt (L/qt) = 0, t, l 0 et l (ΣtT=0qt– S0) = 0.
4.1 Temps discret Avec des fonctions d’utilité standards, la solution vérifiera : qt> 0, pour tout t, et l > 0. On la trouvera donc en résolvant le système : L/qt = tUt’(qt) – l = 0, pour tout t, ΣtT=0qt– S0 = 0.
4.2 Temps continu On veut résoudre le problème suivant : Choisir un plan d’extraction (q(t) ; t 0) pour maximiser la fonction objectif W(Q) = 0T e-rt Ut(q(t)) dt sous la contrainte d’épuisement 0T q(t) dt S0.
4.2 Temps continu On forme le lagrangien associé : L = 0T e-rt Ut(q(t)) dt – l (0T q(t) dt– S0), où : l est un multiplicateur de Lagrange.
4.2 Temps continu La solution du problème vérifie : q(t) 0, L/q(t) 0 et q(t) (L/q(t)) = 0, t, l 0 et l (0T q(t) dt– S0) = 0.
4.2 Temps continu Avec des fonctions d’utilité standards, la solution vérifiera : q(t)> 0, pour tout t, et l > 0. On la trouvera donc en résolvant le système : L/q(t) = e-rtUt’(q(t)) – l = 0, pour tout t, 0T q(t) dt– S0 = 0.
4.3 Exercices Exercice 4 : Supposons que les trois générations ont la même fonction d’utilité : U0(-) = U1(-) = U2(-) = U(-) avec : U(q) = (1 – q/2)q, q étant la consommation de la ressource. Ecrire le lagrangien associé à ce problème. Déterminer le système d’équations caractérisant sa solution.
5. Gestion privée d’une ressource épuisable On étudie ici la gestion d’une res. épuisable par des propriétaires privés. On note : • P(q) = la fonction de demande inverse • i = le taux d’intérêt Toutes ces données sont supposées constantes à travers le temps.
5.1. Valeur Actualisée Nette On appelle Valeur Actualisée Nette, associée à un flux de profits futurs (p0, …, pt, …), la somme d’argent, notée VAN, telle que tout acteur du marché financier serait indifférent entre : • d’une part, disposer immédiatement de la somme d’argent VAN ; • d’autre part, percevoir, dans le futur, la suite des flux de profits (p0, …, pt, …).
5.1. Valeur Actualisée Nette Supposons que le taux d’intérêt du marché financier soit de i = 50% par période. La VAN associée à un profit de 1 €, perçu aux périodes t = 0, 1, 10 ou 100, est donnée par le tableau (avec 1/(1 + i) = 2/3) : t 0 1 10 100 VAN 1 2/3 (2/3)10 (2/3)100
5.1. Valeur Actualisée Nette En toute généralité, la valeur actualisée nette d’un flux de profits (p0, …, pt, …), pour un taux d’intérêt i, s’écrit : VAN = p0 + p1 + … + tpt + … où : = 1/(1 + i) = le facteur d’actualisation, associé au taux d’intérêt i.
5.2. Monopole Supposons qu’il y a un propriétaire-exploitant unique, en position de monopole sur le marché de la ressource épuisable. On note : • S0 = son stock • (c0, …, ct, …) = ses coûts d’extraction unitaire
5.2. Monopole Le monopole cherche à : Choisir un plan d’extraction (q0, …, qt, …) pour maximiser son profit intertemporel VAN = Σtt (P(qt) – ct) qt sachant sa contrainte d’épuisement q0 + … + qt + … S0 On appelle équilibre du monopole la solution (q0*, …, qt*, …) de ce problème.
5.2. Monopole On appelle recette marginale du monopole, la fonction Rm, associant à toute quantité q, l’accroissement de sa recette totale pour l’augmentation d’une unité (infiniment petite) de son offre de la ressource. Par définition de la dérivée : Rm = (P(q) q)’ = P’(q) q + P(q)
5.2. Monopole En adaptant les résultats de la sect° 4, on déduit que : Théorème : L’équilibre du monopole (q0*, …, qt*, …) vérifie : (1) : Rm0 – c0 = … = t(Rmt – ct) = … (2) : q0* + … + qt* + … = S0
5.2. Monopole La condition (1) signifie que le monopole choisit un plan d’extraction tel que la dernière unité extraite rapporte autant, en valeur actuelle, à n’importe quelle date. Sinon, il aurait intérêt à réduire son offre à une date où la dernière unité extraite rapporte moins, en valeur actuelle, pour l’augmenter à une date où la dernière unité extraite rapporte plus, en valeur actuelle. La condition (2) signifie qu’il épuise son gisement, en un temps fini ou infini.
5.2. Monopole Ex. 5 : Déterminer l’équilibre du monopole dans le cas où : P(q) = 1/qe (0 < e < 1) et ct = 0, pour tout t. On a : RT = q1-e. D’où : Rm = (1 – e)/qe. L’équilibre du monopole vérifie : (1) : (1 – e)/q0e = … = t (1 – e)/qte = … (2) : q0 + … + qt + … = S0 En utilisant (1) : qt/q0 = dt, pour tout t, en notant d = 1/e. En substituant dans (2) : (2) : q0 (1 + d + … + dt + …) = q0/(1 - d) = S0 Donc, q0 = (1 - d) S0. Finalement, avec (1) : qt* = dt (1 - d) S0, pour tout t.
5.3. Concurrence parfaite Supposons qu’il y a J propriétaires-exploitants identiques. On note, pour chaque j : • s0 = son stock, avec Σj s0 = S0 • (c0, …, ct, …) = ses coûts d’extraction unitaires • (p0, …, pt, …) = son anticipation des prix futurs
5.3. Concurrence parfaite Tous les propriétaires cherchent à : Choisir un plan d’extraction (q0, …, qt, …) pour maximiser leur profit intertemporel VAN = Σtt (pt – ct) qt sachant leur contrainte d’épuisement q0 + … + qt + … s0 On appelle équilibre du propriétaire la solution (q0*, …, qt*, …) de ce problème.
5.3. Concurrence parfaite A quelques détails près (ici, s0 est quelconque et T peut être infini), ce problème est semblable à celui de la section 2.2. En effet, en posant : Ut(qt) = (pt – ct) qt, on peut le réécrire : Choisir (q0, …, qt, …), pour maximiser Σtt Ut(qt), sachant q0 + … + qt + … s0.
5.3. Concurrence parfaite En adaptant le théorème de la sect° 2.2, avec ici, Umt(qt) = pt – ct, on déduit : L’équilibre du propriétaire (q0*, …, qt*, …) vérifie : (1) : p0 – c0 = … = t (pt – ct) = …, (2) : q0* + … + qt* + … = s0.
5.3. Concurrence parfaite La condition (1) signifie que les propriétaires doivent anticiper que la dernière unité extraite rapporte autant, en valeur actuelle, à n’importe quelle date. Sinon, tous auraient intérêt à attendre la date où (ils anticipent que) la dernière unité extraite rapportera le plus, en valeur actuelle, pour extraire s0 en une fois. Mais alors, le prix à cette date s’effondrerait et leur anticipation serait contredite. La condition (2) signifie qu’il épuise son gisement, en un temps fini ou infini.
5.3. Concurrence parfaite Un équilibre du marché (symétrique et avec anticipation parfaite) se définit par : • Une anticipation de prix (p0*, …, pt*, …) • Un plan d’extraction (q0*, …, qt*, …) tels que : • L’anticipation (p0*, …, pt*, …) se réalise si tous les propriétaires appliquent le plan (q0*, …, qt*, …) • Le plan (q0*, …, qt*, …) est un équilibre des propriétaires s’ils anticipent (p0*, …, pt*, …)